Consignes aux autrices et auteurs au regard de l’écriture inclusive

Parce que le langage est un acte politique, la revue Intersections invite instamment les
personnes qui contribuent à ses numéros à adopter une écriture inclusive. Cette inclusion
peut être faite de multiples façons et nous vous faisons ici quelques propositions. Le
Comité rend ici honneur aux deux seules revues juridiques qui ont jusqu’ici suggéré
l’écriture inclusive à leur auteurices, Amplitudes du droit et Délibérée, les présentes
consignes é tant largement inspirées de celles de cette dernière publication.

Genre des fonctions et métiers
Les noms de fonctions en métiers peuvent facilement être féminisés. En cas de questionnement, la liste de féminisation des fonctions établie par l’Université du Québec est une base de données utile (https://instances.uqam.ca/guide-de-feminisation-ou-la-representation-des-femmes-dans-les-textes/).

Certaines féminisations sont bien établies (directrice, mathématicienne...), d’autres
connaissent une certaine souplesse (auteure/autrice par exemple).

Genre de mots communs
Il est possible de féminiser des mots communs (accord par genre grammatical) tels que
« chef », « successeur », « prédécesseur »...
Elle peut s’opérer par :
- L’ajout d’un suffixe (« cheffe ») ou d’une simple terminaison en « e »
(« successeure », etc.).
- L’utilisation des articles dé finis « le », « la ». (ex. On peut marquer le féminin en
écrivant « la chef », « la successeur »).

Point médian, redoublement systématique et termes « valises »
• En cas de désignation de groupes mixtes, il est possible de faire usage de points
médians pour marquer la bilatéralisation du discours.
Ex. Les chef·fes ; les auteur·trices.
Cet usage peut conduire à des difficultés de lecture si les occurrences sont trop
nombreuses et rapprochées, c’est pourquoi son usage est laissé à l’appréciation des
contributeurs et contributrices...
• Ces difficultés peuvent cependant être palliées de différentes façons :
- Par l’usage juxtaposé des formes féminines et masculines : « les contributeurs et les
contributrices ». Dans ce cas, prêter attention au fait de ne pas systématiquement placer la forme masculine en premier : penser également à écrire « les
contributrices et les contributeurs ».
- Par l’usage du point médian unique. Ecrire « les avocat·es » plutôt que « les
avocat·e·s »

• Une autre possibilité de visibilisation é tant enfin d’user de termes « valises ».
Ex. Les travailleureuses ; les auteurices.

En tout état de causes, pour des raison tant de lisibilité que de symbolique (ne mettons
pas le féminin entre parenthèse !), il est demandé aux auteur·es d’éviter l’usage des
parenthèses (auteur(e)s), des tirets (auteur-e-s), des barres de séparations (auteur/es) ou
du point bas (auteur.e.s).

 

Recours à des termes épicènes
Les difficultés posées par l’usage des points médians peuvent être dépassées par l’usage
de termes épicènes.
Les termes « épicènes » désignent indifféremment le genre masculin ou féminin et il peut
permettre de faire reculer l’emploi du fameux « masculin générique ».
Exemples : « personne » ou « humain » en lieu et place « homme », « le personnel »
plutôt que « les salariés », « la direction » et non « le directeur », « le pouvoir
législatif » plutôt que « le législateur ».
Parfois le simple usage du pluriel suffit à rendre le discours épicène : « les juges »
plutôt que « le juge ».

Règles de la proximité et de la majorité
Il s’agit ici de remettre en question la règle du « masculin qui l'emporte » et de revenir à
la règle qui prévalait avant le XVIIe siècle, celle de la proximité (2).
Il est également possible de favoriser la règle de la majorité (on accorde avec le genre le
plus représenté dans l'énumération – ou le plus représenté dans le réel évoqué).

*Exemples d’emploi des règles de proximité/majorité :
« les principales connaissances et savoirs » (règle de la proximité)
« les hommes et les CSP supérieures sont largement surreprésentées » (règle de la proximité)
« pouvoir, police et armée sont gangrénées » (règle de la majorité)
« lutter en interne contre les cas de discrimination, harcèlement et violence sexuelles » (règle
de la majorité ET de la proximité)
« il a été décidé d’augmenter le salaire des magistrates et des policiers » (accord au réel
statistique).

* Autres exemples d’application à des figures de langage :
« la Justice est le seul perdant des arbitrages budgétaires à venir» => « la seule
perdante » ?
« la Chancellerie est devenue un acteur de la répression» => « est devenue une
actrice de la répression » ?
« la revue ne veut pas faire cavalier seul » => « ne veut pas faire cavalière seule »

 

Genre neutre Des propositions existent pour un langage et une écriture qui ne serait plus fondée sur
une bi-catégorisation des personnes. Il est possible d’en prendre connaissance par
exemple ici : https://www.alpheratz.fr/linguistique/genre-neutre/

Les solutions proposées ne sont pas obligatoires mais fortement recommandées
pour la publication dans Intersections. Il n’est évidemment pas impossible de
mélanger les formes au sein d’un même texte dès lors que la lisibilité globale est
sauvegardée.


Vous pouvez également nous proposer des pistes que nous n’aurions pas
envisagées, n’hésitez pas !

 

1) Sur le caractère signifiant de l’ordre de l’évocation écouter : Laélia Véron, « Jambon-beurre ou beurre-
jambon ? », chronique linguistique, France Inter, 19 janv. 2022. Disponible sur :https://www.youtube.com/watch?v=R7KyIiioFI4&ab_channel=FranceInter

2) Article du Monde du 23 nov. 2017 : https://www.lemonde.fr/les decodeurs/article/2017/11/23/cinq-idees-recues-sur-l-ecriture-inclusive_5219224_4355770.html : « Professeure émérite de littérature de la Renaissance, Eliane Viennot a dirigé l’ouvrage L’Académie contre la langue française (iXe, 2016), cosigné par plusieurs linguistes et sémiologues. Leur ouvrage, qui égratigne les postures "corsetées" de l’Académie française, rappelle que le
français n’a pas toujours valorisé la prédominance du masculin. "Jusqu’au XVIIe siècle, les noms des métiers et des dignités exercées par des femmes étaient au féminin", rappelle Eliane Viennot. On disait alors "charpentière", "prévôte" ou "moissonneuse". La règle d’accord de proximité voulant que le dernier mot l’emporte, et non le masculin, était courante. Elle a, finalement, été remise en cause puis abolie par l’Académie au nom de la
supériorité masculine, comme l’a édicté en 1651, le grammairien Scipion Dupleix, "conseiller du Roy". »