Actualités choisies - Violences, répressions, préventions

(juillet 2023 – juin 2024)

Ariane Amado, Tiffany Coisnard, Mathilde Cornette,

Miléna Dostanic, Hélène Duffuler-Vialle, Anne Jennequin,

Catherine Le Magueresse, Elodie Tuaillon-Hibon

















L’actualité 2023-2024 dans le domaine des violences et répressions peut être analysée au regard des obligations internationales et européennes de la France en matière de lutte contre les violences sexistes et sexuelles (I) et de l’état de cette lutte en droit interne (II).

I. Obligations internationales et européennes de la France en matière de lutte contre les violences sexuelles et sexistes

  1. La France ne respecte pas l’ensemble de ses obligations en matière de lutte contre les violences sexistes et sexuelles. Dans la mise en œuvre de la Convention d’Istanbul, elle tente, dans un rapport à destination du GREVIO, de se justifier du respect de ses engagements, sans reconnaitre la dimension systémique des violences de genre (A). Par ailleurs la jurisprudence récente de la CEDH souligne un décalage entre le traitement judiciaire des violences sexuelles et sexistes en France et les exigences de la Cour, alors même que la France a sept affaires pendantes devant la CEDH (B). Enfin la récente Directive (UE) 2024/1385 du Parlement européen et du Conseil du 14 mai 2024 sur la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique illustre les réserves que certains pays émettent au sujet d’une redéfinition du consentement sexuel, élément pivot dans les infractions à caractère sexuel (C).

A. Mise en œuvre de la Convention d’Istanbul : la France veut « se faire bien voir » par le GREVIO mais ne reconnaît toujours pas le caractère systémique des violences de genre

  1. La Convention du conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique dite Convention d’Istanbul a été signée par la France le 11 mai 2011 et ratifiée le 4 juillet 2014. Elle est entrée en vigueur le 1er novembre 2014. En 2018, la France avait fait l’objet d’une première évaluation générale dite « de référence », qui avait entrainé un rapport assez sévère du GREVIO en novembre 20191. La France avait alors élevé une contestation par le mécanisme du Comité des Parties entre 2020 et 2023, ce qui avait permis d’atténuer certains aspects négatifs du rapport. Le 30 juin 2024, la France a remis un rapport au GREVIO2 pour le premier cycle d’évaluation thématique de la Convention qui porte sur « Etablir un climat de confiance en apportant soutien, protection et justice ».

  2. En premier constat, la lecture de ce rapport montre que les recommandations du GREVIO en la matière n’ont pas été prises en compte, alors même que depuis 2017 la lutte contre les violences contre les femmes a été érigée en « grande cause nationale ».

  3. De manière transversale, le rapport met en lumière des aspects médiatisés des violences de genre – notamment les violences sexuelles à l’encontre des mineur·es et les féminicides – et invisibilise les viols sur adultes, en particulier alors que le viol conjugal constitue une part importante des violences domestiques, qu’il s’agit d’un enjeu important de lutte contre les violences sexuelles dans le contexte de la prostitution ou de la pornographie et qu’il est au cœur du problème du mariage forcé (comme le rappelle régulièrement la Fédération GAMS). Ainsi, certaines réponses du rapport semblent incomplètes ou peu adaptées. Par exemple, là où le GREVIO interroge la France « sur les mesures prises pour permettre de suivre le cheminement des affaires de violence à l’égard des femmes et de violence domestique »3, la France répond uniquement sur les violences dites « intrafamiliales ou domestiques », sans aborder les autres types de violences, notamment le viol.

  4. Un deuxième aspect à noter est l’accumulation de plans, mesures, circulaires, lois, et autres dispositifs tels que les « Grenelle » ou commissions, souvent élaborés en réaction à l’actualité, et qui, bien que témoignant d'une mobilisation indéniable, ne paraissent pas articulés autour d'une réflexion globale sur la nature systémique des violences de genre. Cette impression d'une série de mesures dispersées laisse entrevoir une absence de coordination stratégique, renforçant l’idée d'une réponse ponctuelle plutôt que d'un changement structurel. Bien que le rapport présente certaines avancées notables qui répondent à des obligations conventionnelles spécifiques (comme la création de pôles « VIF » dans les tribunaux, le dépôt de plainte à l’hôpital, ou encore l’établissement d’un âge minimum de consentement pour les violences sexuelles sur mineur·es), il reste difficile de saisir la mise en œuvre concrète de ces dispositifs et leur impact réel sur le terrain. Le rapport ne fournit pas d’analyse approfondie sur la manière dont ces dispositifs sont relayés auprès des professionnel·les concerné·es, ni sur les retours d’expérience qui permettraient d’en mesurer l’efficacité.

  5. On constate également une déconnexion entre certains éléments du rapport et la réalité observée quotidiennement par les professionnel·les. Par exemple, lorsque le rapport souligne que la France « considère la violence à l’égard des femmes comme une forme de discrimination et de violation des droits humains »4, ce qui est effectivement rappelé régulièrement par la Défenseure des Droits, on peine à voir comment cette reconnaissance se traduit concrètement dans les politiques publiques ou dans les décisions des tribunaux, notamment dans les affaires de violences sexuelles au travail. Quant à la partie III, « Nouvelles tendances en ce qui concerne la violence à l’égard des femmes et la violence domestique », elle mentionne par exemple que la France a créé l’infraction du « suicide forcé » il y a quatre ans, mais sans préciser qu’un nombre infime d’affaires ont été jugées sur cette base.

  6. Enfin, l'examen des aspects budgétaires soulève des interrogations sur la mobilisation des moyens financiers alloués à la lutte contre les violences de genre.

  7. Trois programmes sont essentiellement concernés et mobilisés sur le sujet des violences de genre : 101 « Accès au droit et à la justice », 137 « Egalité entre les hommes et les femmes » et 166 « La justice judiciaire ». Le programme 101 concerne essentiellement les crédits dédiés au financement de l’aide aux victimes. Or le rapport ne précise pas que ce programme n’est pas spécifique aux victimes des violences de genre. S’agissant du programme 166, le rapport précise qu’ il ne serait pas possible d’évaluer la part du budget de la Justice consacrée aux violences de genre tout en prétendant que « l’ensemble des moyens consacrés au titre du programme 166 et en particulier au sein des juridictions concourent à éradiquer et sanctionner les infractions d’ordre sexiste ou sexuel, les agressions intrafamiliales et les violences conjugales », ce qui est en décalage avec les statistiques avancées par les associations et activistes, en l’absence regrettable de statistiques officielles, à savoir 65% d’ordonnances de non-lieu en 2023. Enfin, le rapport souligne le lancement d’une « revue des cadres féminines » en 2022 au sein des ressources humaines de la magistrature5. Or le lien avec « Les moyens alloués par le ministère de la Justice » dans la lutte contre les violences faites aux femmes reste ténu, sauf à penser que ce sont les femmes qui doivent/devraient s’occuper des « problèmes des femmes ».

  8. Quant au programme budgétaire véritablement au centre de cette politique en France, le « programme 137 »6, il couvre tous les aspects que la France fait découler des questions relatives à l’« égalité entre les femmes et les hommes » comme en témoignent les six axes qui le composent, dont les violences de genre et les agissements sexistes. Le caractère très général du langage utilisé, ainsi que la conception même du document et de ses items (comme l’« Action 25 » du programme, qui vise la « Prévention et lutte contre les violences et la prostitution »), ne permettent pas une analyse fine des différentes situations concernées. Par conséquent, les chiffres avancés perdent en clarté et en pertinence et, lorsqu'on examine en détail les mesures, on perçoit clairement une approche disparate qui nuit à la cohérence des politiques publiques. En effet, l’« Action 25 » englobe à la fois l’accueil et l’accompagnement des femmes victimes, les interventions destinées aux auteurs de « violences conjugales », ainsi que la prévention de la prostitution, sans réelle distinction entre ces thématiques.

  9. Le rapport remis par la France semble avant tout être une compilation de mesures administratives et budgétaires, certes utile en soi, mais manquant d’une réelle réflexion politique ou juridique. Il apporte donc peu d’éléments pertinents en réponse aux questions soulevées par le GREVIO. De plus, il n’offre que peu de perspectives critiques sur l’action de la France, notamment en ce qui concerne l’évaluation des dispositifs mis en place et les retours d’expérience, éléments pourtant cruciaux dans une démarche d’amélioration continue.

  10. Le rapport reste également limité dans l’identification des lacunes des politiques publiques, en particulier concernant les engagements conventionnels découlant de la convention d’Istanbul. Il n’aborde pas les pistes de correction des dysfonctionnements structurels des outils de politique publique en France, qui apparaissent inadaptés à la complexité des violences de genre. Un autre point notable est l’absence de traitement spécifique du viol sur majeures, un sujet pourtant central, comme en témoignent les nombreuses affaires médiatisées récemment (affaires Mazan, Le Scouarnec, « violeur de Tinder », etc.), ainsi que les sept affaires pendantes devant la CEDH concernant, pour la plupart, des procédures pour viol.

  11. La question des données et des statistiques relatives aux violences de genre, un sujet particulièrement sensible en France, est, elle aussi, insuffisamment analysée. Ce point est pourtant crucial, tant au niveau national qu’au regard des exigences de la Convention d’Istanbul. En l'absence d’une analyse approfondie de ces données, le rapport n’est pas non plus en mesure de valoriser certains progrès importants, tels que l’ordonnance de protection ou la modification des lois relatives à l’inceste et aux agressions sexuelles sur mineur·es, ou encore de fournir un retour d’expérience sur les « cours criminelles », pourtant présentées comme une avancée pour les victimes de viol.

  12. Le rapport du GREVIO incitera sans doute à des réflexions plus approfondies et à la poursuite des travaux engagés, en évitant de se contenter d’une présentation qui peut apparaître comme partiellement biaisée. E.T.H.

B. Les affaires pendantes de la France devant la CEDH, au regard de la jurisprudence récente de la Cour : de la pertinence des arrêts de la CEDH quant à la prise en compte juridique et judiciaire des violences sexuelles et sexistes

  1. La Convention européenne des droits de l’Homme (Conv. EDH) est interprétée par son organe juridictionnel, la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH), compétence qui lui est dévolue expressément par une clause du traité7 et qu’elle exerce tant dans le cadre de son activité contentieuse que consultative. Ses arrêts devenus définitifs, bien que déclaratifs, ont force obligatoire à l’égard des parties au différend. En effet, l’article 46 de la Convention ne confère qu’une autorité relative de la chose jugée aux arrêts de la CEDH8. Celle-ci leur a toutefois reconnu une autorité de la chose interprétée puisque ceux-ci « servent non seulement à trancher les cas dont elle est saisie, mais plus largement à clarifier, sauvegarder et développer les normes de la Convention et à contribuer de la sorte au respect, par les États, des engagements qu’ils ont assumés »9. En ce sens, la Cour a affirmé qu’elle « doit déterminer si les autorités nationales ont dûment pris en compte les principes découlant des arrêts qu’elle a rendus sur des questions similaires, y compris dans des affaires concernant d’autres États […] »10. En France, l’Assemblée plénière de la cour de cassation a intégré cette nécessaire prise en compte des arrêts rendus à l’égard d’autres États parties et a ainsi déclaré que « [l]es États adhérents à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sont tenus de respecter les décisions de la Cour européenne des droits de l'homme, sans attendre d'être attaqués devant elle ni d'avoir modifié́ leur législation »11.

  2. Cette dernière année, plusieurs arrêts de la Cour de Strasbourg ont traité d’affaires de violences sexuelles (en particulier, de viol et d’agression sexuelle). Ce fut l’occasion pour la juridiction d’entériner sa jurisprudence en la matière et de valoriser le travail du GREVIO. Entre 2023 et 2024, la Croatie, la Grèce, la République tchèque et la Lituanie ont toutes été condamnées en raison du traitement judiciaire d’affaires de violences sexuelles – les trois premières pour violation des articles 3 et 8 et la dernière pour violation de l’article 3. À l’occasion de ces arrêts, la CEDH a insisté sur la nécessité d’adopter des sanctions proportionnelles et dissuasives, de garantir l’effectivité des enquêtes (notamment leur célérité) et d’assurer une appréciation adéquate du consentement en matière de violences sexuelles. Elle l’a fait en mobilisant les standards internationaux pertinents issus notamment de sa jurisprudence et des instruments comme la Convention d’Istanbul12, les rapports de son organe de surveillance – le GREVIO - , la Convention de Lanzarote13 et son rapport explicatif14.

  3. Ces arrêts ont un écho particulier en France, où le traitement judiciaire des violences sexuelles est de plus en plus critiqué et a donné lieu à sept requêtes devant la CEDH. L’État français a donc tout intérêt à prendre rapidement toutes les mesures pertinentes pour respecter les standards internationaux et éviter la multiplication des requêtes qui risquent d’engager sa responsabilité.

1. Rappel des exigences du droit international en matière de traitement judiciaire des viols et agressions sexuelles

  1. Proportionnalité de la sanction et lutte contre l’impunité. En décembre 2023, la CEDH a condamné la Croatie pour violation des articles 3 et 8 de la Convention15, dans une affaire d’agression sexuelle. Mme Vučković, infirmière, avait dénoncé des agressions sexuelles commises par un collègue ambulancier alors qu’ils travaillaient en équipe. Les juridictions internes avaient condamné l’agresseur à une peine de dix mois de prison, ensuite commuée en travaux d’intérêt général. La CEDH a jugé que cette condamnation constituait un manquement de l'État à son obligation procédurale de traiter de manière appropriée les violences sexuelles répétées subies par la victime. Elle a souligné notamment que la motivation de la décision de commutation ne tenait pas compte de l’intérêt de la victime et participait au sentiment d’impunité et d’indulgence de la justice dans la répression des violences faites aux femmes :

Such an approach by the domestic courts, in the Court’s view, may be indicative of a certain leniency in punishing violence against women, instead of communicating a strong message to the community that violence against women will not be tolerated16.

  1. Cette exigence de proportionnalité de la sanction en matière de violences sexuelles n’est pas propre à la CEDH, puisque le Comité des droits de l’Homme (CDH) a lui aussi indiqué que l’État devait s’assurer de la proportionnalité de la sanction au regard de la gravité du crime17. La Convention d’Istanbul, elle, impose expressément aux États parties de prendre des mesures pour que les infractions « soient passibles de sanctions effectives, proportionnées et dissuasives, au regard de leur gravité » 18.

  2. Cette jurisprudence est par ailleurs intéressante en ce qu’elle se réfère expressément au rapport du GREVIO sur la Croatie pour étayer ses constatations19. Ce n’est donc plus seulement la Convention d’Istanbul qui est mobilisée en elle-même, mais également les rapports de son organe de surveillance.

  3. Proportionnalité de la sanction et délais de procédure. La Lituanie a elle aussi été condamnée en raison, notamment, de l’inadéquation d’une sanction pour agression sexuelle. Il s’agissait d’une affaire concernant une tentative d’agression sexuelle sur mineur pour laquelle l’agresseur avait été condamné à trois ans d’emprisonnement entièrement assortis de sursis. L’article 6 était invoqué par le requérant, mais la Cour a décidé d’examiner les faits sous l’angle de l’article 320. Elle a conclu à la violation de cet article en raison de la longueur de la procédure et de l’inadéquation de la sanction à la gravité des faits :

In the light of the foregoing considerations, bearing in mind what was at stake for the applicant in the proceedings, the length of those proceedings and the punishment given to the perpetrator, the Court concludes that the domestic authorities failed to comply with their procedural obligations under Article 3 of the Convention21.

  1. Selon la Cour, la longueur de la procédure violait l’exigence de célérité et de diligence de l’enquête découlant de l’article 3 de la Convention.

  2. Le Comité des droits de l’Homme inclut, lui aussi, l’exigence de rapidité dans les critères de l’enquête effective. Selon lui, les États doivent mener des enquêtes rapides, impartiales et approfondies sur les allégations de violations des droits humains22 parmi lesquelles « tous les cas de violence sexuelle » 23 et le fait pour un État de ne pas enquêter rapidement et efficacement sur les allégations de violence sexuelle constitue une violation conjointe des articles 7 et 2.3 du pacte international relatif aux droits civiques et politiques (PIDCP)24.

  3. En ce qui concerne la sanction, la CEDH explique que l’inadéquation de celle-ci résulte de son défaut de caractère dissuasif, susceptible de créer un sentiment d’impunité. Cet objectif de dissuasion est important et doit par ailleurs se retrouver dans le cadre légal existant, puisque la Cour a déjà eu l’occasion d’indiquer que les États doivent adopter des dispositions pénales efficaces pour garantir une « dissuasion effective contre un acte aussi grave que le viol »25.

  4. Enfin, la CEDH rappelle également dans cette décision l’importance de prendre en compte l’intérêt supérieur des enfants dans les affaires de violences sexuelles à leur encontre26.

  5. Effectivité de l’enquête. Un autre arrêt de la Cour est intervenu en février 2024, condamnant la Grèce pour violation de ses obligations positives tirées des articles 3 et 827. La CEDH a considéré que l’affaire concernant la plainte pour viol d’une vacancière britannique par un barman d’un hôtel grec n’avait pas donné lieu à un examen suffisamment sérieux. La Cour rappelle dans cet arrêt toutes les exigences déjà bien connues en matière d’enquête. Elle réaffirme ainsi que l’enquête doit être objective, approfondie, menée avec diligence et célérité, que les autorités doivent prendre les mesures raisonnables dont elles disposent pour obtenir les preuves (dépositions, expertises, examens médico-légaux…)28.

  6. L’obligation d’enquête effective en la matière est également dégagée par le CDH29 comme le comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (Com. EDEF), qui précise que les autorités doivent fournir à la victime des informations sur l’avancement de l’enquête et sur la probabilité d’un procès30. Cette obligation est codifiée à l’article 49.2 de la Convention d’Istanbul31.

  7. Les autres systèmes régionaux consacrent la même obligation, que ce soit au sein de l’organisation des États américains (OEA), notamment dans les décisions de la Cour interaméricaine des droits humains (CIADH)32 ou encore au sein de l’Union africaine, dans une décision de la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples (Com. ADHP)33.

  8. Dans cet arrêt le rapport du GREVIO est également cité à l’appui des constatations de la Cour34.

  9. Appréciation du consentement. Plus récemment, c’est la République tchèque qui a été condamnée, toujours pour violation des obligations positives découlant des articles 3 et 835. Cette fois, c’est davantage l’application du cadre légal du viol qui a été examiné. La requérante ne mettant pas directement en cause la loi dans sa requête, c’est l’interprétation et la mise en œuvre de celle-ci qui étaient au cœur de l’examen de la Cour, afin de savoir si elles permettaient de considérer que l’État avait assuré à la requérante une protection effective contre le viol.

  10. La requérante avait dénoncé en l’espèce des faits de viol par un prêtre qui était aussi son enseignant, lors d’une période de vulnérabilité particulière due à la perte de son père, à des problèmes de santé et au traumatisme de précédentes violences sexuelles dont elle explique avoir été victime.

  11. C’est donc l’appréciation de la notion de consentement par les autorités qui a été analysée :

"Les autorités n’ont pas jugé nécessaire de procéder à une évaluation contextuelle de la crédibilité des déclarations faites et à une vérification de toutes les circonstances environnantes. […] Les autorités du parquet se sont contentées de conclure que la requérante n’avait pas été dans l’incapacité de se défendre au sens de la loi et la jurisprudence internes »36.

  1. La Cour a estimé dans cet arrêt que l’obligation d’appliquer effectivement un système pénal capable de réprimer les actes sexuels non consentis pèse sur les États parties depuis au moins l’arrêt M.C. c. Bulgarie37.

  2. Là encore, d’autres organes de protection des droits humains ont affirmé la centralité de la notion de consentement dans les affaires de violences sexuelles, en particulier de viol, et la façon dont celui-ci devait être analysé. Le Com. EDEF a ainsi rappelé que le consentement ne devait pas être présumé en cas d’absence de résistance de la victime et qu’il devait être apprécié en excluant tout mythe et stéréotype allant en ce sens38.

  3. En tout état de cause, la CEDH a déjà une jurisprudence bien étayée en la matière. Selon la Cour, le consentement à l’acte sexuel doit être apprécié au vu des circonstances et d’une analyse poussée du contexte39. L’analyse du consentement doit ainsi se faire au regard des circonstances personnelles de la victime et notamment de ses capacités intellectuelles (son âge, son développement mental et physique, les circonstances dans lesquelles les faits se sont déroulés – comme, par exemple, des faits commis la nuit, en extérieur, par temps froid40). La Cour n’hésite pas à relever l’absence de prise en compte de l’état de sidération qui peut accompagner certains faits de violence sexuelle et expliquer l’absence de réaction de la victime41.

  4. L’examen de l’adéquation de l’interprétation du cadre légal rejoint nécessairement celui de l’effectivité de l’enquête, puisque l’appréciation des éléments constitutifs de l’infraction détermine la façon dont les investigations seront menées. À titre d’exemple, la volonté de prendre en compte la vulnérabilité ou les réactions post-traumatiques donnera généralement lieu à des expertises et à des investigations permettant d’établir les éléments de faits conduisant à ladite situation de vulnérabilité. L’effectivité de l’enquête dépend donc en grande partie du cadre légal existant et de la façon dont il est interprété.

2. Le traitement judiciaire français des viols face au droit international

  1. Si aucune des décisions précitées ne concerne la France, le comportement de ses autorités en matière de traitement judiciaire des violences sexuelles est critiqué et a donné lieu à sept requêtes actuellement pendantes devant la CEDH concernant le traitement judiciaire de faits de viol (parfois accompagnés d’autres agressions sexuelles)42. A ce stade, seuls sont disponibles les résumés rédigés par le greffe de la Cour et publiés en ligne, mais quelques constats peuvent d’ores et déjà être dressés.

  2. En matière de fondements juridiques, chacune de ces requêtes mobilise les articles 3 (interdiction des traitements inhumains ou dégradants) et 8 (droit au respect de la vie privée et familiale). Tandis que quatre d’entre elles mobilisent l’article 6 (droit à un procès équitable), seules trois mobilisent l’article 14 (interdiction de la discrimination) et une seule se fonde sur l’article 13 (droit à un recours effectif).

  3. En ce qui concerne plus précisément les griefs, il ressort très clairement des résumés disponibles que ces requêtes pointent toutes des dysfonctionnements dans le traitement judiciaire des violences sexuelles, en l’espèce des viols. Ces dysfonctionnements concernent d’abord en particulier et presque unanimement (six requêtes) l’appréciation du viol, et en particulier, de la notion de « consentement » par la justice – c’est-à-dire, on l’imagine, par les magistrat·es comme les personnes agissant sous leur autorité : les policier·es qui agissent selon instructions du parquet ou du·de la juge d’instruction. Elles concernent également la rédaction même de la loi (trois d’entre elles), la victimisation secondaire lors de la procédure ou encore les délais de celle-ci et l’effectivité de l’enquête (quatre requêtes concernées pour chacun de ces derniers griefs).

  4. Si l’on ne connait pas le contenu des requêtes ni la façon dont les griefs y ont été articulés, la jurisprudence de la CEDH permet de constater que les griefs sont souvent intrinsèquement liés les uns aux autres.

  5. La loi et sa rédaction déterminent les éléments constitutifs des infractions précisés par des interprétations jurisprudentielles. L’orientation des investigations comme l’appréciation des faits dépendent nécessairement de ce cadre légal et celles-ci ne sont pas sans incidence sur le traitement accordé à la plaignante et à son récit. Ainsi, l’analyse de l’adéquation du traitement judiciaire des violences sexuelles aux standards internationaux se fait tant au regard du cadre légal qu’au regard de sa mise en œuvre lors de chacune des étapes de la procédure.

  6. Un cadre légal adéquat n’est pas suffisant en lui-même car encore faut-il qu’il soit mis en œuvre de façon adéquate et effective43. Il s’agit toutefois d’une étape essentielle, puisque d’un cadre légal ne répondant pas aux exigences du droit international et européen découlent nécessairement d’autres comportements qui s’inscrivent en violation des obligations tirées de celui-ci. Les arrêts de la CEDH comme les requêtes pendantes contre la France soulignent donc la nécessité de modifier le droit pénal français en matière de viol et d’agressions sexuelles. A cet égard, les décisions à venir de la CEDH concernant la France pourraient peser dans l’actuel débat sur une définition pénal du consentement sexuel. M. D.

C. La définition du viol relève-t-elle de la compétence de l’Union européenne ?

  1. La Directive européenne sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique a été adoptée le 14 mai 2024 à l’issue d’une négociation ardue44. Elle porte sur différentes formes de violence (harcèlement sexuel, cyberviolence, mariage forcé, mutilation génitale féminine, stérilisation forcée…) à l’exception du viol. Ce crime, initialement défini à l’article 5, a été exclu du champ de la directive au cours des négociations de celle-ci. L’on doit cette incongruité à l’opposition de dix pays parmi lesquels l’Allemagne, les Pays Bas, la République Tchèque, la Roumanie, la Hongrie et la France. Ces pays ont notamment avancé un obstacle juridique pour justifier cette exclusion, arguant que l’Union Européenne n’avait pas la compétence requise pour légiférer sur l’infraction de viol.

1. L’absence de base légale pour légiférer : un prétexte ou une réelle contrainte juridique ?

  1. Selon la position officielle française (et d’autres États membres), l’article 83 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), dont le paragraphe 1 énumère les domaines dans lesquels le législateur européen peut adopter des directives d'harmonisation des incriminations et des peines45, ne donne pas compétence à l’UE pour légiférer sur le viol, lequel relèverait de la compétence exclusive des États.

  2. Cette analyse juridique des compétences de l’UE a été contestée avec force par des juristes du parlement européen, des ONG, des syndicats ou par des universitaires46 qui affirment au contraire que le viol relève d’une forme « d’exploitation sexuelle des femmes et des enfants », soit un domaine prévu par l’article 83 TFUE précité. Il est relevé que le retrait de l’article 5 est basé sur une interprétation particulièrement restrictive de la notion « d’exploitation sexuelle » laquelle a pourtant déjà permis à l’UE de légiférer en matière de violences sexuelles à l’encontre des mineur·es47.

  3. Cette divergence d’analyses juridiques amène à s’interroger sur les autres raisons de cette opposition. Qu’y avait-il donc dans cet article 5 qui gênait le gouvernement français au point de le conduire à prendre le risque de faire échouer les négociations menées autour de la directive ?

2. Une définition du viol à laquelle le gouvernement du moment était opposé

  1. Selon les alinéas 2 et 3 de l’article 5,

2.  Les États membres veillent à ce qu’on entende par acte non consenti un acte accompli sans que la femme ait donné son consentement volontairement ou dans une situation où la femme n’est pas en mesure de se forger une volonté libre en raison de son état physique ou mental, par exemple parce qu’elle est inconsciente, ivre, endormie, malade, blessée physiquement ou handicapée, et où cette incapacité à se forger une volonté libre est exploitée.

3.  Le consentement peut être retiré à tout moment au cours de l’acte. L’absence de consentement ne peut être réfutée exclusivement par le silence de la femme, son absence de résistance verbale ou physique ou son comportement sexuel passé.

  1. En posant la centralité du consentement - de son absence ou, s’il est présent, d’une interrogation sur sa validité -, la directive conduisait à un changement de paradigme dans la définition du viol telle qu’elle existe en France où « le défaut de consentement résulte de la violence, contrainte, menace ou surprise ».

  2. La Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique, que la France a ratifié en 2014, adoptait déjà cette approche en son article 36-2. Le GREVIO a d’ailleurs appelé la France à modifier son Code pénal afin de se conformer aux exigences de celle-ci48.

  3. Toutefois, à la différence de la Convention précitée, une directive a un caractère contraignant et l’UE a le pouvoir de sanctionner les États défaillants. Si l’article 5 avait été conservé, la France aurait donc été contrainte de modifier son droit interne. Notre définition légale du viol ne mentionne en effet ni le consentement, ni l’obligation pour la personne qui initie une activité sexuelle de s’assurer de l’accord volontaire, c’est-à-dire libre, éclairé, continu de l’autre. Seuls sont interdits les actes de pénétration ou les actes bucco-génitaux commis par « violence, contrainte, menace ou surprise », ce qui signifie que, ce qui est au centre des débats lors d’un procès pénal, c’est la résistance des victimes, laquelle va déclencher chez l’agresseur la nécessité de recourir à une « violence, contrainte, menace ou surprise ». Or, lorsque la victime est tétanisée, sidérée, morte de peur, elle ne « résiste » pas. Il suffit dès lors à l’agresseur d’alléguer qu’il n’a pas eu recours à l’un de ces stratagèmes pour échapper à toute responsabilité pénale.

  4. Les statistiques judiciaires le prouvent : le droit français ne réprime qu’une minorité de viols, en général ceux qui correspondent aux stéréotypes du « vrai » viol, d'un viol tel qu'on se l'imagine collectivement, commis par un inconnu, usant de violence physique, dans l’espace public. Et, contrairement à ce que l’on entend fréquemment, ce n’est pas seulement en raison d’une mauvaise application du droit liée à une insuffisante formation des acteurs et actrices de la chaine pénale, c’est en premier lieu parce que le droit pénal impose cette approche sexiste en ce qu’il repose sur une présomption de consentement des personnes (principalement des femmes) à des actes sexuels49.

  5. « Il faudrait que tu refuses beaucoup plus pour que je te laisse tranquille »50. Les agresseurs le disent lors de leurs auditions par la police ou au tribunal : « je n’avais pas compris qu’elle ne voulait pas » car « elle n’a pas dit non assez clairement », « elle n’a rien dit, n’a pas résisté », etc. Il est urgent que le droit ne permette plus ces justifications et édicte que « seul un oui est un oui » tout en définissant les circonstances qui invalident un oui qui aurait éventuellement été énoncé. En effet, « céder n’est pas consentir » et l’on ne peut pas consentir à un rapport de domination sans prendre le risque d’un « renversement de la liberté » selon les termes de la juriste Muriel Fabre-Magnan dans son livre L’institution de la liberté51. Autrement dit, personne ne devrait être considérée comme « libre » de céder pour garder un emploi, trouver ou conserver un logement etc.

  6. La France, tout en se targuant d’avoir une diplomatie féministe, a privé des millions d’européennes violées (1 européenne sur 2052) d’un texte potentiellement plus protecteur que leurs droits nationaux. Elles pourront demander à la Cour européenne des droits de « l’homme » de rechercher si leur État respecte le droit européen … C. L. M.

II. Etat de la lutte en droit interne contre les violences de genre

  1. La jurisprudence récente a permis d’étendre la judiciarisation des violences sexuelles et sexistes (A). Pour autant, l’état de la jurisprudence relative au contentieux de ces violences au sein de l’enseignement supérieur et de la recherche (ESR) est inquiétant (B). En parallèle, de récentes politiques publiques renforcent concrètement la lutte contre les violences de genre et notamment les violences institutionnelles (C). Enfin, des propositions de lois et les débats législatifs qui les ont suivies soulèvent des enjeux de reconnaissance et de stigmatisation des droits des minorités de genre (D).

A. L’extension de la judiciarisation des violences sexuelles et sexistes

  1. La validation par le Conseil constitutionnel de la loi du 21 avril 2021, qui sanctionne de vingt ans de réclusion criminelle tout acte de pénétration sexuelle ou bucco-génital commis par un majeur sur un·e mineur·e de quinze ans avec une différence d'âge d'au moins cinq ans, malgré les critiques soulevées lors d’une question prioritaire de constitutionnalité (1), la reconnaissance du harcèlement environnemental en droit du travail (2), et la restriction du domaine de la prescription (3) contribuent à renforcer la lutte contre les violences sexuelles et sexistes dans le droit interne.

1. Redéfinition des violences sexuelles commises à l’encontre des mineur·es : la validation constitutionnelle de la protection renforcée des mineur·es instaurée par la loi du 21 avril 2021

  1. La loi n° 2021-478 du 21 avril 2021 visant à protéger les mineurs des crimes et délits sexuels et de l'inceste a créé une nouvelle infraction afin de punir de vingt ans de réclusion criminelle tout acte de pénétration sexuelle ou bucco-génital commis par un majeur sur un·e mineur·e de quinze ans ou commis sur l'auteur par la personne mineure, lorsque la différence d'âge entre les personnes majeure et mineure est d'au moins cinq ans53.

  2. Cette disposition portait-elle atteinte aux principes de présomption d’innocence, de légalité des délits et des peines, de nécessité des délits et des peines, d'égalité devant la loi, de nécessité et de proportionnalité des peines et enfin portait-elle atteinte aux droits de la défense comme l’argumentait le requérant dans une question prioritaire de constitutionnalité visant le premier alinéa de l'article 222-23-1 du Code pénal et de l'article 222-23-3 du même code ?

  3. Ces interrogations étaient jugées suffisamment sérieuses par la Cour de cassation pour qu’elle transmette la QPC au Conseil constitutionnel aux motifs que les dispositions critiquées sont « susceptibles de porter atteinte aux principes de nécessité des incriminations et des peines et d'égalité des justiciables devant la loi pénale » en ce qu’elles « punissent de vingt ans de réclusion criminelle tout acte de pénétration sexuelle ou acte bucco-génital commis par un majeur sur la personne d'un mineur de quinze ans ou commis sur l'auteur par le mineur, lorsque la différence d'âge entre le majeur et le mineur est d'au moins cinq ans, alors que cet acte est accompli sans violence, contrainte, menace ni surprise, sur une personne dont le consentement est indifférent et ne peut être prouvé, cependant qu'un tel acte est puni d'une peine identique, même lorsqu'il est commis par violence, contrainte, menace ou surprise, sur une personne non consentante, mais d'une peine de sept ans d'emprisonnement, lorsqu'il est commis sans violence, contrainte, menace ni surprise, et que la différence d'âge entre le majeur et le mineur est, fût-ce de très peu, inférieure à cinq ans »54.

  4. Le Conseil constitutionnel répond par la négative à chacune des questions et de façon assez lapidaire55. La décision est commentée par une doctrine majoritairement critique56. Reprenons cet échange argumentaire point par point.

Au titre de la violation du principe de la présomption d’innocence et des droits de la défense.

  1. Après avoir rappelé qu’il résulte de « l'article 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, [que] tout homme est présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable [et] qu'en principe le législateur ne saurait instituer de présomption de culpabilité en matière répressive », le Conseil juge qu’

« en adoptant ces dispositions, le législateur a interdit tout acte de pénétration sexuelle ou bucco-génital entre un majeur et un mineur de quinze ans, lorsque la différence d'âge entre eux est d'au moins cinq ans. D'une part, cette incrimination, dont la caractérisation n'exige pas que ces actes soient commis avec violence, contrainte, menace ou surprise, ne repose pas sur une présomption d'absence de consentement de la victime. D'autre part, il appartient aux autorités de poursuite de rapporter la preuve de l'ensemble de ses éléments constitutifs. Dès lors, les dispositions contestées n'ont ni pour objet ni pour effet d'instituer une présomption de culpabilité »57.

  1. Le Conseil écarte donc le grief de la violation de la présomption d’innocence et des droits de la défense. Cette décision est conforme à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de « l’homme ». En effet, dans un arrêt G. c. Royaume-Uni rendu le 30 août 2011, la Cour déclara irrecevable la requête d’un adolescent âgé de quinze ans condamné après avoir eu un rapport sexuel avec une fille de douze ans58. Cette condamnation avait été prononcée sur le fondement de l’article 5 de la loi de 2003 sur les infractions sexuelles selon lequel toute personne ayant un rapport sexuel avec un·e mineur·e de moins de treize ans se rend coupable de viol, que l’enfant soit ou non consentant·e et que la personne mise en cause ait ou non des motifs raisonnables de croire que le ou la mineur·e avait treize ans ou plus. Dans sa requête à la Cour, le requérant alléguait sous l’angle de l’article 6 de la Convention que sa condamnation était contraire à la présomption d’innocence.

  2. La Cour rappelle qu’il ne lui appartient pas d’imposer aux États le contenu de leur droit pénal et juge qu’en édictant cet interdit le Royaume Uni entendait garantir la protection des enfants de moins de 13 ans. Peu importe donc leur consentement, le plus souvent allégué par le mis en cause, peu importe également que ce dernier ait connaissance de leur âge : il lui appartient de le vérifier. Étonnamment, cette jurisprudence congruente n’est jamais citée par la doctrine précitée59.

Au titre de la violation du principe de légalité des délits et des peines

  1. Là encore, le Conseil considère que ce principe, qui impose au législateur de « définir les crimes et délits en termes suffisamment clairs et précis pour exclure l'arbitraire », est respecté aux motifs que,

« d’une part, les dispositions contestées n'ont pas pour effet de déroger au principe, prévu par l'article 121-3 du code pénal, selon lequel il n'y a pas de crime sans intention de le commettre, la seule imputabilité matérielle des actes réprimés ne suffisant pas à caractériser l'infraction. D'autre part, il résulte des termes mêmes des dispositions contestées que la minorité de quinze ans de la victime, qui est un élément constitutif de l'infraction, n'est pas, dans le même temps, une circonstance aggravante de cette même infraction » 60.

  1. La France a, vingt ans après le Royaume Uni, posé un interdit. L’infraction de viol ou d’agression sexuelle sur mineur·e de 15 ans (et à condition qu’il y ait cinq ans d’écart d’âge) est constituée dès lors que le contact sexuel est prouvé (élément matériel) et qu’il a été voulu (élément intentionnel). Point n’est besoin ici de prouver que le mis en cause a eu recours à une forme de « violence, contrainte, menace ou surprise » habituellement requise pour qualifier le crime de viol ou le délit d’agression sexuelle. Comme l’analysait la baronne Hale of Richemond, ancienne présidente de la Cour suprême du Royaume-Uni, dans l’affaire ayant conduit à l’arrêt G. c. Royaume-Uni de la CEDH précité, « chaque homme a le choix d’où il met son pénis. Il peut être difficile pour lui de maîtriser son excitation mais il a le choix. Il n’y a rien d’injuste ou d’irrationnel à ce qu’une loi dise que s’il choisit de mettre son pénis dans un·e enfant de moins de treize, il commet une infraction [de viol] » 61.

Au titre de la violation du principe d'égalité devant la loi pénale

  1. Derechef, le Conseil exclut la violation en énonçant que si « aux termes de l'article 6 de la Déclaration de 1789, la loi “doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse”, [l]e principe d'égalité devant la loi pénale ne fait pas obstacle à ce qu'une différenciation soit opérée par le législateur entre agissements de nature différente » 62. Or, selon le Conseil, les deux infractions punissent bien des agissements de nature différente selon qu’ils sont commis avec ou sans « violence, contrainte, menace ou surprise » et à la condition qu’il existe entre l'auteur majeur et la victime mineure une différence d'âge d'au moins cinq ans.

Au titre de la violation des principes de nécessité et de proportionnalité des peines

  1. Pour la quatrième fois, le Conseil exclut la violation d’un principe ici édicté par l'article 8 de la Déclaration de 1789 qui dispose : « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires ». Il rappelle que son rôle est « de s'assurer de l'absence de disproportion manifeste entre l'infraction et la peine encourue » 63 et juge qu’« en réprimant d'une peine de vingt ans de réclusion criminelle tout acte de pénétration sexuelle ou bucco-génital commis par un majeur sur un mineur de quinze ans ou commis sur l'auteur par le mineur, lorsque la différence d'âge entre eux est d'au moins cinq ans, le législateur, qui a entendu renforcer la protection de ces mineurs victimes d'infractions sexuelles, n'a pas institué une peine manifestement disproportionnée » 64. Pas plus qu’il n’atteint le principe de l’individualisation des peines.

  2. En affirmant que le consentement d’un·e enfant à un acte sexuel est hors sujet, cette loi marque un tournant attendu dans la protection de l’enfance. Elle est le fruit d’une lente maturation, de travaux menés en pluridisciplinarité notamment par le Collectif pour l’enfance et d’une prise de conscience collective accélérée par des procès65 et par des livres tels Consentement de Vanessa Springora, La familia grande de Camille Kouchner ou plus récemment Triste tigre de Neige Sinno. Reste à la faire vivre. Le Conseil constitutionnel a fait sa part en rejetant cette QPC. C. L. M.

2. Une avancée vers la reconnaissance du harcèlement environnemental en droit du travail

  1. Jusqu’en 1992, le harcèlement sexuel n’existait ni dans le code pénal, ni dans le code du travail, ni dans le statut des fonctionnaires. L’Association européenne contre les Violences faites aux Femmes au Travail (AVFT) se créa en 1985, avec pour objectif, notamment de permettre aux victimes de cette forme de violence de la dénoncer. C’est en 1992 que le harcèlement sexuel fut conceptualisé comme un délit à la faveur de la réforme du Code pénal et qu’il fut également pris en compte dans les relations de travail par le Code du travail et le statut de la fonction publique. D’emblée critiquée par l’association qui les trouvait réductrices66, ces textes furent modifiés à maintes reprises67 ; puis les dispositions pénales furent abrogées en 2012 après que le Conseil constitutionnel les a jugées inconstitutionnelles68. Les textes adoptés69 sont aujourd’hui plus aptes à prendre en compte la réalité subie par les victimes. Ils ont en outre été quelque peu améliorés par la loi du 3 août 2018, qui rend possible de poursuivre plusieurs personnes même si aucune n’a agi de façon répétée, puis par la loi du 2 août 202170, qui comprend maintenant les propos et comportements à connotation sexiste. Cette définition n’est toutefois pas encore harmonisée dans le code général de la fonction publique, ce qui crée une inégalité entre les travailleuses selon que leur contrat relève du privé ou du public.

  2. Ce sont le plus souvent des formes de harcèlement « direct » qui sont sanctionnées par les tribunaux. Or l’AVFT souligne le fait que le harcèlement sexuel est bien souvent environnemental. Il se manifeste par des « blagues » à caractère sexuel, de l’affichage de photos à connotation sexuelle dans les locaux, des chants traditionnels au secteur (par exemple, marine marchande, secteur hospitalier) dont les textes tournent en dérision des viols, l’utilisation de tout type d’objets en forme de pénis, l’envoi de photos, gifs, memes pornographiques dans le chat interne de l’établissement, des discussions sur les ébats sexuels de chacun ou des propos comparant les femmes entre elles, et autres comportements misogynes sans viser spécifiquement la ou les collègues qui y sont exposées.

  3. C’est donc tout un climat de travail qui devient connoté sexuellement et qui peut même s’étendre jusque chez soi lors de l’utilisation d’un chat interne, notamment en télétravail ou encore quand le droit à la déconnexion n’est pas respecté – ce qui est le cas dans de nombreux secteurs.

  4. Or comment concevoir qu’un environnement de travail de ce type n’ait pas d’effet délétère pour les personnes concernées, même si aucune d’entre elles n’est spécifiquement visée ? Un climat qui banalise des propos ou comportements à connotation sexuelle alimente un sentiment d’impunité des violences sexuelles et sexistes et entraine un effet d’appropriation des espaces de travail par certains et une exclusion de cell ·eux qui ressentent un malaise. Ainsi les effets sur les femmes sont les mêmes que lorsqu’elles sont directement visées : elles sont regardées, discutées et considérées comme des objets sexuels et non comme des travailleuses à part entière.

  5. Barbara Fredrickson et Tomi-Ann Roberts71 expliquent ce que produit l’objectification des femmes sur leur santé : une anxiété, une distance vis-à-vis des sensations de leur propre corps et une habitude de se détacher des signaux de leur corps, un sentiment de honte, qui génère un besoin de se cacher, l’obligation d’adopter une vigilance chronique quant à leur sécurité… Toute leur énergie est déployée à éviter les propos à connotation sexuelle ou à limiter le plus possible les effets précités, ce qui signifie, lorsque ces propos sont normalisés par l’ensemble du collectif, d’en être complétement écartées ou de ne pouvoir se dédier à l’exécution de leurs missions.

  6. Lorsqu’elles cherchent justement à ne pas subir cette ostracisation et ses conséquences (perte d’opportunités, isolement…), les femmes se retrouvent bien souvent dans l’obligation de « participer » aux échanges, afin de maintenir un statu quo. C’est notamment l’analyse du Tribunal correctionnel d’Aix-en-Provence dans une décision du 30 novembre 2015 dans laquelle l’AVFT était partie civile.
    Un tel climat de travail porte donc nécessairement atteinte aux travailleuses.

  7. D’où l’importance de l’arrêt de la Cour d’appel d’Orléans du 17 février 2017 qui reconnaît la notion de « harcèlement sexuel environnemental »72. Dans cette procédure73, le Défenseur des Droits avait présenté des observations en faveur de la reconnaissance d’un harcèlement sexuel « d’ambiance » ou « environnemental ». Au terme de son enquête, le Défenseur des droits a en effet décidé de présenter des observations devant la Cour d’appel dans sa décision n° 2016-21274, où il a conclu que les éléments du dossier démontraient qu’il avait bien existé au sein de la rédaction du journal des propos et des agissements répétés à connotation sexuelle pouvant constituer un environnement de harcèlement « intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant », en ce qu’il ne doit pas forcément s’entendre comme un agissement sexuel direct sur la victime mais s’étend à toute contrainte par un salarié d’un environnement professionnel dans lequel se répètent des comportements déplacés à connotation sexuelle et dégradant les conditions de travail du salarié qui ne souhaite plus les subir. Le Défenseur des droits a considéré que l’employeur, en minimisant les faits, n’avait pas satisfait à son obligation de sécurité de résultat à l’égard de sa salariée.

  8. La cour avait finalement retenu que « le harcèlement sexuel peut consister en un harcèlement environnemental ou d’ambiance, où, sans être directement visée, la victime subit les provocations et blagues obscènes ou vulgaires qui lui deviennent insupportables ».

  9. En termes juridiques, il convient d’observer que la définition du harcèlement sexuel n’exige aucunement que les propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste soient dirigés spécifiquement à l’encontre d’une personne pour que celle-ci en soit victime. En réalité, les juges ont donc simplement appliqué le texte à la lettre.

  10. Or un pas de plus a été franchi dans la reconnaissance du harcèlement sexuel environnemental. En juillet 2021, Mme A. a saisi l’AVFT pour dénoncer le harcèlement sexuel environnemental commis par une grande partie de ses collègues masculins, particulièrement par ses supérieurs hiérarchiques, et qui avait commencé dès son arrivée.

  11. Elle subissait ainsi : des discussions concernant des pénis, une exposition à des images de pénis, une peluche de pénis géante achetée et placée dans l’open space pendant plusieurs mois et devenue en quelque sorte la « mascotte » du collectif de travail, une course de karting pendant un séminaire d’entreprise avec un kart en forme de pénis qui éjacule, des mimes d’actes sexuels explicites, des propos sexistes et chosifiants (littéralement, comparaison des femmes à des lave-vaisselles), des discussions autour d’achat de lubrifiant ou encore de masques pénis, une comparaison d’elle-même à une femme prostituée, l’utilisation d’un smiley représentant une vulve comme pseudo sur l’outil de communication professionnel…

  12. Mme A. a eu beau dénoncer les faits, ceux-ci n’ont fait que continuer sans qu’aucune enquête ne soit diligentée. Après avoir résisté un an et demi dans cet environnement misogyne, elle a fini par signer une rupture conventionnelle. Si ce moyen de rupture est inadéquat en matière de violences sexistes et sexuelles, puisqu’il suppose une rupture du contrat d’un commun accord, c’est l’option qui lui a pourtant été conseillée par sa première avocate.

  13. Mme A. a ensuite saisi le conseil de prud’hommes de Paris pour obtenir réparation de ses préjudices et tenter de mettre un terme à l’impunité des hommes composant cette entreprise.

  14. Dans sa décision du 1er septembre 2023, le conseil de prud’hommes a condamné la start-up pour harcèlement sexuel et agissements sexistes en constatant que « Mme A. fournit de nombreuses pièces relatives à des comportements à connotation sexuelle de la part de ses collègues, de blagues sexuelles, des propos à connotation sexuelle et sexiste constituant un harcèlement sexuel environnemental. Les photos et captures d’écran de la messagerie interne de [l’entreprise] montrent une hypersexualisation de l’ambiance de travail ». Le Conseil précise que Mme A. a d’ailleurs parfois été visée directement par les agissements et qu’elle est victime de harcèlement « même si elle a répondu ou participé aux échanges » reprenant ainsi le raisonnement de la décision précitée du Tribunal correctionnel d’Aix-en-Provence du 30 novembre 2015. L’entreprise est également condamnée pour manquement à son obligation de prévention ainsi que pour manquement à son obligation de sécurité.

  15. Cette décision est intéressante en ce qu’elle reprend le sens des deux jurisprudences susmentionnées, qui devraient effectivement être utilisées de manière combinée malgré des dates et juridictions d’ordres différents. En effet, dans une structure de travail où le harcèlement sexuel environnemental est normalisé, voire encouragé, l’AVFT constate que la plupart des travailleuses sont contraintes à s’y plier, ce qui peut parfois donner lieu à une certaine participation de leur part. C’est l’effet inévitable de l’impunité avec laquelle les hommes commettent ces violences sexuelles au travail. Or cette attitude active de la victime peut être utilisée contre elle dans le contexte judiciaire, alors même que cette participation active, loin d’atténuer la violence subie, l’accentue. Si cette réalité n’est pas appréciée dans un dossier de harcèlement sexuel environnemental, les juges ne pourront qu’être dans l’incapacité de caractériser le harcèlement : comment estimer qu’il y a eu une atteinte à la dignité de la travailleuse ou une situation intimidante, hostile ou offensante créée à son encontre tout en faisant peser sur elle l’idée qu’elle ait librement et volontairement pris part à la violence qu’on exerçait à son encontre ?

  16. La reconnaissance de la notion de harcèlement sexuel environnemental par les juges constitue certes une avancée dans la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, mais qui doit toutefois être nuancée du fait de l’incohérence dont la décision fait preuve en ce qui concerne la demande de nullité de la rupture conventionnelle et des demandes afférentes à la rupture. Le conseil des prud’hommes de Paris précise d’abord « La rupture conventionnelle est nulle en cas de vice du consentement qui sont l’erreur, le dol et la violence » puis « Le Conseil a dit que Mme A. a subi un harcèlement sexuel, la signature de la rupture conventionnelle a eu lieu dans ce contexte, mais le Conseil constate que la demanderesse ne prouve pas l’existence d’un vice du consentement affectant la validité de la convention de rupture dans un contexte de harcèlement sexuel. En conséquence, le Conseil déboute Mme A. de sa demande de nullité de la rupture conventionnelle et de ses demandes afférentes à la rupture ».

  17. Ainsi, selon le Conseil des prud’hommes de Paris, le harcèlement sexuel serait une violence imputable à l’employeur qui doit être indemnisée mais ne serait pas considérée comme une violence constitutive d’un vice du consentement quant à la rupture du contrat pourtant survenue comme un non-choix puisqu’il s’agissait de la seule option présentée à Mme A.

  18. Plusieurs hypothèses peuvent être formulées : la complexité des notions relevant du droit civil, tel que le vice de consentement et sa mobilisation occasionnelle par des conseillers et conseillères prud’homales, ou encore le fait que les demandes fassent l’objet de négociations durant les délibérations entre les conseiller·es salarié·es et conseiller·es employeur·ses, qui représentent des intérêts différents, menant à l’acceptation de certaines demandes et au débouté d’autres.

  19. La décision du Conseil de prud’hommes de Paris illustre les incohérences qui subsistent encore, notamment en matière de reconnaissance des effets de ce climat de travail sur le contrat de salariées contraintes de le rompre pour échapper aux violences. T. C., M. C. (AVFT)

3. La restriction du domaine de la prescription

  1. Deux arrêts rendus, l’un par la Chambre de l’instruction de la cour d’appel de Versailles dans « l’affaire PPDA » 75, l’autre par la Cour de cassation dans l’affaire L. S.76 traitent de la prescription de l’action publique, notamment lorsqu’un lien de connexité, rapprochant différentes plaintes, est en cause.

  2. Dans la seconde affaire, M. L. S., chirurgien, fut mis en examen pour viols et agressions sexuelles aggravés à l’encontre de trois-cent-douze victimes. Il lui était reproché d’avoir profité du sommeil engendré par leur anesthésie pour les agresser. Certains faits étaient anciens mais les éléments permettant de les suspecter - notamment les carnets dans lesquels il consignait les agressions - n’avaient été découverts qu’en 2017, lors d’une perquisition à son domicile.

  3. Au regard des lois alors en vigueur, la question de la prescription des violences sexuelles se posait. M. L. S. argua pour sa part que l'absence de souvenirs, même lorsqu’elle est due à une anesthésie, ne constituait pas l’obstacle insurmontable de fait, assimilable à la force majeure, et susceptible de suspendre le délai de prescription prévu par l’article 9-3 du Code de procédure pénale.

  4. La chambre de l’instruction de la cour d'appel de Rennes rejette toutefois sa requête. Elle note que M. L. S. « a admis […] qu'il savait que les victimes ayant subi des actes de nature sexuelle […] ne pouvaient en garder aucun souvenir, soit en raison de leur sommeil anesthésique, soit en raison de l'amnésie provoquée par cette médication ». La cour prend en outre soin de relever toutes les circonstances caractérisant « l’obstacle insurmontable » à la dénonciation des violences : victimes inconscientes, stratégie de l’agresseur qui agit hors la présence de témoins ou prétexte des gestes médicaux lorsqu’il est surpris. Les faits criminels n’étaient connus ni des victimes ni de l’entourage professionnel du médecin, ils ne pouvaient donc être dénoncés. La Cour de cassation confirme le raisonnement de la chambre de l’instruction sur l’appréciation de l’obstacle insurmontable.

  5. Toutefois, si l’arrêt la Cour de cassation retient l’existence d’un obstacle insurmontable constituant une cause de suspension de la prescription pour quatre-vingt-cinq personnes plaignantes, elle rejette le pourvoi de Mme F., partie civile dont le moyen était ainsi rédigé :

« un acte interruptif de prescription concernant une infraction a un même effet à l'égard d'une autre infraction lorsque celle-ci est connexe ; que sont connexes les infractions commises en série sur des victimes différentes en cas de similitude dans le mode opératoire, dans l'approche et le sort réservé́ aux victimes ; que M. [L. S.] a commis des mêmes infractions sexuelles selon le même mode opératoire, la même approche et choix des victimes et le même sort leur était réservé ; que la cour d'appel a constaté́ que les actes étaient “similaires” procédaient “d'un même mode opératoire” et “d'un même mode […] de prédation” ; qu’en énonçant l'absence de connexité́ en ce que les faits “commis sur des victimes distinctes […] demeurent séparables”, la chambre de l'instruction n'a pas justifié́ sa décision et a méconnu les dispositions susvisées ainsi que les articles 8, 9-2 et suivants, 203, 591 et 593 du code de procédure pénale ».

  1. La Cour de cassation valide partiellement l’argument de la requérante puisqu’elle corrige la motivation de la chambre de l’instruction en jugeant que « c'est à tort que les juges ont considéré que les crimes et délits sexuels, y compris commis par le même auteur, ne peuvent être considérés comme des infractions connexes au sens de l'article 9-2 du code de procédure pénale, en ce qu'ils sont commis sur des victimes distinctes ayant subi des actes qui, bien que similaires comme procédant d'un même mode opératoire et de prédation, demeurent séparables les uns des autres tant dans leur matérialité que dans leur intentionnalité. En effet, de tels faits peuvent être connexes dès lors qu'ils présentent entre eux des rapports étroits qu'il appartient aux juges du fond de caractériser ». La Cour estime néanmoins que l'arrêt n'encourt pas la censure « dès lors que la connexité́ entre ces faits n'était pas de nature à permettre à une victime, dont il n'est pas établi qu'elle s'est trouvée dans l'impossibilité́ d'agir, de bénéficier de la suspension du délai de prescription accordée pour ce motif à une autre victime d'un fait connexe » 77. En l’espèce, la procédure n’avait en effet pas permis d’établir que Mme F était, à l’instar des autres victimes, inconsciente au moment des agressions, M. L. S. ayant omis de le préciser dans son carnet. Elle ne pouvait donc bénéficier de la même « solution » en droit.

  2. La situation juridique est autre dans « l’affaire PPDA », acronyme désignant un présentateur « vedette » du journal télévisé de TF1, dans laquelle vingt-deux femmes ont témoigné de crimes et délits sériels commis par le mis en cause sur une période allant de 1985 à 2017. Ce dernier conteste les accusations portées. Rappelons que ces femmes ont choisi de rompre le silence qu’elles avaient jusque-là conservé, afin d’apporter leur témoignage en soutien à une autre victime, Mme P., poursuivie en dénonciation calomnieuse par PPDA78. En 2021, Mme P. avait dénoncé deux viols, l’un commis en 2004, l’autre en 2009. Les juges d’instruction en charge de la procédure pour viol rendirent une ordonnance de refus d’informer conforme aux réquisitions du parquet, motivée par la prescription du premier des viols dénoncés.

  3. Devant la chambre de l’instruction, les conseils de la partie civile contestèrent ce non-lieu arguant que cette prescription n’était pas acquise notamment en raison de l’existence d’un lien de connexité entre toutes les plaintes. La chambre de l’instruction juge recevable cette argumentation. Après avoir rappelé que « s’agissant des crimes sériels, la Cour de cassation a eu à s’exprimer sur la question de la prescription estimant que la connexité́ s’impose en cas de crimes commis en des lieux et des temps différents sur des victimes différentes par un criminel en série, au motif qu’ils procèdent d’une même conception, relèvent d’un même mode opératoire et tendent au même but, les faits devant alors être considérés sous un même angle et donc de manière globale », la chambre relève que les « faits dénoncés tant par la partie civile que par les autres témoins s’inscrivent tous dans un contexte professionnel et se déroulent selon un mode opératoire a priori similaire, les faits ayant généralement lieu dans les bureaux de l’intéressé́ sur des jeunes femmes présentant le même profil professionnel et psychologique ». La chambre - reprenant les termes de la Cour de cassation- juge logiquement que la question de la connexité « pouvait utilement se poser dès lors que lesdits éléments mettaient en évidence que les faits de viol dénoncés relevaient du même mode opératoire et tendaient au même but, pouvant dès lors être analysés sous un même angle ». La chambre applique ainsi une règle classique relative à la connexité, laquelle a pour conséquence, lorsque les infractions font l'objet de procédures distinctes, qu’un acte interruptif de prescription concernant l'une d'elles, a nécessairement le même effet à l'égard de l'autre79.

  4. Les juges d’instruction doivent donc rechercher si les faits de violence sexuelle dénoncés présentent entre eux des « rapports étroits qu'il appartient aux juges du fond de caractériser » afin d’identifier d’éventuels actes interruptifs - tels par exemple, une plainte déposée en 2005 dont la presse a très récemment fait état80 ou d’autres faits non prescrits. C. L. M.

B. La répression des violences sexuelles et sexistes dans l’enseignement supérieur et la recherche

  1. Selon l’Observatoire national des discriminations et de l’égalité dans le supérieur (ONDES), les violences sexistes et sexuelles (VSS) sont en 2022 le deuxième motif de signalement remonté par les établissements (le premier étant le harcèlement moral), ce qui représente 12,1 signalements en moyenne par établissement et par an81. Pour y faire face, le Plan national de lutte contre les violences sexistes et sexuelles dans l’enseignement supérieur et la recherche 2021-2025 est structuré autour de 4 axes – formation et sensibilisation, renforcement des dispositifs de signalement, communication et valorisation de l’engagement des étudiant·es et personnels. Ces axes, principalement centrés sur les victimes (avec des volets prévention, accompagnement et prise en charge), invisibilisent largement la question pourtant centrale de la prise en charge des auteurs de ces violences.

  2. Pourtant, toute une série de mesures sont à la disposition des président·es d’université soucieux de répondre à la problématique des VSS dans leur établissement, qu’elles soient le fait d’enseignants-chercheurs ou d’étudiants : engagement de poursuites disciplinaires pouvant conduire à des sanctions, interdiction d’accès aux locaux et services de l’établissement et, pour les enseignants-chercheurs, suspension à titre conservatoire, ces différentes voies pouvant être utilisées concomitamment. L’analyse du contentieux généré devant les juridictions administratives par ces mesures de janvier 2023 à juillet 2024 conduit à en dresser un bilan assez mitigé. Si elle permet d’identifier le développement d’un contentieux des violences sexistes et sexuelles dans l’enseignement supérieur et la recherche, elle en dessine aussi les limites.

1. Contentieux des mesures prises à l’encontre d’enseignants-chercheurs pour violences sexistes et sexuelles

  1. Qualification juridique des faits de violence. Les faits reprochés à des enseignants-chercheurs sont appréciés à l’aune de la relation d’autorité dans laquelle ils se trouvent à l’égard des étudiant·es et des obligations déontologiques qui s’imposent à eux82. Des comportements déplacés adoptés par un professeur d’université à l’égard d’une doctorante dont il dirigeait la thèse et prenant la forme de courriels à la tonalité inappropriée, de l’envoi d’un poème et d’un parfum offert en cadeau pour les fêtes de fin d’année sont de nature à créer pour la doctorante une « situation particulièrement gênante ». La circonstance que l’enseignant avait déjà fait l’objet d’un blâme infligé par le CNESER pour un comportement similaire à l’égard de deux autres étudiantes dont il dirigeait les travaux conforte la vraisemblance et la gravité des faits en cause83. De même, et contrairement à la qualification retenue par le CNESER, le Conseil d’Etat estime que les invitations au restaurant, à son domicile ou à une soirée privée, une proposition de massage comme les commentaires sur l’apparence physique adressés à plusieurs de ses étudiantes ont créé « une situation intimidante et offensante pour elles », et sont bien constitutifs de harcèlement sexuel. Enfin, le fait pour un professeur d’université d’avoir embrassé une étudiante dont il assurait la direction du mémoire lors d’une soirée passée dans un bar est bien un comportement fautif84. Quoi qu’il en soit, la suspension à titre conservatoire ne saurait intervenir légalement sur la base du seul signalement par une enseignante de propos tenus par une doctorante et relatant des faits dont l’enseignante n’avait pas été témoin et qui n’étaient alors corroborés par aucun autre élément porté à la connaissance du président de l’université. Celle-ci ne peut intervenir qu’après que le signalement a été étayé par le récit par la victime elle-même et à plusieurs reprises des agissements qu’elle a subis85.

  2. Légalité du refus de nomination d’un candidat admis à un concours à raison de son comportement inapproprié. Le Conseil d’Etat a admis que les ministres de la santé et de l’enseignement supérieur et de la recherche pouvaient légalement ne pas proposer à la nomination du Président de la République un candidat pourtant admis à un concours de recrutement de professeurs des universités-praticiens hospitaliers dans la spécialité gynécologie-obstétrique, après qu’il a été porté à leur connaissance que le candidat, à raison du comportement inapproprié à l’égard d’étudiantes en maïeutique et d’internes femmes adopté par lui dans l’exercice de ses fonctions en qualité de praticien contractuel, « ne présentait pas les aptitudes requises » pour l’exercice des fonctions auxquelles il postulait86.

  3. Exigence d’un retentissement des violences sexistes et sexuelles sur l’établissement pour fonder légalement une suspension à titre conservatoire. La suspension à titre conservatoire d’un enseignant-chercheur, laquelle peut être prononcée, sur le fondement de l’article L. 951-4 du code de l’éducation, par le ou la président·e d’université agissant par délégation du ou de la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche « vise à préserver l'intérêt du service public universitaire. Elle ne peut être prononcée que lorsque les faits imputés à l’intéressé présentent un caractère suffisant de vraisemblance et de gravité et que la poursuite des activités de l’intéressé présente des inconvénients suffisamment sérieux pour le service ou le déroulement des procédures en cours »87. Cette suspension a « pour objet de restaurer et préserver, dans l'intérêt de l'ensemble des étudiants et du corps enseignant, la sérénité nécessaire au déroulement des cours et aux activités de recherche universitaire »88. Une telle suspension peut légalement être fondée compte tenu du « retentissement produit par les allégations de la victime au sein de l’établissement »89 : le Conseil d’Etat ne développe toutefois pas en quoi il y a eu retentissement et semble davantage le déduire de la gravité des faits imputés à l’enseignant-chercheur.

  4. Contrôle de la proportionnalité des sanctions disciplinaires90. Un simple blâme, eu égard à la nature des faits de harcèlement sexuel, à la relation d’autorité entre un enseignant-chercheur et ses étudiantes et à l’exemplarité et à l’irréprochabilité qui lui incombent, est une sanction hors de proportion avec les fautes commises91. En revanche, si embrasser une étudiante au cours d’une soirée est certes un comportement fautif, il ne justifie pas une sanction disciplinaire au regard des circonstances particulières : le juge retient un « fait isolé », l’absence de conséquence sur le déroulement de la scolarité et le parcours professionnel de l’étudiante comme les regrets exprimés par l’enseignant92.

  5. Droit à la protection fonctionnelle des enseignants-chercheurs en cas de relaxe ou d’absence de poursuites disciplinaires pour les faits de violences qui leur étaient reprochés. La protection fonctionnelle est due au professeur d’université qui souhaite porter plainte pour dénonciation calomnieuse contre la doctorante qui avait porté à son encontre des accusations de harcèlement sexuel, pour lesquelles l’enquête administrative a conclu à l’absence de matérialité des faits. Le président de l’université est tenu de l’accorder et ne saurait la rejeter au motif que la réalité des faits de dénonciation calomnieuse ne pouvait être suffisamment établie93. De même, la protection fonctionnelle est due à un enseignant-chercheur mis en cause par un article consacré aux violences sexuelles à l’université et paru dans Médiapart, dès lors que l’université, pourtant informée des accusations de violences notamment sexistes portées contre lui, n’a pas engagé de poursuites ni diligenté d’enquête administrative94.

2. Contentieux des mesures prises à l’encontre d’étudiants pour violences sexistes et sexuelles

  1. Qualification juridique des faits de violence. Pour contrôler la qualification, selon le cas, de faute disciplinaire ou d’atteinte à l’ordre public, les tribunaux administratifs sont sensibles à trois séries de considérations, assez peu favorables aux victimes. Ils s’attachent d’abord à la gravité des faits et à leur caractère réitéré sur une même étudiante ou sur plusieurs étudiantes. A ce titre, ils sont sensibles à la circonstance que les faits font l’objet de témoignages circonstanciés, concordants et réitérés des victimes comme des autres étudiants témoins directs ou indirects95. En revanche, toute « contradiction » dans le comportement de la victime, telle qu’un rapport sexuel consenti avec l’auteur des violences le lendemain, est de nature à faire douter de la réalité des violences96. Les tribunaux administratifs se fondent ensuite sur des éléments médicaux. Si le constat par un examen médical de « lésions vaginales et anales compatibles avec les faits décrits par la victime » est susceptible d’emporter la qualification de faute disciplinaire97, les autres éléments médicaux avancés (perte de poids, suivi psychiatrique, traitement par anxiolytiques et antidépresseurs, traitement prophylactique) sont écartés par le juge, au motif qu’ils n’établissent pas avec certitude de lien de causalité avec les violences invoquées98 et/ou que la victime était déjà en situation de vulnérabilité avant les agissements en cause99. Le juge administratif se fonde enfin sur des éléments liés à la procédure pénale. L’existence, en parallèle de signalements à la cellule contre les VSS, de réquisitions judiciaires adressées à l’université suite au dépôt d’une plainte pour viols et agression sexuelle est de nature à emporter la conviction du juge sur la réalité des faits de violences rapportés par la victime100. Il en est de même quand les faits ont donné lieu à une condamnation à une peine d’emprisonnement101. En revanche, le juge se fonde sur l’absence de dépôt de plainte102, le classement sans suite ou la relaxe au motif que les faits n’ont pas pu être clairement établis103 pour dénier aux faits rapportés le caractère de vraisemblance et de gravité. Adopter une telle grille de lecture pour l’appréciation des violences sexistes et sexuelles interroge : c’est ignorer la spécificité de ces violences, commises la plupart du temps dans un cadre strictement privé et dans un contexte d’emprise, souvent non accompagnées de blessures objectivables médicalement et pour lesquelles est observé un faible recours à la plainte, un faible taux de poursuite et un faible taux de condamnations pénales.

  2. Exigence d’un retentissement des violences sexistes et sexuelles sur l’établissement pour fonder la légalité des mesures prises à l’encontre d’étudiants. Les violences sexistes ou sexuelles commises sur des étudiantes ne suffisent pas, par elles-mêmes, à fonder la légalité de mesures prises à l’encontre de leurs auteurs. Il faut établir qu’elles ont eu un retentissement sur la communauté universitaire ou le fonctionnement de l’établissement d’enseignement supérieur. L’interdiction d’accès aux locaux et services de l’université, prévue à l’article R. 712-8 du code de l'éducation, ne peut en effet être prononcée par le ou la président·e de l’université, qu’« en cas de désordre ou de menace de désordre ». Il s’agit donc d’une mesure de police qui doit être adaptée, nécessaire et proportionnée au regard des seules nécessités de l’ordre public et « ne peut être prise que si les autorités universitaires ne disposent pas des moyens de maintenir l'ordre dans l'établissement et si les restrictions qu'elle apporte aux libertés sont justifiées par des risques avérés de désordre »104. Par ailleurs, en matière disciplinaire, la notion de faute, telle que définie par l’article R. 811-11 du code de l’éducation, est éminemment liée à la notion d’ordre : elle est constituée par « tout fait de nature à porter atteinte à l’ordre, au bon fonctionnement ou à la réputation de l’université ». A cet égard, la circonstance que les violences ont été commises en dehors de l’établissement, dans un contexte privé ou sur les réseaux sociaux105 ne saurait être invoquée pour écarter la qualification de faute disciplinaire. Ainsi, saisi de recours dirigés tant contre des interdictions d’accès que contre des sanctions disciplinaires, le juge administratif s’assure de l’existence d’un retentissement sur l’établissement. Il peut s’agir de « l’émoi et l’inquiétude provoqués au sein de la communauté universitaire » par les agissements en cause106, de la nécessité de protéger la santé et la scolarité des étudiantes107 ou encore de l’impact sur le climat plus général régnant entre les étudiants108. Il est à noter cependant que le retentissement doit être directement lié aux faits commis par l’étudiant et non au mouvement de dénonciation publique intitulé « Vague Science Porc » et mené par des associations à la suite de l’abandon des premières poursuites disciplinaires engagées109.

  3. Suspension des sanctions d’exclusion. Les juges suspendent aisément l’exécution des sanctions les plus graves que sont les exclusions pour plusieurs années de l’établissement voire de tout établissement d’enseignement supérieur. Ils sont à cet égard sensibles à la circonstance que l’étudiant sanctionné est à un stade avancé de son cursus universitaire. La sanction d’exclusion le prive de toute possibilité de passer ses examens pour l’année en cours, de terminer les études entreprises ou de se réorienter110 ; elle a en outre, s’agissant d’un étudiant en médecine, pour effet de le priver des revenus tirés de son statut111. Ces effets sont de nature à créer un doute sérieux sur la légalité des sanctions et à fonder l’urgence à en suspendre l’exécution. Et face à cette urgence à suspendre, les juges dénient tout intérêt public à en maintenir l’exécution : à leurs yeux, la réintégration de l’étudiant ne compromet pas le bon fonctionnement du service public ou la sécurité de l’étudiante victime dès lors qu’au moment où le juge statue il n’y a plus de cours, que l’année suivante sera suivie par l’étudiant en grande partie à l’étranger ou en stage, qu’il n’y a plus actuellement de tension dans l’établissement et que l’étudiante n’y poursuit plus ses études112.

  4. L’analyse de ce contentieux administratif des violences sexistes et sexuelles dans l’enseignement supérieur et la recherche est un révélateur parmi d’autres des biais à l’œuvre dans l’appréciation et le traitement de telles violences : tendance à minorer les violences isolées et non corroborées par des éléments matériels, exigence d’un retentissement de ces violences sur l’institution, mansuétude à l’égard des auteurs. A. J.

C. Les politiques publiques

  1. Des dispositifs ont été mis en place pour lutter contre les violences intrafamiliales et conjugales, par la création de pôles spécialisés (1) et d’une aide universelle d’urgence (2). En outre, un nouveau cadre juridique a été élaboré pour garantir davantage les droits des femmes et des enfants en détention (3).

1. La création de pôles spécialisés dans la lutte contre les violences intrafamiliales

  1. Une proposition de loi déposée le 18 octobre 2022, relative à la création d'une juridiction spécialisée aux violences intrafamiliales, adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale le 1er décembre 2022, avait fait l’objet de critiques par la doctrine, à l’instar de celles des pénalistes Audrey Darsonville et Raphaëlle Parizot113, qui dénonçaient la définition même des violences intrafamiliales proposée par le texte, qui excluait les ancien·nes partenaires, pourtant souvent impliqué·es dans des situations de violence post-séparation.

  2. Surtout, les pénalistes soulignaient des problèmes relatifs à la dénomination et à la cohérence des termes utilisés à savoir « pôle » et « tribunal ». L’usage inconsistant de ces termes créait une confusion sur l’organisation juridictionnelle. En effet, un pôle implique une structure collégiale, tandis qu’un tribunal désigne une juridiction unitaire. Cela posait des questions sur la nature exacte de cette juridiction : s’agirait-il d’un regroupement de magistrats spécialisés (pôle) ou d’une juridiction distincte (tribunal) ?

  3. De plus, des questions d’impartialité se posaient quant au rôle des juges, notamment en raison de la difficulté de respecter la règle du non-cumul des fonctions dans des juridictions où le nombre de magistrats reste limité et où les risques de cumul des fonctions d'instruction et de jugement, en violation des règles constitutionnelles relatives à l'impartialité des juges, subsiste.

  4. La justification de la nécessité d’une juridiction spécialisée pour les violences intrafamiliales suscitait en effet des débats. Contrairement à d'autres infractions complexes, comme la criminalité organisée ou le terrorisme, les violences intrafamiliales relèvent du droit commun et ne nécessitent pas une expertise technique qui justifierait une juridiction distincte. La spécialisation pourrait aussi créer des complications administratives et risquerait d'éloigner la justice des victimes, en particulier si cette juridiction couvre un large territoire.

  5. Plutôt que de morceler davantage l'organisation judiciaire, Audrey Darsonville et Raphaëlle Parizot proposaient de renforcer les dispositifs déjà existants, tels que les audiences dédiées, les dispositifs comme le bracelet anti-rapprochement, ou encore des solutions prospectives comme le contrôle judiciaire avec placement probatoire. Ces mesures permettent déjà une prise en charge spécifique des violences intrafamiliales tout en restant dans le cadre de la justice de droit commun.

  6. Enfin, les pénalistes estimaient que la création d'une juridiction spécialisée pourrait être contre-productive. Une approche plus pragmatique consisterait à renforcer la formation des magistrat·es et à mieux articuler le contentieux pénal et civil, notamment en spécialisant des juges au sein des tribunaux déjà existants. Cela permettrait une gestion globale des situations de violences intrafamiliales tout en évitant de créer des barrières artificielles entre les différents aspects du contentieux familial.

  7. Il semble qu’une partie des critiques de la doctrine ait été entendues. En effet, en application d’un décret en date du 23 novembre 2023114, un pôle spécialisé a été mis en place depuis le 1er janvier 2024, au sein des tribunaux judiciaires et des cours d’appel, en remplacement de l'idée initiale de créer un « tribunal spécialisé » spécifique. Ces pôles ont pour mission de coordonner l'action des différent·es acteur·ices judiciaires et d’améliorer la prise en charge des victimes et la détection des violences intrafamiliales, avec des magistrat·es référent·es formé·es spécifiquement à ce type de contentieux. H. D. V.

2. La mise en place d’une aide universelle d’urgence

  1. Un décret du 24 novembre 2023115 relatif à l'aide universelle d'urgence pour les personnes victimes de violences conjugales précise les modalités d’application du dispositif instauré par la loi du 28 février 2023116. Ce dispositif est conçu pour apporter un soutien immédiat et concret aux personnes victimes de violences au sein du couple. Cette aide s'inscrit dans une politique nationale de lutte contre les violences conjugales, particulièrement face à l'augmentation des féminicides.

  2. L'aide universelle d'urgence répond à une urgence sociale : elle prend en compte la dépendance économique des victimes de violences conjugales, qui constitue un frein à quitter leurs agresseurs, en raison de difficultés matérielles et d'isolement financier. L'objectif fondamental de cette aide est donc de permettre aux victimes de gagner en autonomie pour envisager une séparation durable et sécurisée.

  3. Le dispositif cible spécifiquement les victimes de violences conjugales, définies par l'article 132-80 du Code pénal117. Les bénéficiaires sont les victimes dont les agresseurs sont ou ont été le conjoint, concubin ou partenaire de PACS.

  4. Pour accéder à cette aide, la violence doit être « attestée », soit par une ordonnance de protection, soit par le dépôt d'une plainte, soit par un signalement adressé au procureur ou à la procureure de la République. Ce critère d’attestation était critiqué par une partie de la doctrine pour son manque de rigueur probatoire118. Le décret d’application précise néanmoins que le dépôt de main courante ne sera pas suffisant pour déclencher la procédure d’aide.

  5. Le dispositif d'aide universelle se décline sous deux formes, en fonction de la situation sociale et économique de la victime : un prêt sans intérêt, dont le remboursement peut être assumé par l'agresseur dans certains cas ; une aide non remboursable pour les situations de grande précarité.

  6. Le choix entre ces deux formes repose sur l'évaluation de la situation financière de la personne, en prenant en compte la présence éventuelle d'enfants à charge. Le décret du 25 novembre 2023 détaille les seuils de ressources pour l’aide sous forme de don, en fonction de la composition familiale. Par exemple, une personne seule doit avoir des ressources inférieures à 1,5 fois le SMIC, soit 2 029,59 € nets par mois, pour bénéficier de cette forme d'aide, et les seuils augmentent en fonction du nombre d’enfants à charge. Ces seuils de ressources seront revalorisés chaque année au 1er avril en fonction du montant du SMIC au 1er janvier. Le décret précise le montant exact de l’aide en fonction du niveau de ressources et de la composition familiale.

  7. En cas de condamnation de l’agresseur, c’est à lui de rembourser le prêt, dans la limite de 5 000 €. Or cette disposition est également intégrée dans le dispositif pénal : elle peut être appliquée comme une peine complémentaire pour les infractions de violences conjugales, bien que son usage soit limité aux violences les plus graves.

  8. Dans les autres cas, le remboursement incombera à la victime. Ce remboursement est étalé sur 24 mois, avec possibilité de remises ou de réductions selon la situation économique de la bénéficiaire.

  9. Les victimes peuvent faire leur demande directement auprès de la Caisse d'allocations familiales (CAF) et de la Mutualité sociale agricole (MSA), en ligne ou sur place. Une demande peut également être déposée lors du dépôt de plainte. En effet, l'aide est administrée par la CAF et la MSA pour le compte de l’État. La rapidité du versement est une priorité : l’aide doit être fournie dans les trois jours ouvrés suivant la réception de la demande (ou cinq jours si la victime n'est pas allocataire).

  10. Le dispositif prévoit également des droits temporaires pour les bénéficiaires, comme l'accès au RSA pendant six mois, y compris des aides pour l’accompagnement social et professionnel, afin de faciliter leur insertion sur le marché de l'emploi et leur indépendance économique.

  11. La loi prévoit une évaluation quinquennale pour suivre l'efficacité et l'impact du dispositif. Cette révision, couplée à des programmes de financement pour le soutien des victimes, vise à garantir la durabilité du dispositif et à ajuster les ressources en fonction des besoins réels des victimes sur le terrain. Cette programmation pluriannuelle devra être actualisée tous les cinq ans pour mieux évaluer l’impact du dispositif et la cohérence des moyens alloués.

  12. L'aide universelle d'urgence constitue donc en théorie un progrès important dans la protection des victimes de violences conjugales en France, à condition que sa mise en place soit effective et coordonnée. H. D. V.

3. La fin d’une violence institutionnelle : un nouveau cadre pour les droits des femmes et des enfants en détention

  1. Grande avancée en matière de droit pénitentiaire, un décret du 16 novembre 2023119 vient mettre fin à la séparation systématique des enfants de dix-huit mois de leur mère incarcérée. Il s’accompagne d’une circulaire du 24 novembre 2023120 qui développe un véritable droit infantile en prison, où il existait un vide problématique121.

  2. Sur 77 pages contre 12 pour la précédente circulaire abrogée du 18 août 1999, ces nouveaux textes bien qu’infra-législatifs créent tout d’abord des nouveaux droits pour la mère et l’enfant. A titre d’exemple particulièrement significatif, l'âge des 18 mois auquel l’enfant devait auparavant automatiquement être séparé de sa mère incarcérée n'est plus un seuil rigide : il est devenu une étape dans le parcours des enfants en prison. Pour que l’enfant reste au-delà des 18 mois, la mère doit obtenir l'accord du·de la directeur.ice interregional·e des services pénitentiaires délivré après avis d'une commission pluridisciplinaire unique. Il ne s'agit donc plus d'un âge limite mais plutôt d'une étape pour statuer sur l’éventualité que l’enfant séjourne davantage auprès de sa mère incarcérée. Le décret est également venu modifier le code pénitentiaire pour mettre fin aux séparations systématiques des mères en cas d'hospitalisation en urgence de leur enfant122. Notons également la disparition des termes « père de l’enfant » qui figuraient encore dans l’ancienne circulaire au profit des termes « l’autre parent » qui ouvre la possibilité à toute personne ayant été reconnue titulaire de l’autorité parentale de faire prévaloir ses droits sur cet enfant résidant auprès de sa mère en prison.

  3. En outre, le décret du 16 novembre 2023 et la circulaire qui l’accompagne formalisent des pratiques déjà existantes dans certaines prisons mais qui manquaient de base légale. Ainsi, la nouvelle circulaire instaure des prérogatives particulières pour l’administration pénitentiaire quant à la fourniture d’un certain nombre de mobiliers, matériels de puériculture, denrées alimentaires, etc. Par exemple, ce texte détaille l’ensemble des biens qui doivent figurer dans une cellule nurserie comptant les jeux et jouets pour l’enfant. Auparavant, la circulaire du 18 août 1999 était très floue s’agissant du matériel qui devait être fourni par l’administration pénitentiaire si bien que les jouets ne figuraient nulle part. Si certains établissements pénitentiaires allouaient déjà un budget spécifique à l’achat de jouets, leur présence fluctuait dans d’autres unités « nurserie » au gré des dons ponctuels et rares d’associations diverses partenaires de l’établissement local.

  4. Enfin, la circulaire centralise en un seul document différents pans du droit de la santé publique, du droit administratif, du code civil ou encore du code de l’action sociale et des familles en rappelant les différents droits des enfants et de leurs parents ainsi que les obligations incombant à l’administration. Ainsi, les modalités d’exercice de l’autorité parentale, les attributions de la protection maternelle et infantile ou encore la responsabilité de l’administration pénitentiaire en cas de dommage causé à l’enfant sont clairement énoncés dans ce texte. Empreinte d’une volonté déclarative et pédagogique, ce texte a vocation à être lu par les personnels pénitentiaires et les personnes incarcérées elles-mêmes si bien qu’un rappel des droits, et particulièrement de la capacité pour ces dernières à exercer leur autorité parentale sur leurs enfants comme tout autre parent, constitue un geste fort de la part des rédacteur·ices de ces normes. Les personnes incarcérées n’ont souvent pas accès à d’autres textes que ceux à leur disposition dans les bibliothèques des établissements pénitentiaires si bien que la lecture de ce texte peut permettre d’informer les personnes concernées de leurs droits et de la manière dont elles peuvent les faire respecter. Pour reprendre la belle formule du professeur Eric Péchillon qui résumait la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 lors de son entrée en vigueur exactement 14 ans auparavant : « Enfin pourrait-on s'exclamer ; seulement, serait-on tenté de dire »123. Si le décret du 16 novembre et la circulaire du 24 novembre 2023 sont loin d’être parfaits et ne sont qu’une première étape dans la constitutionnalisation d’un droit infantile en prison, ils représentent cependant une avancée majeure dans la défense des libertés fondamentales des enfants et des femmes incarcérées. A. A.

D. Les débats législatifs

  1. De récents débats législatifs autour des propositions de loi visant, d’une part, la réparation des préjudices subis par les personnes condamnées pour homosexualité entre 1942 et 1982 (1) et, d’autre part, l’encadrement des pratiques médicales pour les mineur·es trans (2), suscitent des controverses sur la reconnaissance des droits des minorités de genre et la stigmatisation de la transidentité.

1. Une proposition de loi de réparation des violences institutionnelles commises à l’encontre des personnes condamnées pour homosexualité

  1. Une proposition de loi portant reconnaissance par la Nation et réparation des préjudices subis par les personnes condamnées pour homosexualité entre 1942 et 1982, déposée par Hussein Bourgi, sénateur socialiste d’Occitanie, a été adoptée avec modifications à l’unanimité par l'Assemblée nationale en première lecture le 6 mars 2024. Cette loi mémorielle vise à reconnaître la responsabilité de la France dans les persécutions subies par les minorités de sexe et de genre entre 1942 et 1982, découlant de l'application des dispositions - depuis abrogées - des articles 330 et 331 du Code pénal. Outre l’aspect symbolique fondamental de cette loi dans la reconnaissance du rôle majeur que l’Etat a joué dans les discriminations subies par les personnes notamment gays, lesbiennes, trans, bisexuelles, non-binaires ou queer en raison de leur orientation sexuelle ou identité de genre, avérée ou présumée, ce texte instaure une indemnisation matérielle de 10 000 euros pour chaque personne condamnée au titre de ces articles du code pénal, 150 euros supplémentaires par jour de privation de liberté ainsi que le remboursement total des amendes dont iels se sont acquitté·es en application de leur condamnation. A ce jour, selon les estimations provisoires issues des travaux de Jérémie Gauthier et Régis Schlagdenhauffen, près de 60 000 personnes pourraient avoir été condamnées pour des faits dits « d’homosexualité » au titre de la loi du 6 août 1942 (environ 10 000) ou pour « outrage à la pudeur homosexuelle » entre 1942 et 1982 (environ 50 000)124. En revanche, si le texte d’origine prévoyait également la création d’un délit pénal de négationnisme des faits de déportation des minorités de sexe et de genre opérés par la France durant la Seconde guerre mondiale, nous ne pouvons que déplorer qu’il ait été supprimé entre les différentes navettes parlementaires si bien qu’il ne figure à présent plus dans le texte transmis pour deuxième lecture au Sénat le 7 avril 2024. Espérons donc que les juges interprètent suffisamment largement l’article 24 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, qui prévoit une condamnation de cinq ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende pour toute personne ayant fait l'apologie des crimes de guerre ou des crimes contre l'humanité, pour inclure dans ces derniers les déportations de personnes en raison de leur identité de genre ou de leur orientation sexuelle. A. A.

2. Une proposition de loi constitutive de violence institutionnelle stigmatisante de la transidentité des mineur·es

  1. La proposition de loi visant à encadrer les pratiques médicales mises en œuvre dans la prise en charge des mineurs en questionnement de genre du groupe Les Républicains125 prend racine dans une idéologie politique selon laquelle l’ensemble des mineur·es français·es seraient actuellement en péril en raison d’une prétendue mode qui consisterait à transitionner – refuser l’identité de genre assignée à la naissance notamment au moyen de modifications hormonales et d’opérations chirurgicales – d’une manière facile et rapide au gré des humeurs adolescentes126. A l’heure où les personnes trans subissent une recrudescence d’actes de haine et de violences, cette loi participe à un triple objectif ouvertement transphobe : elle met en lumière de manière fallacieuse comme un problème de société le cas en réalité très circonscrit de quelques centaines de mineur·es déjà très largement discriminé·es dans leur famille ou leur l’école127 ; elle vise à interdire la prise de traitements hormonaux et les opérations d’affirmation sexuelle pour toutes les personnes de moins de dix-huit ans (article déjà supprimé et remplacé par le Sénat en première lecture en raison des répercussions directes graves que cette interdiction pourrait avoir sur les mineur·es concerné·es) ; elle prévoit enfin un renforcement de l’accompagnement pédopsychiatrique chez les mineur·es. Si nous pourrions nous réjouir du souhait de renforcer les soins pédopsychiatriques administré·es à tous·tes les mineur·es en France, l’insertion de cet article au sein de la proposition de loi renvoie inévitablement la transidentité à une forme de pathologisation stigmatisante qui n’est pas sans rappeler le temps fort récent où le « transsexualisme » figurait parmi la liste des troubles mentaux prévus par l’OMS128.

  2. Afin de combattre la peur de l’autre et les fantasmes sur la transidentité, reprenons quelques données scientifiques et médicales : il faut compter en moyenne un délai de deux à cinq ans pour obtenir une chirurgie médicale d’assignation sexuelle si bien que ces chirurgies sont loin d’être répandues et faciles d’accès129. La mauvaise répartition géographique des services et les délais d’attente très longs constituent d’ailleurs précisément l’un des problèmes signalés par le Rapport relatif à la santé et aux parcours de soins des personnes trans remis au gouvernement en janvier 2022130. En 2022, par exemple, il existait 294 mineur·es en France (sur les 3 592 300 enfants de moins de 18 ans répartis sur tout le territoire en 2020131) qui bénéficiaient de l’affection longue durée qui permet d’obtenir une prise en charge à 100 % des traitements hormonaux et soins chirurgicaux en vue d’effectuer une transition de genre132. En outre, les quelques mineur·es qui effectuent des transitions de genre passent par des souffrances physiques et psychiques extrêmes souvent accompagnées de rejet, d’abandon et de discrimination dans la famille, à l’école et dans les lieux de socialisation133. Aussi, évoquer le parcours de transition d’un·e adolescent·e comme la réponse à un « malaise propre à cette période de la vie », pour reprendre l’exposé des motifs de cette proposition de loi, constitue, plus encore que de l’ignorance, une affirmation véritablement dégradante et disqualifiante de ce vécu. Enfin, et il convient de le souligner, cette proposition de loi préoccupante a fait l’objet d’un avis de la Défenseure des droits le 6 mai 2024 dans lequel il est précisé que son adoption constituerait une atteinte grave aux libertés fondamentales et à l’intérêt supérieur des mineur·es concerné·es134. Le slogan « Transrights are human rights » qui rappelle que les droits des personnes trans sont des droits fondamentaux n’aura donc jamais été autant d’actualité. A. A

Ariane Amado, chargée de recherche CNRS, Université de Lille, Centre d’Histoire Judiciaire (CHJ)

Tiffany Coisnard, juriste chargée de mission à l’association européenne contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT)

Mathilde Cornette, juriste chargée de mission à l’association européenne contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT)

Miléna Dostanic, avocate, doctorante, Université Paris Nanterre, Centre de droit international de Nanterre (CEDIN)

Hélène Duffuler-Vialle, maîtresse de conférences, Université d’Artois, Centre Droit Ethique et Procédures (CDEP).

Anne Jennequin, maîtresse de conférences, Université d’Artois, Centre Droit Ethique et Procédures (CDEP).

Catherine Le Magueresse, doctoresse, Université Paris 1-Panthéon Sorbonne, Institut des Sciences Juridique et Philosophique de la Sorbonne (ISJPS)

Elodie Tuaillon-Hibon, avocate, doctorante, Université Paris 1-Panthéon Sorbonne, Institut des Sciences Juridique et Philosophique de la Sorbonne (ISJPS)

Références


  1. https://rm.coe.int/grevio-inf-2019-16/168098c619.↩︎

  2. Groupe d’experts sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, Rapport soumis par la France donnant effet aux dispositions de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique conformément à l’article 68, paragraphe 1 (Premier cycle d’évaluation thématique), GREVIO/Inf(2024)3, 1er juillet 2024, https://rm.coe.int/grevio-inf2024-3-state-report-france-first-thematic-evaluation/1680b099bd.↩︎

  3. Rapport préc., p. 25.↩︎

  4. Rapport préc., p. 12.↩︎

  5. Rapport préc., p. 20.↩︎

  6. Rapport préc., pp. 18-19.↩︎

  7. Article 32.↩︎

  8. Article 46.↩︎

  9. Cour EDH, Plén., 18 janvier 1978, Irlande c. Royaume-Uni, req. n° 631071, § 154 ; Cour EDH, 7 janvier 2010, Rantsev c. Chypre et Russie, req. n° 25965/04, § 197.↩︎

  10. Cour EDH, 9 juin 2009, Opuz c. Turquie, req. n° 33401/02, § 163.↩︎

  11. Cass. ass. plén., 15 avril 2011, n° 10-30.313.↩︎

  12. Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, 7 avril 2011, Istanbul, entrée en vigueur le 1er août 2014, STCE n° 210.↩︎

  13. Convention du Conseil de l'Europe sur la protection des enfants contre l'exploitation et les abus sexuels, 25 octobre 2007, Lanzarote, entrée en vigueur le 1er juillet 2010, STCE n° 201.↩︎

  14. Rapport explicatif de la Convention du Conseil de l'Europe sur la protection des enfants contre l'exploitation et les abus sexuels, 25 octobre 2007, STCE n° 201.↩︎

  15. Cour EDH, 12 décembre 2023, Vučković c. Croatie, req. n° 15798/20, § 68.↩︎

  16. Ibid., §65.↩︎

  17. CDH, 15 juillet 2021, Devi Maya Nepal c. Népal, communication n° 2615/2015, CCPR/C/132/D/2615/2015, § 9.↩︎

  18. Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, préc., art. 45.↩︎

  19. Cour EDH, 12 décembre 2023, Vučković c. Croatie, préc., § 66.↩︎

  20. Cour EDH, 20 février 2024, M.G. c. Lituanie, req. n° 6406/21, §§ 78-79.↩︎

  21. Ibid., § 128.↩︎

  22. CDH, 15 juillet 2021, Devi Maya Nepal c. Népal, préc. § 7.4.↩︎

  23. CDH, « Observations finales sur le troisième rapport périodique de la République centrafricaine », 27 mars 2020, CCPR/C/CAF/CO/3, § 14.↩︎

  24. CDH, 15 juillet 2021, Devi Maya Nepal c. Népal, préc.↩︎

  25. Cour EDH, 4 décembre 2003, M.C. c. Bulgarie, req. n° 39272/98, § 150.↩︎

  26. Cour EDH, 20 février 2024, M.G. c. Lituanie, préc., § 102.↩︎

  27. Cour EDH, 13 février 2024, X c. Grèce, req. n° 38588/21, § 90.↩︎

  28. Ibid., § 69.↩︎

  29. CDH, 15 juillet 2021, Devi Maya Nepal c. Népal, préc. ; CDH, Fulmati Nyaya c. Népal, 18 mars 2019, communication n° 2556/2015, CCPR/C/125/D/2556/2015, § 9.↩︎

  30. Com. EDEF, 9 juillet 2020, S. H. c. Bosnie-Herzégovine, communication n° 116/2017, CEDAW/C/76/D/116/2017, § 8.4.↩︎

  31. Préc.↩︎

  32. CIADH, 20 novembre 2014, Espinoza Gonzáles c. Pérou, Série C n° 289, §239 ; CIADH, 27 novembre 2013, J. c. Pérou, Série C n° 275, § 350.↩︎

  33. Com. ADHP, 12 octobre 2013, Egyptian Initiative for Personal Rights (EIPR) et Interights c. la République arabe d’Égypte, communication 323/06, § 163.↩︎

  34. Ibid., § 89.↩︎

  35. Cour EDH, 20 juin 2024, Z c. République tchèque, req. n° 37782/21, § 63.↩︎

  36. Ibid., § 57.↩︎

  37. Ibid., § 62.↩︎

  38. Com. EDEF, 21 février 2014, R. P. B. c. Philippines, Communication n° 34/2011, CEDAW/C/57/DR/34/2011, § 8.10.↩︎

  39. Pour des faits sur mineurs par exemple : Cour EDH, 28 mai 2020, Z c. Bulgarie, n° 39257/17, §§ 68-70 et 74.↩︎

  40. Cour EDH, 24 mai 2016, I. C. c. Roumanie, n° 36934/08, § 56.↩︎

  41. Cour EDH, 18 octobre 2016, G. U. c. Turquie, n° 16143/10, § 76.↩︎

  42. L. c. France, req. n° 46949/21 ; H. B. c. France, req. n° 24989/22 ; E.A. et Association AVFT c. France ; C. A. c. France, req n° 39690/22, ; M. L c. France, req. n° 39759/22 ; Emily Spanton c. France, req. n° 41585/22 ; G. B. c. France, req. n° 8229/23.↩︎

  43. Cour EDH, 4 décembre 2003, M.C. c. Bulgarie, req. n° 39272/98, § 153.↩︎

  44. Directive (UE) 2024/1385 du Parlement européen et du Conseil du 14 mai 2024 sur la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique ; Pascal Beauvais, « L'Union européenne, nouvel acteur de la lutte pénale contre les violences sexistes », RTDEur. 2024, p. 169.↩︎

  45. « Le terrorisme, la traite des êtres humains et l'exploitation sexuelle des femmes et des enfants, le trafic illicite de drogues, le trafic illicite d'armes, le blanchiment d'argent, la corruption, la contrefaçon de moyens de paiement, la criminalité informatique et la criminalité organisée ».↩︎

  46. V. notamment la lettre ouverte du Lobby Européen des Femmes, « From reputed professors, Jurists, Lawyers in the EUon the Legal basis of the Directive on combating violence against women and domestic violence and the article on the offense of rape », 9 octobre 2023 et Frances Fitzgerald MEP & Evin Incir MEP (on behalf of European Parliament co-rapporteurs), « Legal basis for the inclusion of the offence of rape in the Directive on Combating Violence against Women and Domestic Violence », 11 décembre 2023.↩︎

  47. Directive 2011/93/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 relative à la lutte contre les abus sexuels et l’exploitation sexuelle des enfants, ainsi que la pédopornographie et remplaçant la décision-cadre 2004/68/JAI du Conseil.↩︎

  48. Groupe d’experts sur la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique, Rapport d'évaluation de référence sur la France, 11 nov. 2019.↩︎

  49. Catherine Le Magueresse, Les pièges du consentement. Pour une redéfinition pénale du consentement sexuel, éditions IXe, 2021.↩︎

  50. Propos d’agresseur rapportés par une victime.↩︎

  51. Muriel Fabre-Magnan, L’institution de la liberté, PUF, 2018.↩︎

  52. Violence à l’égard des femmes : une enquête à l’échelle de l’UE. Résultats en bref, Luxembourg, FRA, 2014.↩︎

  53. C.pén., art. 222-23-1. Trois autres incriminations relatives au délit d’agression sexuelle et aux violences liées à l’inceste sont également créées.↩︎

  54. Cass. crim., 24 mai 2023, n° 23-81.485.↩︎

  55. Cons. const., 21 juillet 2023, Décision n° 2023-1058 QPC.↩︎

  56. Philippe Bonfils, « Constitutionnalité de l'incrimination de viol sur mineur de 15 ans », Dr. fam., octobre 2023, comm. 150 ; Philippe Conte, « Peut-on encore prendre le législateur au mot ?- Supplique pour le droit pénal », Droit pénal, novembre 2023, étude 21 ; Stéphane Detraz, « Pourquoi se plaindre d’un viol sans pénétration ni agression ? », Gazette du Palais, 28 novembre 2023, p. 42 ; Emmanuel Dreyer, « Punir un viol sans avoir besoin d’établir qu'il y a eu agression n’est pas contraire à la Constitution », D. 2023, p. 1624 ; Carole Hardouin-Le Goff, « Le Conseil constitutionnel affirme la constitutionnalité du viol spécial sur mineur de 15 ans », La Semaine juridique. Édition générale, 2 octobre 2023, p. 1693 ; Julie Leonard, « Constitutionnalité de l'article relatif au viol sur mineur de quinze ans : oui, mais... », Revue française de droit constitutionnel, juin 2024, p. 528 ; Yves Mayaud, « Du viol commis sur un mineur par un majeur. Constitutionnalité de l'article 222-23-1 du code pénal, épicentre d'une articulation cohérente », Revue de science criminelle et de droit pénal comparé, octobre-décembre 2023, p. 785 ; Delphine Thomas-Taillandier, « Infractions sexuelles sur mineur : examen de constitutionnalité des dispositions protégeant spécifiquement les mineurs de moins de 15 ans », La Gazette du Palais, 28 novembre 2023, p. 11 ; Charles de Waël, « L'absence constitutionnelle du défaut de consentement dans la caractérisation du viol sur mineur de quinze ans », AJ Pénal, 2023, p. 459.↩︎

  57. Cons. const., 21 juillet 2023, Décision n° 2023-1058 QPC.↩︎

  58. Cour EDH, 30 août 2011, G. c. Royaume-Uni, req. n° 37334/08.↩︎

  59. V. supra.↩︎

  60. Cons. const., 21 juillet 2023, Décision n° 2023-1058 QPC, préc.↩︎

  61. Cité in Catherine Le Magueresse, Les pièges du consentement. Pour une redéfinition du consentement sexueI, édition iXe, 2021, p. 184.↩︎

  62. § 22.↩︎

  63. § 25↩︎

  64. § 26.↩︎

  65. Notamment celui de Sarah (nom d’emprunt). Un article de l’avocate de la victime, Me Carine Durrieu Diebolt, intitulé « Atteinte sexuelle : et si la Justice disait que votre enfant a consenti à des rapports sexuels avec un adulte ? », paru sur le site Village justice le 29 août 2017 suivi de celui de Michaël Hajdenberg, le 26 septembre 2017, sur Médiapart ont contribué à cette prise de conscience.↩︎

  66. Cf. notamment, AVFT, « Harcèlement sexuel : une réforme restrictive qui n'est pas sans danger », Semaine Sociale Lamy, n° 599, 11 mai 1992.↩︎

  67. Sur cette évolution des textes, v. Catherine Le Magueresse, « La reconnaissance législative et jurisprudentielle du harcèlement sexuel, une victoire féministe ? (1992 - 2012) », Cahiers du genre, L’engendrement du droit, Éditions l’Harmattan, n° 57/2014.↩︎

  68. Cons. const., 4 mai 2012, Décision n° 2012-240 QPC.↩︎

  69. Loi n° 2012-954 du 6 août 2012 relative au harcèlement sexuel.↩︎

  70. La loi est entrée en vigueur le 31 mars 2022.↩︎

  71. Barbara Fredrickson et Tomi-Ann Roberts, « Objectification Theory », Psychology of Women Quarterly, 1997, 21(2), p. 173-206.↩︎

  72. CA Orléans, Chambre sociale, 7 février 2017, n° 15/02566.↩︎

  73. Procédure dans laquelle l’AVFT était partie intervenante volontaire.↩︎

  74. DDD, Décision MLD-2016-212 du 29 juillet 2016 relative à des agissements de harcèlement sexuel au sein d’une rédaction de journal.↩︎

  75. Versailles, Ch. de l’instruction (10e), 28 juin 2022, n° 304.↩︎

  76. Cass. crim., 21 juin 2023, n° 23-80.106, publié au Bulletin ; RSC 2023. 589, obs. Pierre-Jérôme Delage ; D. 2024, p. 891, obs. Catherine Le Magueresse ; RSC 2023. 791, note Yves Mayaud ; Laura Pignatel, « Affaire Le Scouarnec : les actes du chirurgien pédophile, pour la plupart, non prescrits », D. Étudiant, 20 septembre 2023 (en ligne).↩︎

  77. § 33 à 35 de l’arrêt.↩︎

  78. Cf. Hélène Devynck, Impunité, éd. Le Seuil, 2022.↩︎

  79. Cass. crim., 18 janvier 2006, n° 05-85.858 ; JCP G, n° 29, 19 Juillet 2006, I 159.↩︎

  80. Lorraine de Foucher, Jérôme Lefilliâtre, « Affaire PPDA : en 2005, la police judiciaire enquêtait déjà sur le présentateur pour viol, et se rendait à TF1 », Le Monde, 21 octobre 2024.↩︎

  81. Observatoire national des discriminations et de l’égalité dans le supérieur (ONDES), Rapport d’étude, n° 23-03, octobre 2023, pp. 12-13.↩︎

  82. Alexis Zarca, « La répression disciplinaire du harcèlement sexuel à l’université », La Revue des droits de l’homme [En ligne], 12 | 2017.↩︎

  83. A propos d’une suspension à titre conservatoire CE, 21 mars 2023, n° 461571.↩︎

  84. CE, 27 mars 2024, Etablissement Sorbonne Université, n° 470787, AJDA 2024, p. 929, note Olivia Bui-Xuan.↩︎

  85. CE, 26 mai 2023, n° 458850.↩︎

  86. CE, 28 avril 2023, n° 458275.↩︎

  87. CE, 21 mars 2023, n° 461571 ; v. également CE 18 juillet 2018, n° 418844.↩︎

  88. CE 18 juillet 2018, n° 418844, préc.↩︎

  89. CE, 21 mars 2023, n° 461571 et CE, 26 mai 2023, n° 458850.↩︎

  90. Emilie Marcovici, « Droit disciplinaire des enseignants-chercheurs : le difficile équilibre entre l’indépendance des enseignants-chercheurs et la protection des valeurs de l’université », Actualité juridique Fonctions publiques, 2024, n° 6, p. 330.↩︎

  91. CE, 10 mars 2023, n° 456602, Etablissement Sorbonne Université, JCP A, 2023, 2172, note Céline Leborgne-Ingelaere.↩︎

  92. CE, 27 mars 2024, n° 470787, préc.↩︎

  93. TA Paris, 6 janvier 2023, n° 2200612.↩︎

  94. TA Toulouse, 22 février 2024, n° 2200630.↩︎

  95. TA Versailles, 20 avril 2023, n° 2208241 ; TA Lyon, 17 juillet 2024, n° 2110145.↩︎

  96. TA Bordeaux, 14 décembre 2023, n° 2201063.↩︎

  97. TA Orléans, 14 juin 2024, n° 2200682.↩︎

  98. TA Bordeaux, 14 décembre 2023, n° 2200384.↩︎

  99. TA Toulouse, 5 mai 2023, n° 2302333.↩︎

  100. A propos d’une interdiction d’accès aux locaux de l’université TA Toulouse, 21 novembre 2023, n° 2306600.↩︎

  101. A propos d’une sanction disciplinaire TA Caen, 21 avril 2023, n° 2300873.↩︎

  102. TA Bordeaux, 14 décembre 2023, n° 2201063 ; contra TA Orléans, 14 juin 2024, n° 2200682.↩︎

  103. TA Toulouse, 5 mai 2023, n° 2302333 et TA Bordeaux, 14 décembre 2023, n° 2200384.↩︎

  104. TA Versailles, 20 avril 2023, n° 2208241.↩︎

  105. TA Poitiers, 31 janvier 2023, n° 2230011.↩︎

  106. TA Versailles, 20 avril 2023, n° 2208241.↩︎

  107. TA Toulouse, 21 novembre 2023, n° 2306600 ; TA Lyon, 17 juillet 2024, n° 2110145.↩︎

  108. TA Lyon, 17 juillet 2024, n° 2110145.↩︎

  109. TA Toulouse, 5 mai 2023, n° 2302333 : à propos de faits de violences sexuelles dénoncés par une étudiante, le juge note que « rien ne permet d’établir que [le requérant] aurait contribué à “publiciser” sa relation avec l’étudiante dont s’agit » (sic).↩︎

  110. TA Poitiers, 31 janvier 2023, n° 22300116 pour un étudiant pourtant pénalement condamné à une peine de 10 mois d’emprisonnement assorti d’un sursis probatoire de deux ans pour des faits d'atteinte à l'intimité de la vie privée par fixation, enregistrement ou transmission de l'image d'une personne présentant un caractère sexuel commis sur neuf étudiantes au total ; v. aussi TA Nantes, 28 juin 2024, n° 2408537.↩︎

  111. TA Montpellier, 12 janvier 2024, n° 2307686 pour un étudiant pourtant placé en garde à vue puis mis en examen pour viol et agression sexuelle avec assignation à résidence sous surveillance électronique.↩︎

  112. TA Toulouse, 5 mai 2023, n° 2302333 qui enjoint à l’IEP de Toulouse de permettre à l’étudiant de passer ses examens de fin d’année et de poursuivre sa scolarité au sein de l’établissement.↩︎

  113. V. Audrey Darsonville et Raphaëlle Parizot, « La création d'une juridiction spécialisée en matière de violences intrafamiliales : une mauvaise solution », AJ Pénal, 2023, p. 70.↩︎

  114. Décret n° 2023-1077 du 23 novembre 2023 instituant des pôles spécialisés en matière de violences intrafamiliales au sein des tribunaux judiciaires et des cours d'appel.↩︎

  115. Décret n° 23-1088 du 24 novembre 2023 relatif à l’aide universelle d'urgence pour les personnes victimes de violences conjugales.↩︎

  116. Loi n° 2023-140 du 28 février 2023 créant une aide universelle d'urgence pour les victimes de violences conjugales.↩︎

  117. Article 132-80 du Code pénal.↩︎

  118. Laurence Mauger-Vielpeau, « L’aide universelle d’urgence pour les victimes de violences conjugales », Dr. fam, avril 2023, ét. 12.↩︎

  119. Décret n° 2023-1044 du 16 novembre 2023 modifiant la partie règlementaire du code pénitentiaire (décrets simples) et relatif aux conditions de détention des mères détenues vivant avec leurs jeunes enfants en détention.↩︎

  120. Circulaire relative à la prise en charge des enfants vivant avec leur mère en détention du 24 novembre 2023, NOR JUSK2315651C.↩︎

  121. Ariane Amado, L’enfant en détention en France et en Angleterre- Contribution à l’élaboration d’un cadre juridique pour l’enfant accompagnant sa mère en prison, Paris, Mare & Martin, 2020.↩︎

  122. Ariane Amado, « Vers la fin de la séparation systématique des mères et des enfants en prison lors de leur prise en charge médicale en urgence ? », AJ Pénal, 2023, p. 524.↩︎

  123. Eric Péchillon, « Regard d'un administrativiste sur la loi du 24 novembre 2009 », AJ Pénal, 2009, p. 473.↩︎

  124. Régis Schlagdenhauffen, « La Grande Liberté des homosexuels ? Retour sur l’abrogation des lois réprimant l’homosexualité en Allemagne et en France », Grief, 2022/2, n° 9/2, p. 71-81 ; Jérémie Gauthier, Régis Schlagdenhauffen, « Les sexualités “contre-nature” face à la justice pénale. Une analyse des condamnations pour “homosexualité” en France (1945-1982) », Déviance et Société, 2019/3 Vol. 43, p. 421-459 ; Régis Schlagdenhauffen, « La place du genre dans les revendications mémorielles gays et lesbiennes », Sociologies pratiques, 2014/2, n° 29, p. 51-61.↩︎

  125. Cette proposition de loi n° 2504, enregistrée à l’Assemblée nationale le 11 avril 2024, a été adoptée avec modifications en première lecture par le Sénat le 28 mai 2024.↩︎

  126. Cette proposition de loi coïncide avec la sortie de l’ouvrage de Dora Moutot et Marguerite Stern, Transmania : Enquête sur les dérives de l'idéologie transgenre, aux éditions Magnus, le même jour soit le 11 avril 2024. Notons d’ailleurs que les affiches publicitaires du livre ont été interdites par la Mairie de Paris en raison de leur caractère transphobe : « Des affiches publicitaires pour un livre transphobe retirées des rues de Paris », https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/04/17/des-affiches-publicitaires-pour-un-livre-transphobe-retirees-des-rues-de-paris_6228403_3224.html.↩︎

  127. Arnaud Alessandrin, Karine Espineira, Sociologie de la transphobie, Maison des sciences de l’homme d’Aquitaine, 2015 ; Arnaud Alessandrin, « “Mineurs trans” : de l’inconvénient de ne pas être pris en compte par les politiques publiques », Agora débats/jeunesses, n° 73, 2, 2016, pp. 7-20 ; Arnaud Alessandrin, Johanna Dagorn « Le harcèlement scolaire des minorités LGBTIQ✩ », La Revue de Santé Scolaire et Universitaire, 2022/73.↩︎

  128. Le retrait du « transsexualisme » de la liste de l’Organisation Mondiale de la Santé a été présenté en mai 2019 à Genève par le document CIM 11 et est entré en vigueur dans l’ensemble des Etats membres au 1er janvier 2022. Rappelons que la France avait déjà retiré la transidentité de la liste des affections psychiatriques en 2011.↩︎

  129. Hervé Picard, Simon Jutant, Rapport relatif à la santé et aux parcours de soins des personnes trans, rapport remis à Olivier Véran ministre des affaires sociales et de la santé, janvier 2022, p. 6.↩︎

  130. Ibid, p. 5.↩︎

  131. Statistiques de l’INSEE pour l’année 2020, https://www.insee.fr/fr/statistiques/2381506.↩︎

  132. Hervé Picard, Simon Jutant, op. cit., p. 6.↩︎

  133. Arnaud Alessandrin, op. cit., 2016, pp.7-20.↩︎

  134. Défenseure des droits, Avis n° 24-05 du 6 mai 2024 relatif à la proposition de loi n° 435 visant à encadrer les pratiques médicales mises en œuvre dans la prise en charge des mineurs en questionnement de genre, déposée au Sénat le 19 mars 2024.↩︎