(juillet 2024 – juin 2025)

Nina Bonhomme-Janotto, Hélène Duffuler-Vialle, Anne Jennequin, Catherine Le Magueresse, Julie Léonhard, Anne Simon, Serge Slama
Depuis #MeToo, les violences sexistes et sexuelles ne sont plus
seulement un objet de dénonciation sociale : elles sont devenues un
laboratoire de recomposition du droit pénal, du droit civil et du droit
public. L’actualité 2024-2025 illustre bien la juridicisation comme la
juridictionnalisation de la lutte contre les violences sexistes et
sexuelles. Elle témoigne de la diversité des modes d’appréhension par le
droit des violences sexistes et sexuelles, qu’il s’agisse de pénaliser
les infractions relatives aux violences sexistes et sexuelles (I), de
les réprimer pénalement (II) ou de prévenir les nouvelles violences pour
mieux protéger les victimes (III)].« Son mari m'avait donné la permission, pour moi elle était d'accord »
« Dans l’excitation, j’ai pas fait attention qu’elle ne se réveillait pas »
Ces propos tenus lors du procès des violeurs de Mazan1 illustrent dramatiquement à quel point certains hommes sont convaincus de leur droit d’user des femmes. Pour une grande partie de la société en revanche, cette « découverte » a été un choc.
Ce procès, qualifié de « hors normes », ne posait cependant pas de difficulté juridique : il était acquis que Mme Pélicot avait été droguée par son mari qui la faisait violer par des dizaines d’hommes2. La « surprise », un des quatre éléments requis pour constituer l’infraction de viol, résultait de l’état d’inconscience de Mme Pélicot qui la rendait incapable de consentir à un acte sexuel (ou de le refuser). Contrairement à la plupart des procédures pour viol ou agression sexuelle, le sujet du consentement ne se posait donc pas. Pourtant, plusieurs avocat·es des accusés l’ont soulevé arguant notamment que ces derniers avaient pu croire à un consentement émanant du mari, ou donné par Mme Pélicot avant d’être sédatée … Ces plaidoiries, fondées sur le défaut d’intentionnalité, n’ont pas convaincu les magistrat·es ; elles ont en outre suscité un mouvement d’indignation et de réflexion dans l’espace public3, sur les réseaux sociaux, et plus globalement dans la société.
Ce procès a également contribué au débat préexistant sur la nécessité d’introduire une définition du consentement sexuel dans le Code pénal4 et a pesé dans le processus législatif initié fin 2023 par deux députées, Marie-Charlotte Garin et Véronique Riotton.
À l’origine de leur collaboration, le refus de quelques pays, dont la France, de soutenir une disposition relative au viol de la proposition de directive européenne sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique5.
Se saisissant de ce sujet, la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes de l’Assemblée nationale a alors lancé une mission d’information portant spécifiquement sur la définition pénale du viol et des agressions sexuelles, dont les travaux se sont achevés par la remise d’un rapport6 et par le dépôt d’une proposition de loi transpartisane7 en janvier 2025. Le gouvernement ayant engagé une procédure accélérée, les travaux parlementaires furent raccourcis et aboutirent au vote de la loi le 29 octobre 2025. Revenons sur les débats législatifs et doctrinaux autour de cette loi.
Selon certains pénalistes, cette modification serait inutile voire dangereuse. Inutile car le Code pénal donnerait satisfaction et que seule son application serait parfois défaillante en raison principalement d’un manque de formation des acteur·ices de la chaîne judiciaire et du manque criant de moyens de la justice.
D’autres revendiquent le fait que le Code pénal ne couvre pas toutes les formes de violences sexuelles. Selon le professeur Dreyer par exemple, le droit pénal n’a pas vocation à réprimer toutes les violences sexuelles : « l’agression sexuelle n’est pas tout acte sexuel accompli sans le consentement d’autrui, mais spécifiquement un acte sexuel imposé en ayant recours à la violence, contrainte, menace ou surprise. […] Cela signifie que l’atteinte au consentement d’autrui, qui peut aussi exister en l’absence de violence, contrainte, menace ou surprise, n’est pas assez grave pour relever du droit pénal. Il appartient au seul droit civil d’y apporter une réponse»8.
L’introduction d’une définition du consentement positif serait également dangereuse en ce qu’elle porterait atteinte aux grands principes du droit. Ce sont principalement des universitaires9 et des avocat·es qui partagent cette analyse. Le Conseil national des barreaux, par exemple, considère que « l’inclusion de la notion de consentement risque d’entraîner une insécurité juridique au détriment des victimes et des droits de la défense » et « s’inquiète du renversement de la charge de la preuve et de la disparition de l’élément intentionnel de l’infraction que pourrait induire une réécriture de la définition du crime de viol »10.
La violation du principe de la présomption d’innocence est également redoutée. Ce dernier argument, utilisé pour réduire au silence les personnes qui tentent de dévoiler des VSS, est banal11. Il s’agit ici de soulever l’inconstitutionnalité de la réforme en ce qu’elle conduirait à une inversion de la charge de la preuve. Or, on peine à comprendre cette inquiétude : aucun renversement ou même aménagement de la charge de la preuve n’est opéré par cette modification législative puisqu’il appartiendra toujours aux autorités de poursuite d’apporter la preuve des éléments constitutifs des infractions.
Certaines de ces critiques sont partagées par des associations féministes12 qui les inscrivent toutefois dans un autre cadre d’analyse. Outre qu’elles craignent que les changements apportés par la proposition de loi ne se retournent contre les plaignantes en ce qu’elles seraient davantage questionnées sur leur comportement et contraintes d’apporter la preuve de leur refus13, selon elles, le faible nombre de plaintes et de condamnations tient, non du droit pénal relatif aux VSS dont elles réfutent la conceptualisation patriarcale14, mais du sexisme de la justice. Les efforts pour y remédier devraient donc se concentrer sur l’application du droit15 et sur les moyens alloués à la justice. D’autant que les avancées judiciaires sont possibles comme en témoigne selon elles, l’arrêt de la Cour de cassation du 11 septembre 202416.
Cet arrêt a été mis en avant par les opposant·es à la réforme pour prouver que la jurisprudence parvient à prendre en compte des situations qui auparavant échappaient au droit. Il semble être le premier de la Cour de cassation à mettre en avant la notion de sidération. Jusqu’à présent en effet, seules les juridictions de fond17 y recouraient, sans être censurées par la Cour de cassation18. Cependant, il pourrait demeurer un arrêt d’espèce au regard des faits jugés.
Dans cette procédure, M. D est renvoyé devant un tribunal correctionnel pour agression sexuelle commise sur sa nièce, Mme C. En l’occurrence, M. D. a rejoint sa nièce, plus jeune de 20 ans, alors qu’elle dormait dans son lit et l’a touchée sur les jambes, le ventre, la poitrine et le sexe. Au réveil de celle-ci, il a continué ses agissements, tandis que, pétrifiée, Mme C. était dans l’incapacité de réagir. D’abord relaxé, il est condamné en appel après avoir présenté une défense consistant à alléguer le consentement de la plaignante. Devant la Cour de cassation, sa défense évolue : il fait en effet valoir qu’il « avait pu se méprendre sur les intentions de Mme C. » et soulève donc le moyen du défaut d’élément intentionnel, arguant que la cour d’appel « devait nécessairement rechercher si M. D. avait eu conscience de cette absence de consentement », d’autant que la victime avait déclaré « “que son oncle n’avait pas pu savoir qu’elle n’était pas consentante” en raison de son mutisme total durant les faits »19. La Cour de cassation rejette le pourvoi : « Les juges ont établi que le prévenu a agi par surprise en procédant à des attouchements sur la victime alors que celle-ci était endormie, puis en poursuivant ses gestes qui ont généré chez elle un état de sidération, qu’il a lui-même constaté, ce qui établit qu’il a agi en toute connaissance du défaut de consentement de cette dernière ».
Dans cette affaire, l’infraction d’agression sexuelle était constituée dès lors que les attouchements sexuels ont commencé pendant le sommeil de la victime. Nous sommes là dans une des situations où la « surprise » est retenue depuis 185720. La condamnation était donc prévisible. La Cour de cassation ne s’en tient pas là et rattache la sidération à la surprise, tout en mentionnant l’absence de consentement de la victime, prouvée par d’autres éléments du dossier. Quelle est la raison de cette mention ? L’hypothèse d’un appel au législateur n’est pas exclue. Cette décision met en effet en lumière l’intériorisation par la victime elle-même de sa responsabilité de manifester son désaccord (« son oncle n’avait pas pu savoir qu’elle n’était pas consentante » en raison de son mutisme), alors que son oncle aurait pu rechercher son accord. Ce qu’il n’a pas fait puisque, précisément, il ne s’en souciait pas…
Une question demeure : la solution aurait-elle été la même si M. D. n’avait pas agressé sa nièce pendant son sommeil ? L’état de sidération de cette dernière aurait-il suffi ? On ne peut l’affirmer. Cet arrêt ne peut donc être conclusif quant à l’inutilité de la réforme.
Ces préoccupations et critiques émises par les opposant·es à la proposition de loi ont été prises en compte tout au long du travail parlementaire afin d’améliorer le texte proposant de définir le consentement sexuel et éviter qu’il ne nuise aux victimes.
Le constat des « défaillances » du service public de la justice est partagé à la fois par les associations s’opposant à l’introduction d’une définition du consentement positif et par celles qui y sont favorables. Comme sont partagées l’analyse systémique des VSS, la prégnance de la culture du viol et la conscience aiguë que la plupart des victimes de VSS sont dans une situation de coercition telle qu’un refus les expose à des représailles de diverses natures, de même que d’autres sont dans des rapports de domination tels qu’elles en sont aliénées et que toutes vivent l’annihilation de leur être par le viol.
Toutefois, à l’inverse des opposant·es à la réforme, les partisan·es21 de l’introduction d’une définition pénale du consentement sexuel jugent que la conceptualisation des infractions de viol et d’agression sexuelle par le Code pénal explique, en partie, que 94% des victimes de viol ne déposent pas plainte et qu’un nombre infime d’agresseurs sont condamnés.
Lors du procès, le mis en cause allègue communément que la plaignante a consenti (voire qu’elle était « entreprenante »). Et cette défense porte trop souvent ses fruits parce que le Code pénal le permet. En effet, si l’absence de consentement est une condition nécessaire de la caractérisation d’une infraction de viol ou d’agression sexuelle22, elle n’est pas une condition suffisante : selon l’article 222-22 du Code pénal, elle ne peut résulter que d’une « violence, contrainte, menace ou surprise » (VCMS). La preuve d’un refus extériorisé par la victime ou la preuve de son absence d’accord (pleurs, absence de participation) ne suffisent pas à caractériser l’infraction ; elles doivent être corroborées par une forme de VCMS23. Autrement dit, le Code pénal, en ne permettant pas sa répression, autorise implicitement l’accès à l’intimité des femmes et des hommes, sans leur accord, à condition de ne pas user de VCMS.
Ajoutons que ces modes opératoires n’ont pas été définis par le Code pénal et sont diversement analysés par les juridictions. Le raisonnement est le suivant : si, par exemple, le mis en cause a exercé une forme de violence, c’est pour « vaincre la résistance » de la victime ou (en cas de surprise) empêcher une possible réaction. Une « résistance24 » ou a minima une réaction est attendue de la « vraie » victime, sauf quand elle est dans l’incapacité de le faire.
Quant à l’élément intentionnel des infractions - soit la conscience d’aller contre la volonté de la victime -, il est le plus souvent déduit du recours à une forme de VCMS. Il s’ensuit une jurisprudence retenant l’absence d’intention répréhensible aux motifs que le mis en cause a pu croire que « le refus n’était pas sérieux », qu’il s’agit d’une « mésinterprétation », qu’en l’absence de réaction de la victime, il a cru qu’elle était consentante… De facto, cette approche conduit à interroger le comportement de la victime sur l’expression de son absence de consentement, sur l’éventuelle ambiguïté de son comportement afin de vérifier que le mis en cause n’a « vraiment » pas pu se « méprendre ».
L’un des objectifs de la modification législative est d’éviter les classements sans suite, ordonnances de non-lieu, relaxes ou acquittements fondés sur un doute quant à l’intention du mis en cause alors que ce dernier allègue un consentement sans avoir pris de mesure raisonnable pour s’en assurer, voire en ignorant délibérément les signes de non-acceptation ou en tirant profit d’un contexte dans lequel la victime était contrainte de céder. Le sujet du consentement est au cœur des procès mais ce sont les agresseurs qui le définissent. L’enjeu est de les priver de ce privilège en définissant légalement et objectivement un consentement valable comme étant « libre, éclairé, spécifique, préalable et révocable ». Il doit en outre être analysé en tenant compte des circonstances entourant son éventuelle énonciation. Enfin, il ne peut être déduit du seul silence ou de la seule absence de réaction de la victime.
Cette définition du consentement sexuel conduit à une mutation de l’élément moral des infractions de viol et d’agression sexuelle. Plutôt que de se contenter d’un « j’ai cru que » recevable en l’absence de VCMS ou du fait d’éléments de VCMS jugés insuffisants, il sera demandé au mis en cause comment il s’est assuré effectivement du consentement (tel que défini par le Code pénal) de la victime.
Cette nouvelle approche opère un changement de paradigme. En conséquence, le « droit d’accès à des femmes » que certains hommes pensent toujours avoir25 est juridiquement remis en cause.
La définition du consentement voulue par le législateur encadrera le travail de celles et ceux qui mettront en œuvre les nouvelles dispositions. Elle circonscrit les appréciations subjectives ou stéréotypées relatives au « vrai » viol ou à la « bonne victime » qui a les réactions de résistance idoines. Elle contraint les acteurs et actrices de la chaîne judiciaire à rechercher si le mis en cause s’est soucié de recueillir l’accord de l’autre et, en cas de consentement allégué, s’il présentait les qualités requises par les nouvelles dispositions. Pour mieux cerner l’esprit de la réforme et les attentes des parlementaires, ces dernier·es pourront se référer aux avis du Conseil d’État26, de la CNCDH27 et bien-sûr aux riches travaux parlementaires.
Les instances européennes « exhortaient28 » la France de modifier son droit pénal afin de fonder la définition des violences sexuelles sur l'absence de consentement libre de la victime. A trois reprises en 202529, la CEDH a également fait le constat des lacunes du droit français en affirmant que « le consentement doit traduire la libre volonté d'avoir une relation sexuelle déterminée, au moment où elle intervient et en tenant compte de ses circonstances » 30.
La proposition de loi votée le 29 octobre 2025 a exaucé leurs vœux en introduisant dans le Code pénal une définition du consentement sexuel, qualifié, prenant en compte les éventuels rapports de pouvoir et les circonstances dans lequel il a pu être émis. Loin donc d’un consentement sexuel libéral qui les ignore.
Certes, et cela a été martelé, l’ajout d’une définition pénale du consentement sexuel ne résoudra pas tout. La maltraitance judiciaire souvent liée à des représentations sociales sexistes, la prévention de la victimisation secondaire, le sujet des moyens de la justice doivent être au cœur des combats à mener31. Une étape décisive a toutefois été franchie. C. L. M.
Un maître de conférences en droit public de l’université de Haute Alsace tient, durant ses cours, des propos qualifiés de « sexistes et dénigrants » par les juges. Citons-le : « J’ai la braguette ouverte, je me suis fait sucer entre midi et deux », « Si le viol est inévitable, détends-toi et profite », « Tu vas trop vite, ta copine me l’a encore dit hier soir » 32. Il mime également – sans le toucher - un acte de sodomie sur un étudiant. Quinze étudiant·es témoignent et ces agissements sont enregistrés.
Le journal L’Alsace s’en fait l’écho, ce qui déclenche l’auto-saisine du parquet lequel reçoit par la suite un signalement du président de l’université au titre de l’article 40 du Code de procédure pénale. Une procédure disciplinaire, ouverte en parallèle, donne lieu à une révocation33.
Dans un premier temps, le mis en cause est poursuivi devant le tribunal correctionnel du chef notamment de « harcèlement sexuel par personne abusant de l'autorité que lui confèrent ses fonctions, faits commis au préjudice de quinze étudiant·es ». Il est condamné pour harcèlement sexuel et violence à un an de prison avec sursis, à trois ans d'interdiction d'exercer l'activité professionnelle d'enseignant ainsi qu'à dédommager trois parties civiles (l’université et deux étudiantes) qui avaient demandé un euro symbolique. Il interjette appel. La cour d’appel de Colmar infirme le jugement et le relaxe (sauf pour un fait)34 aux motifs que les étudiant·es « n'ont pas été visés directement par les propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste du prévenu, adressés à la cantonade lors de cours ou de séances de travaux dirigés ».
Elle est censurée par la chambre criminelle de la Cour de cassation saisie de deux pourvois émanant du mis en cause et de l’université. Son arrêt35 vient préciser une acception du harcèlement sexuel dit environnemental ou d’ambiance peu usitée en droit bien que cette forme de harcèlement ait été identifiée depuis longtemps.
La distinction entre le harcèlement sexuel de type chantage et le harcèlement sexuel en raison d’un « environnement hostile » est ancienne36. Elle est le fruit des travaux de la juriste étatsunienne Catharine MacKinnon37 repris en 1980 par l’EEOC (Equal Employment Opportunity Commission) laquelle édicte ses « principes directeurs » en matière de harcèlement sexuel. Deux formes principales de harcèlement sexuel sont distinguées : le chantage sexuel (dit aussi « harcèlement quid pro quo ») et « l’environnement hostile ». Cette distinction sera ensuite appliquée par les tribunaux jusqu’à la Cour suprême38 puis se diffusera dans d’autres pays et organisations, notamment dans les normes européennes telles que la Directive n° 2002/73 du 23 septembre 2002 qui définit le harcèlement sexuel comme « la situation dans laquelle un comportement non désiré à connotation sexuelle, s'exprimant physiquement, verbalement ou non verbalement, survient avec pour objet ou pour effet de porter atteinte à la dignité d'une personne et, en particulier, de créer un environnement intimidant, dégradant, humiliant ou offensant ». Point n’est besoin ici que le harceleur ait visé une personne en particulier, il suffit que ses agissements créent un environnement hostile.
Les associations et syndicats intervenant aux côtés des victimes de VSS sur leur lieu de travail utilisent également cette notion.
Lorsqu’en France le harcèlement sexuel devient un délit en 199239, le législateur exclut le harcèlement environnemental ou « d’ambiance »40. En droit pénal, comme en droit du travail, le harcèlement sexuel suppose, pour être constitué, un abus d'autorité et la preuve que le harceleur ait usé d’ordres, de menaces ou de contraintes dans le but d'obtenir des faveurs sexuelles.
Cette définition restrictive du harcèlement sexuel n’avait toutefois pas empêché la chambre sociale de la Cour de cassation de retenir la faute grave d'un chef de service qui avait eu une attitude particulièrement inconvenante choquant la pudeur de salariées, sans qu'il ne soit établi qu'il ait cherché à obtenir les « faveurs sexuelles » de celles-ci41. Ce qui s’apparente à une admission prétorienne de la seconde forme de harcèlement sexuel.Il faut toutefois attendre la réforme de 2012 pour qu’elle intègre la loi.
Lors des débats parlementaires ayant conduit à l’adoption de la loi n° 2012-954 du 6 août 2012 relative au harcèlement sexuel, le Sénat, suivi par l’Assemblée nationale, a substitué le terme « situation » à « environnement » trouvant ce dernier trop imprécis. De longs échanges ont été consacrés à la nécessité d’inclure ce type de harcèlement également qualifié de harcèlement d’ambiance.
En droit, rien ne s’opposait donc à ce que le harcèlement sexuel environnemental fût réprimé. Encore fallait-il que les victimes se saisissent de cette possibilité et que les juristes la fassent vivre. Certain·es s’y sont employé·es et progressivement la jurisprudence s’est étoffée.
Ce sont d’abord les juridictions sociales qui ont eu recours à cette notion pour condamner des employeurs laissant prospérer le harcèlement sexuel - quand ils n’en étaient pas à l’origine - au mépris de leurs obligations en matière de prévention des VSS et de sécurité au travail ou pour valider des licenciements de harceleurs contestant le caractère fautif de leurs agissements ou l’absence de proportionnalité entre la faute et la sanction. Nous le savons, tous les secteurs sont concernés : rédaction d’un journal42, permanence d’un député43 et … université.
L’arrêt de la chambre criminelle invite désormais les juridictions pénales du fond à qualifier de harcèlement sexuel ou sexiste des agissements à connotation sexuelle ou sexiste imposés, y compris à un collectif de personnes (et non plus seulement à une personne), comme l’y invitait le pourvoi de l’université de Haute-Alsace. Au visa de l’article 222-33 du Code pénal, la Cour de cassation casse l’arrêt de la cour d’appel en ce qu’elle a méconnu le texte et affirme : « En effet, des propos à connotation sexuelle ou sexiste adressés à plusieurs personnes, ou de tels comportements adoptés devant plusieurs personnes, sont susceptibles d'être imposés à chacune d'entre elles ». Certes, elle ne reprend pas les termes de harcèlement environnemental ou d’ambiance présents dans le pourvoi mais elle en reprend la critique.
La formulation retenue « sont susceptibles d’être imposés à chacune d’entre elles » 44 est astucieuse. Elle rappelle que la caractérisation du harcèlement sexuel dépend aussi de la perception de la personne exposée aux agissements. Si ceux-ci « soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante », le harcèlement sexuel sera constitué. Ce qui ne fait pas dépendre la caractérisation de l’infraction d’une approche purement subjective. En effet, les critères posés par le législateur sont appréciés objectivement, selon une référence à la personne raisonnable sujette à des évolutions45. Avant 2012, l’expérience de la personne harcelée comptait peu : lorsque les agissements dénoncés étaient qualifiés de « signaux sociaux conventionnels de séduction » et ramenés à un « désagrément » par les tribunaux46 aux mépris de l’atteinte à sa dignité ou au fait qu’elle devait supporter une situation même si elle la jugeait « intimidante, hostile ou offensante ».
Huit ans après le début du mouvement mondial #Metoo, l’arrêt de la Cour de cassation tourne définitivement cette page et invite à prendre en compte une dimension plus systémique des harcèlements qui prospèrent notamment grâce à l’indifférence ou à la complicité des personnes témoins et à l’impunité des harceleurs. En dénonçant leur professeur, et donc en s’exposant, les quinze étudiant·es ont contribué à mettre fin à cette impunité. Notons que, dans cette entreprise, ils·elles n’ont pas été soutenu·es jusqu’au terme de cette procédure par le parquet ; ce dernier n’ayant pas formé de pourvoi, la Cour de cassation ne peut que se prononcer sur les intérêts civils concernant l’université, la relaxe du mis en cause demeurant acquise.
Ces décisions marquent une avancée dans la mise en œuvre du droit de chacun·e à ne pas être exposé·e à des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste non sollicités. C. L. M.
Sous un vernis de prudence méthodologique, l’arrêt M. A. et autres c. France du 25 juillet 202447 valide la stratégie française issue de la loi du 13 avril 201648 : pénaliser l’achat d’actes sexuels, dépénaliser l’offre par l’abrogation du racolage et adosser l’ensemble à des mesures de prévention, de « parcours de sortie » et de lutte contre la traite et le proxénétisme. La Cour reconnaît que l’« incrimination de l’achat d’actes sexuels constitue une ingérence dans le droit des requérant·es au respect de leur vie privée, ainsi que dans leur autonomie personnelle et leur liberté sexuelle » (§138) mais juge cette ingérence proportionnée au regard de buts légitimes et d’une large marge d’appréciation en l’absence de consensus européen, sous réserve d’un examen continu des effets et d’éventuels ajustements.
Cette décision s’inscrit dans un long glissement français, depuis une tolérance réglementée localement vers une interdiction de la demande pilotée au sommet de la hiérarchie des normes. Au XIXᵉ siècle, le réglementarisme municipal et préfectoral (inscription des « filles publiques », visites médicales, maisons de tolérance) vise à canaliser un « mal nécessaire » au nom de l’ordre et de la salubrité publics, au prix d’un régime d’exception attentatoire aux libertés et centré sur un triangle maison de tolérance–hôpital–prison49. L’entre-deux-guerres, marqué par un hyper-réglementarisme sanitaire et des campagnes abolitionnistes, conduit à l’abolitionnisme classique : fermeture des maisons (1946)50, dépénalisation de la relation tarifée mais maintien d’un arsenal périphérique (proxénétisme, racolage), interdiction du fichage sanitaire (1960)51, puis tournant prohibitionniste du « racolage passif » (2003)52.
La loi du 13 avril 2016 reconfigure ce dispositif : pénalisation de l’acheteur, abrogation du racolage, reconnaissance des personnes prostituées comme victimes avec des parcours de sortie et une logique « santé-droits »53. Le Conseil constitutionnel, saisi en QPC, valide en 2019 la pénalisation des clients en opérant un contrôle de proportionnalité entre atteintes à la vie privée, à la liberté d’entreprendre et à la propriété, d’une part, et sauvegarde de l’ordre public, prévention des infractions et dignité, d’autre part54. L’arrêt M. A. et autres c. France ajoute un contrôle de conventionnalité, tout en illustrant le relèvement progressif du niveau des normes : du maire au législateur, puis du juge constitutionnel au juge européen.
Parallèlement, les catégories idéologiques ont muté. Né au XIXᵉ siècle, l’abolitionnisme dénonçait d’abord le réglementarisme : arbitraire municipal, fichage sanitaire, visites obligatoires, violences institutionnelles d’un régime d’exception. Il s’agissait moins d’interdire la prostitution que de retirer à l’administration le pouvoir d’organiser la sexualité tarifée et de restituer des libertés individuelles. Au XXᵉ siècle, le lexique se déplace vers la lutte contre la prostitution elle-même, décrite comme atteinte à la dignité, « esclavage » et terrain de traite : l’abolitionnisme de la réglementation devient abolitionnisme de la prostitution, et se combine aujourd’hui avec une pénalisation de la demande et la mise en place de parcours de sortie.
En miroir, l’ancien réglementarisme s’est transformé dans le camp des droits en horizon du « travail du sexe ». Il ne s’agit plus d’organiser administrativement la prostitution mais de sortir l’activité de l’exception pénale et sanitaire en l’adossant au droit commun : décriminalisation, application des règles ordinaires du droit du travail, de la protection sociale et du droit des contrats, réduction des risques par l’accès aux soins, la prévention et la continuité des parcours, lutte contre la stigmatisation et les discriminations. Loin d’un retour au réglementarisme, ce paradigme substitue à la logique de surveillance une logique de droits.
Les féministes ont été massivement abolitionnistes au début du XXᵉ siècle, notamment autour de Marcelle Legrand-Falco. Aujourd’hui, le mouvement est profondément divisé : c’est la controverse des « sex-wars », née aux États-Unis à la fin des années 1970. D’un côté, un courant radical (Catharine A. MacKinnon, Andrea Dworkin) analyse la sexualité comme matrice de la hiérarchie de genre et voit dans la prostitution un élément d’un « système prostitueur » : pénaliser la demande, démanteler les marchés et garantir des alternatives matérielles serait une stratégie de transformation par le droit55. De l’autre, un courant sex-positive (Gayle Rubin, Carole S. Vance) insiste sur l’agentivité, les risques de censure et la nécessité de créer les conditions matérielles du consentement, en privilégiant décriminalisation, réduction des risques et accès au droit commun des « travailleur·euses du sexe »56. Cette approche irrigue la grammaire « travail du sexe » des organisations françaises (STRASS) et des acteurs « santé-droits » (AIDES, Médecins du Monde, Acceptess-T, etc.)57.
C’est dans cet espace polémique que se lit l’arrêt M. A. et autres c. France : il compose entre option abolitionniste et horizon « travail du sexe » mais produit une double déception : victoire en demi-teinte pour les abolitionnistes (1), revers et recul des droits des personnes concernées pour les défenseur·euses du « travail du sexe » (2). H. D.-V.
La Cour juge que la lutte contre la traite des êtres humains, la prostitution des mineur·es et plus largement « l’exploitation sexuelle » constitue un objectif légitime. Elle rappelle sa jurisprudence antérieure (notamment V. T. c. France) 58, où elle considère la prostitution incompatible avec les droits et la dignité de la personne humaine dès lors qu’elle est contrainte, et souligne la convergence des parties sur la nécessité de lutter contre les réseaux et la traite (§151). Elle valide le raisonnement du législateur français (rejoint par le Conseil d’État et le Conseil constitutionnel), qui inscrit la pénalisation des clients dans la sauvegarde de la dignité, de l’ordre public et de la prévention des infractions (§141).
Pour apprécier la proportionnalité, la Cour met surtout en avant la qualité du processus d’adoption de la loi : elle insiste sur un processus « long et complexe », deux commissions spéciales, de multiples auditions et études, ainsi que l’adaptation de certains dispositifs à la suite des inquiétudes exprimées par les personnes concernées (§158). Elle souligne également les points de consensus, en particulier la suppression du délit de racolage et la dépénalisation corrélative des personnes prostituées (§161), ainsi que les axes consacrés à la protection et à l’aide à la réinsertion.
En revanche, les effets concrets de la loi sur les personnes prostituées sont largement relégués : la Cour affirme être consciente des risques mais estime ne pas pouvoir trancher si ceux-ci sont imputables à la pénalisation de l’achat d’actes sexuels ou à la prostitution elle-même. L’analyse de proportionnalité repose ainsi davantage sur la légitimité des buts et la qualité du processus législatif que sur un examen empirique des conséquences pour les personnes concernées.
Au nom de l’absence de consensus européen, la Cour accorde à la France une large marge d’appréciation dans la mise en œuvre de sa politique. S’appuyant sur V. T. c. France, elle réaffirme qu’elle ne souhaite pas trancher la question de savoir si la prostitution peut être librement consentie ou provient toujours d’une contrainte – y compris socio-économique – et indique qu’il n’y a pas lieu de s’écarter de cette approche (§156).
Cette prudence sémantique se double d’un constat de pluralité des régimes juridiques en Europe : modèles « nordiques » (Suède, Norvège, France, Irlande), États réglementaristes ou décriminalisation partielle. La Cour se borne à inventorier ces régimes (§68-72) et en déduit l’absence de consensus, ce qui justifie d’élargir la marge d’appréciation.
Les témoignages versés au dossier – seize récits détaillant la dégradation de la situation imputée à la pénalisation de la demande (§6) – révèlent pourtant des violences exercées par les clients-prostitueurs (imposition de pratiques non désirées, rapports non protégés, violences physiques, vols, viols) sur fond de grande précarité. Mais la Cour n’en tire aucune analyse substantielle : la responsabilité est implicitement déplacée vers la loi plutôt qu’examinée du point de vue des auteurs des violences, la référence à la « liberté sexuelle » restant en tension avec un contexte de contrainte socio-économique. En cherchant à ne pas prendre parti, la Cour élude ainsi la question de la violence intrinsèque du système prostitutionnel et maintient une neutralité qui, en pratique, laisse intactes les structures de domination que le dispositif prétend combattre. N. B.-J.
La combinaison de la proportionnalité, de l’absence de consensus et de la large marge d’appréciation fonctionne comme un dispositif de verrouillage. Officiellement, aucune sanction ne frappe les personnes prostituées ; mais en réprimant la demande et en évaluant cette répression à l’aune d’une architecture jugée cohérente (dépénalisation de l’offre, lutte contre la traite), la Cour confère à la mesure une présomption de validité très difficile à renverser. Tant que les opposant·es n’apportent pas la preuve irréfutable de dommages spécifiquement imputables à la pénalisation des clients (violences accrues, dégradation sanitaire, isolement, sous-signalement), la politique tient.
Mattia Pinto pointe une asymétrie probatoire : l’État n’a pas à démontrer l’innocuité ou l’efficacité de la mesure avec la même rigueur que les personnes affectées doivent en démontrer la nocivité. Les données de terrain (déplacement vers des zones isolées, négociations précipitées, exposition accrue à des pratiques non souhaitées, ruptures de suivi sanitaire) sont requalifiées en éléments « controversés » faute d’« effet propre » isolable, alors même que l’accès aux données policières, judiciaires et sanitaires est asymétrique. La marge d’appréciation devient ainsi une forme d’immunité épistémique, qui protège la politique tant que les contre-preuves ne dépassent pas un seuil quasi inatteignable.
Dans cette lecture critique, l’arrêt naturalise une politique des mœurs en l’habillant d’arguments sécuritaires et sanitaires. L’autonomie des personnes concernées est reconnue, mais systématiquement reléguée derrière l’objectif de « tarir la demande ». Ce cadrage retarde ou dépriorise des stratégies fondées sur les droits et la santé : décriminalisation de l’offre comme de la demande, réduction des risques, accès effectif aux soins (VIH/IST, santé mentale), aux droits sociaux (logement, revenu, couverture maladie) et au droit du travail (protection, inspection, syndicats).
Les coûts sont concentrés sur les plus vulnérables – personnes migrantes ou sans papiers, personnes trans, travailleur·euses très précaires – qui paient le prix du passage à la clandestinité, de la dissuasion à signaler les violences et de l’incertitude juridique dans les interactions avec la police et la justice. Le risque est celui d’une sur-interprétation des baisses de signalements comme « succès » politique, d’une défiance accrue et d’une sur-criminalisation sélective de groupes déjà marginalisés.
Face à cela, des auteur·ices comme Mattia Pinto plaident pour inverser la perspective : soupçonner a priori la pénalisation lorsqu’elle affecte des groupes marginalisés ; relever l’exigence de nécessité en examinant les alternatives moins attentatoires (décriminalisation, réduction des risques) ; recentrer l’analyse sur les droits et la santé des personnes concernées selon le principe « rien sur nous sans nous ». Cela suppose des garanties procédurales fortes : rapports réguliers, publics et contradictoires ; ouverture des données de police, de justice et de santé pour permettre de véritables contre-expertises ; indicateurs centrés sur la victimation, les homicides, l’accès et la continuité des soins, l’effectivité des parcours de sortie et les effets différenciés sur les publics précaires ; clauses de révision, voire de caducité, en cas de résultats insuffisants.
Au terme de ce parcours, l’arrêt M. A. et autres c. France consacre moins une vérité substantielle sur la prostitution qu’un réglage de méthode : la pénalisation de la demande demeure licite si elle s’inscrit dans une architecture cohérente (dépénalisation de l’offre, accompagnement, lutte anti-traite) et si l’État met à l’épreuve ses effets dans la durée. La CEDH arbitre ainsi sans trancher les « sex-wars » : les abolitionnistes obtiennent une validation juridictionnelle temporaire de leur cap, sous condition d’un suivi d’efficacité ; les partisan·es du « travail du sexe » voient au contraire un vernis de neutralité stabiliser un prohibitionnisme par la demande qui, selon eux, aggrave la précarité et la stigmatisation.
Sur la longue durée, la décision prolonge un mouvement de surplomb normatif – du gouvernement local des mœurs au contrôle de proportionnalité constitutionnel puis conventionnel – tout en réactivant une vieille scène française : la guerre des chiffres. Sécurité, victimation, homicides, continuité des soins, effets différenciés pour les personnes migrantes, trans ou sans papiers : la Cour, en posant une obligation de veille, transforme cette guerre symbolique en devoir d’évaluation. Sans indicateurs publics, données ouvertes, contre-expertises indépendantes et participation des premier·es concerné·es, la neutralité procédurale risque toutefois de tourner à vide, en recouvrant une option idéologique plus qu’une protection démontrée des droits. H. D.-V.
L’affaire dite « Le Scouarnec » (un ex-chirurgien condamné pour 111 viols et 188 agressions sexuelles commis entre 1989 et 2014 principalement sur des mineures) a illustré le fait que le cumul de circonstances aggravantes n’emporte pas nécessairement pour toutes les infractions une aggravation supplémentaire : encore faut-il que le législateur l’ait spécialement prévue62. Pour le crime de viol63 tel n’est pas (encore) le cas.
La minorité des victimes, additionnée au nombre écrasant des victimes en série en l’espèce, n’a pas permis d’élever la peine encourue au-delà des 20 années prévues par l’article 222-24 du code pénal. La proposition de loi visant à renforcer la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, adoptée le 3 avril 2025 par le Sénat en première lecture64, tire les leçons des vives critiques portées à la décision de condamnation de M. Le Scouarnec. Le texte propose ainsi d’insérer un article 222-24-1 au code pénal qui porterait la peine à 30 ans de réclusion criminelle65 pour le viol commis dans plusieurs des circonstances aggravantes mentionnées à l’article 222-24 actuel du même code66.
« Il y a un temps pour tout ». La prescription de l’action publique en matière de viol commis sur les mineur·es n’a eu de cesse d’être allongée et son point de départ a été reporté. Elle ne commence à courir qu’à partir de la majorité des victimes67 et son délai est aujourd’hui porté à 30 ans68. La loi n° 2021-478 du 21 avril 2021 a même instauré une prescription dite glissante ou en cascade permettant, lorsque le même auteur majeur viole ou agresse sexuellement un·e autre mineur·e, une prolongation du délai déterminé pour la précédente victime jusqu’à la date de prescription applicable à la nouvelle victime69. Jamais la commission d’une nouvelle infraction n’avait pu produire tel effet.
Malgré ces dérogations substantielles, l’imprescriptibilité du viol est à nouveau questionnée70. Le rapport de la CIIVISE du 17 novembre 2023, intitulé « Violences sexuelles faites aux enfants : on vous croit », a réactivé le débat, en préconisant une imprescriptibilité pénale ou, à tout le moins, civile71. Dans le cadre du débat législatif encore en cours72, cette voie a été écartée, lui préférant un allongement à 30 ans73 et l’extension du mécanisme de prescription glissante, y compris pour certaines infractions commises sur des majeur·es. Du fait de l’écoulement du temps et de l’accroissement des difficultés probatoires qui en résulte, les victimes risquent déjà d’être confrontées bien souvent à un classement sans suite, à un non-lieu ou à un acquittement, sources de tiraillements inutiles. Si la proposition devait entrer en vigueur, le phénomène serait amplifié d’autant.
Depuis, le 17 juin 2025, le Parlement européen s’est prononcé en faveur d’une proposition de directive visant à aider les pays de l’Union européenne à lutter plus efficacement contre les abus sexuels sur les enfants74 qui ravive la discussion. Bien que le processus législatif européen ne soit pas achevé et qu’il n’est pas (encore) question de contraindre la France à ce changement, certain·es praticien·nes et théoricien·nes du droit s’en inquiètent75.
« Cinq sur cinq » ? L’état des lieux chiffré78, réalisé par le service statistique ministériel de la Justice (SSM) constitue un apport inédit pour la période 2017-202479 et permet de rendre compte de la délinquance sexuelle juvénile, loin d’être un épiphénomène80. Outre qu’elles reflètent plus justement la réalité du travail des magistrat·es, les données documentent les infractions poursuivies, le profil des auteurs81 et des victimes et les peines prononcées. En substance, 1 500 mineurs sont condamnés par an82 pour des violences sexuelles83, à 98% des garçons84 majoritairement de 13 à 15 ans. Les peines prononcées sont à 57% des peines privatives de liberté, dont 76% assorties d’un sursis85. 85% des mis en cause le sont dans une affaire avec au moins une infraction sexuelle commise sur mineur·e86.
Néanmoins, plusieurs données manquent : une approche fine de la récidive87, surtout une distinction chiffrée avant/après l’entrée en vigueur du code de la justice pénale des mineurs88 - qui permettrait probablement de nuancer l’âge des auteurs (puisqu’il existe désormais une présomption de discernement à compter de 13 ans et une présomption de non discernement pour les moins de 13 ans89, qui ont nécessairement un impact sur la responsabilité pénale des mineurs concernés) - ou encore des précisions sur les sanctions pénales, notamment la peine privative de liberté ferme (du fait du principe de primauté de l’éducatif sur le répressif90) et les mesures éducatives91 (surtout la mesure éducative judiciaire, centrale de la réforme des mineur·es de 2021). On regrette par ailleurs l’absence de prise en compte systématique des évolutions législatives (élargissement de la définition du viol - notamment en 2018 puis en 202192 -, prescription93)94.
« Mieux vaut réfléchir avant d’agir que regretter après avoir agi »95. A l’issue des auditions publiques de juin 2025, le rapport d’orientation et de propositions constitue un espace inédit de réflexions sur les prises en charges plurielles96 du mineur auteur de violences sexuelles97. Les 45 propositions visent à corriger et à compléter les dispositifs déjà existants : amélioration des expertises98, renforcement de la communication entre les magistrat·es99, développement de la justice restaurative100 et des mesures de prévention et d’éducation de la population pour lutter contre « la culture du viol »101.
« Prendre le temps de la réflexion ». L’actualité juridique sur la question des violences sexuelles impliquant un·e mineur·e entraîne de nombreuses controverses doctrinales : clivages entre disciplines et souvent au sein d’une même discipline. Légiférer dans ce domaine ne paraît alors pas si facile. « Prendre le temps de la réflexion » pour maintenir l’intelligence de la loi s’impose et semble le conseil le plus avisé à formuler au législateur. J. L.
En fonction de la branche du droit considérée, un même comportement peut être qualifié de différentes manières : manquement déontologique en matière disciplinaire, faute professionnelle en droits civil et administratif ou encore infraction nommément identifiée en matière pénale. Cette pluralité des qualifications juridiques est une source de difficulté car les VSS correspondent à des qualifications pénales que l’on ne retrouve pas nécessairement comme telles dans le contentieux ordinal ou civil. A titre d’exemple, un patient ayant subi « une manipulation endorectale pour repositionner son bassin » 105 sans information ni consentement a porté plainte pour « agression sexuelle », précisant que le médecin « avait touché sa verge lors du massage ». La décision du Conseil de l'ordre ne retient qu'un manquement aux obligations déontologiques. Dans une autre affaire, s'agissant des faits commis par un majeur sur une personne mineure, le conseil de l’ordre retient une « atteinte sexuelle commise avec contrainte ou surprise sur une patiente par un médecin abusant de l’autorité conférée par sa fonction »106 alors même que le terme d’atteinte, au sens du droit pénal, est réservé aux hypothèses d’infractions sexuelles commises sur des personnes mineures sans violence, contrainte, menace ou surprise107. La décision retient finalement un manquement aux obligations déontologiques du médecin. En l’absence de plainte pour agression sexuelle du patient ou de la patiente, la nature des violences vécues aurait pu rester invisibilisée dans la décision ordinale dont les raisonnements sont essentiellement articulés sur les logiques de respect des obligations déontologiques. Cette différenciation des qualifications peut cependant parfois mettre la lumière sur des situations qui échappent aux procédures étatiques. En ce sens, à la suite d’une plainte pour viol classée sans suite en 2020, un médecin pédiatre qui a entretenu une relation intime avec la mère de trois de ses patients est sanctionné disciplinairement pour manquement à ses obligations déontologiques Il a été considéré qu’il « a abusé de sa position d’autorité en ayant une relation intime pendant des années sur son lieu d'exercice professionnel avec Mme B, qui était vulnérable en raison de la pathologie de son fils, violant ainsi ses obligations déontologiques »108.
Des enjeux de qualification sont également perceptibles devant les juridictions étatiques où, en matière de VSS, la qualification pénale d’agression sexuelle occupe une place prépondérante. En effet, les viols font souvent l’objet de requalification comme agressions sexuelles alors même qu’ils impliqueraient des actes de pénétration sexuelle109. Et les faits de moindre gravité (harcèlement sexuel et outrage sexiste) peinent à apparaître dans le contentieux pénal, notamment en raison de freins procéduraux qui sont à présent mieux identifiés110. Un outrage sexiste a cependant été retenu à l’encontre d’un kinésithérapeute qui avait tenu, de façon réitérée, les propos suivants à l’encontre d’une victime mineure : « c'est tout dans les cuisses et le cul », « tu as un beau fessier », « ce serait dommage d'avoir une fesse flasque et une fesse bombée ». Les juges du fond ont relevé « que ces paroles évoquent en termes vulgaires l'anatomie de la victime et que les mots employés ont une connotation sexuelle » ; ils ajoutent que « les propos dénoncés, tenus par un homme mature à une jeune fille, sont sexistes et ont porté atteinte à la dignité de la victime et créé à son encontre une situation intimidante, offensante, l'ayant mise mal à l'aise ». Cette analyse, dont la pertinence est confirmée par un arrêt de rejet de la Cour de cassation111, ouvre des perspectives quant au déploiement de la répression en matière d’outrage sexiste, aujourd’hui peu représentée dans le contentieux.
Le choix des sanctions prononcées par les juridictions qui connaissent des VSS commises par des médecins donnent encore des informations sur la perception criminologique de cette forme de criminalité qu’ont les acteur·ices des différentes procédures mobilisées. L’interdiction d’exercer auprès de patient·es qui sont, par définition, en situation de vulnérabilité, contre les soignants ayant commis des faits réitérés, pourrait apparaître comme un moyen à privilégier de prévention de la récidive. En ce sens, une chambre disciplinaire de première instance n’avait prononcé qu’une sanction de six mois d’interdiction d’exercice à l’encontre d’un médecin auteur de plusieurs agressions sexuelles, d’abord sur une patiente puis sur la fille mineure de sa conjointe. La chambre nationale de l’ordre des médecins est revenue sur cette décision par une décision définitive de radiation115. S’agissant des juridictions pénales, cinq ans d’interdiction d’exercice de « toute activité dans un établissement de soins » ont été prononcés contre un aide-soignant auteur d’agressions sexuelles. La condamnation, « après avoir exposé les éléments de personnalité de l'intéressé, retient que les faits sont d'une particulière gravité, s'agissant d'attouchements sexuels commis dans le cadre d'hospitalisation par une personne qui avait, en sa qualité d'aide-soignant, autorité sur les victimes, lesquelles se trouvaient dans leur chambre d'hôpital, bénéficiant de soins et de traitements, sans être en mesure de comprendre ce qui leur arrivait, cette gravité et ce mode opératoire rendant indispensable une peine d'emprisonnement, pour assurer la protection de la société et restaurer l'ordre social, gravement troublé par les agissements commis par le prévenu »116. La durée de cette interdiction pourrait sans doute être discutée. Dans d’autres hypothèses, le statut professionnel des auteurs de ces infractions apparaît parfois comme un déterminant fort de sanctions plus clémentes qu’exemplaires. Dans le sens d’une sous-estimation de la dangerosité criminologique de l’auteur de VSS, l’arrêt d’une cour d’appel qui avait interdit définitivement d’exercer la médecine à un gynécologue coupable d’agressions sexuelles sur quatre de ses patientes a été cassé comme insuffisamment motivé sur cette peine complémentaire d’interdiction117. Il est affirmé que la Cour d’appel ne s’est pas suffisamment expliquée sur la personnalité de l’auteur et sa situation personnelle alors qu’il résulte de l’arrêt « que son casier judiciaire ne mentionne aucune condamnation et que l'expert psychiatre qui l'a examiné n'a relevé aucun fonctionnement pervers ». Le médecin gynécologue avait pourtant été visé par six plaintes de patientes et condamnés pour agressions sexuelles sur quatre d’entre elles. Dans le sens d’une clémence incomprise, il nous faut encore revenir sur l’arrêt de la Cour criminelle départementale du Morbihan118 condamnant Joël Le Scouarnec à 20 ans de réclusion criminelle mais refusant de prononcer une mesure de rétention de sûreté contre lui qui, à ce titre, a été âprement critiqué. La Cour a décidé de ne pas prononcer cette mesure d’une exceptionnelle gravité, pourtant requise par le Ministère public, en se fondant sur l’âge de l’accusé (74 ans), sa reconnaissance de l’intégralité des faits et sa volonté de « reconquérir sa part d’humanité », pour reprendre les mots de l’accusé prononcés avant le délibéré119. Pourtant, le caractère inédit de la dangerosité criminologique de l’auteur des faits, la systématicité des passages à l’acte et le mode opératoire reproduit à l’infini permettaient d’établir un risque grave de récidive, critère prépondérant ayant justifié l’adoption de la rétention de sûreté120.
Quel que soit le contexte dans lequel les VSS sont dénoncées, elles s’enracinent et se déploient dans l’asymétrie des relations et les rapports de pouvoir. Dans la relation de soins, cette asymétrie est inhérente à l’accès au corps, à la dépendance thérapeutique et au capital d’expertise des soignant·es. Dans la relation de travail, elle se nourrit du lien de subordination, des trajectoires de carrière et du risque de représailles. Il en résulte un triptyque récurrent : sous-signalement, requalifications atténuantes et sanctions allégées. La réponse juridique doit être à la fois différenciée, en fonction des contextes considérés, et coordonnée dans ces trois champs, afin d’ouvrir des perspectives concrètes en termes de lutte contre ces violences. A. S.
« Après s’être échappée de la camionnette, Chahinez retourne à la gendarmerie déposer une troisième plainte. Dans un schéma normal, banal même, cette nouvelle plainte à la suite de cette séquestration aurait dû alerter les policiers et les services de la justice. Dans un schéma normal, banal même, cette plainte aurait dû protéger Chahinez122 ».
Le prix Fémina vient d’être attribué à Natacha Appanah pour son livre La nuit au cœur dans lequel elle décortique l’histoire de trois femmes - dont l’autrice - victimes des violences de leur compagnon ou ex-compagnon. L’une d’entre elles est Chahinez Daoud, assassinée par son mari en 2020. Celui-ci a été reconnu coupable en 2025123. Les procédures ne sont cependant pas achevées puisque le mari a interjeté appel de cette condamnation et que la famille de Mme Daoud a engagé une procédure mettant en cause la responsabilité de l’État.
En 2025 toujours, un autre féminicide, celui de Nathalie Debaillie124, était au cœur d’un procès en responsabilité de l’État devant le tribunal judiciaire de Paris. Les demandeurs (les deux enfants, le frère et l’ex-conjoint de Mme Debaillie) ont engagé la responsabilité de l’État pour faute lourde sur le fondement de l'article L. 141-1 du Code de l'organisation judiciaire et de l'article 2 de la Convention européenne des droits de l'homme en raison, d'une part, de carences des services de police dans le traitement des mains courantes et de la plainte de Mme Debaillie et, d'autre part, de l'inaction des services de police lors de son enlèvement.
Les carences des services de police dans le traitement des mains courantes et de la plainte sont patentes. En effet, Mme Debaillie a dénoncé les violences au commissariat à quatre reprises. Les deux premières fois, seules des mains courantes ont été enregistrées125. La victime dénonçait le fait que M. Tonneau, son ex-compagnon, n’acceptait pas la séparation, qu’il avait annoncé son intention de s’introduire à son domicile et qu’il se présentait sur son lieu de travail. Des menaces de mort précises, proférées devant témoins, la conduisaient ensuite à déposer une plainte126, puis une troisième main courante lors de laquelle elle exposait que, « depuis sa plainte, son ancien compagnon la suivait constamment, restait aux abords de son lieu de travail, ou venait dans des lieux où elle avait pour habitude d'aller, comme des cafés. Elle relatait que l'un des pneus de son véhicule avait été dégonflé, […] et ajoutait avoir reçu une photo de pierre tombale, avoir constaté des tentatives de connexion sur son compte Facebook, ainsi que la présence d'un logiciel espion sur son téléphone ».
Ces dénonciations ne déclenchent pourtant aucun acte d'enquête. Elles ne sont pas transmises au ministère public en dépit de la gravité des violences dénoncées et alors même que la dangerosité de M. Tonneau est avérée, qu’il a déjà été condamné pour des faits d’incendie volontaire et que plusieurs de ses ex-compagnes se sont plaintes de violences, dont une par strangulation.
Cinq jours après sa dernière main courante, Mme Debaillie est enlevée par des hommes recrutés par son ex-compagnon, conduite au domicile de ce dernier où elle est tuée. Un témoin de cet enlèvement qui tente d’intervenir est touché par deux balles.Selon les demandeurs, si les services de police avaient été plus réactifs lors de l’enlèvement de Mme Debaillie sur son lieu de travail, le meurtrier n’aurait pas eu le temps de la tuer.
A l’audience, le ministère public admet que « l'inaction des acteurs du service public de la justice entre le 9 mars et le 27 mai 2019 est constitutive d'une faute lourde à l'origine pour la victime d'une perte de chance de 50% de ne pas subir les faits d'enlèvement, séquestration et assassinat, compte tenu de l'aléa tenant à l'éventuel prononcé d'une mesure coercitive ainsi qu'au profil et à la particulière détermination de l'auteur des faits ». Il conteste en revanche l’inaction des services de police après l’enlèvement.
L’agent judiciaire du trésor argumente quant à lui « que la faute lourde démontrée est constitutive, non pas du préjudice résultant de la mort de la victime, […] mais de la perte de chance d'éviter celle-ci, et estime excessives les prétentions indemnitaires des demandeurs127 ».
Dans sa décision128, le tribunal judiciaire de Paris liste les manquements avérés des services de police et les confronte à ce qui aurait dû être fait : « A la suite de ce dépôt de plainte dénonçant des faits de menaces de mort et de harcèlement particulièrement circonstanciés, étayés par les main-courantes enregistrées quelques semaines avant, à recouper avec le profil et les antécédents judiciaires de l'ancien compagnon de Mme [Debaillie], les enquêteurs auraient dû, après information du procureur de la République, réaliser des actes d'enquête, procéder à toutes vérifications utiles et à l'audition du mis en cause. L'information du ministère public aurait pu permettre un déferrement et d'éventuelles mesures coercitives telles qu'un contrôle judiciaire avec interdiction de contact et de séjour, voire un placement en détention ou une comparution devant un tribunal ».
Dans un deuxième temps, le tribunal apprécie la responsabilité de l’État au regard de ses obligations conventionnelles européennes. Depuis plusieurs années, la jurisprudence de la CEDH relative aux violences masculines à l’encontre des femmes ne cesse en effet de s’enrichir129. Se fondant sur l’article 2 de la Convention européenne qui met à la charge des États une obligation positive de prendre des mesures afin de protéger la vie des personnes et sur l’article 3 qui prohibe les actes de torture et les traitements inhumains et dégradants, la Cour contrôle notamment la façon dont les États évaluent les risques en tenant compte de la spécificité du contexte de violences dites conjugales.
Se référant à la jurisprudence de la CEDH dont il reprend explicitement le raisonnement et la terminologie, le tribunal déclare qu’« une autorité qui savait ou aurait dû savoir sur le moment que la vie d'une personne était menacée de manière réelle et immédiate du fait des actes criminels d'un tiers est tenue de l'obligation de prendre les mesures raisonnables pour pallier ce risque ». En conséquence, le tribunal reconnaît que « l'absence de tout compte rendu aux services du parquet et de tout acte d'investigation […] constitue, […] un dysfonctionnement traduisant l’inaptitude du service public de la justice à remplir la mission qui lui était confiée ».
En revanche, il juge que le grief tiré de l'inaction des services de police et de justice le jour de l'enlèvement, de la séquestration et de l'assassinat de Mme Debaillie n’est pas fondé. Pour le rejeter, le tribunal reprend précisément la chronologie de l’intervention des services de police à partir du premier appel à Police secours et déclare que les « multiples diligences réalisées en quelques heures le matin des faits démontrent la détermination des services enquêteurs à mettre en œuvre tous les moyens utiles afin de porter secours à Mme [Debaillie], de sorte que les demandeurs ne caractérisent pas le dysfonctionnement qu'ils allèguent le jour des faits »130.
En conséquence de l’admission de la faute lourde de l’État, il alloue des dommages et intérêts aux proches de la victime. Toutefois le raisonnement suivi par le tribunal et les montants alloués interrogent.
En effet, après avoir rappelé que la Cour d’assises a indemnisé la famille pour le préjudice lié à la mort de Mme Debaillie, le tribunal déclare - faisant siens les arguments de l’agent du trésor et du ministère public -, d’une part, qu’il s’agit ici d’indemniser le seul préjudice moral issu de la perte de chance d'éviter l'enlèvement, la séquestration et la mort de Mme Debaillie et, d’autre part, que le taux de perte de chance de ne pas subir les faits du 27 mai 2019 (jour de l’assassinat de celle-ci) est évalué à 50%. Le tribunal justifie le taux retenu par « l'aléa tenant à la bonne localisation d'un suspect [...], au prononcé d'éventuelles mesures coercitives telles qu'un contrôle judiciaire avec interdiction de séjour et de contact, et au respect de celles-ci par un mis en cause ayant organisé son projet criminel avec une implacable détermination ». Autrement dit, l’État serait impuissant devant une telle « détermination » criminelle.
Cette motivation indigne. Si, comme le rappelle la CEDH, les États sont tenus à une obligation de moyens et non de résultat, « de manière à ne pas leur imposer un fardeau insupportable ou excessif, eu égard aux difficultés pour la police d’exercer ses fonctions dans les sociétés contemporaines, à l’imprévisibilité du comportement humain et aux choix opérationnels à faire en termes de priorités et de ressources » 131, ils sont néanmoins tenus à une obligation de diligence dans la prévention et le traitement de ces violences. Or, dans cette affaire si … si les fonctionnaires de police avait pris Mme Debaillie au sérieux quand elle leur faisait part de sa peur, quand elle rapportait les menaces d’enlèvement et de mort proférées par M. Tonneau, s’ils l’avaient arrêté et déféré, s’ils avaient orienté la victime vers des structures permettant sa mise en protection, serions-nous encore à ce taux de 50% de risque d’assassinat ?
Indigne, la décision l’est aussi par le montant des dommages et intérêts alloués : 10 000 € pour chacun des enfants, 4 000 € pour le frère, 3 000 € pour l’ex-compagnon et père des enfants. 27 000 €… Les demandeurs ont interjeté appel de cette décision.
L’État incite les femmes à dévoiler les violences qu’elles subissent sans pour autant se donner tous les moyens de garantir leur sécurité. Certes, depuis le Grenelle des violences conjugales en 2019, des procédures ont été mises en place pour être plus efficaces dans l’intervention auprès des victimes. Mais, depuis des années, les études montrent que les très rares victimes qui dénoncent les violences132 s’exposent à des représailles de la part de l’agresseur. Elles sont en outre particulièrement en danger lorsqu’elles se séparent de leur conjoint. Selon les statistiques issues de l’étude nationale sur les morts violentes au sein du couple133, 47% des femmes tuées par leur conjoint (ou ex-conjoint) avaient déjà subi des violences antérieures. Parmi celles-ci, 74% avaient signalé ces violences antérieures aux forces de sécurité intérieure et, parmi elles, 81 % avaient déposé une plainte antérieure.
Depuis 2020, un RETEX (retour d’expérience) doit être effectué pour chaque homicide conjugal. Il devrait être rendu public. Et la responsabilité de l’État engagée à chaque défaillance du service public de la justice. Parce que savoir que l’on va devoir rendre des comptes incite à mettre en place des moyens pour prévenir les violences et les réprimer si elles surviennent. Pour que les femmes aient plus de 50% de chance de vivre. C. L. M.
En novembre 2021, à l’occasion d’une conférence de presse, Gérald Darmanin, alors ministre de l’Intérieur, déclarait : « Si la justice condamne la personne responsable de ces violences, nous nous engageons à régulariser les femmes victimes au nom de la protection que nous leur devons. S’ils sont en situation irrégulière, les auteurs seront eux, en revanche, expulsés »134. Dans une instruction du 23 décembre 2021135, cosignée par la ministre déléguée chargée de la citoyenneté, Marlène Schiappa, les deux ministres se prévalaient d’un « dispositif [légal] complet de protection des personnes étrangères victimes de violences conjugales » reposant sur, d’une part, « le maintien du droit au séjour des personnes victimes de violences même si la communauté de vie a été rompue » (article L. 423-5 du CESEDA) et, d’autre part, « un accès au séjour sécurisé pour les personnes bénéficiant d'une ordonnance de protection » (article L. 425-6 du CESEDA).
Par ailleurs, s’agissant des auteurs, peu après l’adoption de la loi du 26 janvier 2024136, le même ministre de l’Intérieur adressait une circulaire indiquant que « le motif de levée de protection en raison de violences intrafamiliales est désormais étendu à l'ensemble des étrangers protégés au titre des articles L. 631-2 et 3 […]. Tout fait de violence commis par l'étranger sur son conjoint, un ascendant ou un enfant sur lequel il exerce l'autorité parentale, lui fait ainsi perdre la protection dont il bénéficie et rend possible son expulsion au regard des circonstances de l'espèce » 137. L’éloignement des étrangers auteurs de violences conjugales ou intrafamiliales apparaît dès lors constituer une priorité de l’action ministérielle.
La statistique publique ne permet néanmoins pas de déterminer précisément combien de personnes étrangères se voient reconnaître un droit au séjour, malgré la rupture de la vie commune ou dans le cadre d’une ordonnance de protection, en raison de violences conjugales ou intrafamiliales subies. En 2022, la Cimade évoque la délivrance de 145 premiers titres pour les bénéficiaires d’une ordonnance de protection138. Les statistiques du ministère de l’Intérieur font état en 2023 de 372 premiers titres de séjour délivrés à des personnes « victimes de la traite des êtres humains/violences conjugales » sur les 46 425 premiers titres délivrés pour motif humanitaire, sans distinguer les deux motifs139. En tout état de cause, moins de 200 premiers titres de séjour sont délivrés chaque année pour ce motif et on ignore combien sont refusés. En 2023, le ministère de l’Intérieur estime que 15% des 271 000 victimes de violences conjugales (dont 85 % de femmes) sont de nationalité étrangère (soit plus de 40 000 victimes étrangères)140.
S’agissant des auteurs de ces violences, Gérald Darmanin faisait état lors de sa conférence de presse en 2021, dans les deux dernières années, de « 900 expulsions pour violences conjugales »141 - sans qu’il ne soit possible, là-aussi, d’avoir des données plus précises et récentes sur le nombre total d’éloignements d’étrangers fondés sur ce motif. En 2023, 217 000 personnes ont été mises en cause pour des faits de violences conjugales (dont 86% d’hommes)142.
Ce panorama des décisions rendues entre le 1er juillet 2024 et le 30 juin 2025 permet d’appréhender le sort réservé à ces personnes par l’administration sous le prisme du contentieux des étrangers. Lorsqu’on consulte sur justice.pappers.fr les décisions accessibles à partir de l’open data, on recense plusieurs centaines de décisions avec les mots clefs « violences conjugales » ET « étrangers » dont 5 décisions du Conseil d’État, 289 de Cours administratives d’appel (CAA) et plus de 500 décisions de Tribunaux administratifs (TA). L’ampleur de ces resultats est néanmoins à relativiser dès lors et que le contentieux des étrangers représente 140 000 affaires devant les juridictions administratives générales (TA : 121 073 ; CAA : 17 318 ; CE : 1 569)143.
Une telle masse de décisions est difficile à analyser de manière exhaustive – sauf à utiliser des techniques algorithmiques de traitement automatisé du langage. A défaut, pour cette chronique, il n’est fait état que d’une partie de ces centaines de décisions afin de tenter d’appréhender si les personnes étrangères victimes de violences conjugales (essentiellement des femmes) se voient bien reconnaître un droit au séjour et si la commission de violences conjugales justifie réellement une mesure d’éloignement de leur auteur (essentiellement des hommes).
Depuis une vingtaine d’années, un droit au séjour a été reconnu aux femmes étrangères victimes de violences conjugales – même si celui-ci reste toujours précaire et conditionnel. Auparavant ces femmes étaient systématiquement victimes d’une « triple peine »144 ou d’une « double violence »145 : en sus des violences physiques, sexuelles et/ou psychologiques subies, elles enduraient, lorsqu’elles quittaient leur conjoint, une violence institutionnelle en perdant quasi-systématiquement leur droit au séjour mais aussi tous les droits économiques et sociaux liés à la régularité du séjour et faisaient l’objet d’une OQTF. Il a fallu attendre l’adoption de la loi du 26 novembre 2003 pour que les préfets puissent, malgré la rupture de la communauté de vie, ne pas retirer ou décider de renouveler le titre de séjour « vie privée et familiale » dans le cadre de leur pouvoir discrétionnaire (art. 12 bis de l’ordonnance du 2 novembre 1945)146. Avec la loi du 20 novembre 2007, cela est devenu une obligation (art. L. 313-12 du CESEDA)147. Dans ce cadre, le Conseil d’État a eu l’occasion d’indiquer que, si « de telles violences, subies pendant la vie commune, ouvrent la faculté d'obtenir, sur le fondement de cet article, un titre de séjour », une telle possibilité n’est pas « limitée au premier renouvellement d'un tel titre ». En outre, il a précisé que, saisie d’une telle demande, l'autorité préfectorale est tenue « d'apprécier, sous l'entier contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'intéressé justifie le renouvellement du titre à la date où il se prononce, en tenant compte, notamment, du délai qui s'est écoulé depuis la cessation de la vie commune et des conséquences qui peuvent encore résulter, à cette date, des violences subies »148 . La loi du 7 mars 2016 a ensuite étendu ce cas de délivrance ou de renouvellement de plein droit aux violences familiales et non plus exclusivement conjugales149.
Toutefois, lors de la recodification du CESEDA par l’ordonnance du 16 décembre 2020, alors que celle-ci était censée être faite à droit constant, l’article L. 423-5 du CESEDA (qui a succédé à l’article L. 313-12 de l’ancien CESEDA) n’a pas repris la même formulation150. Il a été omis d’indiquer que le droit au séjour concernait aussi le renouvellement151. Aucune réforme législative de l’article L. 423-5 n’est intervenue depuis, si ce n'est la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, qui s'est bornée à ajouter parmi les conjoints protégés ceux ayant subi une situation de polygamie152.
Cette ambiguïté a conduit certains tribunaux administratifs à ne pas appliquer ces dispositions en cas de renouvellement153. Pourtant, saisi de l’ordonnance de codification, le Conseil d’État a confirmé que ces dispositions ont bien « créé un droit particulier au séjour au profit d'un conjoint de ressortissant français, en raison de violences conjugales ou familiales ayant conduit à la rupture de la vie commune » et que, dans ce cas, « le renouvellement du titre de séjour d'un étranger conjoint de ressortissant français n'est pas conditionné au maintien de la vie commune »154. Par suite, suivant les conclusions de sa rapporteure publique155, le TA de Melun a jugé qu’« il résulte des dispositions de l'article L. 313-12 dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-274 du 7 mars 2016 que le législateur a entendu créer un droit au renouvellement du titre de séjour de l'étranger dont la communauté de vie avec son conjoint de nationalité française a été rompue en raison des violences familiales ou conjugales qu'il a subies. La circonstance que le lien conjugal ait été aussi rompu à la suite de telles violences est sans incidence sur ce droit au renouvellement » et qu’au regard de la jurisprudence du Conseil d’État, « ces nouvelles dispositions ne sauraient être interprétées différemment que les dispositions de l'article L. 313-12 en vigueur avant le 1er mai 2021 »156. Cette interprétation s’est, en définitive, imposée au sein de la juridiction administrative.
Pour autant, toutes les personnes victimes de violences conjugales n’obtiennent pas nécessairement le renouvellement du titre de séjour sur ce fondement. Dans la période étudiée, on dénombre 29 décisions de CAA concernant un renouvellement (dont 10 rejets, 16 rejets d’appels manifestement infondés, 3 satisfactions totales ou partielles) ainsi que 88 jugements de TA (dont 58 rejets, 30 satisfactions totales ou partielles157).
La consultation de notre corpus jurisprudentiel témoigne de ce que les rejets restent plus nombreux que les censures, principalement soit parce que les faits de violences allégués n’apparaissent pas, aux yeux des juges administratifs, suffisamment établis ou caractérisés158, soit parce qu’ils ne leur apparaissent pas suffisamment graves. Ainsi, par exemple, alors que dans un précédent arrêt du 17 mai 2023, la Cour administrative d’appel de Toulouse avait tenu pour établies les violences conjugales dont la requérante avait fait l'objet dès lors qu’il ressortait « clairement des pièces du dossier », en particulier du jugement de divorce et des PV d'audition de l'ex-conjoint que « celui-ci a[vait] admis l'avoir giflée et avoir jeté un téléphone sur elle, et que plusieurs de leurs proches [avaient] témoigné de son caractère violent et agressif »159, cette même Cour estime, dans un nouvel arrêt du 26 décembre 2024, que le préfet a pu légalement, sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation, reprendre une décision de refus de séjour assortie d’une OQTF dès lors que les violences « avaient cessé depuis plus de deux ans », que l'intéressée avait « obtenu le divorce, prononcé aux torts exclusifs de son ex-époux » et que, en outre, aucun « suivi psychologique en lien avec ces violences [ne] serait en cours, ni que celles-ci auraient, plus de deux ans après leur cessation, des répercussions juridiques ou matérielles importantes sur l'appelante »160. La même Cour, dans une autre affaire, tout en reconnaissant « le contexte conflictuel de la rupture entre les époux » et certaines violences physiques ou morales, estime que « la réalité des violences n'était pas établie ». Pourtant l’intéressée faisait valoir que la rupture de la vie commune avec son époux avait pour origine « des violences commises à son encontre à compter du jour où elle a découvert que ce dernier avait une liaison, caractérisées en particulier, selon ses déclarations à la police, par un coup de poing dans le bras, des menaces de la “mettre dehors” et des rapports sexuels consentis uniquement sous cette menace ». Toutefois, la Cour retient, pour justifier le rejet, que la plainte pour violences et viols a été classée sans suite et que l’examen médical n'a révélé aucune lésion. Ce même examen avait, pourtant, fait apparaître un état de grande anxiété, un amaigrissement de l’intéressée et le fait qu’elle était « sous l'emprise de son mari »161. Dans d’autres affaires de notre corpus, d’autres CAA reconnaissent bien l’erreur dans l’appréciation de la situation de l’intéressée pour des violences conjugales « de nature psychologique et verbale »162. Un tribunal administratif innove même en censurant une décision de refus de renouvellement d’une carte de séjour comme conjointe d’un Français, assortie d’une OQTF, en estimant que, si le préfet pouvait, sans erreur d’appréciation, juger que les éléments présentés n’étaient pas suffisants « pour justifier de violences conjugales conformément à l'article L. 423-5 »,il y a lieu, en l'espèce, « eu égard à l'ensemble des circonstances mentionnées au point précédent, à la vulnérabilité des victimes de violences conjugales et à l'attention particulière qu'appelle l'instruction d'une demande invoquant de telles violences, [de retenir] le moyen tiré du défaut d'examen qui entache les motifs initiaux de la décision attaquée »163. Le TA prescrit donc au préfet un réexamen de la situation de l’intéressée ...
Plus original, dans une affaire, la requérante demandait à être indemnisée par l’État de son préjudice pour une somme globale de 22 000 euros du fait de l’édiction, par la préfecture, d’une décision de refus de séjour, assortie d’une OQTF. Elle était ressortissante marocaine, mariée avec un ressortissant français, et avait dû fuir le domicile conjugal avec l'aide de la gendarmerie à la suite de violences de son époux. Malgré le dépôt d’une plainte, le placement sous contrôle judiciaire avec mise à l'épreuve de cinq ans puis la condamnation à une peine de deux mois d'emprisonnement avec sursis de son ex-époux, la préfecture avait – illégalement – refusé le renouvellement de son titre de séjour. Toutefois, le juge administratif n’étant pas réputé être un bon samaritain, la requérante n’est indemnisée qu’en raison de son préjudice économique pour une somme de 750 € et de son préjudice moral, en lien avec l’ « anxiété relative à l'irrégularité de la situation en France et à la perspective de son possible éloignement vers son pays d'origine », pour une somme 500 € – soit un montant total (dérisoire) de 1 250 €, à peine supérieur aux frais irrépétibles de 1 200 €164.
S’agissant des bénéficiaires des accords bilatéraux, ces dispositions s’appliquent aux ressortissants tunisiens dans la mesure où, de jurisprudence constante165, l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 « renvoie, sur tous les points qu'il ne traite pas, à la législation nationale, en particulier aux dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour autant qu'elles ne sont pas incompatibles avec les stipulations de l'accord et nécessaires à sa mise en œuvre »166. S’agissant des ressortissantes algériennes, même si elles ne peuvent utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 423-5 du CESEDA ou de celles de l'article L. 425-6167, car les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 « régissent de manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France […] », les juridictions administratives rappellent168 qu’« il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressée, et notamment des violences conjugales alléguées, l'opportunité d'une mesure de régularisation. Il appartient seulement au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation portée sur la situation personnelle de l'intéressée »169. Pour autant, une CAA estime qu’un préfet ne commet par d’erreur manifeste d'appréciation lorsqu’il refuse l’admission exceptionnelle au séjour (AES) de la requérante dans une affaire où son ancien époux a été condamné à huit mois d'emprisonnement avec sursis, après le dépôt d’une plainte, avec production d’un compte-rendu d'examen médical « faisant état de contusions au niveau de deux dents, dont une mobile, et d'un hématome sur un orteil, avec des photographies », et de deux mains-courantes, pour des faits de violences conjugales qui se sont accentués postérieurement à l'arrêté attaqué170 ...
S’agissant du contentieux de l’article L. 425-6 du CESEDA, celui-ci est beaucoup moins abondant. Pour la période étudiée, notre corpus ne comprend « que » 10 décisions de CAA (toutes de rejet : 4 rejets, 6 appels manifestement infondés, 0 satisfaction partielle ou totale) et 29 décisions de TA (20 rejets, 3 satisfactions partielles et 6 satisfactions totales171) y faisant référence. On peut relever, pêle-mêle, qu’il est exigé, pour se prévaloir de ces dispositions, que la demande de carte de séjour ait été effectuée sur ce fondement172; que l’intéressée ne soit, comme cela vient d’être mentionné, pas algérienne173 ; qu’elle soit effectivement bénéficiaire d’une ordonnance de protection et non simplement victime de violences174. Si la victime a bien bénéficié d’une telle ordonnance, celle-ci doit avoir été renouvelée175 : les effets de celle-ci ne sont pas prolongés de plein droit par le dépôt d’une requête en divorce176. En outre, dès lors que la plainte déposée contre l’ex-conjoint a été classée sans suite, le droit au séjour cesse177.
Dans une partie des affaires relatives à des victimes de violences conjugales, le contentieux porte sur les difficultés pour ces femmes étrangères, en raison de la dématérialisation, d’obtenir un rendez-vous en préfecture ou de voir instruite leur demande d’admission exceptionnelle au séjour ou de renouvellement de titre, compte tenu des dysfonctionnements systémiques de l’ANEF178.
Dans un récent article portant sur l’expulsion d’étrangers en raison de violences conjugales179, nous augurions qu’il y aurait en la matière un avant et un après loi « Darmanin ». En effet, la loi du 26 janvier 2024 a supprimé, à l’exception des mineur.es, les catégories d’étrangers protégés contre les obligations de quitter le territoire français (OQTF) mais a aussi réduit celles protégées contre les mesures d’interdiction du territoire français (ITF) et les arrêtés préfectoraux ou ministériels d’expulsion (APE et AME)180.
Un des enjeux pour l’autorité administrative est de décider si elle édicte, à l’encontre de ces étrangers auteurs de violences conjugales, une décision de refus de renouvellement ou de retrait de leur titre de séjour, le plus souvent une carte de résident, assortie d’une OQTF fondée sur le « trouble à l’ordre public » (TOP) ou si elle opte pour la procédure d’expulsion, qui permet un retrait automatique du titre de séjour mais repose sur une procédure contradictoire préalable plus contraignante (avis de la Commission d’expulsion - COMEX) et, selon la gravité du trouble à l’ordre public, comprend toujours des catégories protégées, même si ces catégories ont été largement affaiblies en cas de violences conjugales ou intrafamiliales181.
Or, dans notre panel182, comme nous l’avions déjà préalablement constaté183, la procédure d’expulsion fondée sur l’article L. 631-2 repose rarement sur les seuls faits de violences conjugales ou intrafamiliales mais concerne, le plus souvent, des étrangers qui ont fait l’objet de plusieurs condamnations pour des motifs divers et « notamment pour des faits de violences conjugales »184. Les violences conjugales apparaissent comme une forme de circonstance aggravante renforçant la légitimité de l’arrêté d’expulsion. Ainsi, dans une affaire, une CAA estime que l’intéressé s’est « inscrit sur une longue période dans un parcours de délinquance marqué par la commission de différentes infractions ainsi que par un comportement violent réitéré à l'égard de ses trois ex-compagnes, faits qui lui ont valu plusieurs condamnations par les juridictions répressives ou qui ont nécessité la délivrance d'ordonnances de protection à raison de violences conjugales ou intrafamiliales »185. On trouve néanmoins une poignée d’affaires dans lesquelles les seuls faits de violences conjugales suffisent à justifier l’expulsion eu égard à leur particulière gravité186. Mais, plus fréquemment, les intéressés font l’objet, avec la décision de non-renouvellement ou de retrait de leur carte de séjour, d’une OQTF fondée sur le trouble à l’ordre public187.
La quasi-totalité des décisions du corpus sont des rejets, en référé188 comme en excès de pouvoir189.
Les censures sont peu nombreuses et reposent souvent sur le fait que la gravité de l’atteinte à l’ordre public n’est pas établie notamment lorsque les faits de violences conjugales sont anciens et sont restés isolés190, ou encore qu’ils s'inscrivaient « dans un contexte relationnel conflictuel avec la mère de la fille de l'intéressé »191 et eu égard notamment aux gages de réinsertion donnés192 ou encore à l’atteinte à l’intérêt supérieur des enfants193.
Dans une affaire, une CAA, tout en estimant que l’intéressé est protégé contre l’OQTF en vertu de l'article L. 611-3 du CESEDA (dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 janvier 2024), car ce père d’un enfant français contribue effectivement à son entretien et son éducation, relève que le préfet aurait pu, eu égard « à la nature et de la gravité des faits qui lui étaient reprochés », mettre en œuvre une procédure d'expulsion194.
Relevons, toutefois, qu’à défaut de protection accordée par le CESEDA, il est toujours possible à ces étrangers en instance d’éloignement d’invoquer, comme ultime protection, l’atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale garantie par l’article 8 de la CESDH eu égard à la gravité de la mesure195.
A l’issue de ce panorama, il est difficile d’affirmer que toutes les victimes étrangères de violences conjugales se voient reconnaître un droit au séjour et que tous les auteurs étrangers peuvent être expulsés. Pour autant, dans ce domaine, les lignes ont, semble-t-il, bougé ces dernières années. S. S.
Le milieu sportif est particulièrement propice aux violences sexuelles, favorisées par l’exaltation des corps et des performances, par la valorisation du sacrifice personnel et de la souffrance et par l’autorité souvent incontestée des entraîneur·ses196. Les chiffres fournis par le ministère des sports sont éloquents. Depuis la création de la cellule Signal-Sports et ce jusqu’au 31 décembre 2023, 1284 personnes ont été mises en cause. Parmi elles, 95% sont des hommes, près de 71% sont des éducateurs sportifs. 89, 9% des faits dénoncés concernent des violences sexuelles. S’agissant des victimes, il s’agit pour 81% de femmes ou de filles, et pour 77% de mineur·es au moment des faits197. Les chiffres sont d’autant plus frappants qu’ils sont loin de traduire l’ampleur des violences sexuelles : ne sont en effet comptabilisées que les violences signalées via Signal-sports, laquelle souffre d’un « déficit de visibilité »198, si bien que de nombreux faits, ayant par ailleurs fait l’objet de signalements, de plaintes et/ou de procédures pénales ou disciplinaires, restent sous ce radar.
Pourtant, ce milieu « forme toujours un écosystème au sein duquel la prévention, le suivi et la dénonciation de ce type de violences reste insuffisamment effectif »199. Dans ces conditions, sortir du « huis-clos institutionnel »200 est une nécessité : que les violences ne demeurent pas dans le secret de la relation entraîneur-entraînée, que leur traitement ne dépende pas du bon vouloir des fédérations ou des moyens dont elles disposent201. Seule cette exportation dans la sphère publique rend possible la reconnaissance de la gravité des violences, la protection et l’accompagnement des victimes et la répression des auteurs. Au-delà de la répression pénale évidemment applicable quoique parfois délicate202, la mobilisation des services de l’État est essentielle pour prévenir les nouvelles violences. Ce volet préventif repose sur deux dispositifs, certes pas spécifiques aux violences sexuelles. D’une part, les services départementaux à la jeunesse, à l'engagement et aux sports procèdent au contrôle de l’honorabilité des éducateurs sportifs, professionnels comme bénévoles, lequel peut conduire le cas échéant à une notification d’incapacité par le préfet203. D’autre part, le préfet de département peut prononcer une interdiction d’exercer les fonctions d’éducateur sportif à titre temporaire ou définitif lorsque « le maintien en activité constituerait un danger pour la santé et la sécurité physique ou morale des pratiquants »204. De 2020 à décembre 2023, le ministère des sports fait état de plus de 1,9 million de contrôles d’honorabilité effectués et de 624 mesures prises par les préfets sur les 1284 personnes mises en cause via la cellule Signal-Sports205.
L’actualité contentieuse témoigne de l’utilisation par le préfet de son pouvoir de police pour prévenir de nouvelles violences sexuelles dans le sport : 60 jugements de tribunaux administratifs, 6 arrêts de cours administratives d’appel et 3 du Conseil d’État. Renseignant sur les conditions de légalité des interdictions d’exercer, un tel panorama jurisprudentiel apporte des précisions utiles tant sur les garanties procédurales applicables (1) que sur l’appréciation du danger comme fondement et limite des mesures de police (2).
Dans deux arrêts de décembre 2024 et avril 2025, le Conseil d’État précise la nature juridique de l’interdiction d’exercer que peut prendre le préfet en application de l’article L. 212-13 du code du sport : « une telle interdiction, à finalité préventive, constitue une mesure de police » 206 et non une sanction ayant le caractère de punition. Dès lors, sont inopérants les moyens tirés du non-respect de la présomption d’innocence et du principe non bis in idem207. Le requérant ne peut pas davantage invoquer la non-conformité aux articles 9 et 16 de la DDHC des dispositions du code du sport en tant qu’elles ne prévoient pas la garantie tenant à ce que la personne visée soit informée de son droit de se taire208. Le requérant ne saurait par ailleurs se plaindre que, l’instruction pénale étant en cours, il a été privé de la possibilité de présenter des éléments de défense en raison du secret de l’instruction, lequel ne s’impose qu’aux personnes qui concourent à la procédure pénale et non à la personne mise en examen209.
Le juge administratif a par ailleurs précisé les contours du « cas d’urgence » qui permet au préfet de prononcer une interdiction temporaire d’exercice limitée à six mois, sans consultation préalable de la commission210 ni procédure contradictoire préalable211. L’urgence « s’apprécie non au regard du délai pris par l’autorité administrative pour édicter une telle mesure mais au regard de l’existence d’une situation de danger »212. L’ancienneté des faits ne fait donc pas obstacle par elle-même à la mise en œuvre de la procédure d’urgence. Ce qui importe, c’est que la décision du préfet soit intervenue à bref délai après qu’il a eu connaissance des faits et de leur gravité213. Le juge est également attentif à la position encore occupée par l’auteur des violences au moment de l’édiction de la mesure de police : personne qui continue d’encadrer des mineur·es et d’assurer la direction d’un club214 ou d’être en contact régulier avec des pratiquant·es d’un club dans lequel elle officie à titre bénévole215 ; ou encore « nécessité de préserver, pour les besoins de l'enquête administrative en cours, d'éventuels témoins et victimes du comportement de l'intéressé, alors […] que celui-ci occupait une place importante au sein [du club] et était connu dans le milieu de la fédération française d'escrime »216.
L’existence d’un danger pour la santé et la sécurité physique ou morale des pratiquant·es est librement appréciée par le préfet, sous le contrôle du juge. Tel n’est pas le cas en revanche lorsque l’interdiction d’exercer fait suite à un contrôle d’honorabilité ayant révélé une condamnation pour l’une des infractions mentionnées à l’article L. 212-9 du code du sport : le préfet, en situation de compétence liée, est alors tenu de prononcer l’interdiction217.
Le préfet n’est pas lié par le traitement pénal ou disciplinaire des faits de violences. N’a aucune incidence sur la légalité de la mesure de police la circonstance que l’intéressé « s’est seulement vu infliger un blâme [par la fédération sportive] et qu’il n’a fait l’objet d’aucune poursuite pénale »218. Il en est de même lorsque la plainte pour viols « a fait l’objet d’un classement sans suite en raison de la prescription des faits et non à raison d’une infraction insuffisamment caractérisée »219. Pareillement, les motifs d’un jugement de relaxe tirés de ce que les faits reprochés ne sont pas établis ou de ce qu’un doute subsiste sur leur réalité ne sont pas revêtus de l’autorité de la chose jugée et laissent l’autorité administrative libre d’apprécier si les faits sont suffisamment établis et s’ils justifient une mesure de police administrative220. Enfin, aucun principe ne s'oppose à ce que le préfet se fonde sur des faits ayant donné lieu à une condamnation pénale assortie du sursis simple, ultérieurement réputée non avenue du fait de l’absence d’infraction commise dans le délai d’épreuve de 5 ans221. Les faits qui ont donné lieu à la condamnation demeurent en effet commis et peuvent légalement justifier la mesure de police.
Dans le cadre du contrôle de la matérialité des faits, le juge admet que le préfet retienne les faits tels qu’ils sont constatés par le juge pénal, dénoncés dans une plainte, signalés au parquet222, ou encore établis, à la suite de l’enquête administrative, par les témoignages directs des victimes, circonstanciés, précis et concordants223 ou par les retranscriptions d’échanges sur les réseaux sociaux224. La matérialité des faits ne saurait en revanche être remise en cause par la production de nombreuses attestations de membres du club, de parents ou d’encadrants sportifs soulignant le professionnalisme de l’intéressé et réfutant tout comportement d’emprise ou maltraitant225. Un juge relève de manière notable que la soixantaine de témoignages individuels, produits par le requérant en réponse aux témoignages accablants de 17 mineur·es et 3 animateurs, et attestant de ses qualités professionnelles et de ne jamais avoir été victimes ou témoins de violences de sa part, émanent « de plongeurs, pour la plupart expérimentés et tous majeurs » 226, de fait, à l’abri de telles violences.
L’appréciation de la réalité du danger justifiant la mesure de police repose sur deux séries de considération. Le danger est, d’une part, révélé par les faits : la gravité des violences, leur caractère récent, leur nombre et leur récurrence dans des clubs différents, l’âge et le nombre des victimes. Un juge note toutefois que l’inexactitude matérielle concernant le nombre de victimes – l’arrêté évoquait plusieurs jeunes filles alors que le comportement inapproprié ne concernait qu’une seule mineure – est sans incidence sur la légalité de l’interdiction, eu égard à la gravité des faits et à l’absence de prise de conscience de l’auteur227. Certains juges sont par ailleurs attentifs à l’utilisation des fonctions d’entraîneur comme « alibi » pour exercer les violences. L’un d’eux relève ainsi que les rencontres individuelles organisées avec plusieurs joueuses étaient « justifié[e]s par leur préparation mentale et l’amélioration de leurs performances sportives, mais [que] les échanges […] ont principalement été orientés sur des questions touchant l[eur] vie personnelle » et ont donné lieu à des propositions sexuelles228. Le danger est, d’autre part, confirmé par le comportement de l’auteur des faits. Il s’agit principalement de l’attitude adoptée pendant l’enquête administrative, qu’il s’agisse du silence gardé « face aux sollicitations de l’administration qui avaient pour finalité d’évaluer s’[il] présentait encore un danger dans l’exercice de sa profession auprès d’un public mineur, féminin ou fragile notamment »229, de l’absence de prise de conscience de la gravité des faits et de l’impact qu’ils ont eu sur les victimes230, voire de la poursuite des comportements inappropriés en dépit des mises en garde231. Mais peut également être pris en compte le comportement qui a consisté à exercer des fonctions d’entraîneur pendant 14 ans sans être titulaire d’une carte professionnelle en cours de validité, « se soustrayant ainsi au contrôle annuel d’honorabilité »232. En revanche, pour le juge, l’absence d’opposition de la victime ne saurait retirer aux comportements leur caractère inapproprié, « au regard du rôle de l’éducateur sportif face aux pratiquants et de la nécessaire distance qu’il implique »233. De même, « la circonstance que la jeune mineure aurait consenti à ces échanges [de messages à connotation sexuelle] ou qu’elle aurait été elle-même à l’initiative de certains d’entre eux n’est pas de nature à minimiser la gravité des agissements reprochés à l’intéressé, à qui il appartenait d’y mettre un terme »234.
Comme toute mesure de police, les interdictions d’exercer doivent être nécessaires, adaptées et proportionnées au risque qu’elles entendent prévenir. Elles ne peuvent pas être regardées comme disproportionnées par principe dès lors que l’autorité administrative est tenue, même en l’absence de texte l’y obligeant expressément, de les abroger à la demande de l’intéressé « si les circonstances […] ont disparu et qu’il est établi qu’il n’existe plus aucun risque pour les pratiquants »235. Une certaine circularité de la motivation s’observe, les mêmes éléments (nombre et gravité des faits, âge de la ou les victimes, minimisation des faits par l’auteur) établissant à la fois le danger pour la santé et la sécurité physique et morale des pratiquant·es et le caractère proportionné de l’interdiction d’exercer. Certaines décisions apportent toutefois un éclairage particulier sur l’appréciation du caractère proportionné. L’une d’elle conclut à la proportionnalité d’une interdiction d’exercer pour 6 mois, dans l’attente des résultats de l’enquête administrative, en soulignant que le requérant assure « l’entraînement et l’encadrement lors de compétitions, notamment éloignées et nécessitant une prise en charge de l’hébergement sans la présence obligatoire de parents »236. Une autre semble, pour justifier une interdiction d’une durée de 30 ans, s’attacher au jeune âge de l’auteur des faits (24 ans) et donc au danger qu’il représente sur le long terme237. Dans deux affaires, était invoquée la disproportion d’une interdiction d’exercer auprès de tout public – majeur comme mineur - prise à la suite de violences exercées exclusivement sur des mineur·es. Dans la première, le juge annule l’interdiction en tant qu’elle est étendue au public majeur : les faits de viols et d’agressions sexuelles sur plusieurs mineures « révèlent […] un manque de discernement, un comportement inapproprié et la perte d’un certain sens des responsabilités, [mais] il ne ressort pas qu[e l’auteur] aurait eu un comportement constitutif d’un danger pour la santé et la sécurité physique ou moral d’un public majeur »238. Dans la seconde, en revanche, le juge retient que les violences sexuelles se sont accompagnées d’autres violences physiques et verbales et d’un comportement dangereux, « de nature à constituer un danger pour […] l’ensemble des pratiquants »239, et ce alors même que le juge d’instruction n’avait pas étendu aux majeur·es l’interdiction de contact prononcée au titre du contrôle judiciaire.
Comme l’indiquait la CIIVISE, « une politique publique de prévention est toujours à la fois le gage de la réduction de l’ampleur des violences sexuelles faites aux enfants et la démonstration du choix collectif de lutter contre le déni et l’impunité des agresseurs »240. La jurisprudence administrative en matière d’interdictions d’exercer conforte cette ambition déployée en matière sportive. A. J.
Hélène Duffuler-Vialle, maîtresse de conférences en
histoire du droit, Université d’Artois, CDEP
Anne Jennequin, maîtresse de conférences en droit
public, Université d’Artois, CDEP
Catherine Le
Magueresse, chercheuse, ancienne présidente de l’AVFT- Libres
et Égales
Julie Léonhard, maîtresse de conférences en
droit privé et sciences criminelles, HDR, Université de Lorraine,
Institut François Gény
Anne Simon, professeure de droit privé et de
sciences criminelles, Université d’Artois, CDEP
Serge Slama, professeur de droit public, Université
Grenoble Alpes, CRJ
Références
Le procès s’est tenu devant la Cour criminelle départementale du Vaucluse du 2 septembre 2024 au 19 décembre 2024.↩︎
51 hommes sont condamnés, 17 feront appel puis se désisteront, à l’exception de l’un d’entre eux.↩︎
V. par exemple les actions du groupe Les amazones d’Avignon : collage, mise en place de grandes banderoles sur les remparts face au tribunal, animation de débats publics.↩︎
Catherine Le Magueresse, Les pièges du consentement. Pour une redéfinition pénale du consentement sexuel, éditions iXe, 2021.↩︎
Proposition de directive du parlement européen et du conseil sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, n° 2022/0066 (COD), 8 mars 2022.↩︎
Marie-Charlotte Garin et Véronique Riotton, Rapport d’information sur la définition pénale du viol, Assemblée nationale, rapport n° 792, 21 janvier 2025.↩︎
Proposition de loi visant à modifier la définition pénale du viol et des agressions sexuelles, n° 842, déposée le mardi 21 janvier 2025.↩︎
Emmanuel Dreyer, « La redéfinition du viol : une faillite pour le droit civil », Gaz. Pal., n° 5, 11 février 2025.↩︎
V. par ex., Jean-Christophe Saint-Pau, « Redéfinition du viol : le piège du consentement », Droit pénal, juin 24, étude 14.↩︎
La résolution figure à la fin du rapport de la commission « Libertés et droits de l’Homme » sur la définition pénale du viol, présenté à l’assemblée générale du Conseil.↩︎
Collectif de femmes juristes, « La protection de l’État de droit pour tou.te.s », Dalloz actualité, 11 mars 2020.↩︎
Principalement par le Collectif féministe contre le viol, la CLEF (Coordination Française pour le Lobby Européen des Femmes), OLF ! (Osez Le féminisme !).↩︎
V. la tribune d’Emmanuelle Piet et Ernestine Ronai, « Le viol n’est pas une pénétration non consentie, mais imposée », Le Monde, 1er avril 2025.↩︎
Elles jugent par exemple que le Code pénal n’est porteur d’aucune présomption de consentement des femmes à des relations sexuelles.↩︎
La définition légale des termes de « violence, contrainte, menace ou surprise » est parfois demandée.↩︎
Cass. crim., 11 septembre 2024, n° 23-86.657.↩︎
V. par ex., Paris, pôle 3, ch. 5, 3 décembre 2010, n° 10/00883, JurisData n° 2010-025456.↩︎
V. par ex., Cass. crim., 13 mai 2015, n° 14-81.199.↩︎
Une déclaration révélatrice de l’intériorisation par les femmes de l’injonction qui leur est faite de « résister » et du travail de prévention à mener : elle aurait pu dire « à aucun moment, je n’ai exprimé le moindre accord à ces contacts sexuels » (pour ceux commis alors qu’elle était réveillée).↩︎
Cass. crim., 25 juin 1857, Bull. crim., n° 240, p. 378.↩︎
Notamment celles et ceux rassemblé·es au sein d’un groupe de travail, nommé « Cercle 1 » et rassemblant des associations (AVFT - Libres et Égales, Choisir la cause des femmes, Femmes solidaires, FNCIDFF, FNSF, Nous toutes), des avocates (Maria Cornaz-Bassoli, Anaïs Defosse, Milena Dostanic, Carine Durrieu-Diebolt, Yasmina Le Ber, Frédérique Pollet-Rouyer, Elodie Tuaillon-Hibon, Marjolaine Vignola), des magistrat·es, des universitaires, des sociologues. Une partie des réflexions ont été publiées sur le site www.consentementfeministe.fr.↩︎
Si la personne voulait ce contact sexuel – i.e., spécifiquement, dans les conditions posées, et librement, c’est-à-dire sans coercition - l’infraction s’efface, il ne s’agit pas de violence sexuelle mais de relation sexuelle. D’où l’intérêt de l’agresseur de faire croire au consentement.↩︎
La Cour de cassation censure les décisions qui ne caractérisent pas un de ces quatre éléments. V. par ex., Cass. crim., 4 septembre 2019, n° 18-83.467 ; Cass. crim., 25 janvier 2023, n° 22-82.990.↩︎
Cass. crim., 21 juin 2017, n° 15-85.375.↩︎
Comme le procès des violeurs de Mazan l’a terriblement illustré.↩︎
Conseil d’État, avis du 11 mars 2025 sur une proposition de loi visant à modifier la définition pénale du viol et des agressions sexuelles.↩︎
CNCDH, Déclaration sur la définition pénale du viol : poser le principe du consentement libre, (D - 2025 - 4) adoptée le 18 mars 2025.↩︎
Terme utilisé par le GREVIO (groupe d'experts indépendants chargé de veiller à la mise en œuvre de la Convention d’Istanbul) dans son 1er rapport sur la France : GREVIO, Rapport d’évaluation (de référence) sur les mesures d’ordre législatif et autres donnant effet aux dispositions de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, France, GREVIO/Inf(2019)16, publié le 19 novembre 2019. V. aussi le rapport Établir un climat de confiance en apportant soutien, protection et justice, France, Premier rapport thématique, 16 septembre 2025.↩︎
CEDH, 23 janvier 2025, n° 13805/21, H. W. c. France ; CEDH, 24 avril 2025, L. et a. c. France, n° 46949/21, n° 24989/22 et n° 39759/22 ; CEDH, 4 septembre 2025, E. A. et Association européenne contre les violences faites aux femmes au travailc. France, n° 30556/22.↩︎
Arrêt E. A. et AVFT c. France, préc.↩︎
V. les revendications portées par la Coalition féministe pour une loi intégrale contre les violences sexuelles.↩︎
Guillaume Krempp, « Sodomie mimée, blague sur le viol… Au tribunal de Mulhouse, l’inventaire des dérapages du professeur Pauvert », Rue 89 Strasbourg, 10 juin 2022.↩︎
CNESER, 31 juillet 2025, n° 1759, 1810, Bulletin officiel, n° 38 du 9 octobre 2025.↩︎
Pour lequel il est condamné pour harcèlement sexuel aggravé, à six mois d'emprisonnement avec sursis, un an d'interdiction professionnelle, un an d'inéligibilité : Colmar, ch. cor., 6 septembre 2023.↩︎
Cass. crim., 12 mars 2025, n° 24-81.644.↩︎
Deirdre McCann, Sexual harassment at work : National and international responses, ILO, 2005.↩︎
Catherine MacKinnon, Sexual Harassment of Working Women, Yale University Press, 1979.↩︎
Meritor Savings Bank v. Vinson, 477 U.S. 57(1986).↩︎
Le harcèlement sexuel intègre également le Code du travail et le statut des fonctionnaires.↩︎
Catherine Le Magueresse, « La reconnaissance législative et jurisprudentielle du harcèlement sexuel, une victoire féministe ? (1992-2012) », Cahiers du Genre, 2014/2 n° 57, p. 115-138.↩︎
Cass. soc., 12 mars 2002, n° 99-42.646, publié au bulletin.↩︎
Orléans, 7 février 2017, n° 15/02566, D. 2018. 919, obs. RÉGINE ; Cah. soc. avril 2017, n° 120, p. 179, obs. M. Dreano. L’AVFT était intervenante volontaire dans cette procédure et avait saisi le Défenseur Des Droits qui s’était également prononcé pour la condamnation de l’employeur sur le fondement d’un harcèlement sexuel « environnemental ».↩︎
Lyon, ch. soc. B, 15 septembre 2023, n° 20/03120. La cour confirme le jugement du conseil de prud’hommes de Bourg en Bresse du 20 mai 2020 sans toutefois reprendre les termes de harcèlement d’ambiance du CPH.↩︎
Le terme « susceptible » est également présent dans la définition du harcèlement moral : v. C. pén., art. 222-33-2.↩︎
Notion qui n’est pas exempte de critique : le « bon père de famille » a longtemps été l’archétype de la personne raisonnable.↩︎
V., par ex.,, Pau, 6 mai 2004 : « Que la seule attitude de séduction, fût-elle maladroite et insistante, d’un supérieur hiérarchique ne suffit pas à caractériser l’infraction ; que Mme P. n’a pas été licenciée ou mise à pied et n’a pas d’avantage fait l’objet de mesures disciplinaires ou de rétorsion à la suite de ses refus réitérés ; que dès lors, quel que soit le désagrément vécu par l’intéressée, le délit ne paraît pas constitué ».↩︎
CEDH, 25 juillet 2024, M. A. et autres c. France, n° 63664/19 et 4 a. V. « Tierces interventions Cour EDH, 25 juillet 2024, M. A. et autres c. France et 4 autres requêtes » [en ligne], Intersections. Revue semestrielle Genre & Droit, décembre 2024, n° 2.↩︎
Loi n° 2016-444 du 13 avril 2016, visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées.↩︎
Hélène Duffuler-Vialle, La réglementation de la prostitution pendant l’entre-deux guerres, Mare &Martin, 2018.↩︎
Loi n° 46-685 du 13 avril 1946 tendant à la fermeture des maisons de tolérance et au renforcement de la lutte contre le proxénétisme.↩︎
Le fichier sanitaire et social instauré en 1946 pour remplacer l’inscription des filles publiques sur les registres de la police a été supprimé par les ordonnances du 25 novembre 1960, prises à la suite de la ratification de la Convention de l’ONU de 1949 par la loi n° 60-754 du 28 juillet 1960 : l’Ordonnance n° 60-1245 du 25 novembre 1960 relative à la lutte contre le proxénétisme (JO 27 novembre 1960, p. 10 603) et l’Ordonnance n° 60-1246 du 25 novembre 1960 modifiant et complétant les dispositions du chapitre 1er du livre III du code de la sante publique relatives aux maladies vénériennes (JO 27 novembre 1960, p. 10 606) qui supprime explicitement le fichage et crée les SPRS (services de prévention et de réadaptation sociale).↩︎
Loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure (LSI) : C. pén., art. 225-10-1.↩︎
Loi n° 2016-444 du 13 avril 2016, visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées.↩︎
Cons. const., 1er février 2019, n° 2018-761, relative à la pénalisation des clients de personnes se livrant à la prostitution (C. pén., art. 611-1 et 225-12-1) ; Hélène Duffuler-Vialle, « La difficile articulation des libertés publiques et des politiques de la prostitution – perspective diachronique XXe-XXIe siècles », Constitutions. Revue de droit constitutionnel appliqué, 2019, n° 1, p. 89-100.↩︎
V. notamment Catharine A. MacKinnon, « Trafficking, Prostitution, and Inequality », Harvard Civil Rights-Civil Liberties Law Review, vol. 46, n° 2, 2011, p. 271-309. En France, des organisations comme l’Amicale/Mouvement du Nid, des collectifs de survivantes et des associations féministes prolongent ce cadrage : cibler la demande, poursuivre les tiers, financer des sorties effectives.↩︎
Gayle S. Rubin, « Thinking Sex : Notes for a Radical Theory of the Politics of Sexuality », in Carole S. Vance (dir.), Pleasure and Danger: Exploring Female Sexuality, Routledge & Kegan Paul, 1984, p. 267-319.↩︎
https://strass-syndicat.org/ ; https://www.aides.org/prostitution-2-ans-apres-la-loi-un-bilan-catastrophique ; https://www.medecinsdumonde.org/sur-le-terrain/travailleuses-du-sexe/ ; https://www.acceptess-t.com/↩︎
CEDH, 11 décembre 2007, V. T. c. France, n° 37194/02,.↩︎
Arnaud Casado, « Couvrez cette prostitution que je ne saurais voir ou la tartufferie tragicomique de la CEDH », Le Club des Juristes, 29 juillet 2024.↩︎
Mattia Pinto, « Do sex workers have a right to have rights ? Let the state decide and criminalise, says the European Court of Human Rights », European Human Rights Law Review, Issue 6, 2024, p. 557-564.↩︎
La notion d’infraction sexuelle n’est pas définie par le législateur et son contenu interroge tant il peut comporter une variété plus ou moins grande d’infractions selon les auteurs. Il en est de même pour la notion de violences sexuelles.↩︎
Tel est le cas par exemple pour les violences volontaires ayant entraîné une incapacité de travail inférieure ou égale à huit jours ou n’ayant entraîné aucune incapacité de travail (C. pén., art. R. 624-1, R. 625-1 et 222-13). L’article 222-13 du code pénal prévoit que les faits sont aggravés en présence de l’une des circonstances aggravantes listées, davantage lorsqu’il y a deux circonstances aggravantes réunies et plus encore quand il y en a trois.↩︎
C. pén., art. 222-23 et s.↩︎
Sénat, Proposition de loi visant à renforcer la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, texte n° 101 (2024-2025) modifié par le Sénat le 3 avril 2025 (https://www.senat.fr/leg/tas24-101.html).↩︎
L’article 222-24 du code pénal prévoit actuellement une peine de 20 ans de réclusion criminelle.↩︎
Le Sénat propose que la même peine de 30 ans de réclusion criminelle soit encourue dès lors que le viol est commis en concours avec un ou plusieurs viols commis sur d’autres victimes.↩︎
C. proc. pén., art. 706-47.↩︎
C. proc. pén., art. 7 al. 3 (contre 20 années prévues en droit commun) ; un mineur victime peut agir jusqu’à ses 48 ans au moins.↩︎
C. proc. pén., art. 7 al. 3.↩︎
Elle avait déjà fait l’objet d’une réflexion avec la mission de consensus sur le délai de prescription applicable aux crimes sexuels commis sur les mineurs, présidée par Mme Flavie Flament et M. Jacques Calmettes en 2017 (rapport du 10 avril 2017).↩︎
Commission Indépendante sur l’Inceste et les Violences Sexuelles Faites aux Enfants (CIIVISE), Violences sexuelles faites aux enfants : « on vous croit », novembre 2023 [en ligne], préconisation 60.↩︎
Proposition de loi visant à renforcer la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, préc.↩︎
Contre 20 années actuellement : C. civ., art. 2226 ; il faut relever l’alignement avec le délai de prescription de l’action publique.↩︎
Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la lutte contre les abus sexuels et l’exploitation sexuelle des enfants, ainsi que contre les matériels relatifs à des abus sexuels sur enfants, et remplaçant la décision-cadre 2004/68/JAI du Conseil (refonte), n° 2024/0035(COD), 6 février 2024.↩︎
V., par ex., Julie Klein, « Contre l’imprescriptibilité des crimes sexuels commis à l’encontre des mineurs », Le Club des Juristes, 1er décembre. 2023. Contra Yves Jeanclos, « Pour l'imprescriptibilité des crimes sexuels commis à l'encontre des mineurs », Le Club Des Juristes, 1er décembre 2023.↩︎
Sun Tzu, The Art of War.↩︎
Fédération française des Centres ressources pour les intervenants auprès des auteurs de violences sexuelles (CRIAVS), Parcours des mineurs auteurs de violences sexuelles, Rapport d’orientation et propositions 2025 [en ligne].↩︎
Construit sur 2 bases de données : Cassiopée (décisions du parquet de 2017 à 2024) et le casier judiciaire national (condamnations 2017-2023).↩︎
Et notamment en comparaison des chiffres clefs annuels de la Justice.↩︎
Ministère de la justice, secrétariat général, service de la statistique, des études et de la recherche (SSER), Les mineurs auteurs d’infractions sexuelles. Contribution du SSM Justice à l’audition publique des 19 et 20 juin 2025 menée par la Fédération Française des Centres Ressources pour Intervenants auprès des Auteurs de Violences Sexuelles (FFCRIAVS), [en ligne], p. 5 : « En 2024, plus d’un mis en cause sur quatre pour viol et près d’un mis en cause sur trois pour agression sexuelle est mineur au moment des faits, des parts assez stables sur les dernières années ».↩︎
Avec une distinction mis en cause / condamnés.↩︎
Contribution du SSM Justice, préc., p. 15.↩︎
92% pour agressions sexuelles ou viols : v. Contribution du SSM Justice, préc., p. 9. À noter également que 90% des mis en cause ont reçu une réponse pénale.↩︎
Même si les filles sont surreprésentées pour le proxénétisme : v. Contribution du SSM Justice, préc., p. 11.↩︎
Contribution du SSM Justice, préc., p. 15.↩︎
Contribution du SSM Justice, préc., p. 9 et 10.↩︎
Une étude d’ampleur permettant une analyse de la récidive des mineurs auteurs d’infractions sexuelles serait toutefois tout aussi instructive et demeure attendue.↩︎
Le 30 septembre 2021.↩︎
CJPM, art. L. 11-1.↩︎
CJPM, art. Préliminaire.↩︎
D’autant que le code de la justice pénale des mineurs invite à prononcer une mesure éducative même lorsqu’est prononcée une peine.↩︎
À la définition classique du viol, « tout acte de pénétration sexuelle de quelque nature qu’il soit », il est ajouté « tout acte bucco-génital » depuis la loi n° 2021-478 du 21 avril 2021. La modification se juxtapose à l’ajout par la loi n° 2018-703 du 3 août 2018 des actes de pénétration sexuelle commis « sur la personne d’autrui » qui permettait déjà d’inclure les fellations imposées par violence, menace, contrainte ou surprise à la victime. Désormais les cunnilingus imposés, y compris sans pénétration de la langue, entrent dans le champ d’application du viol, effaçant au passage la distinction traditionnelle viol/autre agression sexuelle.↩︎
V. not. loi n° 2017-242 du 27 février 2017, loi n° 2018-703 et loi n° 2021-478, préc.↩︎
Il en est de même pour l’infraction d’outrage sexiste qui était initialement une contravention et qui n’est devenue un délit qu’avec la loi n° 2023-22 du 24 janvier 2023.↩︎
Démocrite d’Abdère. ↩︎
Juridique, mais aussi médicale, psychologique, etc.↩︎
C. pén., art. 130-1, et notamment la lutte contre la récidive et la désistance des auteurs.↩︎
Propositions n° 5 et 6.↩︎
Propositions n° 9 et 10.↩︎
Proposition n° 13.↩︎
Propositions n° 26 à 45.↩︎
CNOM, Résultats de l’enquête sur les violences sexistes et sexuelles au sein du corps médical, novembre 2024 [en ligne].↩︎
Collectif, « Nous, médecins, souhaitons dénoncer publiquement le sexisme systémique dans le monde médical hospitalier et universitaire », Le Monde, 17 février 2025.↩︎
Mission interministérielle sur les violences sexistes et sexuelles sous relation d’autorité ou de pouvoir, Les violences sexistes et sexuelles sous relation d’autorité ou de pouvoir : Agir contre ce fléau trop longtemps ignoré, septembre 2024 [en ligne]. .↩︎
CNOM, Chambre disciplinaire nationale, 17 octobre 2024, n° 15558.↩︎
CNOM, Chambre disciplinaire nationale, 26 septembre 2024, n° 15149.↩︎
C. pén, art. 227-25 : « Hors les cas de viol ou d'agression sexuelle prévus à la section 3 du chapitre II du présent titre, le fait, pour un majeur, d'exercer une atteinte sexuelle sur un mineur de quinze ans est puni de sept ans d'emprisonnement et de 100 000 € d'amende ».↩︎
CNOM, Chambre disciplinaire nationale, 24 octobre 2024, n° 15721.↩︎
V. entre autres Cass. crim., 3 novembre 2016, n° 15-82.136 ou Cass. crim., 17 octobre 2018, n° 16-85.186.↩︎
V. not. Anne Simon et Elsa Supiot, Les violences gynécologiques et obstétricales saisies par le droit, IERDJ, 2024, p. 212 et s.↩︎
Cass. crim., 25 septembre 2024, n° 23-86.170.↩︎
Cour des comptes, L’ordre des médecins. Rapport public thématique, 2019 ; LCP, Débat Doc - Violences sexuelles par les médecins : la fin de l’Omerta ?, disponible depuis le 12 janv. 2023 ; Mattea Battaglia, Solène Cordier et Camille Stromboni, « Face aux médecins accusés, l’inertie du conseil de l’ordre en question », Le Monde, 19 juin 2025.↩︎
V. l’éditorial du Monde : « Médecins accusés de violences sexuelles : clarifier les responsabilités », 20 juin 2025.↩︎
Assemblée nationale, Commission des affaires sociales, Audition conjointe avec la commission des lois de représentants du Collectif de victimes de Joël Le Scouarnec : Mme Manon Lemoine, Mme Alexandra Moricet et M. Gabriel Trouvé, membres, et Me Marie Grimaud, avocate du Collectif, 1er juillet 2025.↩︎
CNOM, Chambre disciplinaire nationale, 26 septembre 2024, n° 15149.↩︎
Cass. crim., 25 septembre 2024, n° 23-83.923.↩︎
Cass. crim., 11 décembre 2024, n° 22-82.720. Il est souligné que la cour d’appel avait révélé que « son casier judiciaire ne mentionne aucune condamnation et que l'expert psychiatre qui l'a examiné n'a relevé aucun fonctionnement pervers ».↩︎
Cour criminelle départementale du Morbihan, 28 mai 2025.↩︎
Audrey Darsonville, « Procès Le Scouarnec : pourquoi la rétention de sûreté n’a pas été prononcée », Le Club des juristes, 30 mai 2025.↩︎
L’article 706-53-13 du Code de procédure pénale vise une « particulière dangerosité caractérisée par une probabilité très élevée de récidive parce qu'elles souffrent d'un trouble grave de la personnalité », texte issu de la loi n° 2008-174 du 25 février 2008 relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental.↩︎
Cette obligation inclut la prévention de la victimisation secondaire. Sur l’actualité récente de ce sujet, v. CEDH, 24 avril 2025, L. et a. c. France, n° 46949/21, 24989/22, 39759/22, et T. corr. Paris, 10e ch., 13 mai 2025, n° 24057000509, Ministère public c. Gérard Depardieu.↩︎
Natacha Appanah, La nuit au cœur, Gallimard, 2025, p. 164.↩︎
Il a été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité, assortie d’une période de sûreté de 22 ans.↩︎
Le 5 juillet 2024, l’accusé a été condamné à la peine de 30 années de réclusion criminelle, assortie d'une période de sûreté de 20 ans.↩︎
La circulaire du 24 novembre 2014 d’orientation de politique pénale en matière de lutte contre les violences au sein du couple et relative au dispositif de téléassistance pour la protection des personnes en grave danger (NOR : JUSD1427761C) rappelle pourtant que « le protocole-cadre du 30 décembre 2013 relatif au traitement des mains courantes […] en matière de violences conjugales affirme le principe d’un dépôt de plainte suivi d’une enquête pénale [...]. Il rappelle le caractère très exceptionnel du recueil des déclarations sur main courante […], qui devra être encadré de façon très stricte. Les parquets doivent donc veiller à ce que les services de police et unités de gendarmerie respectent les instructions définies au niveau local en application de ce protocole-cadre ». Il semble que le parquet local n’ait pas « veillé » à cette application.↩︎
Cette plainte n’est pas non plus enregistrée sur Cassiopée.↩︎
Lesquelles étaient de 200 000 € pour chaque enfant, 100 000 € pour le frère et 100 000 € pour l’ex-compagnon et père des enfants.↩︎
TJ Paris, 1re ch. civ., 4 juin 2025, n° 23/16014.↩︎
Catherine Le Magueresse, « Responsabilité des États dans le traitement judiciaire des violences domestiques : les exigences de la Cour européenne des droits de l’homme », Revue trimestrielle des droits de l’homme, 2023, n° 135, p. 699.↩︎
Antoine Bloch, « Au procès en responsabilité de l’État, pour des carences dans le traitement de signalements de menaces de mort, finalement mises à exécution », Dalloz actualité, 12 mai 2025.↩︎
CEDH, gr. ch., 28 octobre 1998, Osman c. Royaume-Uni, n° 23452/94.↩︎
90% ne le font pas.↩︎
Ministère de l’intérieur, Étude nationale sur les morts violentes au sein du couple 2024 [en ligne].↩︎
« Violences conjugales ou sexuelles : les victimes en situation irrégulière pourront être régularisées », Le Bien public, 24 novembre 2021.↩︎
Instruction du 23 décembre 2021 du ministre de l’Intérieur et de la ministre déléguée chargée de la citoyenneté relative à la délivrance des titres pour les victimes de violences conjugales et familiales, NOR : INTA2137559J.↩︎
Loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration.↩︎
Instruction du 5 février 2024 du ministre de l’Intérieur relative à l’expulsion et l’éloignement des étrangers délinquants, NOR : IOMV2402713J.↩︎
https://www.lacimade.org/analyse/les-violences-faites-aux-femmes-etrangeres. V. aussi Précisions des associations suite à la réponse de la France sur la mise en œuvre en France de la Convention d’Istanbul de lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, 16 mars 2023 [en ligne].↩︎
Ministère de l’Intérieur, Chiffres clefs de l’immigration 2023, p. 44.↩︎
Ministère de l’Intérieur, , Info rapide, SSMSI, n°44, nov. 2024.↩︎
« Étrangers délinquants : Gérald Darmanin annonce une loi, le Sénat demande des moyens », Public Sénat, 26 juillet 2022.↩︎
Les violences conjugales enregistrées par les services de sécurité en 2023, préc.↩︎
Rapport public d’activité du Conseil d’État 2024, p.41.↩︎
Françoise Poujoulet, « Femmes étrangères victimes de violences conjugales en France : la triple peine », Revue de l’Institut de Sociologie, n° 85, 2015, p. 155-175.↩︎
Violaine Husson, « La double violence faite aux femmes étrangères », Après-demain, Vol. 2, n° 26, 2013, p. 20-23 ; « Violaine Husson : avec La CIMADE, pour un droit féministe des migrations : Entretien réalisé par Lisa Carayon et Julie Mattiussi » [en ligne], Intersections. Revue semestrielle Genre & Droit, mai 2024.↩︎
Loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l’immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité.↩︎
Loi n° 2007-1631 du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile.↩︎
CE 26 sept. 2014, n° 366041, Lebon T. ; D. 2015. 1007, obs. REGINE.↩︎
Loi n° 2016-274 du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France.↩︎
Ordonnance n° 2020-1733 du 16 décembre 2020 portant partie législative du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.↩︎
Cela s’explique probablement parce qu’un chapitre du CESEDA de 2021 est dédié aux conditions de renouvellement des titres (L. 433-1 à L 433-7.)).↩︎
Loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République.↩︎
Marion Leboeuf, « Titre de séjour du conjoint étranger victime de violences familiales et recodification du CESEDA », AJDA 2024, p. 743.↩︎
CE 24 février 2022, n° 450285, Association Avocats pour la défense des droits des étrangers [ADDE], Lebon T.↩︎
Marion Leboeuf, préc.↩︎
TA Melun, 18 janvier 2024, n° 2208759.↩︎
Pour des suspensions d’arrêtés refusant le renouvellement : TA Nantes, 12 juin 2025, n° 2508701 ; TA Toulouse, 31 mars 2025, n° 2501656 ; TA Grenoble, 9 septembre 2024, n° 2406572. Pour des annulations de refus de renouvellement assortis d’OQTF, avec injonction à délivrer une carte « vie privée et familiale » : TA Nantes, 20 mars 2025, n° 2405802 ; TA Guadeloupe, 30 décembre 2024, n° 2400216 ; TA Grenoble, 27 novembre 2024, n° 2407308 ; TA Cergy-Pontoise, 30 juillet 2024, n° 2403698 ; TA Cergy-Pontoise, 2 juin 2025, n° 2409865 ; TA Bordeaux, 19 septembre 2024, n° 2403369 ; TA Lille, 28 mars 2025, n° 2309413. Annulations avec injonction au réexamen : TA Caen, 5 novembre 2024, n° 2401780 ; TA Orléans, 15 mai 2025, n° 2501931 ; TA Nantes, 14 janvier 2025, n° 2402837. Avec injonction au réexamen à défaut de réponse à la demande de motifs : TA Caen, 5 novembre 2024, n° 2401780.↩︎
Par ex., CAA Bordeaux, ord., 23 octobre 2024, n° 24BX01609.↩︎
CAA Toulouse, 17 mai 2023, n° 22TL00633.↩︎
CAA Toulouse, 26 décembre 2024, n° 23TL01211.↩︎
CAA Toulouse, 6 février 2025, n° 23TL00230.↩︎
Par ex. CAA Versailles, 12 septembre 2024, n° 24VE01309.↩︎
TA Melun, 13 février 2025, n° 2304943. Dans le même sens : TA Martinique, 17 octobre 2024, n° 2400472.↩︎
TA Limoges, 4 février 2025, n° 2201528.↩︎
CE, 22 février 2017, n° 393100, Lebon ; CE, 26 avril 2024, n° 468274, Lebon T.↩︎
Pour un exemple d’annulation : CAA Lyon, 5 février 2025, n° 24LY00493.↩︎
Pour une application : CAA Lyon, 2 juillet 2024, n° 23LY02859.↩︎
CE, 30 juin 2016, n° 391489, Lebon T.↩︎
Par ex. CAA Douai, 10 juillet 2024, n° 23DA01917.↩︎
CAA Versailles, 19 septembre 2024, n° 24VE00352.↩︎
Ces décisions favorables sont fondées sur d’autres motifs que l’article L. 425-6 CESEDA hormis une ordonnance (TA Nice, réf., 10 juin 2025, n° 2502817).↩︎
TA Toulouse, 12 juillet 2024, n° 2306201. ↩︎
CAA Marseille, 2 juillet 2024, n° 23MA03073 ; CAA Nancy, ord., 16 mai 2025, n° 25NC00865.↩︎
Par ex. CAA Nancy, ord., 23 mai 2025, n° 25NC00796 ; TA Paris, 30 janvier 2025, n° 2426963 ; TA Toulouse, 15 octobre 2024, n° 2400819.↩︎
TA Orléans, 29 juillet 2024, n° 2305312.↩︎
CAA Lyon, 24 octobre 2024, n° 23LY02100.↩︎
CAA Versailles, ord., 24 juin 2025, n° 25VE00817 ; TA Orléans, 14 novembre 2024, n° 2305312 ; TA Bordeaux, 5 novembre 2024, n° 2401378.↩︎
Véronique Champeil-Desplats et Serge Slama, « L’administration numérique des étrangers ne répond plus », AJDA, 2024, 42, p. 2241. V. par ex. TA Melun, 17 janvier 2025, n° 2416125 ; TA Montreuil, réf., 22 janvier 2025, n° 2418288 ; TA Paris, 25 février 2025, n° 2503576.↩︎
Serge Slama, « L’expulsion d’étrangers en raison de violences conjugales : la mesure de l’indésirabilité des conjoints violents » in Alexandra Korsakoff (dir.), L’instrumentalisation du principe d'égalité des sexes aux fins de rejet de l'étranger, IFJD, coll. « Transition & Justice », 2025, p. 65-94.↩︎
V. Marion Tissier Raffin, « Actualités choisies, Discriminations, inégalités, exclusions (janvier 2023 – décembre 2023) » [en ligne], Intersections, Revue semestrielle Genre & Droit, chron. Alexandra Korsakoff et Robin Médard Inghilterra, juin 2024, n° 34 ; Emmanuel Aubin-Kanezuka, « Les dispositions relatives à l'éloignement des étrangers “délinquants” », AJDA, n° 12, 2024, p. 664-670.↩︎
Par exemple, les quatre premières catégories de l’article L. 632-2 du CESEDA (conjoints de Français, parents d’enfants français, etc.) peuvent faire l’objet d’un arrêté d’expulsion régi par l’article L. 632-1 lorsque les faits à l'origine de la décision d'expulsion « ont été commis à l'encontre de son conjoint, d'un ascendant ou de ses enfants ou de tout enfant sur lequel il exerce l'autorité parentale ».↩︎
Le seul article L. 631-2 du CESEDA (étrangers ET « violences conjugales » ET « 631-2 ») renvoie à 41 décisions, dont 2 du Conseil d’État (1 rejet, et 1 satisfaction totale), 1 de CAA (1 rejet) et 38 de TA (32 rejets, 3 satisfactions partielles et 3 satisfactions totales).↩︎
Serge Slama, « L’expulsion d’étrangers en raison de violences conjugales : la mesure de l’indésirabilité des conjoints violents », préc.↩︎
TA Poitiers, 6 mai 2025, n° 2501126.↩︎
CAA Paris, 13 mars 2025, n° 23PA02618.↩︎
TA Nancy, 25 octobre 2024, n° 2302193 : l’intéressé a commis, à plusieurs reprises, des violences envers sa conjointe française « en lui lançant des objets, en lui donnant des coups de poing et en se saisissant d'un couteau » ou encore « en la plaquant au mur avec un fer à repasser et en lui entaillant la gorge avec un couteau ». Cela lui a valu une condamnation à une peine d'emprisonnement de quarante-deux mois, dont douze mois avec sursis, en raison de ces faits de violences volontaires ayant, respectivement, entraîné une incapacité totale de travail d'une durée inférieure et supérieure à huit jours, commis par le conjoint avec usage et menace d'une arme et d'une peine complémentaire d'interdiction de détenir ou de porter une arme soumise à autorisation pendant une durée de cinq ans. En outre, même s’il bénéficie d'un suivi psychologique régulier et qu'il a mis en place des versements mensuels pour indemniser la victime, il tend, selon les expertises, « à les banaliser et à reporter la responsabilité sur la victime ». V aussi : TA Limoges, 12 juillet 2024, n° 2400788.↩︎
Par ex. CAA Nancy, ord., 14 mars 2025, n° 25NC00053 ; CAA Paris, 23 janvier 2025, n° 24PA03329 ; CAA Nantes, 16 mai 2025, n° 24NT03353. V., pour un Algérien, même si cela n’est pas expressément prévu par les accords : CAA Marseille, ord., 18 septembre 2024, n° 24MA00061.↩︎
Par ex. TA Clermont-Ferrand, réf., 16 octobre 2024, n° 2402400 ; TA Guadeloupe, réf., 2 juin 2025, n° 2500534.↩︎
Par ex. TA Lyon, 21 mars 2025, n° 2407297 ; TA Montpellier, 15 mai 2025, n° 2404901.↩︎
TA Lyon, 4 juin 2025, n° 2506257 ; CAA Toulouse, 12 novembre 2024, n° 23TL02780.↩︎
TA Châlons-en-Champagne, 28 novembre 2024, n° 2401767.↩︎
TA Lyon, 2 juillet 2024, n° 2303612.↩︎
TA Lyon, réf., 6 juin 2025, n° 2506519.↩︎
CAA Paris, 21 octobre 2024, n° 23PA04704.↩︎
Pour des censures sur ce fondement : CE, 20 février 2025, n° 498964 ; CE, réf., 20 décembre 2024, n° 499477.↩︎
CNCDH, Avis sur les violences sexuelles et sexistes dans le sport : prévenir, protéger, accompagner, Avis A-2024-1, janvier 2024, pp. 4-6 ; Patrick Roux, Karine Repérant, Le revers de nos médailles, Dunod, 2023, pp. 23-125 ; Olivier Coste, Philippe Liotard (dir.), Violences sexuelles et sport. L’essentiel pour agir, Elsevier, 2024.↩︎
Ministère des sports, Chiffres clés des signalements de violences dans le sport au 31 décembre 2023 [en ligne].↩︎
« Quatre ans après sa création en décembre 2019, la plupart des personnes auditionnées n’en avaient jamais entendu parler » : Claudia Rouaux, Rapport fait au nom de la commission des affaires culturelles et de l’éducation sur la proposition de loi visant à renforcer la protection des mineurs et l’honorabilité dans le sport, Assemblée nationale, 14 février 2024, n° 2203, p. 8.↩︎
CNCDH, avis préc., p. 2 ; Claudia Rouaux, rapport préc.↩︎
Commission Indépendante sur l’Inceste et les Violences Sexuelles Faites aux Enfants (CIIVISE), Violences sexuelles faites aux enfants : « on vous croit », novembre 2023 [en ligne], p. 452.↩︎
Ludivine Richefeu, « Violences sexuelles commises dans le sport : quel rôle pour les fédérations sportives ? », [en ligne], Intersections. Revue semestrielle Genre & Droit, décembre 2024, n° 2.↩︎
Audrey Darsonville, « Repenser le défaut de consentement dans les agressions sexuelles à l’aune de la pratique sportive », in Déviances sportives, Arch. de pol. crim., 2020/1, n° 42, pp. 33-41 ; Maïlys Derenemesnil, Philippe Liotard, « Les violences sexistes et sexuelles : quel contour pénal ? Réflexions autour de quelques infractions », in Olivier Coste, Philippe Liotard (dir.), préc., pp. 33-40.↩︎
C. sport, art. L. 212-9. V. not. Caroline Siffrein-Blanc, « La protection des mineurs dans le sport par le renfort de l’exigence d’honorabilité », Dr. fam., n° 7-8, 2024, étude 17 ; Fabienne Bourdais, « La lutte contre les violences sexuelles dans le sport en France depuis 2020. Traitement des signalements et contrôle d’honorabilité », in Olivier Coste, Philippe Liotard (dir.), préc., pp. 147-154 ; Ministère des sports, Guide. Contrôle de l’honorabilité des éducateurs, des exploitants bénévoles et des juges, arbitres licenciés auprès des fédérations sportives, Bureau de l’éthique sportive et de la protection des publics, décembre 2024.↩︎
C. sport, art. L. 212-13.↩︎
Ministère des sports, Chiffres clés, préc.↩︎
CE, 10 décembre 2024, n° 497912 et CE, 22 avril 2025, n° 497761.↩︎
TA Strasbourg, 18 juillet 2024, n° 2201897 ; TA Poitiers, 19 septembre 2024, n° 2201144. V. aussi CE, 20 février 2013, n° 364081, Théron, Lebon.↩︎
Refus de renvoi au Conseil constitutionnel de la QPC posée : CE, 10 décembre 2024 et CE, 22 avril 2025, préc.↩︎
CAA Paris, 19 novembre 2024, n° 23PA01521.↩︎
C. sport, art. L. 212-13.↩︎
CRPA, art. L. 121-2.↩︎
CAA Toulouse, 30 janvier 2024, n° 22TL21117 ; TA Poitiers, préc. (8 années entre certains faits et l’arrêté préfectoral).↩︎
Une à deux semaines de délai entre l’information au préfet et l’arrêté préfectoral d’interdiction atteste de l’urgence (CAA Douai, 8 janvier 2025, n° 23DA01756 ; TA Orléans, 31 octobre 2024, n° 2202338). Un délai de plusieurs mois, admis dans un contexte de confinement lié au covid (CAA Toulouse, préc.), démontre en dehors d’un tel contexte qu’il n’y avait pas urgence et que l’arrêté d’interdiction est par voie de conséquence entaché de vice de procédure pour n’avoir pas été précédé d’une procédure contradictoire (TA Strasbourg, 20 juin 2025, n° 2402538).↩︎
CAA Douai, 8 janvier 2025, préc.↩︎
CAA Toulouse, préc.↩︎
TA Orléans, 31 octobre 2024, préc.↩︎
CAA Lyon, 19 juin 2025, n° 24LY02512.↩︎
CAA Douai, 8 janvier 2025, préc.↩︎
CAA Toulouse, préc.↩︎
CAA Douai, 7 mai 2025, n° 23DA01803.↩︎
CAA Marseille, 14 octobre 2024, n° 24MA00901 et CAA Paris, préc. Il s’agit des premières applications en matière de violences sexuelles d’un principe posé à propos de mesures d’interdiction d’acquisition et de détention d’armes : CAA Marseille, 9 mars 2020, n° 18MA04895.↩︎
TA Bastia, 14 mars 2025, n° 2301176 : pour des faits commis par une entraîneuse sur de jeunes nageuses.↩︎
TA Nancy, 4 juillet 2025, n° 2401146 ; TA Paris, 17 octobre 2024, n° 2309037.↩︎
CAA Douai, 7 mai 2025, préc. ; TA Versailles, 18 mars 2025, n° 2208488.↩︎
TA Orléans, 31 octobre 2024, préc.↩︎
TA Toulon, 3 avril 2025, n° 2202997.↩︎
TA Versailles, 12 juin 2025, n° 2303851.↩︎
TA Besançon, 3 décembre 2024, n° 2201902. V. aussi TA Strasbourg, 17 octobre 2024, n° 2303812 : « cette relation s'est développée alors que M. C entraînait cette pratiquante d'équitation en vue de la préparation de compétitions, ce qui lui a conféré une position d'autorité dont il a abusé ».↩︎
CAA Marseille, préc. ; CAA Paris, préc.↩︎
CAA Douai, 7 mai 2025, préc. ; TA Poitiers, préc. ; TA Strasbourg, 17 octobre 2024, préc.↩︎
TA Versailles, 12 juin 2025, préc.↩︎
TA Bordeaux, 28 février 2024, n° 2103934.↩︎
TA Bordeaux, préc.↩︎
CAA Douai, 7 mai 2025, préc.↩︎
CAA Toulouse, préc. ; voir aussi CE, 19 juin 2023, n° 465978.↩︎
TA Nancy, préc.↩︎
TA Melun, 22 mai 2025, n° 2212398.↩︎
TA Montreuil, 4 octobre 2024, n° 2208219.↩︎
TA Paris, préc.↩︎
CIIVISE, préc., p. 687.↩︎