(juin 2023 – juillet 2024)
Lisa Carayon, Julie Mattiussi, Marie Mesnil, Marc Pichard, Delphine Porcheron, Maïté Saulier
Collectivement dans les rapports familiaux ou individuellement au plan de l’identité personnelle, les questions de genre traversent les vies des personnes et appellent, au plan juridique, des réponses en droit des personnes et de la famille. En témoignent les nombreuses actualités de l’année 2023-2024 susceptibles de faire l’objet d’analyses critiques, qu’il s’agisse de la reconnaissance, par le droit, de la diversité des formes de vies familiales (I), du contentieux lié à la recherche des origines ou à la filiation (II) ou encore de l’état civil (III).
Reconnaître une forme juridique de conjugalité accessible aux couples composés de deux personnes de même sexe s’impose aux États membres du Conseil de l’Europe depuis 20151. Pourtant, plusieurs États, ainsi que la Russie2, continuent de l’ignorer : l’Ukraine3, la Roumanie4, la Bulgarie, la Pologne et la Russie donc ont toutes été condamnées en 2023 pour violation de l’art. 8, parfois combiné à l’art. 14 Conv. EDH.
En resserrant l’analyse sur les décisions rendues contre la Bulgarie et la Pologne5, intégrant seules la période ici commentée, les exigences de la Cour sont claires : les États n’ont pas l’obligation d’ouvrir le mariage aux couples d’hommes ou de femmes, mais doivent en revanche reconnaître juridiquement ces unions. Le choix des moyens est laissé aux autorités, mais le recours possible aux techniques de droit commun – contrat de société, convention de cohabitation ou indivision – est heureusement jugé insuffisant. La « reconnaissance officielle » est imposée afin de déployer, à l’image de bon nombre d’institutions familiales, deux types d’effets. Les uns sont d’ordre individuel : résoudre les « difficultés inhérentes à la vie de couple » ou « répondre aux besoins fondamentaux des personnes concernées »6 ; les autres sont d’ordre collectif, voire politique : conférer à ces couples « une existence ainsi qu’une légitimité vis-à-vis du monde extérieur »7 et ainsi utiliser l’institutionnalisation comme vecteur de changement social.
On s’inquiétera de voir croître, dans la défense des États mis en cause, l’utilisation d’une certaine catégorie d’arguments visant à empêcher toute évolution et à conserver ce que serait la famille « traditionnelle »8 : la prévalence de la souveraineté nationale, la défense d’une certaine « culture »9, le recours à l’argument d’une opinion publique défavorable aux relations homosexuelles mesurée par sondages10, tout comme la proposition d’une lecture originaliste de la Convention européenne en sont autant d’exemples, fort heureusement repoussés par la Cour. M. S.
Les familles monoparentales occupent une double place dans les discours et textes des derniers mois. Suivant une argumentation ancienne et contestable selon laquelle restaurer l’autorité dans la famille permettrait de restaurer l’ordre dans la société, plusieurs propositions ont sous-entendu, au lendemain des épisodes de violences de juin 2023, le laxisme des mères, très majoritairement à la tête des familles monoparentales11.
Ce sont ainsi les fonctions éducatives de ces familles qui ont été mises en causes à plusieurs reprises12, tant par le Président de la République qui s’est prononcé en faveur d’un critiquable « devoir de visite des pères »13, que par Aurore Bergé, alors ministre des solidarités et des familles, qui avait pu envisager, dans une approche répressive critiquée14, la mise en place de travaux d’intérêts généraux pour les parents défaillants ou une amende pour les parents absents aux audiences de leurs enfants, dans le cadre d’une commission parentalité qui n’aura finalement pas vu le jour15.
Mais ces familles ont également été appréhendées sous l’angle d’une certaine solidarité. Rappelant leur plus grande précarité et le cumul des inégalités rencontrées, particulièrement lorsqu’une femme est à leur tête16, des parlementaires ont formulé des propositions occultant souvent les origines véritables et nombreuses des difficultés. Une proposition de loi « visant à réduire la précarité sociale et monétaire des familles monoparentales », déposée à l’Assemblée nationale le 16 avril 202417 invitait à trois modifications très ponctuelles, mais intéressantes du droit en vigueur : un allongement du congé maternité à 26 semaines pour les femmes « célibataires, divorcées ou séparées »18 au moment de l’accouchement dès l’arrivée du premier enfant ; le versement d’allocations familiales dès le premier enfant « lorsque le parent en supporte la charge à titre exclusif ou principal »19 et l’exclusion de la pension alimentaire des ressources prises en considération pour le calcul de l’aide personnalisée au logement. Un rapport du Sénat de mars 202420 prévoyait quant à lui une liste de dix recommandations pour « renforcer les mécanismes de solidarité publique et privée pour augmenter le niveau de vie des familles monoparentales » et « reconnaître les familles monoparentales comme un modèle familial parmi d’autres ». Parmi ces propositions, citons – mesure emblématique du rapport –, la création d’une « carte “familles monoparentales” », facultative et renouvelable annuellement permettant d’obtenir des avantages de la part des employeurs, des collectivités ou de certains services publics souhaitant en accorder. Le décalage entre cette proposition et les difficultés quotidiennes des familles est immense : une politique publique efficace ne saurait reposer sur une incitation aussi faible à l’octroi d’avantages, qui plus est éventuels. D’autres recommandations sont plus intéressantes, à l’image du maintien du versement de l’allocation de soutien familial en cas de remise en couple du « parent gardien ». La proposition est toutefois minimale puisque destinée à n’être qu’expérimentale dans certains départements. On songe encore à la proposition de réévaluation du barème de calcul de la contribution à l’entretien et à l’éducation de l’enfant et à l’ouverture, sur le modèle québécois, d’un prélèvement à la source de la pension alimentaire. Là encore, cependant, les propositions sont timides : le prélèvement à la source pourrait être « envisagé » après qu’un bilan annuel de l’intermédiation financière des pensions alimentaires soit dressé au regard d’objectifs plus ambitieux de réduction des taux d’impayés21.
Gageons que ces propositions, remises en cause par l’actualité politique, soient retravaillées à l’avenir en ayant à l’esprit les causes structurelles majoritaires de la précarité économique et sociale22 : le plus souvent, la précarité des femmes à la tête de ces familles n’est pas nouvelle, mais révélée et aggravée par la séparation. C’est donc bel et bien dans le couple et dans les inégalités de genre qu’il génère que se nichent les véritables difficultés pour bon nombre de ces familles. M. S.
Le 28 juin 2024, l’Assemblée plénière de la Cour de cassation a d’ailleurs rendu une décision attendue en faveur de l’égalité entre les parents23. En l’espèce, un mineur dont les parents sont séparés provoque un incendie alors qu’il se trouve chez son père en vertu d’un droit de visite et d’hébergement. En vertu de l’article 1242, alinéa 4, du Code civil, selon lequel « le père et la mère, en tant qu'ils exercent l'autorité parentale, sont solidairement responsables du dommage causé par leurs enfants mineurs habitant avec eux », les deux parents sont condamnés en première instance à prendre en charge l’indemnisation des dommages causés. Pourtant, la jurisprudence considérait alors que la condition de cohabitation n’était remplie que par le parent chez lequel la résidence habituelle de l’enfant est fixée24, même si le dommage est causé pendant le temps où l’autre parent exerce son droit de visite et d’hébergement25. En l’espèce, la résidence habituelle était fixée chez la mère. Le père a donc interjeté appel. S’en est suivie une longue procédure qui s’achève finalement par un revirement de jurisprudence en Assemblée plénière : désormais, la cohabitation est considérée comme une conséquence de l’autorité parentale, sauf si l’enfant réside chez un tiers en vertu d’une décision administrative et judiciaire. Dans la présente affaire, les parents sont donc solidairement responsables. La solution est heureuse : en 2018, 85% des enfants de parents séparés hors résidence alternée vivaient avec leur mère26. Ces dernières étaient donc, le plus souvent, seules responsables des dommages causés par l’enfant mineur et supportaient l’indemnisation. Cet état du droit était, à l’évidence, inégalitaire au détriment des femmes. Au surplus, il privait la victime d’un débiteur d’indemnisation potentiel27. Une réforme législative permettrait néanmoins d’aller plus loin en rattachant directement la responsabilité des parents à la filiation28, ce qui serait cohérent avec le caractère objectif de la responsabilité des parents. Au surplus, cela améliorerait l’égalité entre les parents, puisque le retrait de l’autorité parentale ne déchargerait plus un parent de sa responsabilité. Or cette mesure, parce qu’elle concerne notamment les auteurs de violences au sein des couples, vise davantage les pères29.
La loi n° 2024-233 du 18 mars 2024 visant à mieux protéger et accompagner les enfants victimes et covictimes de violences intrafamiliales30 étend les possibilités de retrait de l’autorité parentale du parent violent dans le contexte de violences intra-familiales. La suspension de l’autorité parentale, mais aussi des droits de visite et d’hébergement, est ainsi automatique en cas de poursuites pour crime contre la personne de l’enfant ou de l’autre parent ainsi que d’agression sexuelle sur la personne de l’enfant31. En cas de condamnation, le retrait de l’autorité parentale est de principe, sauf décision motivée du juge32. Ces évolutions traduisent des préconisations du rapport de la commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (CIIVISE), rendu public le 20 novembre 2023. Le rapport, rédigé après trois années d’enquête auprès des institutions sociojudiciaires et des personnes concernées, met en lumière des dynamiques de genre qui font obstacle à la lutte contre ce type de violences33. Le rapport révèle ainsi que les mères alertées sur des violences sexuelles commises au sein de la famille le sont à 43,8% de faits commis par leur compagnon (le père à 29,6%, le beau-père à 14,2%)34. Dans ce cas, l’éloignement de la victime de son agresseur souhaité par la mère peut être perçu par les autorités comme l’expression d’un conflit dans le cadre de la séparation parentale. Il s’agit d’un phénomène d’ampleur très rapidement identifié par la CIIVISE35, qui n’est pas sans poser difficulté. La perception de la situation comme un conflit charrie en effet nombre de représentations négatives sur l’attitude des mères36 qui seraient tantôt fusionnelles, aliénantes, instrumentaliseraient leur enfant dans un combat contre le père. Une telle analyse entraîne une perception biaisée de l’intérêt de l’enfant comme étant d’avoir un lien avec ses deux parents, avec une vindicte maternelle à combattre. À l’inverse, si la situation est analysée non comme un conflit, mais comme une réaction à la violence37, l’intérêt de l’enfant réside plutôt dans le fait d’accompagner la mère dans sa démarche protectrice. C’est pourquoi le rapport préconise des évolutions du droit permettant, dès les premières dénonciations par l’enfant, une mise à distance du parent violent38. Ceci pour que, dans l’attente de l’établissement de la vérité, le postulat soit celui de croire l’enfant et son parent protecteur et non celui de ne pas croire l’agresseur qui se prétend innocent. Il s’agit d’un changement de paradigme neutre au genre dans les termes de la loi, mais qui de fait revient à accorder un crédit plus grand à la parole des mères de victimes et à rééquilibrer un rapport de force structurellement défavorable aux mères, parce qu’elles sont des femmes. J. M.
Comment concilier incarcération et maternité ? L’automne 2023 offre deux réponses à cette question, rarement abordée notamment en raison du faible nombre de femmes détenues en France et dans le monde39. Une circulaire du 24 novembre40 et un décret du 16 novembre 202341 modifient et précisent les règles applicables à la prise en charge des enfants vivant avec leur mère détenue. Les mères incarcérées peuvent vivre avec leur enfant jusqu’aux dix-huit mois de ces derniers, cette limite d’âge pouvant être repoussée sous condition42. Bien que vivant au sein de l’établissement, ces enfants ne sont pas légalement détenus. Ils subissent pourtant les contraintes de l’institution carcérale, de sorte que le droit ne peut les ignorer43.
Jusqu'à présent, leur quotidien était régi par quelques textes du code pénitentiaire, mais surtout par une circulaire de 199944, qui devait impérativement être réécrite pour tenir compte des évolutions du droit familial des vingt-cinq dernières années. Le texte est porteur d’améliorations. La place de l'autre « parent » - qui n'est plus forcément le père - est ainsi explicitée et il est prévu que lui soient communiquées des informations sur l’accueil de l’enfant, sauf contraintes de sécurité. C’est aussi à une forme de répartition des prérogatives des parents que procèdent les textes : si l'enfant naît pendant la détention et que l'autre parent refuse qu'il vive au sein de l’établissement, le JAF ou le juge des enfants peut être saisi, l’enfant étant maintenu auprès de la mère, sauf danger avéré, en attendant la décision. En revanche, si l'enfant naît avant l'incarcération, c'est à la mère de saisir le juge pour envisager son accueil dans l’établissement. D’autres mesures sont bienvenues, à l’image de la création d'un « référent nurserie » dans chaque direction interrégionale des services pénitentiaires, du caractère pluridisciplinaire de la prise en charge du mineur, de l’amélioration du cahier des charges applicable aux constructions de nouvelles unités ou de l’autorisation pour la mère, sauf exception, d’accompagner son enfant pour des soins urgents en établissement de santé45.
Mais la circulaire est aussi sujette à critiques. La formalisation de la prise en charge temporaire de l'enfant par une codétenue est douteuse, sous l’angle des responsabilités individuelles et collectives. « L'ordre de priorité » établi pour l'occupation des places mère-enfant, anticipant la survenance d'un dépassement des capacités d'accueil, est également questionnable. Enfin, et surtout, la philosophie profonde du texte ne diffère pas de celui de 199946 : il s’agit toujours de laisser l’enfant en bas âge auprès des mères et d’elles seules ; il s’agit toujours, aussi, de laisser des enfants en prison. Penser l’amélioration de leurs conditions de prise en charge, c’est ne pas penser d’alternatives en dehors du milieu carcéral.
Une décision de la CJUE du 21 décembre 202347 aborde différemment ce lien entre maternité et incarcération, à l’occasion d’une question préjudicielle posée à la Cour par l’Italie. Était en cause un mandat d’arrêt européen émis par la Belgique en 2020 à l’encontre d’une femme devant exécuter une peine d’emprisonnement pour des infractions de trafics d’êtres humains et de facilitation de l’immigration clandestine. Arrêtée en Italie, en compagnie de son fils de 3 ans, cette femme était enceinte de son deuxième enfant, qui naîtra quelques mois plus tard. Les autorités italiennes refusent de remettre cette personne à la Belgique, faute de disposer d’informations suffisantes sur l’exécution des peines prononcées à l’égard des mères vivant avec leurs enfants. L’intéressée est donc libérée et une question préjudicielle est posée à la CJUE. La décision-cadre 2002/584 du Conseil européen, relative au mandat d’arrêt européen doit-elle être interprétée comme ne permettant pas à l’autorité judiciaire d’exécution de refuser ou, en tout état de cause, de reporter la remise de la mère ayant des enfants mineurs vivant avec elle ? Si oui, ces dispositions sont-elles compatibles avec le droit au respect de la vie privée et familiale, les droits de l’enfant et les traditions constitutionnelles communes aux États membres « dans la mesure où ils exigent la remise de la mère en rompant ses liens avec ses enfants mineurs qui vivent avec elle sans tenir compte de l’intérêt supérieur de l’enfant ? » Après avoir rappelé l’importance des « principe de confiance mutuelle entre les États membres » et de « reconnaissance mutuelle », au nom desquels les États sont tenus de « présumer le respect des droits fondamentaux par les autres États »48, la CJUE indique qu’un mandat d’arrêt européen peut ne pas être respecté en cas de méconnaissance des droits fondamentaux garantis par la charte des droits fondamentaux de l’UE. Exceptionnellement donc, le « risque réel » d’atteintes aux droits fondamentaux peut justifier la non-exécution du mandat. Encore faut-il apprécier ce risque. Pour ce faire, la Cour livre un véritable guide aux États, en invitant à la réalisation d’un examen en deux temps. Dans une première étape, l’État doit déterminer s’il existe « des éléments objectifs, fiables, précis et dûment actualisés tendant à démontrer l’existence d’un risque réel de violation, dans l’État membre d’émission » du mandat d’arrêt49, en utilisant diverses sources : décisions judiciaires internationales, rapports du Conseil de l’Europe ou des Nations Unies, etc. Vient ensuite une seconde étape, consistant à vérifier « de manière concrète et précise » les défaillances identifiées au cours du premier examen, pouvant avoir « une incidence sur les conditions de détention de la personne qui fait l’objet du mandat ou de prise en charge de ses enfants, notamment s’il « existe des motifs sérieux et avérés de croire que cette personne ou ses enfants courront un risque réel de violation des droits fondamentaux »50.
Pédagogique, la réponse donnée par la Cour est toutefois illusoire. Connaître les conditions de détention dans un État est extrêmement difficile, et connaître celles qui s’appliquent aux femmes en général, et aux mères en particulier, l’est encore plus. D’abord, parce qu’il existe un écart considérable entre ce que prévoient les lois d’un État et la pratique des établissements. Ensuite, parce que moins nombreuses, les femmes incarcérées sont souvent délaissées, voire ignorées des études, rapports et statistiques mentionnés ici par la Cour51. Enfin, leurs conditions de détention peuvent considérablement varier selon l’établissement considéré. L’examen proposé par la CJUE risque donc fort souvent de ne pas aboutir à la reconnaissance d’une atteinte aux droits fondamentaux… M. S.
La loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration dite loi « Darmanin » a créé deux dispositifs extrêmement préjudiciables aux femmes étrangères résidant en Outre-mer. Le premier concerne le regroupement familial vers Mayotte. Il prévoit, tout d’abord, l’allongement à trois ans de la durée de séjour préalable à la demande – contre deux en métropole – mais transforme surtout la nature du titre de séjour que doit détenir la personne qui sollicite le regroupement. Là où le droit commun impose un titre d’une validité d’un an52, il faudra, à Mayotte, détenir un titre d’une validité « de plus de cinq ans ». Or, les seuls titres qui remplissent cette condition sont les cartes de résident, c’est-à-dire des titres conditionnés à de longues durées de séjour en France et, le plus souvent, à des conditions de ressources et de niveau de langue. Titres donc moins accessibles aux femmes.
La seconde disposition, d’une grande violence, concerne les mères d’enfants français résidant à Mayotte et en Guyane53 . Pour rappel, en droit commun, pour bénéficier d’un titre de séjour en tant que parent d’enfant français, le parent étranger doit tout d’abord démontrer qu’il contribue effectivement à l’entretien et à l’éducation de cet enfant depuis sa naissance ou depuis au moins deux ans. En outre, depuis 2018, il doit prouver que le parent français qui a établi sa filiation par reconnaissance contribue aussi aux besoins de l’enfant, mais sans condition de durée. Cette disposition est déjà très contestable dans la mesure où, parce que seuls les hommes établissent en réalité leur filiation par reconnaissance, elle n’impose de fait cette condition supplémentaire qu’aux mères étrangères d’enfants français, ainsi dépendantes du père pour fournir les documents nécessaires à leurs démarches administratives54.
Le nouveau texte ajoute donc, uniquement pour Mayotte et la Guyane, une condition de durée d’entretien et d’éducation de l’enfant de la part du père français, qui doit y contribuer depuis la naissance de l’enfant ou depuis trois ans. La disposition accentue donc cette situation absurde où la légalité du séjour des mères dépend de la diligence des pères non seulement à remplir leurs obligations, mais donc aussi, désormais, à faire établir leur filiation dès la naissance. En effet, si le père français ne reconnaît pas l’enfant immédiatement – et quand bien même il remplirait, à compter de cette reconnaissance, l’ensemble de ses obligations – la mère ne peut bénéficier d’un droit au séjour avant l’expiration d’un délai de trois ans.
Une dernière disposition doit être étudiée : l’interdiction du placement en rétention des enfants au profit d’une assignation à résidence des adultes accompagnés de mineur·es. En apparence, cette nouvelle interdiction semble évidemment favorable aux familles, mais le détail de son application est tout autre. Une circulaire du 5 février 202455 précise qu’il « demeure toujours possible de placer en [rétention]un des deux parents en vue d’un retour forcé, […] et d’assigner à résidence l’autre parent qui accompagne les enfants ». La répartition des rôles se fera sans doute sans trop de surprise : aux pères l’enfermement en centre, aux mères l’enfermement à la maison.
Deux décisions de la Cour administrative d’appel de Nantes56 sont venues clarifier le contenu de l’ordre public international concernant l’autorité parentale. Dans ces deux affaires, il s’agissait de statuer sur la réception, en droit français, de « délégations d’autorité paternelle » établies à l’étranger dans deux pays – le Sénégal et la Centrafrique – où, par principe, seul le père exerce l’autorité parentale. Dans ces deux cas, un visa vers la France avait été demandé au bénéfice d’un enfant par une personne titulaire d’une délégation qui n’avait été accordée que par un seul des deux parents – en application du droit local. La Cour administrative de Nantes affirme alors dans un considérant de principe que « la conception française de l’ordre public international implique que le consentement à la délégation de l’autorité parentale à l’égard d’un enfant soit donné dans le respect du principe d’égalité des parents », mais elle ajoute que « la circonstance qu’une décision prise par un tribunal étranger réserve à l’un des parents le soin de prendre seul certaines décisions (…) ne peut permettre d’écarter cette décision que pour autant qu’elle heurte de manière concrète les principes essentiels du droit français ». Il s’agit donc pour les juridictions de faire une appréciation in concreto de la façon dont le parent qui n’avait pas le pouvoir de participer à la délégation – le plus souvent la mère – a pu effectivement acquiescer à cette démarche. La position semble mesurée puisqu’elle évite que des mères soient privées de leurs enfants via des décisions auxquelles elles n’auraient pas consenti, tout en leur réservant la possibilité d’apporter la preuve qu’elles peuvent adhérer à cette démarche, notamment pour permettre à leurs enfants de migrer sans elles, si c’est leur choix. Mais, dans le cadre du contentieux des visas, toujours plus restrictif, ne sera-t-il pas difficile pour ces femmes d’apporter la preuve de leur consentement ? Dans la première de ces affaires, l’attestation fournie à cette fin est jugée non probante puisqu’il « ne présente aucune garantie quant à la libre acceptation par [la mère] de la délégation d’autorité parentale accordée à l’égard de sa fille ». Espérons donc que la protection de l’égalité entre les hommes et les femmes ne soit pas, une fois de plus, instrumentalisée à des fins de restriction des migrations. L. C.
L’arrêt Verhoeven c. France rendu par la Cour européenne des droits de l’homme le 28 mars 202457 témoigne, en cas de déplacement illicite d’enfants, de la difficulté de trouver un équilibre entre le principe du retour immédiat de l’enfant et sa protection de tout risque grave, en particulier dans un contexte de violences au sein du couple. Cette affaire concerne un enfant résidant au Japon déplacé illicitement par sa mère en France alors qu’il était âgé de 2 ans. Suite à deux arrêts rendus par la Première chambre civile de la Cour de cassation58, une décision de retour de l’enfant vers le Japon fut prise par les autorités françaises. Saisie par la mère de l’enfant, la Cour EDH a jugé que cet ordre de retour n’était pas constitutif d’une violation de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme.
En l’espèce, la mère de l’enfant, de nationalité française, s’appuyait sur l’article 13(1)(b) de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants pour s’opposer au retour de l’enfant au Japon. Cette disposition prévoit une exception au retour lorsqu’il « existe un risque grave que le retour de l’enfant ne l’expose à un danger physique ou psychique, ou de toute autre manière ne le place dans une situation intolérable ». Cette exception doit être interprétée strictement afin de faire prévaloir le retour de l’enfant et mettre un terme à la voie de fait créée par son enlèvement. Dans l’affaire en cause, la mère ravisseuse décrivait une situation d’emprise et de violences exercées sur elle par son conjoint59. La Cour EDH a néanmoins estimé que les juridictions françaises avaient répondu aux obligations découlant de la Convention européenne des droits de l’homme combinée à la Convention de La Haye en ne retenant pas l’exception du risque grave pour l’enfant. Pour cela, la Cour s’est placée dans une « logique de subsidiarité »60 en limitant son contrôle à l’existence d’un examen approfondi par les autorités françaises des conséquences pour l’enfant d’un retour au Japon.
Le contexte de violences exercées par le parent victime de l’enlèvement contre le conjoint ravisseur soulève néanmoins des questionnements. Tout d’abord, l’on peut se demander, à l’instar du juge Mits dans son opinion dissidente, si la Convention de La Haye est bien adaptée à ce type de situation. Certes, le Guide de bonnes pratiques relatif à l’article 13(1)(b)61 publié en 2020 par la Conférence de La Haye préconise d’interpréter l’exception du risque grave en prenant en considération les violences exercées à l’encontre du parent ravisseur et non seulement celles portant directement sur l’enfant. Des divergences importantes peuvent cependant être constatées selon les juridictions nationales62. Ensuite, dans son arrêt, la CEDH souligne, comme l’avaient fait les juridictions françaises, l’existence de procédures de médiation familiale en droit japonais63. Or, dans un contexte de violences au sein du couple, la médiation doit être écartée64. Le recours à cette procédure aurait donc dû être exclu en l’espèce et non servir d’élément en faveur du retour de l’enfant. D. P.
La Cour de cassation, dans un arrêt du 10 mai 202473, refuse l’examen de constitutionnalité de la reconnaissance conjointe anticipée (RCA) : « L'art. 342-11 c. civ., en ce qu'il impose aux couples de femmes ayant recours à une assistance médicale à la procréation avec tiers donneur de procéder à une reconnaissance conjointe anticipée pour établir la filiation à l'égard de la femme qui n'accouche pas de l'enfant, porte-t-il atteinte au principe d'égalité et en particulier au principe d'égalité entre les hommes et les femmes, à la liberté personnelle, au droit à une vie familiale normale, au droit au respect de la vie privée ainsi qu'au principe fondamental reconnu par les lois de la République de gratuité de l'établissement des actes de l'état civil ? » Cette question, qu’un couple de femmes souhaitait soumettre au contrôle du Conseil constitutionnel, n’est jugée ni sérieuse, ni nouvelle par la première chambre civile.
À certains égards, la solution convainc. La Cour décide ainsi que les mentions relatives à la RCA portées dans l'acte de naissance ne figurent pas sur les extraits délivrés aux tiers, mais seulement sur les copies intégrales réservées à certaines personnes, sous conditions74, de sorte que le droit à la vie privée n’est pas atteint. La solution nous semble encore inattaquable lorsqu’est rejeté l’argument d’une atteinte au principe d’égalité tenant au caractère payant de la RCA. Si la différence de traitement instaurée entre les couples selon qu’ils sont composés de deux femmes ou d’une femme et d’un homme mérite d’être interrogée à cet égard sur le fond, c’est ici la nature réglementaire du texte prévoyant le caractère payant qui rend impossible le contrôle de constitutionnalité75.
Est bien moins convaincante, en revanche, l’interprétation du principe d’égalité devant la loi et entre les femmes et les hommes à laquelle les juges procèdent. La Cour souligne qu’une situation identique existe en matière d'accès à l'AMP, pour les couples formés d'un homme et d'une femme et les couples formés de deux femmes, mais qu’en revanche, « pris sous l'angle du parent d'intention et des enfants nés selon ce mode de conception », leur situation diffère au regard de « la vraisemblance biologique du lien de filiation »76. Autrement dit, c’est parce que deux femmes ne peuvent passer pour être toutes deux génitrices qu’il existe une différence de traitement, en rapport direct avec l'objet de la loi qui est d'assurer une « filiation sécurisée ayant les mêmes effets et ouvrant les mêmes droits que la filiation fondée sur la vraisemblance biologique et la filiation adoptive ». Or, une toute autre interprétation du principe d’égalité aurait pu être proposée.
Pour quelles raisons, en effet, la « vraisemblance biologique » devrait-elle constituer le point d’observation de l’atteinte éventuelle au principe d'égalité, et non le projet parental ? Érigé en finalité du recours à l'AMP par la loi77, le projet parental n’est utilisé par les juges que pour examiner l'égalité dans les conditions d'accès à l'AMP, mais non dans ses conséquences. Le choix d'une application dissociée du principe d'égalité, conduisant à observer séparément « l'accès à la procréation » d'une part78, et « la situation du parent d'intention et des enfants nés selon ce mode de conception », d'autre part, nous semble donc particulièrement fragile. M. S.
Dans une décision du 23 mai 202479, la Cour de cassation s’est, pour la première fois, prononcée sur l’interprétation de l’article 9 de la loi du 21 février 2022 visant à réformer l’adoption, dite loi Limon. Ce texte met en place un dispositif transitoire, pour une durée de trois ans, permettant au juge de prononcer l’adoption par la femme qui ne l'a pas porté de l’enfant qu’elle a eu par une assistance médicale à l'étranger avant la loi du 2 août 2021 et ce, en dépit de l’opposition de la mère. Cette affaire est, semble-t-il, la première dans laquelle il a été fait application de ce dispositif par une juridiction du fond80. Il s’agit, en l’espèce, d’un couple de femmes, marié en 2018, qui a conçu un enfant par assistance médicale avec tiers donneur à l’étranger avant l’ouverture de l’accès à ces services en santé reproductive en France par la loi n° 2021-1018 du 2 août 2021 relative à la bioéthique. En dépit de la rétractation du consentement réalisé dans le délai légal par la femme ayant accouché, la femme dont le statut de mère n’est pas reconnu en droit dépose une requête en adoption plénière de l’enfant de sa conjointe le 30 novembre 2020. Le dispositif de l’article 9 de la loi Limon, voté depuis, trouve à s’appliquer : la Cour d’appel de Lyon prononce l’adoption en soulignant l’affection que la requérante témoigne à l’enfant et précise qu’« un double lien de filiation constitu[e] une protection pour un enfant qui bénéficierait d'ores et déjà d'un double lien de filiation s'il était né après l'entrée en vigueur de la loi n° 2021-1017 du 2 août 2021 relative à la bioéthique ». La mère opposée à l’établissement du second lien de filiation maternelle forme un pourvoi en cassation et fait valoir que l’exigence de protection de l’enfant n’a pas été caractérisée. S’agit-il d’une condition autonome, qui s’ajoute à la caractérisation de l’intérêt de l’enfant ? En vertu d’une interprétation basée sur l’intention du législateur, la Cour de cassation estime qu’il n’est pas nécessaire « de démontrer concrètement que la mesure d'adoption est indispensable pour protéger l'enfant d'un danger ». Aussi, « l’adoption de l'enfant peut être prononcée si, en dépit du refus, sans motif légitime, de la femme qui a accouché de procéder à la reconnaissante conjointe, elle est conforme à l'intérêt de l'enfant, souverainement apprécié par le juge en considération des exigences de sa protection ». Par cette décision, la Cour de cassation ne limite pas la portée du dispositif adopté par le législateur : l’adoption doit être prononcée en considération de l’intérêt de l’enfant. Qu’en serait-il du contrôle de la Cour de cassation lorsque la juridiction du fond aura estimé que l’intérêt de l’enfant justifie de ne pas faire droit à la demande d’adoption ou lorsqu’elle aura pris en compte le fait que l’enfant s’oppose à l’adoption ? Confrontée à l'opposition de l’aîné des deux enfants, âgé de 12 ans, à son adoption, la Cour d’appel de Lyon a prononcé celle-ci estimant que « la volonté exprimée par [l'enfant est] équivoque surtout dans le contexte de conflit de loyauté »81. Qu’en serait-il si l’enfant était âgé de plus de 13 ans ? L’exceptionnalité du dispositif de l’article 9 de la loi Limon, qui permet de passer outre l’opposition de la mère, doit-elle également être étendu au consentement de l’enfant, en l’absence de texte précisant s’il doit être recherché ou au contraire écarté ? Les réponses qui pourraient être apportées à ces interrogations arriveront, en tout état de cause, après la fin de ces dispositions transitoires, qui expireront le 24 février 2025.
Au regard de cette temporalité, très courte compte tenu de la longueur des procédures, de la complexité et de la conflictualité des situations et surtout de l’importance des enjeux touchant à l’identité personnelle, des députés avaient déposé, avant l’été, une proposition de loi visant notamment à prolonger le dispositif sans limite de temps : seul l’épuisement des situations individuelles ferait tomber le texte en désuétude82. Il était également proposé de prévoir des dispositifs de rattrapage pour les AMP réalisées après la loi du 2 août 2021 lorsque la reconnaissance conjointe anticipée (RCA) n’a pas été faite. Il était d’abord prévu que le couple puisse effectuer une reconnaissance conjointe et en cas d’opposition de la mère, pour éviter à nouveau que des femmes se retrouvent sans lien de filiation à l’égard de leur enfant, qu’elles puissent demander un établissement judiciaire de leur maternité. L'intitulé même de la proposition de loi, à savoir « visant à sécuriser la filiation des enfants nés par assistance médicale à la procréation au sein des couples de femmes »83, masque mal les lacunes structurelles du droit français à précisément remplir cet objectif. La seconde maternité n’existe que dans les marges du droit –par adoption, RC, RCA ou des dispositifs transitoires bricolés et bancals84– et des enfants restent avec un seul lien de filiation alors qu’ils sont pourtant issus d’un projet parental commun. M. M.
L’arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l’Homme, CP et MN contre France85 le 12 octobre 2023 répond à la question de savoir si le délai de forclusion de l’article 333, al. 2 du Code civil est conforme au droit au respect de la vie privée et familiale. Il montre, en outre, que les règles procédurales du droit de la filiation ne sont pas toujours bien connues. Un homme et une femme se séparent en 2012. L’homme a reconnu à leur naissance les deux enfants issus de l’union en 2006 et 2007. Après la rupture, le nouveau partenaire de la mère adresse à ce dernier un courrier indiquant qu’il est le père biologique du cadet et l’assigne en contestation de paternité le 14 novembre 2012. L’enfant et sa mère ne sont attraits à l’affaire respectivement que les 28 février et 4 mars 2013. L’action en contestation est jugée irrecevable en droit interne86 : puisque le titre et la possession d’état avaient été conformes pendant plus de cinq ans, nul ne pouvait contester la filiation, à l’exception du ministère public. Certes, ce délai de forclusion de l’art. 333, alinéa 2 du Code civil pouvait être interrompu par une demande en justice, mais encore fallait-il que le père et l’enfant soient assignés dans les délais, ce qui n’était pas le cas.
La solution est contestée par le père prétendu et la mère au nom de l’art. 8 de la Convention EDH en vain : selon la Cour, les autorités internes n’ont pas eu recours à « une exigence procédurale de façon excessivement formaliste »87 et la vérité biologique ne devait pas prévaloir. Mais deux autres précisions retiennent particulièrement l’attention. D’abord, si l’action intentée vise ici pour le père prétendu à contester la paternité d’un autre homme, la Cour reproche à la mère, pourtant requérante devant la Cour, sa passivité. Elle « aurait été la personne la mieux placée pour intervenir spontanément dans la procédure, sans attendre d’y être attraite de manière forcée, laissant ainsi perdurer dans le temps une situation conflictuelle et de plus en plus problématique pour l’enfant »88. D’autre part, les juges précisent que rien n’avait empêché le requérant d’agir plus tôt89. La précision semble anodine, mais est essentielle. Pourquoi ? La Cour de cassation a pu retenir que le délai de forclusion de l’art. 333, al. 2 n’est pas susceptible de suspension90. Elle applique donc plus strictement qu’ailleurs l’article 2220 du Code civil, en considérant que les causes de suspension de prescription ne valent pas pour un délai préfix et qu’il n’y a ainsi pas lieu de sonder une éventuelle impossibilité d’agir du demandeur. Or, la solution européenne est bien différente : en soulignant qu’un tel empêchement, s’il avait existé, aurait pu être retenu, les juges sous-entendent une possible application de la maxime contra non valentem. Une telle solution serait bienvenue, notamment en ce qu’elle bénéficierait à l’enfant qui, devenu majeur, pourrait contester une filiation paternelle établie pendant sa minorité, confortée par une possession d’état quinquennale. Tenir compte de l’empêchement lié à la minorité pour suspendre ce délai, permettrait de mieux garantir son droit à la vie privée et familiale, comme son droit d’accéder à un juge. M. S
C’est une affaire aux multiples ramifications qui fait l’objet de l’arrêt rendu par la Chambre criminelle de la Cour de cassation le 27 septembre 202391. En l’espèce, une résidente de Polynésie française, à l’occasion d’une rencontre avec un travailleur social, en octobre 2020, déclare avoir « donné son bébé » à un homme. La situation fait l’objet d’un signalement au Procureur de la République. On apprend ainsi qu’un couple d’hommes mariés avait pris contact avec les services sociaux au début de la même année pour s’engager dans une procédure d’agrément aux fins d’adoption ; que, au mois de juin de la même année, il avait diffusé au sein de la maternité du Centre hospitalier de la Polynésie française des cartes de visite indiquant sa volonté d’adopter un « enfant fa’a’amu »92 ; que, grâce à l’intervention d’un tiers, il était entré en contact avec un autre couple marié, composé d’un homme et d’une femme enceinte, et qu’il avait été convenu que l’enfant à naître serait reconnu par un des membres du couple d’hommes, à qui serait remis l’enfant. Une reconnaissance anticipée est effectivement souscrite par l’un des membres du couple d’hommes, fin septembre 2020, quelques jours avant la naissance de l’enfant.
Tous les protagonistes, la femme ayant porté l’enfant et son mari, d’une part, l’auteur de la reconnaissance et son propre mari, d’autre part, sont renvoyés devant le tribunal correctionnel de différents chefs, et notamment, s’agissant de l’auteur de la reconnaissance, de provocation à l'abandon d'enfant, faux document administratif et obtention indue de document administratif. Tous sont relaxés par le tribunal correctionnel comme par la cour d’appel. Le Parquet forme alors un pourvoi et, parallèlement, ouvre un autre front, en assignant l’auteur de la reconnaissance en contestation de la filiation sur le fondement de l’article 336 du Code civil. Au civil, le ministère convainc tant le tribunal que la cour d’appel, qui se prononce par un arrêt du 28 juin 202293, semble-t-il non frappé d’un pourvoi. L’auteur de la reconnaissance n’est donc plus le père lorsque la chambre criminelle de la Cour de cassation décide, par arrêt du 23 novembre 2022, de saisir la première chambre civile d’une demande d’avis ainsi formulée : « L'objet de la reconnaissance de paternité est-il d'affirmer l'existence d'un lien de filiation biologique susceptible d'une démonstration de son exactitude ou de son inexactitude ou bien seulement l'affirmation de la volonté de créer une situation juridique par laquelle le déclarant s'engage à prendre en charge l'éducation et l'entretien de l'enfant, indépendamment de l'existence d'un lien biologique ? ». L’avis, subtil sinon sibyllin, est rendu le 5 avril 2023 : « la reconnaissance est l'acte libre et volontaire par lequel un homme ou une femme déclare être le père ou la mère d'un enfant et s'engage à assumer toutes les conséquences qui en découlent selon la loi, notamment celle de prendre en charge l'entretien et l'éducation de l'enfant ; inscrite au titre VII du livre I du code civil, elle repose sur une présomption de conformité de la filiation ainsi établie à la réalité biologique et peut être contestée, dans les conditions et dans les délais strictement définis par la loi, si la preuve contraire en est apportée ». Ainsi éclairée – ou pas – sur l’objet de la reconnaissance, la chambre criminelle rejette le pourvoi formé contre les décisions de relaxe. D’une part, elle approuve la cour d’appel d’avoir exclu la provocation à l’abandon d’enfant : « en effet, pour caractériser la provocation au sens de l'article 227-12 du code pénal, les promesses doivent présenter un caractère suffisamment précis et les dons intervenir antérieurement à l'abandon de l'enfant », ce qui n’était pas le cas en l’espèce. D’autre part, « le délit de faux et par voie de conséquence celui d’obtention indue d’un document administratif » ne sont pas plus constitués. La validité de la reconnaissance, dont l’arrêt reprend la définition proposée par la première chambre civile, n’est pas conditionnée à « sa conformité à la réalité biologique de la filiation ainsi établie » : « dès lors qu'une reconnaissance de paternité n'atteste en elle-même aucune réalité biologique, l'acte par lequel une personne souscrit une telle reconnaissance alors qu'elle sait ne pas être le père biologique de l'enfant est insusceptible de caractériser l'altération frauduleuse de la vérité constitutive d'un faux au sens des articles 441-1 et 441-2 du code pénal ».
L’arrêt et, au-delà, l’affaire, suscitent le malaise94 : quand bien même elle ne constituerait pas le délit de provocation à l’abandon d’enfant, la promesse d’une « vie meilleure » pour l’enfant à naître d’un couple polynésien dont les autres enfants étaient placés met en évidence la nécessité d’intégrer dans toute réflexion sur la circulation d’enfants les rapports de domination qui peuvent s’y déployer. Mais ce ne sont pas les seules interrogations qu’ils suscitent au prisme du genre.
En premier lieu, l’arrêt du 23 septembre semble assumer une approche résolument « volontariste » de la filiation. La reconnaissance « n’atteste[rait] en elle-même aucune réalité biologique ». Partant, même si son auteur sait ne pas être le géniteur de l’enfant, il ne commettrait pas un faux. En somme, une reconnaissance ne pourrait pas être « mensongère » puisqu’elle ne dirait rien de la réalité, en l’occurrence de la réalité biologique95. La reconnaissance prouve et donc, puisque les deux termes peuvent être considérés comme synonymes, atteste la filiation96, pas la « réalité biologique »97. En affirmant que la reconnaissance ne peut pas constituer un faux, parce que, en elle-même, elle ne dirait rien de la réalité98, la Cour participe donc à autonomiser la filiation des corps. Ce faisant, elle œuvrerait à libérer les individus d’assignations sociales liées à des données corporelles et, donc, de l’ordre du genre, dont on a pu soutenir qu’il se traduit avant tout, en la matière, par la figure de l’indisponibilité99.
En deuxième lieu, après avoir posé une définition très générale de la reconnaissance, la Cour prend soin de préciser qu’« une reconnaissance de paternité n’atteste en elle-même aucune réalité biologique » et elle relève, au soutien de sa solution, que « les juges [du fond] ajoutent que l'enfant n'est pas privé de la réalité de sa filiation ni de son droit à connaître ses origines alors que sa filiation maternelle est établie et que la reconnaissance faite […] peut faire l'objet d'une contestation ». Ce faisant, l’arrêt suggère que paternité et maternité pourraient ne pas entretenir les mêmes rapports à la réalité biologique. D’une part, la maternité établie dirait la « réalité de la filiation », réalité qui serait étrangère à l’établissement de la paternité par reconnaissance. D’autre part, la reconnaissance d’un enfant par une femme n’en ayant pas accouché pourrait constituer un faux : si la Cour ne l’affirme pas, elle ne l’exclut pas100. Elle constitue, en toute hypothèse, une autre infraction pénale, la simulation, « atteinte à la filiation » punissable sur le fondement de l’article 227-13 du Code pénal. La référence à « un homme ou une femme » dans la définition posée de la reconnaissance n’implique donc pas une unité de régime entre reconnaissance de paternité et reconnaissance de maternité : la symétrie n’est qu’illusion. Quand bien même une femme « s’engage[rait] à assumer toutes les conséquences qui […] découlent [de la filiation] selon la loi », elle s’exposerait à des poursuites pénales. Maternité et paternité n’intéressent pas au même degré l’ordre public.
En troisième lieu, l’arrêt semble toutefois, par une incise, inviter à les rapprocher, précisément dans leurs rapports à l’ordre public. On y lit en effet que « la circonstance que les prévenus ont cherché à contourner les règles de l'adoption, qui est susceptible de constituer une fraude à la loi au sens de l'article 336 du code civil, est indifférente à caractériser le délit de faux […] ». En droit positif, une femme reconnaissant un enfant dont elle n’a pas accouché commet une fraude à la loi, ouvrant la voie à une contestation du lien de filiation par le ministère public. En revanche, il était jusqu’alors admis que, en reconnaissant un enfant qu’il savait ne pas être issu de ses œuvres, un homme ne commettait pas une telle fraude – dès lors que, ce faisant, il ne poursuivait pas un avantage particulier dont la finalité serait étrangère à l’intérêt de l’enfant et à son éducation101. L’affirmation de la Cour est-elle liée aux circonstances de l’espèce, la reconnaissance ayant en l’occurrence été annulée pour fraude à la loi, alors que l’auteur de la reconnaissance et son mari s’étaient semble-t-il résignés à cette extrémité, faute d’avoir pu adopter ? A-t-elle au contraire une portée plus générale, toute reconnaissance sciemment contraire à la réalité biologique devant désormais être analysée comme une fraude à l’adoption ? L’arrêt de la Cour de Papeete (préc.) semble inviter à cette seconde analyse qui retient la fraude à la loi en relevant que la « reconnaissance de paternité [a été effectuée par son auteur] dans le seul but d'obtenir à son profit une filiation avec un enfant, sans passer par les procédures exigeantes établies par les règles du code civil sur l'adoption, s'épargnant l'intervention d'un tiers, ou d'une autorité, à même de contrôler et recueillir le consentement des parents et vérifier les situations respectives des parents biologiques et candidats à l'adoption, et évitant ainsi le risque d'un refus du père biologique ou du juge judiciaire, comportement caractérisant la fraude à la loi ». Toute reconnaissance « mensongère » ne répond-elle pas à une telle description de la fraude ? Si cette analyse devait l’emporter, c’est en réalité un pouvoir général de contestation des reconnaissances « mensongères » qui serait ainsi reconnu au Ministère public, ce qui fragiliserait non seulement l’analyse de l’arrêt comme œuvrant au détachement de la filiation et de la biologie, mais nombre de reconnaissances présumées « suspectes », notamment pour avoir été souscrites par des étrangers en situation irrégulière102. M. P.
Lisa Carayon, Maîtresse de conférences, Université
Sorbonne Paris Nord, Institut de recherche interdisciplinaire sur les
enjeux sociaux (IRIS)
Julie Mattiussi, Maîtresse de conférences, Université de Strasbourg, Centre de droit privé fondamental.
Marie Mesnil, Maîtresse de conférences, Université Paris-Saclay, Institut Droit Éthique Patrimoine (IDEP)
Marc Pichard, Professeur, Université Paris Nanterre, Centre de droit civil des affaires et du contentieux économique (CEDCACE).
Delphine Porcheron, Maîtresse de conférences, Université de Strasbourg, Centre de droit privé fondamental
Maïté Saulier, Maîtresse de conférences, CY Cergy Paris, Laboratoire d’études juridiques et politiques (LEJEP)
Références
Cour EDH, 4e sect., 21 juillet 2015, Oliari c. Italie, req. n° 18766/11 et 36030/11 ; égal. ant. Cour EDH, GC, 7 novembre 2013, Vallianatos et autre c. Grèce, req. n° 29381/09 et 32684/09.↩︎
Cour EDH, GC, 17 janvier 2023, Fedotova et autres c. Russie, req. n° 40792, 30538/14, 42439/14.↩︎
Cour EDH, 5e sect., 1er juin 2023, Maymulakhin et Markiv c. Ukraine, req. n° 75135/14.↩︎
Cour EDH, 4e sect., 23 mai 2023, Buhuceanu et autres c. Roumanie, req. n° 20081/19 et 20 autres.↩︎
Cour EDH, Koilova et Babulkova c. Bulgarie, 5 sept. 2023, req. n° 40209/20 ; Cour EDH, Przybyszewska et autres c. Pologne, 5 déc. 2023, req. n° 11454/17 et 9 autres.↩︎
Cour EDH, 3e sect., 5 septembre 2023, Koilova et Babulkova c. Bulgarie, req. n°40209/20, §50 ; §54.↩︎
Ibidem, §51.↩︎
Ibid., §70 ; égal. Fedotova et autres c. Russie, préc. §111.↩︎
Ibid., §32-34.↩︎
Par ex. Cour EDH, 1re sect., 12 décembre 2023, Przybyszewska et autres c. Pologne, req. n° 11454/17 et neuf autres, §72.↩︎
Sur cent familles monoparentales, quatre-vingt-deux ont une femme à leur tête.↩︎
V. sur ce sujet, Marie-Clémence Le Pape et Clémence Helfter, Idées reçues sur les familles monoparentales, Le cavalier bleu, 2024 et spéc. Claude Martin, « La monoparentalité a des conséquences négatives sur les enfants », p. 59 et s.↩︎
Elle, 8 mai 2024, « #MeToo, Depardieu, monoparentalité, congé de naissance : Macron nous répond ». Sur ce point, Lisa Carayon, Stéphanie Hennette-Vauchez, Marc Pichard, « Éditorial. Place des pères : annonce présidentielle, analyses féministes », Intersections, 2024/1.↩︎
V. par ex. communiqué de la CNAPE, « Tour de France de la parentalité » : la CNAPE dénonce un virage répressif, 11 décembre 2023.↩︎
« Aurore Bergé : "Des travaux d’intérêt général pour les parents défaillants"», Entretien, La Tribune dimanche, 10 décembre 2023. Au lendemain de ces annonces, plusieurs membres de la commission ont annoncé leur démission. En avril 2024, Sarah El Haïry, ministre chargée l’enfance, de la jeunesse et des familles, a annoncé la réinstallation de la commission parentalité « dans l’objectif de mieux accompagner les parents dans leur rôle de premier éducateur de leur enfant ». Un rapport devait être remis en décembre 2024.↩︎
Élisabeth Algava, Kilian Bloch, Isabelle Robert-Bobée, « Les familles en 2020 : 25 % de familles monoparentales, 21 % de familles nombreuses », Insee Focus, n° 249, 13 septembre 2021 : 41% des enfants issus de familles monoparentales vivent sous le seuil de pauvreté monétaire. Ce taux atteint 46% s’agissant des enfants vivant avec leur mère, contre 22% des enfants vivant avec leur père.↩︎
Proposition n° 2518.↩︎
Proposition de création d’un article L. 1225-19-1 du Code du travail.↩︎
Proposition de modification de l’art. L. 521-1 du Code de la sécurité sociale.↩︎
Sénat, Familles monoparentales : pour un changement des représentations sociétales, par Colombe Brossel et Béatrice Gosselin, au nom de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, n° 485, 28 mars 2024.↩︎
Selon la COG 2023-2027, le taux global d’impayés est fixé à 21% en 2027.↩︎
Marie-Clémence Le Pape et Clémence Helfter dir., Les familles monoparentales. Conditions de vie, vécu et action publique. Un état des savoirs, CNAF, La documentation française, 2023.↩︎
Cass. ass. plén., 28 juin 2024, n° 22-84.760.↩︎
Cass. 2e civ., 20 janvier 2000, n° 98-14.479.↩︎
Cass. crim., 29 avril 2014, n° 13-84.207.↩︎
Insee première, n° 1788, 14 janvier 2020.↩︎
Jérémy Houssier, « Feu la cohabitation ? Nouveau revirement pour la responsabilité civile des père et mère », AJ fam. 2024 ? p. 467.↩︎
Caroline Siffrein-Blanc, « Vers une réforme de la responsabilité civile des parents », RTD civ. 2011. 479.↩︎
En 2019, 83% des personnes mises en causes pour violences intrafamiliales étaient des hommes, Insee références, 9 décembre 2021.↩︎
Marie Mesnil, « Violences intrafamiliales et autorité parentale : la loi du 18 mars 2024 », AJ fam. 2024, 177.↩︎
C. civ., art. 378-2.↩︎
C. civ., art. 378.↩︎
Rapport CIIVISE, « Violences sexuelles faites aux enfants : “On vous croit” », p. 136, l’agresseur intra familial est le plus souvent un homme, p. 456, les mères sont les premières confidentes des victimes de violences sexuelles, y compris au sein de la famille.↩︎
Ibid.↩︎
V. déjà avis du 27 octobre 2021, « À propos des mères en lutte ».↩︎
Sur le manque de crédibilité accordée à la parole des femmes de façon générale, rapport CIIVISE p. 282.↩︎
Sur la distinction entre violence et conflit, v. Karen Sadlier, « L’enfant co-victime de la violence dans le couple », in Roland Coutanceau et Muriel Salmona (dir.), Violences conjugales et familles, Dunod, 2016.288.↩︎
Proposition 52 : « Prévoir, dans la loi, la suspension de plein droit de l’exercice de l’autorité parentale et des droits de visite et d’hébergement du parent poursuivi pour viol ou agression sexuelle incestueuse contre son enfant ».↩︎
En France, 3,8% des personnes détenues sont des femmes au 1er juillet 2024 selon les statistiques mensuelles de la direction de l’administration pénitentiaire. Une augmentation est toutefois perceptible au niveau mondial, Helen Fair, Roy Walmsley, World Female Imprisonment List, Women and girls in penal institutions, including pre-trial detainees/remand prisoners, 5e éd., oct. 2022.↩︎
Circulaire relative à la prise en charge des enfants vivant avec leur mère en détention, JUSK2315651C, BO 1er décembre 2023.↩︎
Décret n° 2023-1044 modifiant la partie règlementaire du code pénitentiaire (décrets simples) et relatif aux conditions de détention des mères détenues vivant avec leurs jeunes enfants en détention, JORF n°0267, 18 novembre 2023.↩︎
C. pénit., art. D. 216-22 et D. 216-23.↩︎
Ariane Amado, L’enfant en détention en France et en Angleterre : contribution à l’élaboration d’un cadre juridique pour l’enfant accompagnant sa mère en prison, Mare & Martin, 2020.↩︎
Circ. 16 août 1999 relative aux conditions d'accueil des enfants laissés auprès de leur mère incarcérée, NOR JUSE9940062C.↩︎
Ariane Amado, « Vers la fin de la séparation systématique des mères et des enfants en prison lors de leur prise en charge médicale en urgence ? », AJ Pénal, 2023, p. 524.↩︎
Maïté Saulier, « Les femmes enfermées. Femmes invisibles, discriminations invisibles ? », in Jérémy Houssier et Maïté Saulier, Les femmes et le droit. Les discriminations invisibles, Dalloz, Thèmes et commentaires, 2024, p. 137.↩︎
CJUE, aff. C-261/22.↩︎
§34.↩︎
§47.↩︎
§48.↩︎
Corinne Rostaing, « L’invisibilisation des femmes dans les recherches sur la prison », Les Cahiers de Framespa, 2017, n° 25.↩︎
CESEDA, art. L. 434-2.↩︎
CESEDA, art. L. 441-4 (pour la Guyane) et L. 441-7 (pour à Mayotte).↩︎
Sur ce mécanisme v. Lisa Carayon, « Parents suspects. Stratégies de contrôle des personnes étrangères parents d’enfants français », Revue interdisciplinaire d'études juridiques, vol. 86, n° 1, 2021, p. 109.↩︎
Circ. 5 fév. 2024, NOR : IOMV2402702J.↩︎
5e chambre, 24 oct. 2023, n° 23NT01255 et 28 nov. 2023, n°22NT01489.↩︎
Cour EDH, Verhoeven c. France, 18 mars 2024, n° 19664/20, AJ fam. 2024, p. 417, obs. Alexandre Boiché, Dr. fam. 2024, n° 7-8, chron., Adeline Gouttenoire et Fabien Marchadier.↩︎
Cass. 1re civ., 22 novembre 2018, n° 18-20.546, Cass. 1re civ., 21 novembre 2019, n° 19-19.388.↩︎
Pour les autres aspects de l’affaire, v. les obs. préc., adde sur la notion de « risque juridique » mise en avant par la requérante, Alejandra Blanquet, « Le risque juridique au sein de la Convention de la Convention de La Haye de 1980 : le cas des enlèvements internationaux d’enfants au Japon », JDI 2022, p. 103 et s.↩︎
Adeline Gouttenoire et Fabien Marchadier, chron. préc.↩︎
Le Guide peut être consulté sur le site de la Conférence de La Haye, https://www.hcch.net/fr/publications-and-studies/details4/?pid=7059.↩︎
Sur ce point, v. Hansu Yalas, « L’enlèvement international d’enfant et la lutte contre les violences domestiques », Dr. fam. 2024, n° 4, Etudes ; Rhona Schuz et Merle H. Weiner, « A mistake waiting to happen : the failure to correct the Guide to Good Practice on Article 13(1)(b) », consultable sur le site, https://www.hcch.net/fr/publications-and-studies/details4/?pid=7059.↩︎
§ 63.↩︎
Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, dite Convention d’Istanbul, art. 48.↩︎
Req. n° 18843/20.↩︎
Cour EDH, GC, 13 février 2003, Odièvre c. France, req. n° 42326/98.↩︎
CASF, art. L. 147-6.↩︎
§66, §72.↩︎
Sur l’approche de cette question en termes de conflits de droits plutôt qu’en termes de droit des femmes, Lisa Carayon, « Penser les droits reproductifs comme un tout : avortement, contraception et accouchement sous X en droit français », in Laurence Brunet et Alexandrine Guyard-Nedelec, Mon corps, mes droits ! L’avortement menacé ?, Mare & Martin, 2019.↩︎
Depuis la loi n° 2009-61du 16 janvier 2009 ratifiant l'ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005 portant réforme de la filiation et modifiant ou abrogeant diverses dispositions relatives à la filiation.↩︎
CASF, art. préc.↩︎
§73.↩︎
Cass. 1re civ., 10 mai 2024, n° 24-40.001.↩︎
Décret n° 2017-890 du 6 mai 2017 relatif à l'état civil, modifié par décret n° 2019-966 du 18 sept. 2019, art. 30.↩︎
C. com, art. A. 444-84-1 C. com., arrêté du 9 déc. 2021, prévoyant un émolument fixe de 75,46 euros, mais une exonération des droits d'enregistrement est prévue depuis la loi de finances pour 2023, v. CGI, art. 847 bis, 2°.↩︎
§11.↩︎
§9, CSP, art. L. 2141-2.↩︎
Expressément mentionné comme ne devant pas être discriminatoire par l'art. L. 2141-2, al. 2 CSP.↩︎
Cass. 1re civ., 23 mai 2024, n° 22-20.069, obs. Marie Mesnil, D. 2024, 1510 et obs. Laurence Brunet, AJ. fam., 2024, p. 464.↩︎
CA Lyon, 9 juin 2022, n° 21/09303, Dalloz actualité, 6 sept. 2022, obs. Marie Mesnil, RJPF 2022-11/19, obs. Julien Boisson.↩︎
CA Lyon, 29 fév. 2024, n°22/07/07427, AJ Fam. 2024, 304, obs. Marie Mesnil.↩︎
Proposition de loi AN visant à sécuriser l'établissement de la filiation pour les enfants nés par AMP au sein des couples de femmes, n° 2581, déposée par Raphaël Gérard le 2 mai 2024.↩︎
Proposition de loi AN visant à sécuriser l’établissement de la filiation pour les enfants nés par assistance médicale à la procréation au sein des couples de femmes, n° 2581, déposée le jeudi 2 mai 2024.↩︎
Laurence Brunet et Marie Mesnil, « D'un bricolage à l'autre : l'adoption forcée de l'enfant conçu par AMP au sein d'un couple de femmes aujourd'hui séparées », AJ fam. 2022. 190.↩︎
Requêtes n° 56513/17 et 56515/17.↩︎
Cass. 1re civ., 1er février 2017, n° 15-27.245, AJ Fam. 2017, p. 203, obs. Jérémy Houssier ; RTD Civ. 2017, p. 363, note Jean Hauser.↩︎
§51.↩︎
§52.↩︎
§50.↩︎
Cass. 1re civ., 15 janv. 2020, n° 19-12.348.↩︎
n° 21-83673.↩︎
Sur cette pratique polynésienne, v. Natacha Gagné, « Le fa'a'amu, défi judiciaire », Délibérée 2023, vol. 18, p. 55 et s.↩︎
n° 21/00370.↩︎
En ce sens, v. Lisa Carayon, « Panorama Droit et genre », D. 2024, p. 893.↩︎
Rappr. Frédéric Rouvière, « Le droit : nature ou artifice ? », RTD civ. 2024.275, p. 276 : « Dans cette voie, il est impossible d’altérer la vérité, la reconnaissance ne repose que sur la volonté : celle-ci est toujours égale à elle-même ».↩︎
Art. 310-3 C. civ. : « La filiation se prouve [notamment] par l'acte de reconnaissance ».↩︎
Pour une vigoureuse contestation de l’analyse de la Cour de cassation, v. Jean Garrigue, « L’auteur d’une reconnaissance mensongère : peut-être un fraudeur mais pas un faussaire … », RJPF, n° 287, 1er mars 2024.↩︎
Comp. la justification différente retenue pour aboutir à la même solution par Crim. 8 mars 1988, n° 87-92108 : « la reconnaissance mensongère d'un enfant naturel dans un acte de l'état civil ne constitue pas en soi un faux punissable, cette reconnaissance pouvant toujours, en vertu de l'article 339 du Code civil, être contestée par son auteur lui-même ».↩︎
Stéphanie Hennette-Vauchez, « L’analyse juridique du genre », in Rafael Encinas de Munagorri, Stéphanie Hennette-Vauchez, Carlos Herrera, Olivier Leclerc (dir.), L’analyse juridique de (x), Kimé, 2016, p. 113 et s.↩︎
En ce sens, v. Jean Garrigue, préc.↩︎
Sur la distinction entre reconnaissance « de complaisance » et reconnaissance « frauduleuse », v. not. Circulaire du 28 octobre 2011 relative aux règles particulières à divers actes de l’état civil relatifs à la naissance et à la filiation, NOR : JUSC1119808C, n° 264 et s.↩︎
Sur la défense de l’ordre « national » et l’ordre « du genre » par le ministère public, v. Lisa Carayon et Marc Pichard, « L’ordre public, c’est juste de l’ordre ? Le ministère public, les personnes et les familles », Délibérée, 2024, vol. 21, p. 31 et s.↩︎
Loi adoptée par le Bundestag le 12 avril 2014, entrée en vigueur au 1er novembre 2024, Pierre Michel, « La loi sur l’autodétermination du genre entre en vigueur : l’Allemagne montre-t-elle la voie ? », Le club des juristes, 7 novembre 2024.↩︎
C. civ., art. 61-6.↩︎
Réponse ministérielle du 5 décembre 2023 à la question écrite n° 6107 relative au nombre de changements de sexe depuis 1993, JORF 5 décembre 2023, p. 10955.↩︎
Circulaire du 10 mai 2017 de présentation des dispositions de l’article 56 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle concernant les procédures judiciaires de changement de prénom et de modification de la mention du sexe à l’état civil, NOR : JUSC1709389C.↩︎
82% en 2022 d’après la même étude.↩︎