(juillet 2024 – juin 2025)
Lisa Carayon, Julie Mattiussi, Marie Mesnil et Maïté Saulier

La chronique « État civil, familles et conjugalités » réalise une
analyse de genre des grandes actualités en droit familial et de l’état
civil du 1er juillet 2024 au 30 juin 2025. L’année a été spécialement
marquée par une jurisprudence de la Cour de justice de l’Union
européenne active sur l’identité de genre. De façon plus générale, la
lecture de l’actualité juridique dans une perspective de genre révèle
une invocation toujours importante du principe d’égalité entre les
femmes et les hommes devant les juridictions comme dans les travaux
législatifs en cours, mais son effectivité demeure très incertaine,
qu’il s’agisse de le considérer en droit de la nationalité, en droit des
étrangers ou encore en droit de l’autorité parentale. Les différentes
actualités sont présentées au travers de rubriques thématiques : état
civil et identification (I), filiation (II), autorité parentale (III) et
couple (IV).La décision du Conseil constitutionnel du 25 avril 2025 (QPC, n° 2025-1135) illustre à merveille la façon dont le principe d’égalité entre les hommes et les femmes peut, tout à la fois, être un outil puissant de transformation du droit et un instrument stérilisé par la timidité des juridictions. Ainsi, pour la quatrième fois1, le Conseil constitutionnel censure ici une ancienne loi sur la transmission de la nationalité française qui posait des règles distinctes pour les hommes et les femmes.
En l’occurrence, il s’agissait d’une disposition qui, entre le 20 octobre 1945 et le 1er juin 1951, énonçait que l’acquisition d’une nationalité étrangère faisait perdre aux Français·es leur nationalité, mais que cette perte s’opérait de plein droit pour les femmes, là où les hommes âgés de moins de cinquante ans ne perdaient leur qualité de français « qu’avec l’autorisation du Gouvernement »2.
Une lecture rapide de ce texte pourrait faire penser que c’étaient les hommes qui étaient discriminés par ce mécanisme, puisque seuls eux pouvaient être empêchés de se défaire de leur nationalité française – notamment afin d’être « conservés » dans les contingents militaires potentiels. Mais le Conseil constitutionnel opère ici une lecture in concreto des textes — ce qui n’est pas dans ses habitudes — et y voit une autre réalité : seuls les hommes pouvaient voir leur nationalité « sauvée » par le Gouvernement. Ainsi, nombre de femmes ont été automatiquement exclues de la communauté nationale, notamment lorsqu’elles acquéraient une nouvelle nationalité par mariage. Sur le papier donc, double source de réjouissance : le principe d’égalité trouve ici une application concrète, et le Conseil constitutionnel s’engage dans une appréciation des effets réels des textes qu’il examine, au lieu de s’en tenir à une lecture désincarnée. Que demander de plus ? Peut‑être que cette décision ait un effet concret pour quelqu’un, ce qui n’est pas une évidence.
En effet, comme dans ses précédentes décisions sur la question, le Conseil module drastiquement les effets de sa censure dans le temps. Très classiquement, elle ne remettra pas en cause les refus définitifs de nationalité qui auraient pu être prononcés par le passé. Mais, en plus, elle ne pourra être utilement invoquée que par les femmes qui ont directement été privées de leur nationalité en application des textes censurés – leurs descendant·es ne pouvant s’en prévaloir que dans un second temps. Étant donné l’âge des personnes concernées, autant dire que les bénéficiaires de cette censure seront rares. L’objectif est atteint : la France ne sera pas submergée par des hordes d’étranger·ères devenues français·es par la magie du principe d’égalité.
Par ailleurs, au-delà de la question du genre, notons que le Conseil ne censure, dans le texte, que les mots « de sexe masculin », délaissant la question d’une autre différence de traitement opérée par la disposition : une distinction fondée sur l’âge. Ainsi, les hommes de plus de cinquante ans, qui, comme les femmes, perdaient automatiquement leur nationalité, sans que le Gouvernement ne puisse les « retenir » dans la Nation, ne mériteraient‑ils pas une question prioritaire de constitutionnalité ? L. C.
L’année est marquée par plusieurs décisions de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) qui, sans faire application de dispositions visant spécifiquement les personnes relevant de minorités de genre, invitent néanmoins plus ou moins directement les États à prendre en compte les risques de discriminations auxquels elles sont exposées. L’arrêt Mirin du 4 octobre 20243 est le premier de la série. Il se fonde sur la liberté de circulation pour critiquer le refus de reconnaître le changement de sexe obtenu dans un pays tiers. En l’espèce, un homme transgenre de nationalités britannique et roumaine vivant au Royaume‑Uni avait obtenu une modification de la mention de son sexe sur ses documents d’identité officiels selon la procédure anglaise de deed poll (changement de prénom), puis un gender recognition certificate (GRC – certificat reconnaissant l’identité de genre de la personne). Il a ensuite demandé aux autorités roumaines de mettre en adéquation son acte de naissance avec son identité masculine, ce qui lui a été refusé. C’est dans ce contexte que la CJUE a été saisie de deux questions préjudicielles. En réponse à ces questions, elle affirme qu’en vertu de la libre circulation garantie par les dispositions du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE)4 lues à la lumière de la Charte des droits fondamentaux5, les changements légalement acquis dans un autre État membre doivent être reconnus au sein de l’Union européenne.
Quelques mois plus tard, dans un arrêt Mousse rendu le 9 janvier 20256 sur question préjudicielle du Conseil d’État français, la CJUE répond à la question de savoir si les formulaires faisant obligation aux clients et clientes de la société de transports ferroviaires de cocher la case « Madame » ou « Monsieur » lors de l’achat de billets de train en ligne respectaient les dispositions du Règlement général sur la protection des données (RGPD)7. L’analyse est menée à l’aune du principe de minimisation des données, aux termes duquel les données à caractère personnel doivent être « adéquates, pertinentes et limitées à ce qui est nécessaire au regard des finalités pour lesquelles elles sont traitées »8. Dès lors, la principale question posée portait sur la licéité du traitement au regard du RGPD. Selon la CJUE, la collecte des données relatives à la civilité des personnes n’est pas indispensable à l’achat d’un billet de train. Par conséquent, le traitement ne peut être regardé comme licite au regard de l’article 6 (1) (b) du RGPD, qui admet que des données soient traitées de façon obligatoire s’il s’agit de la condition de l’exécution d’un contrat. Demeurait la question de savoir si le traitement était licite au regard d’un autre alinéa, l’article 6 (1) (f) du RGPD, qui prévoit qu’un traitement de données à caractère personnel est licite s’il est « nécessaire aux fins des intérêts légitimes poursuivis par le responsable du traitement ou par un tiers, à moins que ne prévalent les intérêts ou les libertés et les droits fondamentaux de la personne concernée qui exigent une protection des données à caractère personnel, notamment lorsque la personne concernée est un enfant ». À cet égard, la CJUE indique qu’il appartiendra au Conseil d’État de vérifier ces conditions et notamment d’établir s’il existe un risque de discrimination à raison de l’identité de genre9. Le 31 juillet 2025, le Conseil d’État annule la décision de la CNIL ayant initialement donné lieu à ce contentieux. Sans aller jusqu’à se prononcer sur la question du risque de discriminations, il estime que le traitement de données n’était en l’espèce pas nécessaire et rejette la justification sur le fondement de l’article 6 (1) (f)10. Un contentieux qui traduit donc dans le droit le déclin des usages genrés relatifs à la civilité des personnes.
C’est encore le RGPD qui est mobilisé dans le cadre de l’arrêt de la CJUE du 13 mars 2025, Deldits11. En l’espèce, un ressortissant iranien, assigné femme à la naissance, obtient l’asile en Hongrie en 2014 en raison de sa transidentité. En 2022, il sollicite de la part des autorités hongroises la rectification de la mention « femme » dans le registre de l’asile, arguant de son inexactitude. Il produit pour cela les mêmes documents que ceux qui lui ont permis, huit ans auparavant, d’obtenir l’asile. Face au refus de l’administration hongroise, la CJUE est saisie de trois questions préjudicielles. La première, dont découlent les deux autres, porte sur l’étendue du droit à rectification des données de l’article 16 du RGPD. La CJUE répond qu’il est possible de solliciter de l’autorité administrative la rectification des données inexactes sur le fondement du droit à la rectification, à charge pour le demandeur de prouver l’inexactitude des données. La Cour précise que les éléments doivent être « pertinents et suffisants », et ne peuvent en aucun cas conduire à exiger la preuve d’un traitement médico-chirurgical. Outre que ces décisions européennes auront, à n’en pas douter, une influence certaine sur les décisions de justice internes, l’année n’a pas été sans connaître d’actualités en droit français. J. M.
L’année concentre également quelques actualités relatives à la modification de la mention du sexe à l’état civil. Le 3 décembre 2024, a ainsi été déposée à l’Assemblée nationale une proposition de loi visant à faciliter la reconnaissance du genre à l’état civil13. L’évolution proposée consiste à déjudiciariser la procédure en admettant les changements de la mention du sexe sur la base d’une simple déclaration à l’officier d’état civil. La déclaration pourrait être réalisée par toute personne de plus de quinze ans. Elle intervient dans un contexte où l’Allemagne est le dernier État membre de l’Union européenne à avoir emprunté la voie de la déjudiciarisation14, après le Danemark en 2014, Malte et l’Irlande en 2015, la Norvège en 2016 et l’Espagne et la Belgique en 202315. La proposition de loi n’a, pour l’heure, pas été examinée.
En revanche, l’appréciation judiciaire de la « réunion suffisante de faits » démontrant que « la mention relative [au] sexe dans les actes de l’état civil ne correspond pas à celui dans lequel [une personne] se présente et dans lequel elle est connue », conformément à l’article 61-5 du Code civil est toujours de mise. Le Conseil d’État, dans un arrêt du 27 janvier 202516, a même validé deux circulaires précisant les éléments de preuve à rapporter, l’une en date du 17 février 2017 sur le changement de prénom17, l’autre en date du 10 mai 2017 sur le changement de sexe18. Ces deux circulaires avaient été contestées en justice par des associations qui estimaient qu’en obligeant les demandeur·esses à s’en remettre aux attestations de tierces personnes s’agissant de leur appartenance sociale au sexe revendiqué, et plus particulièrement s’agissant de leur apparence physique, les circulaires revenaient à faire de la conformité aux stéréotypes de genre une condition pour modifier la mention du sexe à l’état civil. Selon le Conseil d’État, les éléments requis pour changer de sexe et de prénom ne constituent pas des atteintes excessives au droit au respect de la vie privée et au principe de non-discrimination. Pourtant, il n’exclut pas que des éléments sociaux puissent être pris en compte. Or, le Défenseur des droits avait indiqué dès 2016 que des conditions de nature sociale sont insatisfaisantes en ce qu’elles font dépendre le changement, non du ressenti de la personne, mais du regard que la société porte sur elle19.
C’est cette même autorité qui, dans une décision-cadre du 16 juin 2025, rappelle « l’importance du libre choix de l’apparence physique et considère que la demande adressée à la personne requérante de produire des photographies, ou encore de se présenter afin que soit appréciée son apparence physique est contraire à l’article 8 de la conv. EDH garantissant le droit au respect de la vie privée ». Elle ajoute qu’en tout état de cause, l’appréciation judiciaire ne saurait conduire à reproduire des stéréotypes de genre. Surtout, cette décision-cadre réitère clairement une position favorable à une procédure déjudiciarisée et déclaratoire20. Au‑delà de la question de la modification du sexe à l’état civil, le Défenseur des droits dresse, dans cette décision‑cadre, un état des lieux des droits des personnes transgenres et des obstacles auxquels elles font face pour les faire appliquer. La décision, de 63 pages, formule 56 recommandations dans des domaines aussi divers que la filiation et l’accès à la parentalité, l’accès aux soins, l’école, la détention, la pratique sportive, l’emploi ou encore la situation des personnes étrangères et gagne à être consultée par toute personne intéressée par la question des droits des personnes transgenres. J. M.
La direction de l’administration pénitentiaire (DAP) a publié, le 5 mars 2024, un référentiel national de « prise en charge des personnes LGBT+ placées sous main de justice ». D’un volume conséquent – soixante pages, dont dix pages d’annexes et glossaire – ce document a été adopté dans le cadre du « plan national d’action pour l’égalité des droits, contre la haine et les discriminations anti-LGBT+ 2023‑2026 porté par la délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti‑LGBT » et a vocation à devenir un « document réflexe permettant d’accompagner et répondre aux interrogations des personnels pénitentiaires et des partenaires »21. Applicable tant au milieu ouvert que fermé, le référentiel s’inscrit dans une volonté affichée depuis quelque temps par l’administration pénitentiaire de mieux tenir compte de l’identité de genre des personnes écrouées, comme l’impose l’article L. 6 du Code pénitentiaire22 et comme l’exigent certaines instances internationales23. Formellement, il s’agit d’un outil à visée pédagogique, construit en trois parties : I. Prise en charge des personnes LGBT+ : comprendre, identifier et orienter ; II. Questions pratiques ; III. Repérer et lutter contre les LGBTphobies. Il comprend des éléments de vocabulaire, des « cas concrets », des recommandations de bonnes pratiques et des fiches d’aide à la décision. L’ensemble apparaît indiscutablement destiné au personnel de l’administration pénitentiaire, à l’exclusion des personnes détenues concernées qui n’ont, en tout état de cause, pas été consultées pour sa réalisation24. Substantiellement, trois enseignements peuvent être tirés de l’analyse de ce nouveau référentiel.
D’une part, l’affectation des personnes détenues selon leur genre occupe une place centrale. La prison, on le sait, est organisée suivant un principe de non-mixité25 qui conduit notamment à un enfermement distinct des femmes et des hommes26, ce qui peut être source de difficultés majeures pour les personnes trans27 : incarcération dans un quartier ou un établissement ne correspondant pas à leur identité de genre, placement à l’isolement justifié par leur protection, etc. Sur ce point, le référentiel énonce « un principe de référence »28 : la mention du sexe à l’état civil est prise en compte pour décider de l’affectation de la personne, mais des exceptions sont possibles pour orienter la personne, avec son accord, « vers le quartier le plus adapté à sa situation », que ce soit au moment de l’incarcération ou en cours d’exécution de peine, à son initiative ou sur demande de l’établissement d’accueil. On saluera cette approche plus respectueuse de l’autodétermination de la personne, comme le fait de recueillir son avis directement à l’écrit ou lors d’un entretien oral en cas de difficultés et ce, avant toute prise de décision29. Le pouvoir de l’administration pénitentiaire reste toutefois très étendu. La « fiche pratique sur l’affectation des publics transgenres »30, remplie par le personnel de l’établissement et du service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP) et étudiée en commission pluridisciplinaire unique (CPU) avant la décision, le démontre : elle comprend, par exemple, la question suivante : « L’apparence de la personne détenue peut‑elle être considérée comme proche de son nouveau genre (l’apparence physique à proprement parler, mais aussi vestimentaire ou autre) ? ». La formulation retenue laisse une part considérable d’interprétation au personnel. En outre, au stade de la décision, s’il est bienvenu que « l’absence de prise d’un traitement hormonal ou de modifications anatomiques » ne puisse être la seule justification d’un refus31, le pouvoir de l’administration et le poids de ses moyens restent considérables : le refus peut ainsi être justifié « en cas d’insuffisance ou d’absence d’éléments permettant de justifier d’une différence entre l’identité de genre de la personne et celle du public accueilli sur son secteur actuel d’hébergement » ou s’il est constaté qu’ « une prise en charge adaptée ne peut être garantie au sein du quartier/établissement d’accueil »32.
D’autre part, le référentiel, dont la valeur normative est déjà très faible en soi, laisse une marge d’appréciation conséquente à l’établissement pénitentiaire en particulier et à l’administration pénitentiaire en général pour résoudre certaines problématiques rencontrées par les personnes LGBT+. Il ne fait aucun doute que les contraintes liées à la sécurité, au manque de temps et de moyens humains ou à la surpopulation – qui n’est d’ailleurs jamais mentionnée dans le référentiel malgré son importance sans précédent et son impact pratique33 – seront invoquées comme des obstacles à la mise en œuvre de nombreuses recommandations. Citons, par exemple, les développements consacrés à la liberté vestimentaire des personnes détenues34. Le référentiel prévoit qu’une personne détenue peut se déplacer en portant une tenue de son choix, puis la changer en salle de fouilles avant une extraction ou une permission35. Cependant, dans la réalité, les impératifs de sécurité, de surveillance et de gestion du temps rendront cette possibilité difficilement applicable.36. De la même manière, les établissements pénitentiaires invoqueront, à n’en pas douter, ces mêmes contraintes pour justifier le non-respect de certaines recommandations, telles que l’encellulement individuel des personnes considérées comme vulnérables37, qui devrait être la règle, ou l’organisation d’activités avec un nombre limité de participants afin d’assurer une surveillance adaptée38. Il s’agit là de belles idées, certes, mais qui achopperont sans aucun doute sur la réalité du terrain carcéral.
Enfin, le référentiel adopte une approche très individuelle de la vulnérabilité, en centrant l’analyse sur la prise en charge singulière de la personne détenue et sur la façon de la protéger des discriminations et de la violence qu’elle pourrait subir de la part de ses co-détenu·es. Le caractère systémique des inégalités et, de fait, la façon de lutter contre celles-ci au sein même de l’institution carcérale, notamment de façon préventive, n’est que très peu abordé : certes, des actions de sensibilisation aux LGBTphobies par des activités de groupe culturelles ou sportives sont envisagées, mais elles ne sont que facultatives39 ; la formation du personnel de l’administration à la lutte contre les discriminations n’est abordée que comme une simple faculté40 ; les fouilles intégrales ou par palpation des personnes transgenres laissent une large place au « volontariat » des surveillant·es, soit à des choix individuels41 ; et rien n’est dit, encore, des actes LGBTphobes que pourraient commettre l’administration elle-même à travers les pratiques ou décisions d’un·e surveillant·e, d’un·e personnel·le d’encadrement, ou d’un·e membre du SPIP. Pire, la production par le système carcéral lui-même de certaines stigmatisations est, à certains égards, validée au motif de protéger les personnes détenues : ainsi de la mise en place de certains créneaux de promenades « spécifiques »42 ou de la demande veillant à « sensibiliser la personne à l’utilisation de vêtements et accessoires considérés comme neutres ou unisexes et au port d’un maquillage discret »43 en détention.
En définitive, il ne faut pas nier le progrès que constitue l’adoption de ce référentiel : le rappel du devoir de neutralité des agents pénitentiaires44, l’exposé du bon usage des marques de civilité45, l’importance de faire parvenir à une personne son courrier quand bien même le prénom du destinataire ne serait pas identique à celui qui figure à l’état civil46 sont de véritables avancées. Plus encore, le simple fait que la direction de l’administration pénitentiaire se dote d’un tel outil est un progrès à saluer. Mais des doutes nombreux émergent nécessairement quand se pose la question de son effectivité et du regard que pose l’administration pénitentiaire sur sa propre contribution aux inégalités de genre. M. S.
Bien qu’arrivée à échéance cette année, la procédure d’adoption « forcée » instaurée par l’article 9 de la loi du 21 février 2022 visant à réformer l’adoption, dite loi Limon, continue de donner lieu à une abondante jurisprudence. Ce dispositif transitoire interroge profondément les principes qui structurent le droit de l’adoption, mais surtout, la nécessité pour les couples de même sexe d’y recourir pour établir un second lien de filiation à l’égard d’un enfant pourtant conçu dans le cadre d’un projet parental commun.
Par deux arrêts en date du 12 juin 2025, la première chambre civile de la Cour de cassation s’est prononcée à deux reprises sur ce texte. D’abord, elle a précisé l’articulation entre l’adoption fondée sur l’article 9 de la loi Limon et la reconnaissance conjointe, prévue à l’article 6, IV de la loi du 2 août 2021 : aucun formalisme particulier n’est exigé et la preuve du refus de procéder à une reconnaissance conjointe (RC) peut être rapportée par tous moyens47. Ensuite, elle a refusé de renvoyer une QPC posée par la mère opposée à l’adoption par son ex-compagne de leur enfant en estimant que « les dispositions contestées, qui garantissent le respect des liens entre l’enfant et sa famille d’origine et supposent une appréciation au cas par cas de la situation des différentes personnes concernées, ne portent en elles-mêmes atteinte ni au droit de l’enfant et de la mère mentionnée dans l’acte de naissance de mener une vie familiale normale », ni à l’exigence de protection de l’intérêt supérieur de l’enfant, ni au droit au respect de leur vie privée48. Le caractère dérogatoire du dispositif, qui permet, « à titre exceptionnel et pour une durée limitée, de déroger au principe selon lequel les parents doivent consentir à l’adoption de leur enfant que dans des conditions strictement définies »49, est explicité. L’adoption forcée n’est envisageable que s’il est prouvé que l’enfant est issu d’un projet parental commun réalisé par assistance médicale à la procréation (AMP) à l’étranger, avant la publication de la loi n° 2021-1017 du 2 août 202150 et qu’elle est conforme à l’intérêt de l’enfant « souverainement apprécié par le juge, in concreto, à la date où il statue »51. Enfin, la Cour de cassation contrôle de manière étroite la motivation des décisions d’adoption rendues et en particulier la caractérisation de l’intérêt de l’enfant52 – comme l’atteste une décision rendue le même jour, dans laquelle elle retient que la cour d’appel a « estimé qu’il était dans l’intérêt de l’enfant de pouvoir disposer d’une double filiation, conformément au projet parental initial du couple, afin, notamment, de bénéficier de l’affection et de l’attention constante de ses deux parents et de s’inscrire dans ses deux familles élargies »53.
Ces considérations se retrouvent dans les décisions des juges du fond qui prononcent l’adoption plénière de l’enfant54, y compris lorsque la seconde mère présente un état de santé mentale fragile55. Pour instituer ce second lien de filiation maternelle, les juges peinent à ne pas tenir compte de l’existence, voire de la qualité de la relation que la « mère », candidate à l’adoption, entretient avec ses enfants et de ses qualités parentales. Si certains arrivent à mettre à distance ces considérations compte tenu du conflit de loyauté dans lequel se trouvent pris les enfants56, d’autres se réfugient à l’inverse derrière l’opposition des enfants pour justifier le refus de prononcer l’adoption57, y compris lorsque l’enfant âgé de moins de 13 ans n’a pas à y consentir58. Certes, l’intérêt de l’enfant doit primer dans toutes les décisions qui le concernent. Il semble néanmoins contestable, dans ces situations de séparations conflictuelles justifiant le prononcé d’une adoption « forcée », c’est-à-dire sans le consentement de la mère légale, d’exiger celui de l’enfant. L’intérêt de l’enfant n’est-il pas précisément d’être soustrait au conflit de loyauté dans lequel il ne peut que se trouver ? Ces quelques affaires démontrent l’inadaptation des règles juridiques en matière de filiation pour les couples de même sexe : ces femmes doivent recourir à l’adoption — dans une procédure nécessairement contentieuse compte tenu de l’opposition de la mère légale à celle-ci59 — pour établir un lien de filiation à l’égard de leur(s) propre(s) enfant(s).
Au demeurant, les deux dispositifs de rattrapage, la reconnaissance conjointe a posteriori créée par l’article 6, IV de la loi du 2 août 2021 et l’adoption « forcée » permise par l’article 9 de la loi Limon, ne s’appliquent qu’à une seule manière de faire famille : les AMP avec tiers donneur à l’étranger. Or il existait d’autres manières de contourner l’impossibilité pour les couples de femmes d’accéder à l’AMP en France. Dans un arrêt rendu par la première chambre civile le 4 octobre 2024, la Cour de cassation statue ainsi sur le recours d’une mère non statutaire ayant contesté la conformité de ces dispositions aux droits et libertés que la Constitution garantit. En l’espèce, sa compagne avait bénéficié, en France, d’une AMP en se présentant dans un service de médecine de la reproduction avec un homme pour y être pris en charge en tant que couple hétérosexuel ; de ce fait, elle ne pouvait, à la suite de leur séparation, adopter leur enfant commun. La QPC n’a précisément pas été renvoyée devant le Conseil constitutionnel car la première chambre civile a jugé que l’article 9 de la loi Limon n’était pas applicable au litige60. Le sort réservé aux inséminations artisanales est également très variable selon les juridictions61 – alors même que la Cour européenne des droits de l’homme avait pu émettre une réserve à ce sujet62.
L’adoption forcée de l’article 9 de la loi Limon, qui excluait de son périmètre un grand nombre de situations dans lesquelles l’enfant était pourtant issu d’un projet parental commun, ne s’applique désormais plus qu’aux instances en cours. C’est donc, à nouveau, vers les dispositions du droit commun de l’adoption, et en particulier la procédure d’adoption par l’autre membre du couple, qu’il convient de se tourner pour établir, en l’absence de reconnaissance conjointe anticipée, un second lien de filiation maternelle. Deux conditions sont alors nécessaires. La première condition, tenant à l’existence d’un couple, ne connaît plus aucune exception et en l’absence de mariage, la séparation du couple mettra un coup d’arrêt immédiat à l’établissement du second lien de filiation par adoption. La seconde condition tenant au consentement du parent légal ne connaît qu’une seule exception, désormais prévue à l’article 348-7 du code civil : le tribunal peut juger abusif le refus d’un parent de consentir à l’adoption de son enfant lorsqu’il s’en désintéresse au risque d’en compromettre la santé ou la moralité. Une disposition dont la contestation de la constitutionnalité n’a pas été jugée sérieuse par la Cour de cassation qui réaffirme, dans un arrêt du 26 mars 2025 – qui portait sur l’ancien article 348-6 du code civil, que « l’exigence du consentement des parents d’origine à l’adoption de leurs enfants mineurs, édictée par l’article 348 du code civil, constitue un principe essentiel du droit de l’adoption »63. Dès lors que la mère a consenti à l’adoption de l’enfant par sa conjointe et qu’elle n’a pas rétracté son consentement dans le délai de deux mois prévu par la loi, « l’opposition du conjoint ne lie pas le juge, qui doit seulement vérifier que les conditions légales de l’adoption de l’enfant sont remplies et si celle-ci est conforme à son intérêt »64. Il s’agissait en l’espèce d’un couple de femmes dont l’enfant était né en 2016, mais la situation pourrait être identique même si l’enfant était né après la loi du 2 août 2021. En effet, si l’acte notarié de reconnaissance conjointe anticipée n’a pas été réalisé en amont de la grossesse ou qu’il est inefficace, la seconde filiation maternelle ne peut être établie que par la procédure d’adoption par l’autre membre du couple : la possibilité d’instituer, par l’adoption, une seconde filiation maternelle dépend à nouveau de l’existence du couple et du consentement de la mère figurant dans l’acte de naissance. L’article 9 de la loi Limon n’est donc plus en vigueur, mais il n’en demeure pas moins que les juges seront amenés, à l’avenir encore, à prononcer des adoptions « forcées » – cette fois en application des règles de droit commun. Dans cette perspective, le mariage semble plus protecteur en ce qu’il permet de faire perdurer l’existence du couple au-delà de la séparation de fait. Il apparaît également important de conserver des liens avec l’enfant et pour cela, la mère non statutaire peut demander au juge de bénéficier, en tant que tiers, d’un droit de visite et d’hébergement – à charge pour elle de démontrer qu’il en va de l’intérêt de l’enfant65.
Dans une décision du 30 janvier 202566, le Défenseur des droits rappelle le Gouvernement à un principe pourtant connu : une circulaire ne peut déroger à la loi. En l’occurrence, cette décision revient sur la circulaire du 20 mars 2019 de présentation des dispositions destinées à lutter a priori contre les reconnaissances frauduleuses de paternité et de maternité qui visait, notamment, à mettre en œuvre les nouvelles dispositions du Code civil créées par la loi du 10 septembre 201867. Rappelons que cette loi a introduit deux nouveautés majeures dans le mécanisme de reconnaissance de filiation – en réalité de reconnaissance de paternité, tant on sait que les reconnaissances de maternité sont presque inexistantes. D’une part, l’enregistrement d’une reconnaissance peut désormais faire l’objet d’une opposition du parquet si elle est jugée frauduleuse. D’autre part, la reconnaissance – douteuse ou non – ne peut être enregistrée que sur présentation d’un « document officiel délivré par une autorité publique comportant son nom, son prénom, sa date et son lieu de naissance, sa photographie et sa signature » ainsi qu’un document établissant « son domicile ou […] sa résidence par la production d’une pièce justificative datée de moins de trois mois » énonce désormais l’article 316 du code civil68.
Il y aurait ainsi beaucoup à dire sur l’obligation d’attestation de domicile, outil par excellence d’exclusion des populations les plus précaires ; mais c’est sur le premier de ces documents que le contentieux s’est cristallisé. En effet, la circulaire d’application affirmait que les « récépissés » ne pouvaient être considérés comme des documents permettant d’établir l’identité du déclarant. Or, non seulement ces documents remplissent les conditions prévues par la loi mais, en outre, ils sont souvent les seuls documents « d’identité » détenus par les personnes migrantes – en particulier les demandeurs et demandeuses d’asile69. C’est précisément cette situation qui a d’ailleurs conduit à la saisine du Défendeur des droits, qui recommande donc au Ministère de la justice non seulement d’imposer la recevabilité des récépissés, mais, plus largement, de « rappeler aux services en charge de l’état civil que l’appréciation de la validité d’un justificatif d’identité doit, en tout état de cause, se faire à l’aune du droit au respect de la vie privée et familiale des intéressés et en considération de l’intérêt supérieur de l’enfant ».
Cette prise de position du Défenseur des droits est salutaire dans un contexte où s’accentue toujours plus la surveillance des pères étrangers d’enfants français ou les pères français d’enfants étrangers. Une surveillance qui se nourrit notamment de stéréotypes de genre racistes : l’image de pères étrangers forcément démissionnaires ou fraudeurs et de femmes étrangères à la sexualité douteuse et aux ventres menaçants pour l’intégrité de la Nation70. L. C.
L’arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 5 mars 2025 refuse une détermination des modalités d’exercice de l’autorité parentale illégale et défavorable aux mères. En l’espèce, un couple composé d’un homme et d’une femme, parents d’un jeune enfant, se sépare. Le père saisit le juge aux affaires familiales afin de déterminer les modalités d’exercice de l’autorité parentale. Un appel est formé devant la Cour d’appel de Paris, qui rend une décision surprenante : les juges autorisent la mère à prendre seule les décisions relatives à la santé de l’enfant en cas de nécessité médicale ou d’urgence, mais uniquement lorsqu’elle aura sollicité au préalable l’avis du père et que celui-ci, « soit se sera abstenu de répondre, soit s’y sera opposé sans raison légitime et sans faire de contre‑propositions efficientes ». La décision est cassée. Les juges, en statuant de la sorte, méconnaissaient les règles fondamentales de l’autorité parentale. Lorsqu’un couple se sépare, soit l’exercice est confié unilatéralement à l’un des parents78 et l’autre conserve alors le droit et le devoir de surveiller l’entretien et l’éducation, en étant informé des choix importants relatifs à la vie de l’enfant79 ; soit l’autorité parentale s’exerce en commun et s’applique alors, d’une part, une présomption d’accord pour les actes usuels et, d’autre part, l’exigence d’un double accord pour les actes qui ne le sont pas80. Il paraît donc impossible donc, comme l’a fait la Cour d’appel, de se placer au milieu du gué en prononçant un exercice en commun partiel de l’autorité parentale, laissant certains domaines à la compétence exclusive de l’un des parents. On constatera d’ailleurs que lorsque le juge a la possibilité de cantonner l’intervention des parents, la loi le dit explicitement : tel est le cas pour la délégation d’autorité parentale, qui peut être totale ou partielle81 ; ou pour le retrait d’autorité parentale, qui peut également porter sur tout ou partie des attributs de l’autorité parentale82. Or une telle possibilité n’est pas prévue par la loi s’agissant de l’exercice de l’autorité parentale. Mais au-delà de ces éléments de texte, la décision est révélatrice de l’imprégnation des assignations de genre qui semblent avoir guidé les juges d’appel. La mère se voyait confier deux missions : d’abord, prendre les décisions relevant de la santé de l’enfant dans une acception tout à fait traditionnelle du care au sein de la famille. Ensuite, et surtout, fournir le travail nécessaire pour faire émerger une décision commune avec le père : obligée de solliciter son avis, elle devait attendre son opposition, constater son abstention ou juger de l’efficience d’une contre‑proposition qu’il aurait jugée opportun de faire... Ce n’est donc pas seulement une délégation de la mission du magistrat à la mère que condamne ici la Cour de cassation ; c’est aussi l’imposition d’une charge : celle de trouver des accords ou d’identifier des conflits préjudiciables à l’intérêt de l’enfant. M. S.
L’arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 5 février 2025 va dans un même sens favorable aux droits des mères et à une interprétation rigoureuse des textes, mais cette fois dans un contexte de violences conjugales83. En l’espèce, la Cour d’appel de Caen avait octroyé une ordonnance de protection à une femme tout en lui confiant l’exercice unilatéral de l’autorité parentale sur le fondement de l’article 373-2-1 du Code civil. Cette possibilité est donnée aux juges par l’article 515-11, 5° du Code civil, selon lequel, à l’occasion de la délivrance d’une ordonnance de protection, les juges aux affaires familiales sont compétents pour « se prononcer sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale et, au sens de l’article 373-2-9, sur les modalités du droit de visite et d’hébergement, ainsi que, le cas échéant, sur la contribution aux charges du mariage pour les couples mariés, sur l’aide matérielle au sens de l’article 515-4 pour les partenaires d’un pacte civil de solidarité et sur la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants ». L’exercice unilatéral de l’autorité parentale est une modalité d’exercice de l’autorité parentale, contrairement au retrait de l’autorité parentale des articles 378 et suivants du Code civil, qui concerne la titularité même de l’autorité parentale. En ce sens, la décision ne surprend pas. Le pourvoi formé contre l’arrêt d’appel exploitait toutefois une ambiguïté doctrinale qui distingue les modalités de l’exercice de l’autorité parentale et les conditions de son exercice84 ; et son rejet témoigne d’une volonté ferme de la haute juridiction de parfaire l’éloignement mis en place par l’ordonnance de protection en limitant, par l’exercice unilatéral confié à la mère, les contacts entre la victime et l’agresseur. J. M
L’affaire inédite sur laquelle statue la Cour européenne des droits de l’Homme le 27 août 2024 dans un arrêt Namik Yüksel c. Turquie89 soulève la question du droit de visite quand l’enfant vit en prison avec la mère et que le père est lui aussi détenu. En l’espèce, un couple turc est incarcéré dans un même établissement. Leur enfant de quatre ans vit en cellule auprès de sa mère, conformément à la loi turque90. Le père, privé du même droit, souligne que l’octroi d’un d’accueil à la seule mère est « sexiste » et néfaste pour le « bien‑être psychologique de l’enfant »91. Il demande à bénéficier de visites plus nombreuses, ce qui lui est refusé, mais des aménagements sont accordés : une visite hebdomadaire d’une heure avec contact92 et une visite mensuelle réunissant le couple. La Cour EDH constate que les autorités turques ont respecté l’article 8 de la Convention en tenant compte de l’intérêt supérieur de l’enfant, en permettant des contacts réguliers malgré l’incarcération et en favorisant l’intervention de professionnel·les qualifié·es.
En Turquie, un enfant peut rester en détention avec sa mère jusqu’à l’âge de six ans, en l’absence d’alternative extérieure. En France, cette cohabitation est possible jusqu’à 18 mois, avec prolongation éventuelle93. L’accusation de « sexisme » formulée par le père pourrait donc être adressée au droit français. Toutefois, cette sorte d’exclusivisme maternel n’est pas tranché par la Cour qui préfère se concentrer sur les modalités des visites elles-mêmes, jugées compatibles avec l’article 8 de la Convention. Que serait‑il advenu d’une telle demande en France ? Un même établissement peut accueillir — dans des quartiers distincts, en raison du principe de non‑mixité et de séparation des unités nurseries — un père et une mère et son enfant. Dans ce cas, les membres de la famille, sur décision de la direction de l’établissement, peuvent bénéficier de parloirs familiaux94 ou d’unités de vie familiale95, sous réserve, cependant, du respect de l’intérêt de l’enfant. Mais il s’agit là d’un constat théorique. En pratique, l’insuffisance de structures d’aide au maintien des liens est à déplorer, qui plus est dans un contexte de surpopulation : les établissements comprenant des unités nurseries sont rares96, et sur les 186 établissements pénitentiaires français, seuls 38 sont équipés de parloirs familiaux, quand 59 sont équipés d’unités de vie familiale97. M. S.
Dans une décision du 24 avril 2025, le Conseil d’État98 prend une position ambiguë au regard du principe d’égalité entre les parents. En l’espèce, une femme de nationalité française avait reçu une délégation d’autorité parentale totale sur une mineure sénégalaise. Cette délégation avait été accordée à la demande du seul père de l’enfant, en vertu du droit sénégalais qui, dans un couple marié, attribue au père la faculté de déléguer sa « puissance paternelle » sans l’accord de la mère - l’inverse n’étant pas possible. Forte de cette décision, la délégataire avait sollicité pour l’enfant un visa long séjour vers la France. Sa demande est rejetée et ce refus est confirmé par chaque juridiction jusqu’au Conseil d’État.
Sur le papier, la décision est protectrice des femmes, puisque le Conseil d’État réaffirme que « le principe d’égalité des parents dans l’exercice de l’autorité parentale est au nombre des principes relevant de la conception française de l’ordre public international »99, et refuse de prendre acte de la délégation effectuée sans le consentement de la mère – ce qui le conduit à confirmer le refus de visa. On voit parfaitement comment cette position protège les femmes qui refuseraient que leur enfant soit confié·e à une tierce personne, en particulier aux fins de partir à l’étranger, surtout dans un contexte international où le trafic d’enfant et leur exploitation est une violente réalité.
Pour autant, la décision interroge car, en l’espèce, la mère produisait une attestation selon laquelle elle approuvait la délégation d’autorité – attestation jugée non probante par les juridictions. A contrario donc, on comprend que les juges auraient pu prendre en compte la délégation dans l’examen de la demande de visa si une preuve suffisante de l’accord de la mère avait été rapportée. Mais une telle preuve peut-elle vraiment exister en dehors d’une participation effective à la procédure judiciaire qui, par définition, n’est pas organisée par le droit sénégalais100 ? Dans un contexte de défiance à l’égard des migrations internationales et de forte restriction dans la délivrance des visas, la question peut être posée ainsi : l’impossibilité pour les mères de participer à la procédure de délégation ne serait-elle pas un bon prétexte pour refuser systématiquement l’arrivée en France d’enfants étrangers confié·es à des Français·es ? Par ailleurs, le Conseil d’État, tenu par les obligations internationales de la France, ajoute que la demande de visa ne présentait aucun argument relatif à l’intérêt supérieur de l’enfant, ce qui suggère que des circonstances particulières pourraient éventuellement permettre de contourner l’accord de la mère. Pourquoi pas ; mais notons que jamais la situation inverse ne pourra se produire : même tout à fait conforme à son intérêt, une demande de visa pour un enfant sans délégation d’autorité parentale motivée uniquement par le fait de souhaiter résider avec une tierce personne n’aurait aucune chance d’aboutir. En effet, le droit français prohibant tout éloignement forcé de mineur·es non accompagné·es d’un majeur responsable, les autorités françaises ne délivrent de visa long séjour pour des mineur·es seul·es que dans des cas tout à fait spécifiques – par peur de ne pouvoir les éloigner en cas de dépassement du visa101. Les mères sénégalaises mariées ne pouvant solliciter seules une délégation d’autorité parentale, elles ne peuvent donc prendre seules pour leurs enfants la décision de les laisser partir, même dans leur meilleur intérêt... L. C.
Lors d’une séparation parentale, si les parents sont en désaccord sur le lieu de résidence de l’enfant, le juge a pour mission de trancher le litige dans l’intérêt des enfants. La proposition de loi du 21 janvier 2025102 vise, dans ce cas, à faire de la résidence alternée le principe et à imposer au parent qui s’y opposerait de démontrer que celle‑ci est contraire à l’intérêt des enfants. De prime abord, la proposition semble consensuelle car porteuse d’égalité. Les enfants sont généralement soumis à l’autorité parentale conjointe, la résidence alternée, si elle est matériellement possible et souhaitée par les deux parents, apparaît comme la continuité de cet exercice commun. Décriée initialement comme pouvant bousculer les repères matériels des enfants, elle est progressivement entrée dans les mœurs. La part des résidences alternées n’a ainsi eu de cesse de progresser103. Il faut toutefois noter que l’idée d’une résidence alternée de principe est susceptible d’être portée par les tenants de positions politiques radicalement opposées, ce qui doit alerter sur la lourdeur des enjeux d’une proposition dont l’évidence doit être questionnée. Selon une première posture, la résidence alternée doit être de principe, car il faudrait en finir avec un droit « trop favorable » aux mères, et néfaste pour les enfants. L’exposé des motifs de la proposition, en l’occurrence portée par des députés principalement issus de la majorité présidentielle (Ensemble pour la République et Modem), affirme ainsi que la résidence habituelle accroîtrait considérablement le risque que les mineurs aillent en détention, aient des comportements suicidaires, et va jusqu’à affirmer que « 90 % des sans-abris ont grandi sans père ». Chacune de ces affirmations relève de clichés et de chiffres non fondés scientifiquement ou mal utilisés104. Une autre position favorable à la résidence alternée s’inscrit dans une posture féministe. La résidence habituelle est, sous cet angle, perçue comme défavorable aux mères puisqu’elle leur incombe très majoritairement, les obligeant à une charge familiale quasi-permanente tandis que les pères se verraient délestés de leur responsabilité. La résidence alternée de principe obligerait les pères à s’impliquer et permettrait une plus forte émancipation des mères105. Cette dissension autour de la proposition de la résidence alternée comme principe doit inviter à la prudence. Dans cette perspective, deux principaux arguments allant dans le sens de la mesure peuvent être évoqués. D’une part, la résidence alternée est parfois utilisée comme moyen de garder le lien avec la mère dans un contexte de violences conjugales. Faire de la résidence alternée le principe selon les termes de la proposition de loi, ce serait contraindre les femmes victimes de violences à en rapporter la preuve devant les juridictions pour attester que la résidence alternée n’est pas conforme à l’intérêt de l’enfant. Or cette preuve est souvent difficile à rapporter dans le système actuel qui exige des faits (certificats médicaux, dépôts de plainte…). L’aléa judiciaire est important, les enjeux sont forts, et les juges aux affaires familiales sont soumis à une charge de travail qui ne leur permet pas toujours de se plonger dans les dossiers. Aujourd’hui, dans certains cas, obtenir la résidence habituelle reste une manière pour les mères de se préserver et de préserver leurs enfants de l’exposition à une relation toxique, qui n’a pas été qualifiée de situation de violences conjugales par la justice dans un contexte où la justice peine à identifier et à sanctionner les violences conjugales. D’autre part, la résidence alternée n’est pas toujours synonyme de décharge mentale pour les femmes. Au contraire, elles continuent souvent à prendre les rendez‑vous médicaux, se charger du linge des enfants, penser au matériel pour l’école, recevoir les courriers et relances administratives, le tout au profit d’un père qui sera socialement perçu comme impliqué à 50 % compte tenu de la résidence alternée. Dans certains cas, l’exercice de cette charge « seule » est plus simple pour les femmes.
Il convient évidemment de prendre en considération la fonction expressive de la loi, qui manifesterait, avec un principe de résidence alternée, le caractère anormal de l’absence d’investissement des pères. Mais le maintien du cas par cas, dans l’intérêt de l’enfant, compte tenu de l’état de la justice actuelle, peut être aussi vu comme une règle à maintenir dans une perspective féministe.
Quoi qu’il en soit, il n’est pas étonnant que les règles relatives à la résidence de l’enfant de parents séparés soient régulièrement l’objet de débats : la rupture du couple n’intervient jamais sur un terrain neutre en termes d’égalité, ce que révèle un rapport récent. J. M.
Un rapport d’information de la Délégation aux droits des femmes de l’Assemblée nationale, présenté par Sarah Legrain et Delphine Lingemann et portant sur « les politiques d’accompagnement à la parentalité » a été rendu public le 24 juin 2025. L’étude est construite en deux parties. La première s’attache aux constats : sans surprise, la « charge domestique et parentale » est encore largement assumée par les femmes106 et si les politiques familiales ont été, au fil du temps, réorientées vers la « parentalité » et non plus simplement vers le rôle des mères, ce voile d’égalité ne suffit bien évidemment pas à combattre les stéréotypes et les inégalités réelles affectant les femmes107. Le rapport constate par exemple qu’entre 2020 et 2022, six personnes sur dix adhéraient à l’idée selon laquelle les mères savent mieux répondre aux besoins des enfants que les pères ou qu’en 2022, 23 % des 18-24 ans adhéraient à l’idée selon laquelle « un enfant qui n’a pas encore l’âge d’aller à l’école a des chances de souffrir si sa mère travaille ». Quant aux inégalités, on relèvera les manifestations d’une « pénalité parentale » explicitée par le rapport dans ses implications économiques (perte de revenus, diminution d’activités), sociales (isolement, discrimination dans l’environnement professionnel) et sanitaires (risque d’épuisement physique et psychique), évidemment exacerbée pour les mères en charge d’une famille monoparentale. Quarante‑quatre recommandations, souvent intéressantes, sont proposées dans la deuxième partie du rapport pour « avancer vers l’égalité dans la parentalité »108. On retiendra notamment la promotion d’une vision égalitaire des rôles parentaux dès le plus jeune âge109 ; une réforme des congés parentaux avec une proposition d’allongement du congé paternité à 16 semaines à l’image du « congé » maternité 110 ; une amélioration du suivi post-partum avec une extension du congé de proche aidant au second parent en cas de dépression de la mère ; la création d’un statut de famille monoparentale permettant l’octroi de droits spécifiques111 ; ou encore une réforme du système d’accueil de la petite enfance. M. S.
Dans un arrêt du 23 janvier 2025118, la Cour EDH a jugé, à l’unanimité, que les autorités françaises avaient violé l’article 8 de la Convention EDH, à propos d’un divorce pour faute prononcé aux torts exclusifs d’une épouse, au motif qu’elle avait cessé d’avoir des relations intimes avec son conjoint. Il s’agit d’une décision historique à double titre : elle ancre enfin les valeurs de liberté et d’égalité dans ce que l’institution matrimoniale peut comprendre de plus intime. Elle emporte avec elle la vieille idée selon laquelle la finalité procréative du mariage devrait impliquer l’obligation de consentir aux relations sexuelles avec son conjoint.
En l’espèce, tout l’enjeu résidait dans le point de savoir si l’ingérence dans la vie familiale de l’épouse était justifiée. Cela donne, d’abord, l’occasion aux juges de constater que le devoir conjugal existait toujours en droit français en 2025 - à raison d’une interprétation de l’article 215 du Code civil imposant aux époux une communauté de vie – et que l’ingérence était donc prévue par la loi119. L’affirmation peut surprendre, car l’existence du devoir conjugal était peu connue dans l’opinion publique, en particulier des personnes n’ayant jamais eu à subir les affres d’un divorce contentieux. Elle était néanmoins toujours enseignée dans les facultés de droit, et même parfois soutenue par des juristes120. Son existence en jurisprudence est clairement relevée par la Cour EDH, qui d’ailleurs est saisie sur la base d’un divorce aux torts exclusifs pour manquement au devoir conjugal prononcé par la Cour d’appel de Versailles dans un arrêt du 7 novembre 2019. La Cour décide, ensuite, que l’ingérence poursuivait un « but légitime », dès lors que la sanction de l’inexécution du devoir conjugal offrirait un moyen d’accéder au divorce. L’argument est douteux : fort heureusement, il existe d’autres voies permettant de sortir d’une vie matrimoniale devenue intolérable, ce que ne manque pas de relever plus loin la Cour EDH121. En définitive, c’est à l’aune de la condition de nécessité que les juges se positionnent pour condamner la France, en relevant deux points essentiels. Elle souligne d’abord que la répression pénale des relations sexuelles non consenties entre époux ne saurait suffire. Car « techniquement il est tout à fait possible de concevoir un droit qui, de façon cohérente, sanctionne au plan pénal le viol entre époux en même temps qu’il oblige ces mêmes époux à un devoir conjugal »122. Or en maintenant le devoir conjugal, l’État ne garantit pas la liberté des époux de refuser toute relation intime. Pire, il les contraint à « se forcer » pour respecter leurs obligations maritales et éviter toute possibilité d’un divorce pour faute. Ce faisant, la France enfreint son obligation positive de prévention des violences domestiques et sexuelles123. La Cour précise ensuite que le mariage ne constitue pas un consentement par anticipation, ce que sous‑entendaient de façon très problématique les autorités françaises124.
Que retenir de cette décision ? Les demandes de divorce fondées sur une inexécution du devoir conjugal sont en majorité portées par les hommes, et le plus souvent à titre reconventionnel, comme l’indique la Cour européenne. L’étude de Julie Mattiussi démontre que « sur cent décisions étudiées, soixante-dix demandes de reconnaissance d’une violation du devoir conjugal émanaient d’hommes au sein de couples de sexes différents, souvent à titre reconventionnel. Dans quatorze décisions, l’information n’était pas connue ; dans treize décisions, la demande émanait d’une femme dans un couple de sexe différent ; dans deux, les époux se rejetaient mutuellement la faute, et dans une décision, le moyen avait été relevé d’office par la cour d’appel »125. La disparition du devoir conjugal constitue un progrès du droit pour tous, mais certainement davantage encore pour les femmes. J. M. et M. S.
Lisa Carayon, Maîtresse de conférences, Université Sorbonne Paris Nord, Institut de recherche interterdisciplinaire sur les enjeux sociaux (IRIS)
Julie Mattiussi, Maîtresse de conférences, Université de Strasbourg, Centre de droit privé fondamental
Marie Mesnil, Maîtresse de conférences, Université Paris-Saclay, Institut Droit Éthique Patrimoine (IDEP)
Maïté Saulier, Maîtresse de conférences, CY Cergy Paris, Laboratoire d’études juridiques et politiques (LEJEP)
Cons. cons., 5 octobre 2018, n° 2018-737 QPC ; Cons. Const., 10 décembre 2021, n° 2021-954 QPC et 25 avril 2024, n° 2024-1086 QPC.↩︎
Ord. 19 octobre 1945, art. 9 : « Jusqu’à une date qui sera fixée par décret, et au plus tard à l’expiration du délai de cinq ans suivant la date de la cessation légale des hostilités, l’acquisition d’une nationalité étrangère par un Français du sexe masculin, âgé de moins de 50 ans, ne lui fait perdre la nationalité française qu’avec l’autorisation du Gouvernement français ».↩︎
CJUE, 4 oct. 2024, Mirin, C-4/23 ; : JCP G, 2025, 54, note Louis d’Avout ; D., 2025, p. 93, note Bernard Haftel, JDI, 2025, comm. 12, note Delphine Porcheron.↩︎
Art. 20 et 21.↩︎
Art. 7 (droit au respect de la vie privée) et 45 (liberté de circulation)↩︎
CJUE, 9 janv. 2025, Mousse, C-394/23 ; Dalloz IP/IT, 2025, p. 70, obs. Shanaz Kessaci ; AJDA, 2025, p. 64, note Emmanuelle Maupin ; Revue de droit du travail, 2025, p. 180, note Marie Mercat-Bruns ; Communication commerce électronique, 2025, comm. 4, note Anne Danis-Fatôme ; Europe, 2025, comm. 3, note Denys Simon.↩︎
Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE.↩︎
RGPD, art. 5 (1) (c).↩︎
§ 61.↩︎
CE, 31 juillet 2025, n° 452850.↩︎
C-247/23.↩︎
n° 2210744.↩︎
Proposition de loi n° 656.↩︎
Loi du 21 juin 2024 sur l’autodétermination de genre ; v. Pierre Michel, « La loi sur l’autodétermination du genre entre en vigueur : l’Allemagne montre-t-elle la voie ? », Le club des juristes, 7 nov. 2024 [en ligne].↩︎
Défenseur des droits, Décision-cadre n°2025-112 relative au respect de l’identité de genre des personnes transgenres.↩︎
n° 492376.↩︎
Circ. du 17 février 2017, NOR : JUSC1701863C↩︎
Circ. du 10 mai 2017, NOR : JUSC1709389C↩︎
Défenseur des Droits, Avis MLD-MSP-2016-164 du 24 juin 2016.↩︎
Recommandation n° 4.↩︎
Édito du référentiel par le directeur de l’administration pénitentiaire, Laurent Ridel, p. 3.↩︎
« L'administration pénitentiaire garantit à toute personne détenue le respect de sa dignité et de ses droits. L'exercice de ceux-ci ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles résultant des contraintes inhérentes à la détention, du maintien de la sécurité et du bon ordre des établissements, de la prévention de la commission de nouvelles infractions et de la protection de l'intérêt des victimes. Ces restrictions tiennent compte de l'âge, de l'état de santé, du handicap, de l'identité de genre et de la personnalité de chaque personne détenue ».↩︎
On pense par exemple aux principes sur l’application de la législation internationale des droits humains en matière d’orientation sexuelle et d’identités de genre, dit « Principes de Jogjakarta » de mars 2007 (spéc. principe n°9 : « toute personne privée de sa liberté doit être traitée avec humanité et avec le respect de la dignité inhérente à la personne humaine. L’orientation sexuelle et l’identité de genre font partie intégrante de la dignité de chaque personne ») ou au comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) qui, dans son 33e rapport général d’activités d’avril 2024, a dédié un chapitre de fond à l’établissement de « principes de base pour garantir un traitement respectueux et décent en prison » : https://rm.coe.int/1680af7212 (spéc. p. 37 et s.)↩︎
Sur ce point, Baptiste Garreau, Prune Missoffe, « Référentiel LGBT+ en prison : un petit pas sur un long chemin », Revue Dedans Dehors, mai 2024, n° 122.↩︎
Sur ce sujet, v. not. Coline Cardi, Anaïs Henneguelle, Anne Jennequin, Corine Rostaing, dir., La mixité genrée à l’épreuve de la prison. Recherche interdisciplinaire sur les interactions, espaces et temps mixtes en détention, IERDJ, septembre 2024 : https://hal.science/hal-05163182/document ; Anne Jennequin, Corinne Rostaing, « La non-binarité en détention. Un défi pour l’administration pénitentiaire » in Olivia Bui-Xuan, dir, Le(s) droit(s) à l’épreuve de la non-binarité, IFJD, 2023, p. 169 ; Anne Jennequin, « Le traitement carcéral des rapports entre les sexes : la regrettable exception pénitentiaire », in Patricia Demaye-Simonie, Valérie Mutelet, Fanny Vasseur-Lambry, Explorer le champ lexical de l’égalité homme/femme, Arras, Artois Presses Université, 2022, p. 151 ; Coline Rostaing, « La non-mixité des établissements pénitentiaires et ses effets sur les conceptions de genre : une approche sociologique », in Isabelle Heullant‑Donat, Julie Claustre, Élisabeth Lusset, Falk Bretschneider, dir., Enfermements. Volume III, éd. de la Sorbonne, 2017, p. 33 et s.↩︎
Code pénitentiaire, art. R. 211-1.↩︎
Sur ce sujet, Ariane Amado, Quentin Markarian, Olivia Nederlandt, « Le traitement des femmes et des personnes trans en prison : une approche comparée en droit belge, français et suisse », Revue de droit pénal et de criminologie, 2024, vol. 2024, n° 4, p. 333 ; Morgan Pénitot, « Les personnes détenues transgenres : quelle prise en compte ? », Cahiers de la recherche sur les droits fondamentaux, 2024, n° 22 [en ligne] ; Maïté Saulier, « Les personnes trans incarcérées : l’ordre pénitentiaire troublé ? », RJPF, 2025, p. 295.↩︎
Référentiel, p. 9.↩︎
Référentiel, p. 10. La décision est prise en commission pluridisciplinaire unique (CPU) lorsque l’établissement dispose d’un quartier femmes et d’un quartier hommes ou par la direction interrégionale des services pénitentiaires (DISP) ou la direction de l’administration pénitentiaire (DAP), après avis de la CPU, lorsqu’un transfert est nécessaire dans un autre établissement, disposant d’un quartier adapté.↩︎
Annexe II du référentiel↩︎
Référentiel, p. 12.↩︎
Référentiel, p. 12.↩︎
Le nombre de personnes écrouées détenues en France s’élève au 1er juillet 2025 à 84 951, pour une capacité de 62 509 places. Le nombre de personnes écrouées détenues a augmenté de 8,2 % en une année : https://www.justice.gouv.fr/documentation/etudes-et-statistiques/statistiques-mensuelles-population-detenue-ecrouee-9↩︎
Sur cette question, v. les conclusions de Me Benoit David dans le dossier du présent numéro.↩︎
Référentiel, p. 26.↩︎
Référentiel, p. 26.↩︎
Référentiel, p. 20.↩︎
Référentiel, p. 22.↩︎
Référentiel, p. 45↩︎
Référentiel, p. 45.↩︎
Référentiel, p. 21 : « Des échanges entre les surveillant(e)s et le personnel d’encadrement peuvent permettre l’identification d’agents volontaires pour exécuter les mesures de fouilles sur les personnes transgenres. Il est nécessaire de réaliser préalablement une sensibilisation des agents travaillant sur le secteur concerné ».↩︎
Référentiel, p. 22.↩︎
Référentiel, p. 24.↩︎
Référentiel, p. 17.↩︎
Référentiel, p. 18.↩︎
Référentiel, p. 25.↩︎
Cass. 1re civ., 12 juin 2025, n° 24-10.743, §§ 7-8.↩︎
§ 14.↩︎
Cass. 1re civ., 12 juin 2025, n° 24-21.397 et 398, § 9.↩︎
§ 10.↩︎
§ 12.↩︎
§ 13.↩︎
Cass. 1re civ., 12 juin 2025, n° 24-10.743, § 12 ; AJ fam., 2025, p. 393, obs. Maïté Saulier.↩︎
CA Amiens, 26 septembre 2024, n° 24/00381 ; AJ fam., 2024, p. 564, obs. Marie Mesnil.↩︎
TJ de Draguignan, 26 mars 2025, n° 24/05394 ; AJ fam., 2025, p. 290, obs. Marie Mesnil.↩︎
CA Lyon, 9 octobre 2024, n° 23/04234 ; AJ fam., 2024, p. 565, obs. Marie Mesnil.↩︎
CA Paris, 3 décembre 2024, n° 23/19221 ; AJ fam., 2025, p. 51, obs. Marie Mesnil.↩︎
CA Paris, 26 nov. 2024, n° 24/03817 ; AJ fam., 2025, p. 48, obs. Marie Mesnil.↩︎
Pour un appel jugé irrecevable de ce fait, voir CA Amiens, 22 mai 2025, n° 24/03870, et obs. Marie Mesnil à paraître in AJ fam.↩︎
Cass. 1re civ., 4 oct. 2024, n° 24-12.533 ; D. actu., 25 octobre 2024, obs. Marie Mesnil.↩︎
Pour une adoption prononcée, voir : TJ Avignon, 21 novembre 2024 ; AJ fam. 2025, p. 50, obs. Marie Mesnil ; et pour un rejet, voir : TJ Bordeaux, 2e civ. 16 septembre 2024, n° 23/07862 ; AJ fam. 2024, p. 567 obs. Marie Mesnil.↩︎
CEDH, 24 mars 2022, C.E. et autres c. France, n° 29775/18 et 29693/19, § 113 : « Au demeurant, la Cour souligne que l’exclusion du régime transitoire des enfants mineurs qui ne sont pas issus d’une AMP pratiquée à l’étranger et qui, à l’instar de M.B., sont nés sans recours à une assistance médicale à la procréation pratiquée sur le territoire français, pourrait soulever une difficulté sérieuse au regard de l’article 8 de la Convention, pris isolément ou combiné avec l’article 14 ».↩︎
§ 19↩︎
Cass. 1re civ., 26 mars 2025, n° 22-22.507, § 8.↩︎
Cass. 1re civ., 30 avril 2025, n° 23-11.544 ; AJ Fam., 2025, p. 340, obs. Marie Mesnil.↩︎
Décision n° 2025-017.↩︎
Loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie.↩︎
Lisa Carayon, « Nouvelle procédure de reconnaissance de filiation : viser les personnes étrangères, frapper tous les pères », AJ fam., 2018, p. 541. Pour une étude plus approfondie de ce dispositif et de son inscription dans la politique migratoire des familles v. aussi Lisa Carayon, « Parents suspects. Stratégies de contrôle des personnes étrangères parents d’enfants français » Revue interdisciplinaire d’études juridiques, 2021, vol. 86, n° 1, pp. 109-135.↩︎
Pour une critique globale de cette circulaire v. Lisa Carayon, Cécile Madeline : « Ne reconnaît pas son enfant qui veut… », Lettre du SAF, oct. 2019, [en ligne : http://lesaf.org/wp-content/uploads/2019/09/9-paternite-LCCM.pdf].↩︎
V. l’édito, « Mère-Patrie. Le genre au cœur des politiques migratoires », Intersections. Revue semestrielle genre et droit, 2025, n° 3.↩︎
Loi n° 2025-568 du 23 juin 2025 visant à renforcer l’autorité de la justice à l’égard des mineurs délinquants et de leurs parents.↩︎
Charlotte Tenenhaus, « La loi sur la justice des mineurs : le Conseil constitutionnel a eu le dernier mot », D. actu., 9 juillet 2025.↩︎
Cons. const., 19 juin 2025, n° 2025-886 DC.↩︎
V. la précédente livraison de la chronique « État civil, familles et conjugalités », Intersections. Revue semestrielle genre et droit, 2024, n° 2 [en ligne].↩︎
Cass. ass. plén., 28 juin 2024, n° 22-84.760 : « […] L’ensemble de ces considérations conduit la Cour à interpréter désormais la notion de cohabitation comme la conséquence de l’exercice conjoint de l’autorité parentale, laquelle emporte pour chacun des parents un ensemble de droits et de devoirs, et à juger désormais que leur cohabitation avec un enfant mineur à l’égard duquel ils exercent conjointement l’autorité parentale ne cesse que lorsque des décisions administrative ou judiciaire confient ce mineur à un tiers » ; D., 2024, p. 1751, note Louis Perdrix et Ibid., p. 1548, obs. Philippe Bonfils et Adeline Gouttenoire ; Ibid., p. 22, obs. Christophe Quézel-Ambrunaz ; Ibid., p. 852, obs. Marc Pichard ; AJ fam., 2024, p. 467, obs. Jérémy. Houssier ; RTD civ. 2024, p. 628, obs. Anne-Marie Leroyer ; Ibid., p. 897, obs. Patrice Jourdain ; RJPF 2024, n° 292, note Bérénice de Bertier-Lestrade ; Revue Lamy Droit Civil, 1er nov. 2024, n° 230, note Mélodie Combot ; Lexbase, 24 juill. 2024, n° A55625LL, obs. Adeline Gouttenoire ; Dr. fam., 2024, p. 106, note Anthony Tardif ; Responsabilité civile et assurances 2024. 190, note Julien Lagoutte ; JCP G 2024, p. 992, note Laura Vitale ; et la précédente livraison de la chronique « État civil, familles et conjugalités », Intersections. Revue semestrielle genre et droit, 2024, n° 2 [en ligne].↩︎
Caroline Siffrein-Blanc, « Vers une réforme de la responsabilité civile des parents », RTD civ., 2011, p. 479.↩︎
C. pén., art. 227-17.↩︎
C. civ., art. 373-2-1, al. 1er.↩︎
C. civ., art. 373-2-1, al. 5.↩︎
C. civ., art. 372-2.↩︎
C. civ., art. 377-1.↩︎
C. civ., art. 379-1.↩︎
Cass. 1re civ., 5 février 2025, n° 23-13.181 ; AJ fam., 2025, p. 227, obs. Blandine Mallevaey.↩︎
Blandine Mallevaey, « Ordonnance de protection des victimes de violences conjugales et exercice de l’autorité parentale », AJ fam., 2025, p. 231.↩︎
Rép. min. n° 1274 du 10 oct. 2024.↩︎
Rapport de la CIIVISE « Violences sexuelles faites aux enfants : on vous croit », 17 novembre 2023, p. 439.↩︎
Rép. min 12 juillet 2018 à la question écrite n° 02674.↩︎
La réponse ministérielle indique que le SAP peut être invoqué par les parties.↩︎
CEDH, 27 août 2024, Namik Yüksel c. Turquie, n° 28791/10.↩︎
Loi turque no 5275 relative à l’application des peines et des mesures préventives, art. 65.↩︎
§ 9.↩︎
En Turquie, des visites « sans contact » peuvent être ordonnées. Elles sont, en principe, interdites en France, mais des exceptions existent : pour les personnes prévenues, le juge d’instruction peut prescrire des visites avec dispositif de séparation. La direction d’établissement peut également décider de ce dispositif pour des raisons de sécurité ou à la demande du visiteur ou de la personne visitée, v. Code pénit., art. R. 341-13.↩︎
Sur décision du directeur interrégional des services pénitentiaires et après avis d’une commission consultative, v. Code pénit., art. D. 216-22 et s.↩︎
Code pénit., art. R. 341-15.↩︎
Code pénit., art. R. 341-16↩︎
Au 1er janvier 2022, 32 établissements pénitentiaires étaient équipés de cellules mère-enfant. Les quartiers nurserie sont très souvent composés de quelques cellules seulement, à l’exclusion de la maison d’arrêt de Fleury‑Mérogis qui en compte une vingtaine.↩︎
V. justice.gouv.fr : la prise en charge en détention.↩︎
n° 490561 ; et v. les observations de Maïté Saulier, AJ fam., 2025, p. 403.↩︎
Comp. Cass. 1re civ., 4 novembre 2010, n° 09-15.302.↩︎
Sur ce point, soulignant les paradoxes de la décision au regard des principes du droit international privé : Amélie Panet-Marre, « Contrariété à l’ordre public international de la délégation de puissance paternelle sans l’accord de la mère », D. actu., 15 mai 2025.↩︎
On pense ainsi aux rares cas de visa pour scolarisation dans le secondaire. Des visas de court séjour sont parfois délivrés dans le cadre de voyages scolaires ou pour permettre des soins médicaux (aucun visa long séjour de ce type n’ayant été délivré depuis 2013). Dans ces situations, fait que la personne mineure soit, d’une part prise en charge par une institution et, d’autre part, ne soit pas accompagnée de ses parents est souvent vu comme une garantie de retour.↩︎
Proposition de loi 21 janvier 2025 n° 819 visant à permettre à l’enfant de maintenir des liens équilibrés avec ses deux parents en cas de séparation s’il y a désaccord sur le mode de résidence.↩︎
En 2020, 11,5 % des enfants de parents séparés sont en résidence alternée contre 10,6 % en 2018, v. Kilian Bloch, Insee première, 3 mars 2021 : « En 2020, 12 % des enfants dont les parents sont séparés vivent en résidence alternée ».↩︎
Pour une critique précise et référencée de ces chiffres, Stéphanie Lamy, « Résidence alternée : le normfare au service de la domination masculine », Blog Mediapart, 11 juillet 2025.↩︎
V. not. l’édito « Place des pères : annonces présidentielles, analyses féministes », Intersections. Revue semestrielle genre et droit, 2024, n° 1.↩︎
Rapport précité, p. 17 et s.↩︎
V. égal. Clémentine De Champs, Claudine Pirus, « Des stéréotypes de genre encore très ancrés, notamment chez les hommes », Études et résultats, DREES, Février 2024, n° 1294.↩︎
Rapport, p. 47 et s.↩︎
Cours d’activités domestiques à l’école pour l’ensemble des élèves (p. 48), adoption d’une terminologie neutre pour l’école maternelle qui deviendrait l’école pré-élémentaire ou pour les « congés » maternité et paternité (p. 49).↩︎
La proposition est ainsi formulée (p. 68) : « huit semaines seraient obligatoires et huit semaines seraient facultatives. Sur les huit semaines obligatoires, quatre semaines, correspondant au système actuel, devraient être prises à la naissance de l’enfant et seraient donc simultanées avec le congé de la mère. Elles auraient pour objectif de favoriser une répartition équitable des tâches parentales tout en facilitant la récupération de la mère. À l’issue du congé maternité, le père prendrait, de manière obligatoire, quatre semaines supplémentaires (…) De l’avis des experts auditionnés, ces semaines de congé du père seul avec l’enfant sont fondamentales pour éviter l’installation d’une position de « parent auxiliaire » et mettre en place une dynamique égalitaire dans la répartition des tâches parentales et domestiques. À cette période obligatoire, viendrait s’ajouter une période de huit semaines facultatives et fractionnables, que les pères pourraient poser dans l’année suivant la naissance de l’enfant.↩︎
V. déjà pour la proposition de création d’une « carte “familles monoparentales”», Sénat, Familles monoparentales : pour un changement des représentations sociétales, par Colombe Brossel et Béatrice Gosselin, au nom de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, n° 485, 28 mars 2024 (sur lequel, v. une précédente livraison de la chronique « Actualités choisies État civil, familles et conjugalités », Intersections. Revue semestrielle genre et droit, 2024, n° 2, spéc. § 7.↩︎
C. civ., art. 255 dans le cadre du divorce ; C. civ., art. 373-2-10 dans le cadre de l’autorité parentale.↩︎
C. civ., art. 375-4-1.↩︎
Référentiel national de financement partenarial des services de médiation familiale, janvier 2025.↩︎
Pour une présentation sommaire, v. [en ligne : https://www.unaf.fr/ressources/separation-des-couples-causes-et-processus/]. Nous remercions l’autrice de nous avoir transmis le rapport dans son intégralité et renvoyons les lecteurices à la publication suivante : Emmanuelle Santelli, « De quoi la séparation est-elle l’expression ? Quand le modèle de l’amour romantique entrave la conversation conjugale », Recherches familiales, 2024, n° 21, pp. 105-126.↩︎
Emmanuelle Santelli, Séparations. Des origines à la décision, analyse d’un processus, Rapport de recherche 2022, p. 5 [en ligne].↩︎
Ibid., annexe 3, p. 30.↩︎
CEDH, 23 janvier 2025, H. W. c. France, n° 13805/21 ; D., 2025, p. 372, note Julie Mattiussi ; AJ fam., 2025, p. 102, note Maïté Saulier ; RJPF 2025, n° 290, note Mélanie Jaoul ; JCP G, 2025, p. 269, note Marie Lamarche ; Dr. fam. 2025, comm. 29, note Jean-René Binet ; ibid., p. 51, note Nicolas Kermabon ; Procédures, 2025, comm. 59, obs. Mélanie Douchy‑Oudot ; Gaz. Pal., 11 mars 2025, n° 9, note Rémy Libchaber ; L’essentiel droit de la famille et des personnes 2025, n° 3 ; RTD civ., 2025, p. 288, obs. J.-P. Marguénaud ; RTD civ., 2005, p. 308, obs. Anne-Marie Leroyer.↩︎
Pour une étude fouillée de la jurisprudence rendue après la loi n° 2006-399 du 4 avril 2006 sur ce fondement : Julie Mattiussi, « Le devoir conjugal : de l’obligation de consentir », in Manon Garcia, Julie Mazaleigue‑Labaste, Alicia‑Dorothy Mornington (dir.), Envers et revers du consentement, Mare & Martin, 2023, p. 123.↩︎
Lisa Carayon et Maïté Saulier, « L’avènement du retour en arrière – puisqu’on peut tout publier… », Intersections. Revue semestrielle genre et droit, 2025, n° 3 [en ligne].↩︎
§ 92 : « le conjoint de la requérante avait la possibilité de solliciter le divorce pour altération définitive du lien conjugal. [...] La défense de ses droits pouvait donc être assurée par d’autres moyens ».↩︎
Julie Mattiussi, art. préc.↩︎
Conv. du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, dite « Convention d’Istanbul », en vigueur en France depuis le 1er nov. 2014, art. 12.↩︎
V. spéc. § 58.↩︎
Julie Mattiussi, art. préc.↩︎