Neutralité du service public et libre manifestation des convictions religieuses en cas de pratique sportive
Résumé
Depuis 2016, l’article 1er des statuts de la Fédération française de football (FFF) dispose que « sont interdits, à l’occasion de compétitions ou de manifestations organisées sur le territoire de la Fédération ou en lien avec celles-ci : […] tout port de signe ou tenue manifestant ostensiblement une appartenance politique, philosophique, religieuse ou syndicale » sous peine de poursuites disciplinaires et pénales. Par son arrêt du 29 juin 2023, Alliance citoyenne et autres (n° 458088), le Conseil d’État a conforté le refus de la FFF d’abroger ou de modifier cet article. Sa légalité fut admise, au prix d’une extension du régime de neutralité des exécutantes du service public (appliqué aux joueuses sélectionnées dans les équipes de France) et d’un contrôle de proportionnalité particulièrement mesuré (au détriment des autres licenciées, usagères du service public). La solution retenue n’est toutefois pas consensuelle au sein du Palais Royal. D’une part, les conclusions partiellement contraires du rapporteur public (publiées et accessibles ici) retenaient l’illégalité de l’obligation de neutralité religieuse pour les licenciées non sélectionnées dans les équipes de France. D’autre part, le responsable du centre de recherches et de diffusion juridiques du Conseil d’État confiait plusieurs réserves dans son commentaire de la décision (AJDA, 2023, n° 31, p. 1643). Face à une « restriction rédigée de manière aussi large […] au droit des usagers d’exprimer leurs convictions », il déplorait que le constat de légalité retenu par le Conseil d’État - « dans un cas où aucun risque tangible n’a été documenté par l’autorité organisant le service public » - constitue un « précédent dont on pourra tenter de se prévaloir dans d’autres services publics ».
Intersections – revue semestrielle Genre & Droit a souhaité en complément donner à voir un autre argumentaire dans cette affaire, celui de Maître Marion Ogier, avocate des demanderesses. Le mémoire récapitulatif ici reproduit, avec l’accord de son autrice, détaille les moyens invoqués devant le Conseil d’État en soutien de l’annulation. Ces conclusions s’écartent, elles aussi, de la solution retenue par la formation de jugement et invitent à s’intéresser aux effets de l’interdiction sur la liberté des femmes.
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