Traitement carcéral des femmes, sens de la peine et distinction des sexes au temps de la Révolution française

















Nicolas Lumbroso

Résumé :

Jusqu’à l’émergence des études de genre dans les années 1980, le traitement judiciaire et carcéral des femmes sous la Révolution française est resté un champ partiellement exploré, les historien·nes s’étant surtout focalisé·es sur la prison révolutionnaire et républicaine au temps de la « Terreur ». Pourtant, un corpus dense et diversifié – archives judiciaires, pétitions, mémoires, correspondances – met en lumière non seulement certaines spécificités du régime carcéral appliqué aux femmes, mais aussi la manière dont s’articulent les représentations sociales du corps et du statut des détenues avec des pratiques institutionnelles différenciées. Au moment où la Révolution, puis la République en guerre avec les monarchies d’Europe prétendent fonder un appareil répressif sur un universalisme juridique, c’est-à-dire l’égalité proclamée des justiciables devant la loi notamment pénale, se pose la question de sa mise en œuvre concrète face aux différenciations de genre opérées par les institutions judiciaires et carcérales. Privées de citoyenneté active et de liberté, comment les prisonnières parviennent-elles néanmoins à investir un espace d’expression et de résistance dans l’attente d’un procès incertain ou d’une exécution capitale inéluctable ? L’approche retenue considère le genre comme une construction sociale et politique : les catégories « femmes » et « hommes » ne renvoient pas à de simples réalités biologiques, mais à des assignations et des normes qui organisent la société et légitiment des hiérarchies. Cette perspective permet d’éclairer la manière dont les institutions révolutionnaires ont produit et entretenu des différences de traitement entre hommes et femmes, y compris dans le domaine carcéral. Les suppliques de condamnées réclamant leur mise en liberté auprès de la Convention nationale en l’an II (1793-1794) – au nom de leur âge, de leur état de grossesse ou des conditions de détention – révèlent la difficulté de concilier l’universalisme prétendu de la loi pénale avec les hiérarchies de genre. L’article entend analyser cette tension, en articulant la logique genrée des pratiques révolutionnaires et une lecture critique des hiérarchies qu’elle institue, afin de mettre au jour les résistances, stratégies et expériences des femmes incarcérées.

Mots-clés : Révolution française ; femmes ; prison ; distinction des sexes ; hiérarchies de genre, agentivité.

Abstract :

Until the rise of gender studies in the 1980s, the judicial and carceral treatment of women during the French Revolution remained a relatively neglected field. Historians largely concentrated on revolutionary and republican imprisonment during the so-called « Terror », leaving aside the specific experiences of female detainees. Yet a rich and varied body of sources – judicial archives, petitions, memoirs, and correspondence – reveals not only distinctive features of the carceral regime applied to women, but also the ways in which social representations of the female body and status intersected with differentiated institutional practices. As the Revolution, and later the wartime Republic, claimed to build a repressive apparatus grounded in juridical universalism – that is, the proclaimed equality of all citizens before the law – a tension emerged between this ideal and the gendered distinctions embedded in judicial and prison institutions. Deprived of both active citizenship and freedom, imprisoned women nonetheless managed to carve out spaces for expression and resistance while awaiting an uncertain trial or an inevitable execution. This article approaches gender as a social and political construct: the categories « women » and « men » are understood not as biological givens but as normative assignments that structure society and legitimise hierarchies. From this perspective, revolutionary institutions appear as both producers and reproducers of gendered inequalities, including in the carceral sphere. The petitions addressed by female prisoners to the National Convention during Year II (1793–1794) – invoking their age, pregnancy, or conditions of detention to request release – expose the difficulty of reconciling the universalist claims of penal law with enduring gender hierarchies. By examining these tensions, the article explores how gendered logics shaped revolutionary practices and how imprisoned women resisted, adapted, and negotiated within the confines of a system that simultaneously invoked equality and enacted difference.

Keywords : French Revolution; women ; prison ; sexual distinction ; gender hierarchies ; agency.

  1. L’étude croisée de l’histoire de la Révolution française et de l’histoire des femmes a connu d’importants développements depuis une trentaine d’années, sous l’impulsion d’historiennes françaises telles que Dominique Godineau1, Martine Lapied2, Marie-France Brive3 ou Anne Verjus4, mais aussi anglophones comme Lynn Hunt5 et Suzanne Desan6. Ces dernières ont particulièrement interrogé l’engagement militant des parisiennes dans l’événement révolutionnaire et la question de la citoyenneté des femmes sous la Révolution. À la faveur de ces travaux, nourris par les questionnements féministes des années 1970, l’histoire des femmes n’est plus une « parenthèse » en marge de l’histoire révolutionnaire7, mais un objet d’étude à part entière.

  2. Le regain d’intérêt suscité par les approches biographiques8 et le moment commémoratif de 1989 a contribué à sortir de l’ombre des figures telles qu’Olympe de Gouges, Mary Wollstonecraft, Théroigne de Méricourt, Louise de Kéralio ou Claire Lacombe. Ce « renouveau » historiographique9 a aussi été interprété comme la redécouverte d’un courant proto-féministe en Europe10, attentif aux enjeux sociaux et politiques de l’émancipation des femmes aux XVIIIᵉ et XIXᵉ siècles. Si la place des femmes dans l’espace politique révolutionnaire a ainsi été largement réévaluée, l’histoire de la justice et des pratiques carcérales demeure peu développée sous l’angle plus général du genre et se réduit, le plus souvent, à l’étude de quelques parcours de femmes emblématiques de la période de la « Terreur »11.

  3. Des chercheurs comme Jean-Claude Farcy ont souligné le relatif recul des études consacrées à l’histoire du droit pénal depuis les années 1980-1990, au profit de débats contemporains sur les politiques pénitentiaires12. La prison révolutionnaire et républicaine, de 1789 à l’an III, est le plus souvent étudiée à travers le prisme de l’exception politique, occultant ainsi les prisons de droit commun. Cette approche restrictive délaissait une série de pratiques et de situations révélant combien la distinction de genre pesait sur le traitement judiciaire et carcéral. L’explication de ces « prisons oubliées de la Révolution »13 tient au fait que l’historiographie fait naître la prison dite moderne à partir du XIXe siècle, avec quelques nuances de la part d’historien·nes sur cette segmentation historique14. C’est dire l’étendue des champs encore à explorer d’une histoire judiciaire et carcérale sous l’angle du genre15, l’essentiel des travaux scientifiques relatifs aux prisons de femmes prenant souvent comme point de départ la fin du premier Empire ou la Restauration16.

  4. L’invisibilité ou la sous-représentation à la fois sociale et historiographique des femmes judiciarisées – ces « oubliées de l’histoire » selon l’expression de Michelle Perrot17 – ne doit pas masquer leur présence réelle dans l’univers carcéral à la fin du XVIIIᵉ siècle. La proportion de détenues pouvait atteindre localement entre 15 et 25 % de la population carcérale, soit une part bien plus élevée qu’aujourd’hui où elle oscille autour de 3 à 5 %18. Ce contraste invite à replacer le sujet non pas seulement en termes numériques mais de regard porté par les institutions et les historien·nes sur la composition de la population pénale. C’est à ce titre qu’un réexamen au prisme du genre, nourri par des corpus variés – archives législatives et judiciaires ou sources de l’intime (journaux, correspondances, mémoires, billets d’adieu)  – apparaît pertinent. L’analyse historiographique récente a montré les liens étroits entre histoires pénale et carcérale, en croisant l’histoire des femmes, de la délinquance et de l’enfermement. Au-delà d’une simple réintégration des femmes dans le récit révolutionnaire, il s’agit de savoir comment les catégories de sexe19 structurent les pratiques judiciaires et carcérales.

  5. Plusieurs travaux ont souligné l’« agentivité » des femmes – leur capacité à agir et résister dans la contrainte carcérale – permettant de dépasser une lecture purement victimaire20. Si l’approche foucaldienne a profondément marqué l’histoire des institutions disciplinaires, du contrôle social des corps et des comportements21, elle n’intégrait pas les enjeux de genre. L’apport décisif de Joan W. Scott22 et de l’historiographie ultérieure a été précisément de faire du genre un « outil analytique » et « opérationnel »23 permettant d’appréhender les rapports sociaux entre les sexes, tels qu’ils se traduisent dans les dispositifs juridiques, les pratiques pénales et les productions discursives issues de l’expérience carcérale.

  6. La présente étude vise à montrer comment en matière de régime carcéral, terme préférable à celui plus moderne de pénitentiaire24, la Révolution française, tout en proclamant le principe d’égalité devant la loi pénale et en instituant la prison comme peine, a maintenu ou recomposé des formes de distinction de genre dans l’exécution des peines. Une première partie s’intéressera à l’émergence d’un appareil carcéral révolutionnaire à l’épreuve du genre (I). En parallèle, il s’agit d’analyser comment les femmes, privées de citoyenneté et enfermées, ont néanmoins investi l’espace carcéral pour développer des stratégies d’expression, de résistance et des pratiques spécifiques, jusqu’à l’épreuve de la maternité en prison. En effet, la maternité, loin d’être un simple statut biologique, devient en prison un registre d’action – juridique, rhétorique et corporel – que les détenues mobilisent pour négocier, contester ou infléchir leur sort, tout en subissant les limites genrées (II).

I. L’amorce d’un appareil carcéral révolutionnaire à l’épreuve du genre

  1. Placée au cœur du nouvel ordre social, l’égalité devant la loi concernait d’abord les citoyens actifs, à l’exclusion des femmes et de certains hommes (notamment les non-propriétaires avant 1792). Dans le domaine judiciaire et carcéral, la notion d’égalité s’est ainsi immédiatement heurtée aux distinctions de genre (A). La prison politique de la période dite de la « Terreur », tournée vers la répression des suspect·es et l’élimination des ennemi·es de la République, semble avoir relativisé ces distinctions de genre ou de rang au nom de l’urgence répressive (B).

A. La peine carcérale au miroir des représentations sociales du XVIIIe siècle

  1. Inspiré par les idées réformistes des Lumières, notamment sous l’influence de Cesare Beccaria25, et des modèles étrangers, le législateur révolutionnaire procède à un encadrement des motifs et modalités de l’enfermement, en réaction aux supplices corporels et aux lettres de cachet. Dans le nouvel édifice répressif, les peines privatives de liberté (fers, réclusion, gêne, détention) deviennent non plus un moyen d’appréhender la personne (du latin prehensio, action de prendre quelqu’un au corps) à titre préventif dans l’attente du jugement ou de son exécution, mais un moyen de punir26. Si une réflexion de sensibilité philanthropique et hygiéniste s’amorce en matière d’enfermement carcéral avec les travaux de François Doublet (1751-1795)27, ceux de John Howard (1726-1790)28 et Jeremy Bentham (1748-1832) dont Mirabeau se fait l’écho à l’Assemblée nationale constituante à travers son Rapport sur les maisons d’amélioration (1790)29, il reste que l’échelle des peines est pensée avant les possibilités matérielles de leur application dont la mise en œuvre est laissée à la charge des corps administratifs des départements pour l’établissement des maisons d’arrêt, de justice et prisons pénales30. Il n’y a pas encore de véritable élaboration d’un projet ou programme de politique carcérale. La loi du 10 vendémiaire an IV-2 octobre 1795 concrétisera la centralisation politique de l’administration des prisons en la plaçant sous l’autorité du ministère de l’Intérieur. La Révolution marque donc un tournant dans la manière de concevoir une nouvelle pénalité et les débuts d’une « science des peines »31. La société de la période révolutionnaire rompt avec l’Ancien Régime sans pour autant devenir égalitaire. La prison en est l’un des lieux d’observation privilégiés.

  2. À l’aube de la prison moderne qui se cristallisera au XIXᵉ siècle, les espaces et régimes carcéraux de la Révolution présentent une physionomie profondément marquée par les disparités sociales, juridiques et la distinction de genre. La prison révolutionnaire n’est pas celle de l’égalité. Si ce terme constitue un principe fondateur du discours révolutionnaire, son contenu demeure pluriel et contradictoire, proclamant une égalité civile et pénale des citoyens devant la loi tout en excluant les femmes de la citoyenneté politique et en laissant persister des inégalités sociales et matérielles. En effet, les lieux d’enfermement, en villes ou à la campagne, présentent une grande diversité depuis les prisons d’État à Vincennes ou Paris (comme la Bastille ou la Conciergerie), les maisons de force (pour les femmes et les vieillard·es) et les hôpitaux jusqu’aux dépôts de mendicité accueillant des catégories disparates (indigent·es, vagabond·es, prostituées, militaires) aux situations pénales très différentes (prévenu·es, accusé·es ou condamné·es). À ces inégalités s’ajoutent les distinctions de genre qui ne relevaient pas seulement d’une conciliation difficile avec les principes proclamés, mais aussi de l’exclusion ab initio des femmes de la citoyenneté par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Dans la culture juridique et politique révolutionnaire, ces distinctions ne sont toutefois pas perçues comme contraires à l’égalité : hommes et femmes, pour des raisons essentialistes, sont définis comme relevant de situations sociales différentes rendant légitimes des traitements différenciés32.

  3. Dans son Rapport sur le projet de Code pénal présenté le 23 mai 1791 à l’Assemblée constituante, Lepeletier de Saint Fargeau (1760-1793) expose que « dans l’ordre des peines actuelles, l’hôpital ou la réclusion dans une maison de force, est pour les femmes ce que sont les galères pour les hommes. Privation de liberté et travail, tels sont les éléments de cette peine »33, traduisant par le recours au travail forcé la philosophie utilitariste de la peine privative de liberté. Cette différenciation genrée du régime carcéral, reprenant la hiérarchisation pénale de l’ancien droit34, conduit à inscrire la détention des femmes et des hommes dans une fiction d’équivalence35, soumis à des peines jugées comparables dans leur pénibilité et leur utilité sociale. L’égalité pénale ne s’entend pas comme identité de traitement, mais comme adaptation différenciée à des individus dont les situations physiologiques et sociales sont conçues comme distinctes et légitimatrices d’inégalités de genre36.

  4. L’appartenance ou non à la citoyenneté engendre aussi une pénalité spécifique différenciée. Concernant les peines infamantes, la citoyenneté passive des femmes – qui les exclut de la participation politique – a pour effet de réserver la dégradation civique aux seuls hommes dotés de droits politiques. Les femmes, quant à elles, sont renvoyées à d’autres formes de peines infamantes, comme le carcan37, à l’instar des étrangers et des repris de justice. Il convient toutefois de rappeler que, jusqu’à la suppression de la distinction entre citoyens actifs et passifs par la loi des 20-25 août 1792, une partie des hommes était également classée parmi les « citoyens passifs » en raison de critères censitaires. Pour les peines afflictives (travaux forcés, gêne, détention), la loi prévoit que les femmes condamnées à la peine de fers l’effectueront sous la forme de la réclusion pour le même nombre d’années dans une maison de force38.

  5. Héritière des pratiques passées39, la Révolution conserve le principe de non-mixité des lieux d’enfermement carcéral dans le Code pénal du 25 septembre 1791-6 octobre 1791 : « Les hommes et les femmes seront enfermés et travailleront dans des enceintes séparées ». Toutefois, en pratique, l’état des prisons est matière à « bricolage » autant dans l’agencement des bâtiments que des arbitrages législatifs, notamment dans le contexte de crise fiscale, monétaire et militaire du printemps 179240. La vétusté, la promiscuité et l’absence d’hygiène des lieux de détention existants (dépôts de mendicité), l’inadéquation des édifices anciens ou issus des biens nationaux faisant office de prisons pour peine, ajoutés aux coûts des réformes judiciaires et administratives, ne permettent pas réellement une séparation des âges et des sexes au sein de la population pénale, ni davantage de répondre aux nouveaux objectifs assignés à la peine (amendement et relèvement des condamné·es). Enfermé à la Conciergerie pour « brissotisme », Honoré Riouffe (1764-1813) écrit dans ses Mémoires d’un détenu pour servir à l’histoire de la tyrannie de Robespierre (1795) que la prison des femmes et celle des hommes ne sont séparées que d’une simple grille à travers laquelle elles et ils pouvaient communiquer verbalement, voire physiquement41. Confirmée dans les mémoires du comte Beugnot (1761-1835), la situation de la Conciergerie n’est pas exceptionnelle : elle est identique à la prison du Luxembourg, l’une des plus confortables de la capitale42. À Paris, les femmes sont transférées à Sainte-Pélagie où les conditions carcérales sont plus rudes qu’à la prison de l’Abbaye, et où se mélangent les prisonnières de droit commun, les femmes arrêtées pour prostitution et les criminelles. Une mixité de fait y règne par la liberté de circulation des hommes et des femmes en journée43. À côté des scènes de sociabilité relatées dans des écrits autobiographiques44, la détention collective plaçait les corps sous un contrôle permanent, exposant les prisonniers et prisonnières à des violences de nature multiple (verbales, physiques ou sexuelles).

  6. Néanmoins les témoignages insistent moins sur la mixité carcérale en tant que telle que sur la surveillance intrusive exclusivement masculine pesant sur les détenues. La dépossession du corps et la privation d’intimité, produites à la fois par la promiscuité et par le regard permanent du personnel masculin (concierges, geôliers, porte-clefs, guichetiers, greffiers) ainsi que d’intervenants extérieurs (médecins, ecclésiastiques, magistrats), étaient vécues comme une sujétion oppressive et une atteinte à la dignité. Dans une lettre du 16 juillet 1793, Charlotte Corday (1768-1793) se plaint auprès du Comité de sûreté générale de « l’indécence » de la présence nocturne de gendarmes dans sa cellule et « renouvelle la prière de [la] laisser dormir seule »45, réclamant non pas tant une non-mixité qu’un encellulement individuel, face à une présence masculine ressentie comme insupportable. À la Conciergerie, Marie-Antoinette subit elle aussi ce dispositif de contrôle sous le regard de deux sentinelles46. Les récits personnels des femmes détenues insistent sur les pratiques d’ingérence et de contrainte inhérentes à l’absence de séparation avec les hommes. In fine, mixité et surveillance masculine sont deux dimensions qui se cumulent souvent mais ne se confondent pas : la première relève de l’organisation spatiale et des flux internes de la population pénale ; la seconde, des rapports d’autorité et de contrôle exercés par des hommes sur les femmes détenues. Les sources dénoncent prioritairement cette seconde dimension, révélatrice d’une recomposition révolutionnaire des rapports de pouvoir et de genre.

  7. Parallèlement, cet enfermement dans des conditions d’insalubrité notoire conduit le 31 janvier 1793 la Convention nationale, après le compte rendu de Garat (1749-1833), ministre de la Justice, sur l’état des prisons de Paris, à enjoindre aux corps administratifs de veiller à l’exécution des lois sur les prisons et à charger quatre de ses Comités (législation, guerre, finances et domaines) de présenter sous quinzaine un rapport sur les maisons de justice, de correction, d’arrêt et autres prisons de la République, ainsi que sur les moyens d’adoucir le sort des détenu·es et d’établir entre eux un traitement égal47. Garat y dénonce non seulement le manque d’hygiène et la promiscuité, mais aussi le non-respect des règles de séparation prévues par le Code pénal de 1791, notamment selon l’âge et le sexe. L’incapacité pratique à assurer cette non-mixité révèle l’écart persistant entre la norme législative et les réalités carcérales. La confusion de la population carcérale s’accentue à partir du printemps 1793 avec une radicalisation de la répression dans une République en guerre48. L’entrée dans un régime d’exception transforme les prisons de droit commun en prisons politiques vers lesquelles affluent les suspect·es d’actes de fédéralisme, de conspiration ou de contre-Révolution.

B. Le genre en temps d’exception politique

  1. L’historiographie de la Révolution française des vingt dernières années a revisité le concept de « la Terreur » tant dans sa nature que dans sa réalité et sa temporalité. Les travaux de Michel Biard et Marisa Linton, Jean-Clément Martin, Timothy Tackett et Sophie Wahnich notamment ont mis en évidence la complexité d’un phénomène multifactoriel (urgence, émotions, radicalisation des oppositions politiques) présenté comme un « système » lors de la phase dite thermidorienne de la Convention nationale49. Le passage progressif à un temps d’exception politique se concrétise par l’élaboration d’une répression visant à atteindre tou·tes les adversaires de la Révolution et de la République naissante, sans distinction des sexes ou des rangs. La lutte contre les ennemi·es de l’intérieur avec les soulèvements de l’Ouest conduit à la mise en place de la procédure dite de mise hors de la loi (décret du 19 mars 1793) et à une criminalisation de l’émigration face aux menaces militaires aux frontières (décret du 28 mars 1793). Le Tribunal criminel extraordinaire institué le 10 mars 1793 devient l’un des rouages de la justice d’exception chargée de neutraliser les entreprises de conspiration. La suspicion généralisée trouve une traduction juridique avec le décret du 17 septembre 1793 connu sous le nom de « loi des suspects » au champ d’application très étendu50. Ce mouvement répressif s’accompagne d’une vague d’arrestations suivie de détentions prolongées, sans horizon clair de jugement, qui touche indistinctement hommes et femmes. Pour ces dernières, l’attente pouvait durer plusieurs mois, au point que certaines apparaissent dans les sources moins comme des prisonnières que comme de véritables pensionnaires. Pour celles et ceux qui attendent leur procès, l’issue n’oscille plus pour les crimes politiques et assimilés (fabrication de faux assignats) qu’entre condamnation à la peine capitale ou détention de sûreté sine die. Reste à déterminer si ces expériences s’inscrivent dans un régime carcéral commun ou se déploient selon des modalités genrées. Autrement dit, dans ce contexte de radicalisation de la Révolution, l’histoire de « la Terreur » concerne-t-elle les hommes et les femmes de la même manière ou bien est-il possible de déceler des disparités genrées dans l’application des mesures privatives de liberté ?

  2. Des études régionales ont permis de montrer certaines spécificités dans la mise en œuvre de la justice de l’an II à l’égard des femmes. Karine Poulard s’est intéressée aux cas de celles arrêtées comme « suspectes » et incarcérées dans les prisons à Nantes et en Loire-Atlantique entre septembre 1793 et août 179451. À partir de 960 cas recensés et d’un vaste corpus de correspondances souvent inédites, trois aspects de la répression appliquée aux femmes ont été mis en lumière. En premier lieu, le nombre de condamnations à la peine capitale était moins élevé que pour les hommes mais les conditions de leur détention étaient plus difficiles et longues. En second lieu, l’autrice constate l’existence d’un lien entre leur exclusion du champ politique et la difficulté d’obtenir leur mise en liberté comparativement aux hommes. En effet, la possibilité pour les détenues d’apporter aux autorités révolutionnaires la preuve de leur patriotisme et de leur civisme était plus limitée que pour les hommes titulaires de la citoyenneté active – voire illusoire. Enfin, la répression de l’an II trouvait un critère d’application suffisant dans le lien conjugal et familial. En ce sens, la relation de parenté ou d’alliance avec une personne relevant de l’une des catégories de suspect rendait possible l’exercice de mesures coercitives. Suivant cette logique, les femmes incarnaient une figure paradoxale de suspectes, jugées et punies au titre d’une appartenance familiale plus que de leurs propres actes.

  3. Ce mécanisme d’imputation par alliance apparaît ainsi avec force dans le cas de la veuve du général vendéen Bonchamps. Écrouée à la prison du Bon Pasteur de Nantes le 3 germinal an II-23 mars 1794 sur décision du comité révolutionnaire d’Ancenis52, elle avait été condamnée à la peine de mort par la commission militaire du Mans le 16 germinal an II-5 avril 1794. Sa situation illustre combien le seul lien conjugal pouvait suffire à faire peser sur une femme la responsabilité politique de son mari et la faire condamner. Le 29 nivôse an III-18 janvier 1795, sur le rapport du représentant du peuple Pons de Verdun (1759-1844) au nom du Comité de législation, un décret annula le jugement en ce « qu’il est prouvé que la citoyenne Bonchamps, à la suite d’une action, a sauvé la vie à un grand nombre de patriotes » et « qu’il est d’ailleurs conséquent au décret du 14 frimaire de la faire jouir de l’amnistie qu’il prononce »53. L’épouse se voit ainsi attribuer un acte politique à valeur républicaine qui relevait en réalité de la mémoire de son mari, le général vendéen, et de son geste de clémence à Cholet. Cette logique de solidarité conjugale était asymétrique dans la mesure où les époux n’étaient pas poursuivis pour les positions ou les actions de leurs épouses, ce qui souligne combien la justice révolutionnaire reconduisait une hiérarchie patriarcale dans l’appréciation des responsabilités.

  4. Plus récemment, le cas de la prison nantaise du Bouffay a été étudié pour la période directoriale. Celle-ci se caractérise à la fois par un discours politique affichant la volonté de parachever la réforme carcérale de 1791 et par la persistance de pratiques héritées de l’an II et de l’an III54. L’ambition du pouvoir exécutif de réorganiser la prison pénale en profondeur – en assurant la sécurité et la séparation des détenu·es selon leur genre ou la nature (délictuelle ou criminelle) de leur condamnation – se heurte à des difficultés financières et humaines, dont il rend « la Terreur » responsable. Malgré les intentions réformatrices, la prison demeurait un espace de misère, d’inégalités et de violence, où la séparation par catégories pénales restait largement inappliquée. Ce cas illustre bien le décalage durable entre le principe d’égalité devant la loi et les réalités de l’incarcération. Les femmes du Bouffay, qui représentaient plus de 20 % des détenu·es, étaient pour l’essentiel condamnées pour des « délits d’ordre public » tels que la prostitution. La prison apparaît ainsi comme un lieu où se rejoue la stigmatisation sociale des femmes pauvres et marginalisées, placées dans une position de vulnérabilité structurelle.

  5. L’étude des pratiques carcérales révolutionnaires montre combien la proclamation d’une égalité pénale s’est heurtée à la persistance de distinctions fondées sur le genre, qu’il s’agisse des conditions d’enfermement ou de la responsabilité imputée par le biais des solidarités familiales. Mais ces distinctions ne s’arrêtent pas aux dispositifs institutionnels. Elles se traduisent aussi dans les expériences vécues et dans les modes d’expression des détenues. C’est en ce sens que l’analyse gagne à être déplacée du registre des distinctions de genre telles qu’elles étaient formulées à l’époque vers celui des hiérarchies de genre qui permettent d’interroger les rapports de pouvoir et les formes d’agentivité féminine en prison.

II. Maternité et agentivité en prison : les tensions d’un universalisme pénal genré

  1. Lieu de contrainte et de surveillance, la prison est aussi un espace d’énonciation où se donnent à voir des prises d’initiative – toujours situées, intermittentes et négociées – que l’on nomme ici « agentivité ». Il ne s’agit pas d’en faire un héroïsme, mais de saisir un ensemble de pratiques dans les interstices de l’institution à la fois dans les registres politiques (écrits de captivité, protestations, mobilisations collectives) (A), et dans les registres sociaux et corporels où la maternité en détention opère à la fois comme ressource stratégique et comme vecteur d’assignation et de contrôle (B). Cette perspective met au jour l’écart entre l’universalisme pénal proclamé et les conditions concrètes de l’enfermement, ainsi que les modalités genrées de la peine. Ces deux dimensions montrent comment le genre configure l’expérience carcérale et ouvre, au cœur même de la contrainte, des marges d’action et de résistance.

A. La prison, lieu de production et d’expression politique des détenues

  1. Délaissée par l’historiographie jusqu’à une époque récente, la prise de parole publique des femmes55 représente un « gisement historique incomparable »56 par la diversité de ses formes et l’étendue des sources archivistiques. Écrits du for privé ou ego-documents, pétitions, correspondances et récits autobiographiques des XVIIIe et XIXe siècles57 ont connu depuis une vingtaine d’années un renouveau qui s’est également affirmé en histoire du genre58. Envisagée dans le contexte carcéral, l’expression publique prend la coloration d’un acte politique de résistance à la règle, d’une évasion intellectuelle franchissant l’enclos. La prison produit ainsi une véritable « littérature de captivité »59 : loin de se réduire à des témoignages, ces textes contribuent à la construction de savoirs sur le genre, en rendant visibles les conditions spécifiques de l’enfermement et en mettant en lumière la manière dont la contrainte carcérale reconfigure les rapports sociaux de sexe. Quelles formes et modalités peuvent prendre ces récits de détenues dans un espace réduit de liberté ?

  2. Deux modes opératoires retiendront l’attention en raison du contenu et de la portée politiques des représentations sur la prison : les pétitions individuelles et les mémoires60. Les premières à l’allure de suppliques sollicitant des autorités publiques une mesure d’élargissement sont généralement concomitantes à la détention. Les seconds dont l’écriture débute le plus souvent en détention ne connaissent une postérité éditoriale qu’après la libération ou la disparition de leurs autrices. Combinant des considérations d’ordre personnel avec le récit subjectif d’événements politiques, ces deux formes d’expression publique obéissent néanmoins à des logiques et objectifs propres. Les pétitions individuelles s’inscrivent dans une stratégie rhétorique d’auto-justification et de reconstruction du vécu, une manière de se raconter en Révolution et en prison, dans le dessein d’obtenir une fin de peine anticipée. À l’innocence clamée s’ajoute l’adhésion affichée à la Révolution61. Arrêtée le 20 juillet 1793, Olympe de Gouges prend à témoin l’opinion publique et les représentants du peuple en parvenant à faire placarder au mois de septembre 1793 dans les rues de la capitale une feuille intitulée Une patriote persécutée à la Convention nationale62. S’intéressant aux lettres de femmes détenues en l’an II pour cause de prostitution à la prison de la Salpétrière et présentées après les événements du 9 thermidor an II-27 juillet 179463, Clyde Plumauzille montre « la puissance d’agir » de leurs revendications64. L’intelligence avec laquelle elles usent d’un répertoire des émotions et des caractères propres à leur condition sociale et à leur genre révèle une stratégie de résistance et de négociation. C’est ainsi qu’elles mettent en avant leurs différentes fragilités sociales et économiques à travers leur infortune, leur état de misère et leur enfermement dont elles dénoncent l’arbitraire et l’inadaptation, attendant depuis plus d’un an un procès dont elles espèrent justice. Elles bénéficient des dispositions favorables des Conventionnels dits « Thermidoriens » pour un retour vers le droit commun et de libération massive des républicains patriotes.

  3. Parmi les mémoires – plus d’une centaine – sur la Révolution écrits par des femmes et publiés de la Restauration jusqu’à la première décennie du XXe siècle65, ceux comportant le récit de leur confrontation à la répression et à la prison révolutionnaires se comptent en nombre restreint. Cette rareté s’explique d’abord par une aptitude à l’écriture qui reste généralement l’apanage des classes bourgeoises ou aristocrates ou des secrétaires à leur service. Elle résulte aussi, pour certaines, d’une mort prématurée comme Madame Roland (1754-1793), pour d’autres par le legs tardif de leurs souvenirs, à distance des événements vécus. Mêlant fiction et réalité, entre logique de transmission familiale et témoignages à destination de l’opinion publique, les mémoires et autres formes littéraires assimilées (correspondances, journaux personnels) ont fait l’objet d’une réévaluation en tant qu’objet historiographique66. Pour ces femmes mémorialistes, à la fois actrices, victimes ou rescapées de la Révolution, l’acte d’écrire l’expérience carcérale depuis le fond du cachot ou à l’approche de l’échafaud, ou plus de trente ans après dans le confort du logis, est un geste politique de résistance et de réparation67, une manière « d’entrer dans l’histoire » à travers « une littérature de survivantes […], une littérature qui répond à la nécessité psychologique de pleurer les morts et de réclamer justice »68. Arrêtée le 1er juin 1793 puis détenue entre juin et octobre 1793 successivement à la prison de l’Abbaye, de Sainte-Pélagie puis de la Conciergerie, Manon Roland, mettant en action une identité de femme de lettres assumée, fait dans les Notes historiques le récit de faits en même temps que la justification politique de son mari, ancien ministre de l’Intérieur, et des députés girondins. En octobre 1793, elle entreprend ses Mémoires particuliers et ses Dernières pensées69. Ce statut de femme lettrée occupe aussi le texte de son Projet de Défense devant le Tribunal révolutionnaire en mobilisant son identité d’écrivaine et de femme portée sur la chose publique tout en reconnaissant explicitement les « bornes imposées par son sexe »70. Dans le contexte carcéral, cette mise en récit témoigne à la fois de l’intériorisation des contraintes genrées et de la tactique rhétorique qui présente l’action comme conforme aux limites imposées. Son écriture n’éclaire pas seulement sa trajectoire personnelle. Elle donne à voir la manière dont le traitement judiciaire et carcéral des femmes se doublait d’une contrainte discursive, qui les obligeait à justifier leur rôle politique.

  4. Le cas de Barbe Henry d’Aulnois, épouse Meslier de Rocan (1776-1836) vient également éclairer le traitement pénal des condamnées politiques en l’an II. Jeune protagoniste dans « l’affaire des dragées » aussi connue dans l’historiographie sous le titre des « Vierges de Verdun »71, elle entreprend en 1827 à destination de sa fille le récit de ses tourments judiciaires survenus plus de trente années auparavant. Étroitement liée à la capitulation de la ville de Verdun le 2 septembre 1792 face à l’invasion par les armées prussiennes, l’affaire mettait en cause un groupe d’habitant·es et notamment un cortège de jeunes femmes qui s’étaient rendues au camp ennemi pour offrir fleurs et dragées au souverain de Prusse. Barbe Henry n’avait alors que seize ans. Après l’émoi général autour de ces événements, les faits portés à la connaissance de l’Assemblée législative finissante puis de la Convention nationale suscitèrent la vengeance nationale. Placée avec une autre jeune fille, Claire Tabouillot, au couvent des Bénédictines de Saint-Maur à Verdun puis transférée à Saint-Mihiel, elle fut finalement incarcérée avec les autres inculpé·es à Paris et écrouée à la Conciergerie dans l’attente de son jugement par le Tribunal révolutionnaire. Après avoir été soumise au « rapiotage » (sorte de fouille et confiscation d’objets effectuée par les geôliers), elle relate sa brève rencontre avec le député Hérault de Séchelles (1759-1794)72 attendant son procès devant le Tribunal révolutionnaire : « On nous fit traverser une pièce occupée par des hommes détenus, laquelle séparait la cour des femmes du Guichet. Un de ces hommes que je reconnus depuis pour avoir été Hérault de Séchelles m’adressa la parole en ces termes : “Jeune fille, votre innocence, votre jeunesse ne vous sauvera pas ; apprenez à mon exemple mourir avec courage” »73. À travers ces ultimes paroles du député rapportées par la jeune prisonnière, l’héroïsme devant l’adversité carcérale s’entend au masculin. Le sens du sacrifice révolutionnaire et républicain s’incarne dans une figure d’homme érigée en modèle prescriptif pour les femmes. Ce cadrage fait écho à l’ambivalence décrite par Honoré Riouffe à propos de Madame Roland : d’un côté une force de caractère, une « assurance ordinaire » et le courage « d’un grand homme » ; de l’autre « son sexe reprenait le dessus, et on voyait qu’elle avait pleuré au souvenir de sa fille et de son époux. Ce mélange d’amollissement naturel et de force la rendait plus intéressante »74. L’héroïsme révolutionnaire – notion récemment investie par l’historiographie qui en a montré les contours variables – consisterait, pour les détenues, par l’injonction à dépasser, au nom de leurs opinions ou de leur foi, la « nature » assignée à leur condition, dans l’expérience carcérale et plus encore à l’approche de la mort75.

  5. Certaines figures féminines réclament leur procès et préfèrent mourir pour leurs convictions que de s’évader, telles Manon Roland ou Olympe de Gouges76 qui transforme la devise révolutionnaire dans une apostrophe passée à la postérité : « Que l’on me juge donc !... La mort ou la liberté »77. Parfois, la résistance passe par un acte purement symbolique, comme l’envoi de mèches de cheveux avant la montée de l’échafaud pour les faire échapper à la justice révolutionnaire78. Parallèlement à un martyrologue essentiellement masculin dont témoignent les premières « panthéonisations » (Lepeletier de Saint-Fargeau, Marat, Mirabeau)79, la Révolution valorise un héroïsme féminin circonscrit, célébré dans le Recueil des actions héroïques et civiques signalant des faits de patriotisme et de bravoure de femmes combattant dans les armées pour la République (jusqu’au décret du 30 avril 1793 qui les en exclut) ou lors des événements populaires parisiens (prise des Tuileries le 10 août 1792)80. Cette timide mise à l’honneur d’un « agir révolutionnaire » des femmes ne paraît en rien envisageable pour des prisonnières suspectes, poursuivies ou jugées pour avoir nui à la Révolution et au régime républicain. C’est plutôt une entreprise d’anti-héroïsation qui s’exerce à leur égard : femmes contre-révolutionnaires accusées de complot avec l’étranger (tel le complot breton dit de « La Rouërie » au printemps 1793), émigrées, insurgées de l’Ouest, ou encore figures spectaculaires comme Charlotte Corday, coupable de l’assassinat de Marat le 13 juillet 179381. Dans tous ces cas, le discours révolutionnaire polarise l’agir des femmes : héroïsme masculin lorsqu’il sert la Nation, infamie lorsqu’il le contredit, voire qualifié d’excès criminel.

  6. Pour autant, une autre forme d’héroïcité féminine peut se lire dans les écrits et les attitudes des prisonnières elles-mêmes, sous la forme d’une résistance quotidienne : endurance morale face à l’épreuve de la détention, relectures critiques et personnelles des événements politiques, affirmation d’une dignité malgré l’opprobre. Cette « héroïcité carcérale » dessine un contrepoint discret mais réel au discours officiel, révélant la manière dont les femmes pouvaient réinvestir leur captivité en espace d’action et de subjectivation. Hormis des cas isolés (comme Olympe de Gouges), les pétitions de détenues mettent en œuvre un processus d’héroïsation reproduisant les hiérarchies de genre en mettant en avant, à l’appui de leurs suppliques, leur utilité sociale dans la sphère domestique et leur adhésion aux valeurs politiques de la Révolution, sans pour autant chercher à prendre part aux affaires publiques réservées aux citoyens. Le poème devenu célèbre d’André Chénier (1762-1794), La jeune captive82, composé pendant sa détention, porte l’image d’une captivité vécue dans une passivité résignée et une impassibilité sacrificielle quasi-mystique qui entre en contraste avec les aspirations d’émancipation et de participation au politique que l’on trouve en Olympe de Gouges ou Manon Roland.

  7. Condamnées à la peine capitale le 5 floréal an II-24 avril 1794, Barbe Henry et Claire Tabouillot adressèrent après le moment thermidorien une demande de révision de leur jugement à la Convention nationale83. Soutenues par leurs proches et par les autorités locales, elles obtinrent d’abord une liberté provisoire pour raison de santé84, puis, par un arrêté du 17 pluviôse an III-5 février 1795, l’annulation définitive de leur condamnation. Le Comité de législation dénonça « l’arbitraire le plus criant », relevant notamment que « la faiblesse de leur âge et de leur sexe » rendait invraisemblables les intentions de conspiration qu’on leur avait attribuées85. Ce recours à des procédés argumentatifs mêlant innocence politique et faiblesse des femmes souligne combien le traitement judiciaire des femmes pouvait s’appuyer, pour les condamner comme pour les disculper, sur des catégories genrées de vulnérabilité et de respectabilité. Leur libération procède d’un renversement des stéréotypes de genre : elles sont jugées innocentes non pas parce qu’elles seraient égales en droits devant la loi, mais parce que leur sexe et leur âge les placeraient en dehors du champ même de l’action politique et criminelle.

  8. Si l’on observe, à travers l’expression politique et littéraire des prisonnières, des formes d’agentivité face à la contrainte carcérale, la maternité en constituait l’une des modalités les plus saillantes : registre d’action et de négociation mobilisé par les détenues pour infléchir leur sort. Dans le même mouvement, parce qu’elle est pensée par l’institution comme « nature » et « fonction » à protéger et à gouverner, la maternité devient aussi un opérateur de différenciation pénale qui organise des régimes de peine dits adaptés. L’analyse assume cette ambivalence : la maternité est à la fois appréhendée comme pouvoir d’agir situé, tout en montrant comment ce même registre sert de vecteur d’assignation et de contrôle.

B. Maternité et différenciation carcérale : les tensions d’un universalisme genré

  1. Dans la justice révolutionnaire, la grossesse constituait une situation singulière qui entraînait la suspension temporaire de l’exécution de la peine capitale. Mais cette spécificité ne doit pas masquer l’ensemble plus large des différenciations appliquées aux femmes incarcérées : leur traitement pénal ne se réduisait pas à cette mesure dérogatoire, et la maternité ne saurait être perçue comme la seule modalité de leur expérience carcérale. Elle apparaît plutôt comme un prisme privilégié qui révèle les tensions entre les principes égalitaires proclamés et les ajustements concrets imposés par les rapports de genre.

  2. Tirant ses origines de l’Ordonnance criminelle du 26 août 1670 reportant l’exécution jusqu’à la naissance de l’enfant (Titre XXV, art. 23), cet usage judiciaire ne fut pas remis en cause par les lois révolutionnaires. S’agissant de l’exécution des peines infamantes, un décret du 31 août 1792 prévoyait une dispense de peine et d’exposition publique pour les femmes enceintes condamnées au carcan. Toutefois, le législateur n’alla pas jusqu’à octroyer l’exemption86 et substitua au carcan la peine d’un mois de prison à compter du jugement avec affichage en place publique. Comment ce traitement pénal des femmes enceintes évolua-t-il avec l’entrée dans un régime d’exception et le développement d’une justice « extraordinaire » à côté d’une justice de droit commun au champ de plus en plus réduit ?

  3. Sur les 368 femmes condamnées à la peine capitale par le Tribunal révolutionnaire entre 1793 et 1795, une trentaine s’était déclarée enceinte dans l’espoir de repousser le moment de leur exécution87. Parmi les plus connues figure Olympe de Gouges qui avait déclaré une grossesse de trois semaines aussitôt après le jugement la condamnant à la peine de mort le 2 novembre 179388. Les médecins de la Conciergerie ne parvinrent pas à se prononcer nettement sur son état clinique89. Estimant qu’aucune grossesse n’avait été constatée et attendu que « d’après les règlements concernant les maisons d’arrêt, il ne doit exister aucune communication à l’intérieur et à l’extérieur entre les hommes et les femmes détenus », l’accusateur public Fouquier-Tinville demanda le 13 brumaire an II-3 novembre 1793 qu’« il soit passé outre dans les vingt-quatre heures à l’exécution »90. La lutte contre les conspiratrices et ennemi·es de la Nation l’emporta bientôt sur toute autre considération dans une République en guerre contre les monarchies d’Europe. Faisant le récit de sa détention à la Conciergerie, Riouffe décrit dans ses Mémoires « de jeunes femmes enceintes, d’autres qui venaient d’accoucher […], d’autres dont le lait s’était arrêté tout-à-coup […], jour et nuit précipités dans cet abîme »91. Deux cas de détenues retiennent l’attention.

  4. Accusée et condamnée à mort le 28 ventôse an II-18 mars 1794 pour intelligence avec des émigré·es, Louise-Sylvie de Blamont (1773-1864) adressa le 17 thermidor an II-4 août 1794 une pétition au Comité de sûreté générale en révision de son jugement. Elle y souligne le caractère dérisoire des faits retenus contre elle – quelques lettres reçues d’une tante religieuse – et invoque son état de grossesse : « Enceinte alors, je suis revenue à l’hospice où j’attendais avec effroi le moment si cher à toutes les mères, celui de donner la vie à mon enfant, lorsqu’une heureuse révolution […] a ranimé mes espérances »92. Cette formulation révèle une stratégie rhétorique fondée à la fois sur l’innocence personnelle et sur la condition maternelle. En se présentant comme femme innocente et future mère, la pétitionnaire mobilise deux registres puissants aux yeux des autorités révolutionnaires : vulnérabilité et respectabilité liées au genre, et l’humanité attachée à la maternité. Son recours illustre ainsi comment, dans le contexte carcéral, les détenues pouvaient investir la maternité comme ressource discursive pour obtenir révision et clémence, confirmant le rôle du genre dans le traitement judiciaire.

  5. Anne-Marie-Louise Mégret de Sérilly (1763-1799)93 avait subi un sort identique lors d’une audience collective le 21 floréal an II-10 mai 1794 devant le Tribunal révolutionnaire qui l’avait condamnée à la peine capitale pour conspiration. Se déclarant aussitôt enceinte de six semaines, elle parvint à faire reporter provisoirement l’exécution du jugement puis adressa une lettre datée du 17 thermidor an II-4 août 1794 : « Je ne dois la vie qu’à ma grossesse et le moment où je devais donner l’être à mon enfant était celui qui devait terminer mon existence si une heureuse révolution ne me faisait espérer pouvoir appeler d’un jugement inique qui, en envoyant des innocents à la mort, prive de malheureux enfants de leurs parents »94.

  6. Les chances d’examen des pétitions reposaient sur l’efficacité d’un réseau de solidarité entre femmes auprès des représentants du peuple siégeant dans les comités de la Convention95. Mégret de Sérilly sollicita sa cousine Pauline de Montmorin, comtesse de Beaumont, qui entretenait d’étroites relations avec Augustine-Magdeleine Pourrat (1740-1818), épouse de l’opulent banquier parisien Louis Pourrat. Cette dernière entreprit des démarches auprès du représentant Pons de Verdun pour le sensibiliser sur la situation de son amie. Le 17 septembre 1794, ce dernier invita la Convention à voter deux propositions : d’une part, le sursis provisoire à son exécution ; d’autre part, interdire le jugement pour crime capital de toute femme reconnue enceinte96.

  7. La première proposition fut aussitôt convertie en décret. Mais d’autres femmes, condamnées pour crimes de droit commun (contrefaçon d’assignats) ou politiques (propos contre-révolutionnaires, complicité d’émigration) restaient encore en attente d’une décision définitive sur leur sort97. Le 13 pluviôse an III-1er février 1795, sur le rapport de Pons de Verdun, le Comité de législation ordonna leur transfert de l’hôpital de la Salpétrière vers l’hospice national de l’Archevêché au considérant que « des femmes enceintes doivent être rangées » dans la même « classe » que les « prisonniers et condamnés malades » et « ont droit au même traitement » « pour y recevoir tous les secours et soins que leur état commande à l’humanité »98. La veuve Mégret de Sérilly fut la première à être libérée le 21 vendémiaire an III-12 octobre 1794.

  8. La seconde proposition, de portée beaucoup plus générale, ne fut discutée à la Convention que huit mois plus tard, le 23 germinal an III-12 avril 179599. Pons commença par combattre le sursis à l’exécution capitale en raison de ses aspects inégalitaires et traumatisants. Selon lui, l’attente de la naissance de l’enfant pour conduire sa mère à l’échafaud engendrait une rupture d’égalité entre les hommes et les femmes en infligeant à ces dernières une souffrance physique et morale supplémentaire par une détention prolongée de plusieurs mois qui n’existait pas dans le dispositif répressif envers les condamnés masculins : « La plus forte peine que prononce votre code pénal contre l’homme atteint et convaincu du plus grand crime, est la mort ; et cette mort, le législateur l’a voulue sans agonie, dégagée, pour ainsi dire, de toutes les angoisses qui la multiplient et qui ne font que prolonger les douleurs de ce triste moment ; il a voulu qu’elle ne put être différée plus de vingt-quatre heures après la condamnation ; comment vous écarteriez-vous, sans injustice, et sans vous mettre en contradiction avec cette loi, d’une de ses dispositions dictées par l’humanité, et consignée dans la déclaration des droits ? Pour qui vous en écarteriez-vous ? Pour un être faible, que la nature semble avoir particulièrement recommandé à la sensibilité du législateur […]. Cette pénible agonie, aux horreurs de laquelle vous la laissez en proie, peut se prolonger pendant sept ou huit mois. En avons-nous bien calculé toute la durée ? » Au nom d’une application égalitaire d’un droit pénal dégagé de toute forme de souffrance et supplice inutiles, les femmes enceintes devaient pouvoir jouir du même droit que les hommes devant la mort légale. Ce raisonnement n’amena pas pour autant l’orateur à louer la peine capitale à l’égard de cette catégorie pénale : « La naissance, ce moment qui éveille dans le sein maternel de si tendres sentiments, ne s’annoncera que pour ajouter aux douleurs de l’enfantement, celle de la plus cruelle séparation, et elle ne présentera à son imagination en délire que la perspective désespérante de l’échafaud qui l’attend »100.

  9. La Convention décréta que « le sursis provisoire à tout jugement de mort, rendu contre des femmes dont l’exécution a été suspendue pour cause de grossesse, est déclaré définitif » (art. 2). Le sursis définitif ne mettait cependant pas les condamnées à l’abri de toute sanction pénale. En effet, l’article 3 autorisait les Comités de législation et de sûreté générale à statuer en dernier lieu sur leur mise en liberté ou leur détention ultérieure. Ce sursis impactait donc l’exécution de la peine sans pour autant effacer la culpabilité. Pas moins de quinze jours plus tard, les deux comités réunis, sur rapport de Pons, firent application du décret du 23 germinal an III-12 avril 1795 en faveur des détenues pétitionnaires. La seconde proposition décrétée par la Convention interdisait à l’avenir de « mettre en jugement » toute femme reconnue enceinte « prévenue de crime emportant la peine de mort ». Plus qu’une disposition pénale spéciale imprécise, le texte instaurait surtout un empêchement procédural préalable : une femme enceinte pouvait bien être pénalement poursuivie pour un crime capital (au stade de la prévention), sans toutefois être renvoyée devant la juridiction de jugement tant que durait sa grossesse. Son champ d’application se voulait général (crimes capitaux, politiques ou de droit commun). La grossesse entrainait donc la mise en place d’un régime dérogatoire de procédure et d’exécution. Pour élargir ce régime dérogatoire non pas aux seules femmes enceintes mais à toutes les femmes, après ce vote plébiscité dans la salle législative, Villetard, député de l’Yonne, réclama de décréter « dès à présent l’abolition de la peine de mort pour les femmes »101, proposition renvoyée au Comité de législation102 et restée sans lendemain. Le décret du 23 germinal an III-12 avril 1795 ne resta en vigueur qu’une quinzaine d’années, jusqu’à son abrogation implicite par le Code pénal de 1810 réinstaurant le sursis à exécution pour les femmes enceintes.

  10. Qu’il s’agisse des formes de résistance ou de la maternité en détention, l’expérience carcérale montre combien le genre structurait la pratique judiciaire et pénale. Entre égalité pénale et distinction des sexes, la prison apparaît comme un révélateur des contradictions révolutionnaires.

Conclusion

  1. L’étude du traitement carcéral des femmes sous la Révolution française met en lumière les tensions constitutives entre une volonté de rationalisation pénale et des pratiques carcérales différenciées selon le genre. Loin de se limiter à une stricte application des principes de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, la justice révolutionnaire a continué de penser et traiter les femmes à partir d’une position paradoxale, à la fois citoyennes passives exclues de la sphère politique, mais pénalement responsables souvent par le prisme de leurs liens familiaux et conjugaux. La normativité du droit pénal s’exprime de manière genrée dans des mécanismes où le principe de non-mixité se heurte à une mixité de fait et une surveillance des femmes exclusivement par des hommes. Les femmes y sont appréhendées comme suspectes du fait de leur parenté, et au contraire comme innocentes en cas de patriotisme familial révolutionnaire. Cette différenciation n’éteint pas pour autant toute capacité d’agir. Les suppliques adressées à la Convention, les correspondances clandestines, les récits de captivité ou les mobilisations collectives en prison attestent de stratégies multiples d’expression et de résistance. Ces pratiques discursives et politiques révèlent que la prison, espace de coercition, pouvait aussi devenir un espace d’agentivité, où les détenues affirmaient leur voix et cherchaient à infléchir le regard des autorités. En ce sens, les femmes incarcérées furent à la fois assignées à une position de vulnérabilité structurelle et capables d’une agentivité négociée.

  2. D’un point de vue analytique, la maternité apparaît comme un double prisme : ressource d’action pour infléchir une procédure ou une exécution de peine, mais aussi vecteur d’assignation qui naturalise la différence et justifie des traitements « adaptés ». L’héroïsation, souvent masculine dans ses codes, coexiste avec des formes discrètes d’héroïcité carcérale (endurance, dignité, écriture de soi) ; elle dit moins l’égalité que la négociation de places possibles dans un espace de contrainte.

  3. L’histoire croisée des femmes et de la prison révolutionnaire invite ainsi à penser autrement la genèse des institutions pénales modernes, non pas comme une marche linéaire vers l’égalité, mais comme un champ traversé par des rapports de pouvoir et de genre. Elle éclaire à la fois la persistance d’inégalités structurelles, la capacité des femmes à s’y confronter et à agir, et les résonances contemporaines de ces tensions, visibles aujourd’hui encore dans les débats sur la surpopulation carcérale, les conditions de détention, la parentalité en prison et les formes genrées de la vulnérabilité pénale.

Nicolas Lumbroso, Docteur en Histoire, Université de Lille, Laboratoire de l’Institut de Recherches Historiques du Septentrion (IRHIS) UMR CNRS 8529

Références


  1. Dominique Godineau, Citoyennes tricoteuses, Alinéa, 1988, rééd. Perrin, 2004.↩︎

  2. Martine Lapied, « Histoire du Genre en Révolution », in Jean-Clément Martin (dir.), La Révolution à l’œuvre. Perspectives actuelles dans l’histoire de la Révolution française, PUR, 2005, p. 77-87.↩︎

  3. Marie-France Brive (éd.), Les femmes et la Révolution française, Presses Universitaires du Mirail, 1989, 3 vol.↩︎

  4. Anne Verjus, Le cens de la famille. Les femmes et le vote. 1789-1848, Belin, 2002.↩︎

  5. Lynn Hunt, The family Romance of French Revolution : sex, class and political culture, University of California Press, 1992 (trad. fr., Le roman familial de la Révolution française, Albin Michel, 1995).↩︎

  6. Suzanne Desan, The Family on Trial in Revolutionnary France, University of California Press, 2004; id. « Théroigne de Méricourt, Gender, and International Politics in Revolutionary Europe », Journal of Modern History, n° 2, 2020, p. 274-310 ; Élisabeth Sledziewski, « “L’exclusion prononcée contre les femmes” : pourquoi ? », in Raymonde Monnier (dir.), Citoyens et citoyenneté sous la Révolution française, Société des études robespierristes, 2006, p. 191-198.↩︎

  7. Dominique Godineau, op. cit., p. 13-14.↩︎

  8. Philippe Levillain, « Les protagonistes : de la biographie », in René Rémond (dir.), Pour une histoire politique, Seuil, 1988, p. 121-159 ; François Dosse, Le pari biographique. Écrire une vie, La Découverte, 2005.↩︎

  9. Christine Fauré, « La prise de parole publique des femmes sous la Révolution française », Annales historiques de la Révolution française, n° 344, 2/2006, p. 3-4.↩︎

  10. V. le numéro spécial « Féminismes en Europe », Annales historiques de la révolution Française, Armand Colin, n° 411, 1/2023.↩︎

  11. Cécile Berly, Guillotinées. Marie-Antoinette, Mme du Barry, Mme Roland, Olympe de Gouges, Passés composés/Humensis, 2023.↩︎

  12. Jean-Claude Farcy, L’histoire de la justice française de la Révolution à nos jours. Trois décennies de recherches, PUF, 2001, p. 267-268.↩︎

  13. Jacques-Guy Petit, « Les premières maisons centrales de détention (1791-1805) », in Michel Pertué (dir.), La Révolution et l’ordre juridique privé : rationalité ou scandale ?, PUF, 1988, t. 2, p. 653.↩︎

  14. Jean-Claude Farcy, préc., p. 270 et 297-298 et la bibliographie citée, notes 1-5.↩︎

  15. Pour une étude historique sous l’angle de la statistique judiciaire et du genre, Michelle Perrot, « Ouverture », in Frédéric Chauvaud, Michelle Perrot, Jacques-Guy Petit (dir.), Femmes et justice pénale (XIXe-XXe siècles), PUR, 2002, p. 9-21 ; Robert Allen, « La justice pénale et les femmes, 1792-1811 », Annales historiques de la Révolution française, n° 350, 2007-4, p. 87-107.↩︎

  16. Par exemple, Claudie Lesselier, « Les femmes et la prison 1820-1939. Prisons de femmes et reproduction de la société patriarcale », in Jacques-Guy Petit (dir.), La prison, le bagne et l’histoire, Librairie des Méridiens, 1984, p. 115-128.↩︎

  17. Michelle Perrot (préf.), in Isabelle Heullant, Julie Claustre, Élisabeth Lusset, Falk Bretschneider (dir.), Enfermements III. Le genre enfermé. Hommes et femmes en milieux clos (XIIIe XXe siècle), Publications de la Sorbonne, 2016, p. 9.↩︎

  18. Selon la Statistique des établissements et des personnes écrouées en France publiée mensuellement par le ministère de la Justice, consultable en ligne : https://www.justice.gouv.fr/documentation/etudes-et-statistiques/statistiques-mensuelles-population-detenue-ecrouee-0↩︎

  19. Dans le cadre de cet article, les catégories de sexe désignent les catégories juridiques et sociales telles qu’elles apparaissent dans les sources révolutionnaires (Déclarations, lois, pratiques administratives et judiciaires) et renvoient à la manière dont les institutions révolutionnaires différencient et classent les individus. L’expression « hiérarchies de genre » est employée pour appréhender les rapports sociaux entre les sexes dans le champ judiciaire et carcéral, faisant référence à une lecture contemporaine inspirée des travaux de Joan W. Scott et des études de genre qui envisagent le genre comme une construction sociale et relationnelle de pouvoir.↩︎

  20. Corinne Rostaing, La relation carcérale. Identités et rapports sociaux dans les prisons de femmes, PUF, 1997.↩︎

  21. Michel Foucault, Surveiller et punir. Naissance de la prison, Gallimard, Bibliothèques des histoires, 1975.↩︎

  22. Joan W. Scott, « Genre : une catégorie utile d’analyse historique », Cahiers du GRIF, 1988, p. 125-153 ; La citoyenne paradoxale : les féministes françaises et les droits de l’homme, Albin Michel, 1998.↩︎

  23. Yannick Ripa, Histoire féminine de la France de la Révolution à la loi Veil, Belin, 2020, p. 9 (préf. Michelle Perrot).↩︎

  24. L’usage du terme pénitentiaire, dérivé de pénitence, se développe à partir du début du XIXe siècle puis avec la publication de plusieurs écrits sur le système pénitentiaire en Europe et aux États-Unis (Charles Lucas en 1828, Alexis de Tocqueville en 1836).↩︎

  25. Cesare Beccaria, Des délits et des peines, trad. Maurice Chevallier, Flammarion, 1991 [1764].↩︎

  26. Pour une synthèse sur la période révolutionnaire, Nicole Castan, Claude Faugeron, Jacques-Guy Petit, Michel Pierre, André Zysberg et al., Histoire des galères, bagnes et prisons XIIIe-XXe siècles. Introduction à l’histoire pénale de la France, 1991, p. 109-122.↩︎

  27. Mémoire sur la nécessité d'établir une réforme dans les prisons et sur les moyens de l'opérer, suivi de la conclusion d'un Rapport sur l'état actuel des prisons de Paris, lue à la séance publique de la Société royale de médecine, le 28 août 1791, par M. Doublet, Méquignon aîné, 1791.↩︎

  28. Christian Carlier, Jacques-Guy Petit, John Howard. État des prisons, des hôpitaux et des maisons de force en Europe au XVIIIe siècle, Éditions de l’Atelier, 1994 [1788].↩︎

  29. René Martinage, « Les innovations de constituants en matière de répression », in Robert Badinter (dir.), Une autre justice, 1789-1799. Contributions à l’histoire de la justice sous la Révolution française, Fayard, 1989, p. 118 et 125-126.↩︎

  30. « En conséquence et pour l’exécution des dispositions précédentes, il sera fait choix dans chaque département, soit dans la ville, soit près de la ville où le tribunal est fixé, d’une enceinte propre à réunir l’établissement des cachots, des lieux de gêne et des chambres de détention, etc. » (C. pén., Titre IV). Déjà, v. décret du 22 décembre 1789 sur la constitution des assemblées primaires et assemblées administratives (Section III, art. 2).↩︎

  31. René Martinage, « Les origines de la pénologie dans le code pénal de 1791 », in Michel Pertué (dir.), op. cit., t. 1, p. 16.↩︎

  32. Elsa Fondimare, L’impossible indifférenciation : le principe d’égalité dans ses rapports à la différence des sexes, thèse de doctorat, Université de Paris Nanterre, 2018, p. 31 et s.↩︎

  33. Archives parlementaires, 1ère série, t. XXVI, p. 324.↩︎

  34. Déclarations royales concernant la répression de la récidive de vols du 4 mars 1724 (BNF, F-21096) et du 18 juillet 1724 concernant la récidive de mendicité et de vagabondage (BNF, F-21097) prévoyant l’enfermement en maison de force et hôpital général pour les femmes, et les galères pour les hommes.↩︎

  35. Michel Foucault, op. cit., p. 120-121.↩︎

  36. Elsa Fondimare, op. cit., p. 73.↩︎

  37. La peine du carcan consistait à fixer la personne condamnée à un pilori au moyen d'un collier de fer et à l'exposer au public.↩︎

  38. C. pén., titre I, art. 9 et 10.↩︎

  39. En France, dès le XIVe siècle, au nom de la « naturelle faiblesse » des femmes, plusieurs textes normatifs affirment la volonté de séparation des sexes en détention (Didier Lett, Crimes, genre et châtiments au Moyen-Âge, Armand Colin, 2024, p. 328-329). L’Ordonnance criminelle de 1670 consacre également le principe de non-mixité en prescrivant que « les hommes prisonniers et les femmes seront mis dans des chambres séparées » (titre XIII, art. 20). En pratique, cette séparation restait marginale.↩︎

  40. Jacques-Guy Petit, Ces peines obscures. La prison pénale en France 1780-1875, Fayard, 1990, p. 75.↩︎

  41. Anne de Mathan, Bernard Fauconnier, Histoire de Terreur. Les Mémoires de François Armand Cholet et Honoré Riouffe, Honoré Champion, 2014, p. 230.↩︎

  42. Olivier Blanc, La dernière lettre. Prisons et condamnés de la Révolution. 1793-1794, Laffont, 1984, p. 75-77. Égal., Camille Dégez, « Les conditions de vie en prison à l’époque moderne. L’exemple de la Conciergerie », in Isabelle Heullant, Julie Claustre, Élisabeth Lusset (dir.), Enfermements. Le cloître et la prison (VIe XVIIIe siècle), Publications de la Sorbonne, 2011, p. 197-210.↩︎

  43. Cécile Berly, op. cit., p. 65.↩︎

  44. Olivier Blanc, op. cit., p. 32-33.↩︎

  45. Gérard Walter, Actes du Tribunal révolutionnaire, Mercure de France, coll. « Le Temps retrouvé », rééd. 2008, p. 61 et 67.↩︎

  46. Cécile Berly, op. cit., p. 57.↩︎

  47. Archives parlementaires, 1ère série, t. LVIII, p. 106-107.↩︎

  48. Jacques-Guy Petit, Ces peines obscures, op. cit., p. 76-78.↩︎

  49. Sophie Wahnich, La liberté ou la mort, essai sur la Terreur et le terrorisme, La Fabrique, 2003 ; Marisa Linton, Choosing Terror. Virtue, Friendship and Authenticity in the French Revolution, OUP, 2013 ; Michel Biard, Hervé Leuwers (dir.), Visages de la Terreur, Armand Colin, 2014 ; Jean-Clément Martin, La Terreur. Vérités et légendes, Perrin, 2017 ; id., Les échos de la Terreur. Vérités d’un mensonge d’État 1794-2001, Belin, 2018 ; Timothy Tackett, Anatomie de la Terreur. Le processus révolutionnaire, 1787-1793, Seuil, 2018 ; Michel Biard, Marisa Linton, Terreur ! La Révolution Française face à ses démons, Armand Colin, 2020.↩︎

  50. Sont réputés suspects ceux qui n’ont pas justifié de leurs moyens d’existence, accompli leurs devoirs civiques et/ou se sont vu refuser des certificats de civisme, ceux suspendus de leurs fonctions par la Convention nationale ou des représentants du peuple en mission, nobles et parents d’émigrés qui n’ont pas constamment manifesté leur attachement à la Révolution, ceux qui soit par leur conduite, soit par leurs relations, soit par leurs propos ou écrits, s’annoncent comme partisans de la tyrannie ou du fédéralisme ou ennemis de la liberté.↩︎

  51. Karine Poulard, « Femmes et répression sous la Terreur à Nantes et en Loire-Atlantique (1793-1794) », Mémoires de la Société d’Histoire et d’Archéologie de Bretagne, 1998, t. 76, p. 341-365.↩︎

  52. Sur le récit de son arrestation et sa condamnation, Mémoires de Madame la Marquise de Bonchamps sur la Vendée, 1823, p. 118 et s. ; Mémoires de Madame la Marquise de la Rochejaquelein, Bourloton, 1889, p. 415 et s.↩︎

  53. Moniteur universel, réimpression, n° 122, 2 pluviôse an III-21 janvier 1795, p. 253.↩︎

  54. Thomas Pasquier, « Faiblesses et mutations d’un établissement carcéral sous le Directoire. La prison du Bouffay de Nantes (An IV-An VIII) », Annales historiques de la Révolution française, n° 406, 2021-4, p. 55-82.↩︎

  55. Claudine Wolikow (dir.), La voix des femmes dans la Révolution française, Éditions universitaires de Dijon, 2012.↩︎

  56. Christine Fauré, « Doléances, déclarations et pétitions, trois formes de parole publique des femmes sous la Révolution », Annales historiques de la Révolution française, n° 344, 2/2006, p. 5.↩︎

  57. Une vigilance méthodologique s’impose : pétitions, mémoires et correspondances sont des écritures adressées et travaillées par des objectifs procéduraux ou d’auto-justifications, qui construisent performativement des identités (mère, épouse, citoyenne) pour peser sur l’issue judiciaire.↩︎

  58. Sylvie Mouysset, Isabelle Lacque-Labarthe, « Se dire, s’écrire : traces de soi. Les récits personnels à l’épreuve du genre (XVe –XXIe siècle) », in Sylvie Chaperon, Adeline Grand-Clément, Sylvie Mouysset (dir.), Histoire des femmes et du genre, p. 219-247 ; Nathalie Grande, Mémoires de prison, mémoires de mort. Les écrits de prisonniers de la Révolution française, PUR, 2013.↩︎

  59. Isabelle Heullant, Julie Claustre, Élisabeth Lusset et Falk Bretschneider (dir.), op. cit., p. 24.↩︎

  60. Nathalie Pétiteau, Écrire la mémoire. Les mémorialistes de la Révolution et de l’Empire, Les Indes savantes, 2012 ; Anne de Mathan, Mémoires de la Révolution française, PUR, 2019.↩︎

  61. Olivier Blanc, op. cit., p. 90, 114.↩︎

  62. Cécile Berly, op. cit., p. 95.↩︎

  63. Lettres conservées aux Archives nationales dans la sous-série F7.↩︎

  64. Clyde Plumauzille, « L’appel à la justice des femmes enfermées pour prostitution sous la “Terreur” : entre “vie fragile” et puissance d’agir », Orages, Littérature et culture (1760-1830), 2013, Sexes en Révolution, 12, p. 111-131.↩︎

  65. Odile Krakovitch, « Analyse critique des mémoires sur la Révolution écrits par les femmes », in Marie-France Brive (dir.), op.  cit., p. 123-136.↩︎

  66. Anne de Mathan, Bernard Fauconnier, op. cit., p. 25-27.↩︎

  67. Olivier Ritz, « Entre recherche de la vérité et fabrique du consensus : l’historiographie de la Révolution en l’an III », in Hervé Leuwers, Virginie Martin, Denis Salas (dir.), Juger la « terreur ». Justice transitionnelle et République de l’an III (1794-1795), La Documentation française, coll. Histoire de la justice, n° 32, AFHJ, 2021, p. 66-67.↩︎

  68. Marie-France Brive (dir.), op. cit., p. 151-152 (rapport de synthèse).↩︎

  69. Cécile Berly, op. cit., p. 63, 67, 70.↩︎

  70. Mémoires de Madame Roland, (rééd. Paul de Roux), Mercure de France, « Le Temps retrouvé », 1986, p. 371-372.↩︎

  71. Nicolas Lumbroso, « Les Vierges de Verdun », Connaissance de la Meuse, n° 150, septembre 2023, p. 13-17.↩︎

  72. Aux côtés notamment de Camille Desmoulins et Danton, Marie Jean Hérault de Séchelles est déclaré coupable et condamné à la peine capitale le 16 germinal an II-5 avril 1794 par le Tribunal révolutionnaire pour avoir voulu rétablir la monarchie, attenter à la Convention et au gouvernement de la République.↩︎

  73. Alain Fisnot, Les Vierges de Verdun ou l’Affaire des Dragées, 2002, p. 57-58.↩︎

  74. Anne de Mathan, Bernard Fauconnier, op. cit., p. 231-232 ; Olivier Blanc, op. cit., p. 40-41.↩︎

  75. Geneviève Fermenjean, Jacques Guilhaumou, Karine Lambert, Martine Lapied, « L’autre Panthéon. Femmes et héroïsation sous la Révolution Française », in Serge Bianchi (dir.), Héros et héroïnes de la Révolution française, CTHS, 2012, p. 81-95.↩︎

  76. « Après cinq mois de captivité, je fus transférée dans une maison de santé où j’ai été libre comme chez moi. J’aurais pu m’évader, mes ennemis ni mes bourreaux ne l’ignorent pas, mais convaincue que toute la malveillance réunie pour me prendre ne pourrait parvenir à me reprocher une seule démarche contre la Révolution, j’ai demandé moi-même mon jugement » (O. Blanc, op. cit., p. 147).↩︎

  77. Olympe de Gouges, Écrits politiques 1792-1793 (préf. Olivier Blanc), Indigo & Côté-Femmes Éditions, 1993, t. 2, p. 253.↩︎

  78. Olivier Blanc, op. cit., p. 92-93.↩︎

  79. Michel Biard, La liberté ou la mort, Tallandier, 2015, p. 221-248, not. p. 224, 236, 244 ; id., Histoire politique du Panthéon de 1791 à nos jours, PUF, 2025, p. 55-63.↩︎

  80. Dominique Godineau, « Quel héroïsme pour les femmes pendant la Révolution française ? », in Évelyne Cohen, Anne Gangloff (dir.), Succès et échec de l’héroïsation de l’Antiquité à l’actualité européenne, PUR, 2025, p. 145-162.↩︎

  81. Geneviève Fermenjean, Jacques Guilhaumou, Karine Lambert, Martine Lapied, « L’autre Panthéon. Femmes et héroïsation sous la Révolution Française », op. cit., p. 81-95 ; Guillaume Mazeau, Le Bain de l’Histoire. Charlotte Corday et l’attentat contre Marat (1793-2009), Champ Vallon, 2009.↩︎

  82. André Chénier, Œuvres complètes, présentées par Gérard Walter, Bibliothèques de la Pléiade, Gallimard, 1950, p. 185-186.↩︎

  83. Le mémoire indiquait : « il est aujourd’hui clairement démontré que le Catalina français n’avait pas d’armes plus favorites pour égorger les citoyens et leur faire détester le gouvernement de la République, que le Tribunal révolutionnaire : c’était là qu’il faisait entasser ses nombreuses victimes » (Jacquet-Philibert Dommanget, « Claire Tabouillot, une des vierges de Verdun », Mémoires de la société d’archéologie et d’histoire de la Moselle,1868, t. 2, p. 147).↩︎

  84. Archives municipales de Verdun, ms 920.↩︎

  85. Jacquet-Philibert Dommanget, préc., p. 146.↩︎

  86. Dans son rapport présenté par le député Henry (Haute-Marne), le Comité de législation considéra « que le glaive de la loi doit se promener perpétuellement et indistinctement sur toute les têtes, persuadé que la punition du crime est la première dette de la puissance publique envers tous les membres de la société » (Archives parlementaires, 1ère série, t. XLIX, p. 140).↩︎

  87. Emmanuelle Berthiaud, « Les femmes enceintes devant la justice révolutionnaire à Paris (1793-1810) : l’évolution des enjeux et des représentations de la grossesse », in Lucien Faggon, Christophe Régina, Bernard Ribémont (dir.), La culture judiciaire. Discours, représentations et usages de la justice du Moyen Âge à nos jours, Presses Universitaires de Dijon, 2014, p. 124-126.↩︎

  88. Olivier Blanc, Marie-Olympe de Gouges, une humaniste à la fin du XVIIIe siècle, Viénet, 2003, p. 220-221 ; Cécile Berly, op. cit., p. 76,↩︎

  89. Gazette des tribunaux, t. 9, février 1794, p. 304-308.↩︎

  90. Cécile Berly, op. cit., p. 128-129.↩︎

  91. Anne de Mathan, Bernard Fauconnier, op. cit., p. 257.↩︎

  92. Pierre Gaumy, « Un groupe d’habitants de la région de Rochechouart devant le Tribunal révolutionnaire pendant la Terreur », Bulletin de la société « Les Amis des sciences et des Arts », de Rochechouart, n°6, 1902, t. 12, p. 154-155.↩︎

  93. Félix Chandenier, « Madame de Sérilly, échappée de l’échafaud sous la Terreur », Bulletin de la société archéologique de Sens, 1891, t. 16, p. 132-164 ; André Beaunier, « Une maman sous la Terreur. Madame de Sérilly et ses enfants », La Revue universelle, 1922, t. 11, p. 257-276, 409-427 et 562-580.↩︎

  94. Maxime Billard, Les femmes enceintes devant le tribunal révolutionnaire, Perrin, 1911, p. 136.↩︎

  95. Nicolas Lumbroso, « Pons de Verdun et l’égalité des droits en faveur des femmes : l’aspiration d’un conventionnel à une plus grande égalité des sexes », Annales historiques de la Révolution française, n° 406, 2021-4, p. 133-153.↩︎

  96. Journal de la Montagne, n° 141, 18 septembre 1794, p. 1155.↩︎

  97. Gabriel-Jérôme Sénart, Révélations puisées dans les cartons des comités de salut public et de sûreté générale, ou mémoires inédits de Sénart, Paris, 1824, 2e éd., p. 238-239.↩︎

  98. AN, D III, 58, pièce 55, n°23, AN, D III 381, n° 29 (séance du 13 pluviôse an III-1er février 1795).↩︎

  99. Moniteur universel, réimpression, n° 206, 26 germinal an III-15 avril 1795, p. 207-208.↩︎

  100. Ibid., p. 208.↩︎

  101. Moniteur universel, réimpression, n°122, 2 pluviôse an III-21 janvier 1795, p. 253.↩︎

  102. Moniteur universel, réimpression, n°206, 26 germinal an III-15 avril 1795, p. 840.↩︎